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Caractérisation de l’effet de la corrosion dans les liants hydrauliques

CHAPITRE II. REVUE BIBLIOGRAPHIQUE II.1 C OMPORTEMENT DIFFERE DU MORTIER DE LAITIER ACTIVE

II.2.3 Caractérisation de l’effet de la corrosion dans les liants hydrauliques

La couche de produits de corrosion formée présente généralement des propriétés mécaniques différentes de celles du métal initial ce qui peut engendrer des forces de traction dans la matrice. En effet, les produits de corrosion néoformés remplissent dans un premier temps les pores et les vides situés à l’interface métal/liant hydraulique puis commencent à générer des contraintes essentiellement radiales sur le liant. Ces contraintes dépendent des facteurs suivants :

- La cinétique de corrosion du métal et par suite de croissance des couches de produits de corrosion,

- La nature et les propriétés physico-chimiques (densité), - Les propriétés mécaniques (dureté) de ces produits,

- L’état de confinement de ces produits dans la porosité du matériau.

Différentes études se sont intéressées à la détermination des propriétés mécaniques des produits de corrosion de l’acier dans le béton armé. Classiquement, les produits de corrosion sont modélisés comme étant essentiellement composés d’eau avec un module de compressibilité égal à 2 GPa et un coefficient de Poisson de 0,49 (un module de Young donc faible proche de zéro) (Molina, 1993). Cependant, des valeurs de modules d’élasticité correspondants aux phases cristallines constituants les produits de corrosion figurent dans la littérature (Neindre, 1991) (Samsonov, 1973). Néanmoins, une simulation utilisant ces valeurs n’est pas réaliste. Il est plus convenable d’utiliser des valeurs de propriétés mécaniques comprises entre celles de l’eau et celles des cristaux d’oxydes suivant la combinaison des produits de corrosion présents, leur porosité et leur niveau de cristallisation. Il fut donc nécessaire de recourir à des valeurs déterminées expérimentalement.

Récemment, trois méthodes de caractérisation utilisées dans la littérature pour déterminer le module de Young des oxydes peuvent être retenues et sont présentées ci-dessous.

La première utilise le contact élastique d’Hertz (théorie applicables aux sols, en supposant un contact sphérique entre les grains et un frottement nul) pour interpréter des essais œdométriques sur des échantillons réduits en poudre (pour avoir l’état granulaire). Les cellules de confinement sont schématisées dans la Figure II.32.

Figure II.32 : Sché a d'u œdo t e pe etta t de si ule l'état de co fi e e t des p oduits de co osio da s le lia t hydraulique (Ouglova, 2006)

Cette approche est utilisée pour déterminer le module de Young de produits de corrosion formés au laboratoire (Ouglova, 2006). En effet, en effectuant un test œdométrique sur ces produits réduits en poudre, un comportement élastique non linéaire similaire à celui du contact entre grains régit par la

théorie de Hertz est détecté. En appliquant celle théorie et en considérant un coefficient de Poisson compris entre 0 et 0,2, il est possible de calculer la valeur du module de Young des produits.

La deuxième technique se base sur des essais de corrélation d’images (Caré, et al., 2008). Les déplacements à la surface supérieure d’un échantillon cylindrique de mortier contenant au centre une armature en acier soumise à un courant électrique sont suivis par analyse d’images. Le dispositif expérimental correspondant est schématisé dans la Figure II.33.

Figure II.33 : Schéma du montage utilisé pour déterminer le coefficient d'expansion des produits de corrosion par corrélation d'images (Caré, et al., 2008)

Le post-traitement à l’aide des logiciels de corrélation d’images, tel que le logiciel Corelli développé au LMT1 qui a été utilisé dans cette étude, permet de calculer les champs de déformations causées par la corrosion de l’armature sur la surface. Ceci permet de déterminer un coefficient d’expansion des couches de corrosion et de calibrer par la suite le module de Young correspondant des produits de corrosion par modélisation numérique (analyse inverse).

Ces méthodes peuvent manquer de précision puisque dans le premier cas l’état de confinement des produits de corrosion est modifié et dans le deuxième plusieurs hypothèses doivent être avancées par rapport aux variations dimensionnelles des éprouvettes en béton.

La dernière méthode est celle de l’indentation. Elle consiste à presser un objet de grande dureté et de géométrie connue contre la surface du matériau à étudier. Les cycles de charge/décharge appliqués sont caractérisés par une courbe force/pénétration. L’analyse de la phase de décharge donne la surface de contact projetée entre l’indenteur et le matériau sous charge maximale. Il est alors possible de déterminer la dureté et le module de Young du matériau étudié.

En effet, la dureté � est définie par le rapport de la force maximale appliquée � sur l’aire de l’empreinte résiduelle laissée dans le matériau après le retrait de l’indenteur :

� = � ���

� ��� Équation II.17

1 Corelli-Q4 : logiciel de corrélation d’images numériques développé au LMT (Laboratoire de Mécanique et de Technologie)

Avec ℎ aire de contact à profondeur et charge maximales.

Le calcul du module d’élasticité du matériau est aussi possible en passant par le calcul de la rigidité du couple échantillon/indenteur (Marcus & Florian, 2005).

Figure II.34 Schéma explicatif de la charge/décharge lors d'un essai de nano-indentation (Maciejak & Aubert, 2007)

Figure II.35: Courbe caractéristique de charge décharge en fonction du déplacement (Maciejak &

Aubert, 2007)

La macro-indentation implique une charge appliquée supérieure à 10 N, pour la micro-indentation elle est comprise entre 0,1 et 10 N et pour la nano-micro-indentation elle est inférieure au Newton. En nano-indentation, la mesure continue de la charge et du déplacement a remplacé la mesure optique de l’empreinte résiduelle après le retrait de l’indenteur de la macro et micro-indentation. Cette technique permet de mesurer les propriétés mécaniques de couches minces en particulier leur dureté et leur module d’élasticité réduit.

L’appareillage de nano-indentation doit couvrir une gamme de forces allant du µN à quelques centaines de mN avec une précision de l’ordre du µN et une gamme de profondeurs de pénétration de l’ordre de quelques dizaines de nanomètre avec une résolution inférieure au nanomètre. Le choix du type de l’indenteur dépend de l’utilisation désirée (Maciejak & Aubert, 2007).

Cette technique a été utilisée dans la littérature (Šavija, et al., 2015) pour l’évaluation des propriétés mécaniques des produits de corrosion de l’acier dans un échantillon de béton armé. Elle a permis d’évaluer le module d’élasticité des couches de produits de corrosion et a montré que la valeur de ce dernier est fortement dépendante de l’état de confinement des produits de corrosion dans l’échantillon cimentaire. Les empreintes laissées sur l’échantillon testé par une pointe de Berkovich en diamant sont représentées sur la Figure II.36.

Figure II.36 : Empreinte de l'indenteur laissée sur des produits de corrosion d'armatures en acier dans du béton armé (Šavija, et al., 2015)