• Aucun résultat trouvé

Capacité portante des semelles circulaires : Rappel des résultats connus

2 Analyse à la rupture

2.5 Capacité portante sismique des fondations circulaires

2.5.2 Capacité portante des semelles circulaires : Rappel des résultats connus

2.5.2.1 Premiers résultats

Comme on l’a vu, la méthode des lignes de glissement a permis le traitement de problèmes plans et axisymétriques où le nombre des quantités inconnues est égal au nombre des équations disponibles. Concernant les problèmes axisymétriques et leur traitement, les critères de résistance habituels (Tresca/Coulomb)1 permettent aussi l’adoption de l’hypothèse de Haar – Karman (1909), qui rend possible l’utilisation de la méthode des lignes de glissement. Selon cette hypothèse, si l’on note par { , , }r θ z les coordonnées cylindriques où z désigne l’axe de symétrie axiale, on a :

σ est contrainte principale θθ

σ est égale à l’une des contraintes principales situées dans le plan méridien. θθ

Le système d’équations aux dérivées partielles a été formulé par Berezancew (1952) pour un milieu homogène et Salençon (1977) pour un milieu non homogène. Levin (1955) a présenté des bornes supérieures de la capacité portante d’une semelle rigide circulaire, reposant sur un sol homogène purement cohérent, soumise à l’action d’une force verticale centrée N, tandis que Shield (1955) a construit un champ de contrainte complet sous la semelle dans le cas d’une interface sol – semelle lisse. La force maximale supportée par une semelle de rayon r est :

(2.32) N cA A r2

max = 5.69 , = π

1 Ces critères sont du type « courbe intrinsèque », c’est-à-dire qu’ils ne font pas intervenir la contrainte principale

2.5. Capacité portante sismique des fondations circulaires 67

où c désigne la cohésion du sol.

Un peu plus tard, la solution a été reprise par Eason & Shield (1960) dans le cas d’une interface sol – semelle rugueuse, qui fournit une force portante égale à :

(2.33) N cA A r2

max = 6.05 , = π

Cox et al. (1961) ont traité le problème d’un sol cohérent et frottant sans poids volumique, alors que Cox (1962) a pris en compte le cas d’un sol avec poids volumique au moyen de la méthode des caractéristiques.

Salençon & Matar (1982) ont présenté des solutions pour une grande variété de configurations ; pour un sol cohérent et frottant avec poids volumique, ils ont pris en compte l’hétérogénéité du sol (gradient vertical de cohésion), l’effet d’une surcharge et la présence d’une assise indéformable sous le sol, toujours en géométrie axisymétrique. La construction de champs de contrainte à travers un calcul global par la méthode des « caractéristiques » leur a permis de s’affranchir de l’erreur introduite par la méthode de superposition de Terzaghi et également de la quantifier. Les résultats ont été présentés sous forme d’abaques, en rapportant la capacité portante des fondations circulaires à celle des fondations filantes de même largeur dans les mêmes conditions, au moyen d’un coefficient de forme. Dans le cas des sols frottants, le gradient vertical de cohésion a pu être regroupé avec le poids volumique. Le gradient vertical de cohésion a été également pris en compte dans le problème par Houlsby & Wroth (1983), dans le contexte de la méthode de lignes de glissement, et par Kusakabe et al. (1986) qui ont fourni des bornes supérieures de la capacité portante par l’approche cinématique.

Plus récemment, Tani & Craig (1995) ont élaboré des analyses par la méthode des lignes de glissement pour des sols cohérents hétérogènes et réalisé des tests en centrifugeuse afin de vérifier les résultats des analyses théoriques. La Figure 2.20 présente une semelle circulaire typique testée en centrifugeuse par Tani & Craig (1995).

(a) (b) Figure 2.20 – Résultats typiques des tests en centrifugeuse d’après Tani & Craig (1995) ; a)

déformation du sol argileux, b) surface du sol

Par ailleurs, Sekiguchi & Kobayashi (1997) ont introduit un deuxième paramètre de chargement ; le moment M. Ils ont établi des bornes supérieures par le traitement d’un mécanisme de rotation (on présente ce mécanisme dans le paragraphe §2.5.4.3.2), ainsi que des bornes inférieures au moyen d’un champ de contrainte statiquement admissible complet obtenu par simple réduction du champ de Shield à une fondation réduite selon le procédé habituel pour les semelles filantes (cf.

Meyerhoff, 1951). Les résultats de Sekiguchi & Kobayashi (1997) sont présentés sur la Figure 2.21.

(a) (b) Figure 2.21 – Les résultats de Sekiguchi & Kobayashi (1997). a) champ de contrainte sous la semelle et b)

diagramme d’interaction entre force verticale centrée et moment.

2.5.2.2 Résultats de l’industrie offshore

La connaissance sur le comportement des semelles circulaires reposant notamment sur des sols cohérents et soumises à un chargement généralisé a été abondamment enrichie par l’étude des fondations des structures offshore. La fondation la plus commune pour ce type de structure est une semelle circulaire connue comme “spudcan footing” dans la littérature anglophone. Comme une structure (plateforme) marine est soumise à l’action cyclique des vagues, du vent etc., il est nécessaire d’étudier la capacité portante de la fondation sous l’action d’un chargement généralisé comportant notamment une force verticale, une force horizontale {N, V} et un moment {M} sur la semelle. Une représentation tridimensionnelle de la fondation typique de l’industrie offshore est donnée sur la Figure 2.22.

2.5. Capacité portante sismique des fondations circulaires 69

Il est important de noter que dans le cas des fondations offshore, l’interface sol-semelle est considérée comme parfaitement collée afin de décrire la forte adhésion qui se développe à l’interface sol-semelle au fond marin. En revanche, pour l’étude parasismique des fondations il est opportun, comme l’ont montré les observations sur site après séismes, de considérer une interface qui permet le décollement entre la semelle et le sol. Néanmoins, l’étude des fondations offshore peut fournir des résultats utiles même pour l’étude parasismique des fondations.

Dans le contexte des fondations offshore, Bransby et Randolph (1998) ont étudié la réponse des fondations circulaires sur un sol cohérent avec un gradient vertical de cohésion, soumises à un chargement comportant les paramètres {N, V, M}. Afin de simplifier le calcul ils considèrent que la forme de la surface ultime est la même pour une semelle filante et pour une semelle circulaire et que la seule différence concerne les valeurs maximales de la force verticale, horizontale et du moment. Ainsi, ils ont pu remplacer le problème tridimensionnel par un problème plan traité par des analyses en éléments finis et par l’approche cinématique du calcul à la rupture. Dans Bransby & Randolph (1999) les configurations considérées sont étendues au cas d’une profondeur d’encastrement significative. Les champs de vitesse virtuels utilisés sont inspirés des résultats des analyses en éléments finis, comme cela est illustré sur la Figure 2.23.

Figure 2.23 – Champs de vitesse pour l’approche cinématique, inspirés par des résultats par éléments finis d’après Bransby & Randolph (1998)..

La méthode du suivi de l’évolution élastoplastique par éléments finis a été utilisée aussi par Taiebat & Carter (2000, 2002). Des modèles bidimensionnels et tridimensionnels sont développés dans le cas d’une semelle circulaire sur un sol cohérent homogène. L’étude porte éventuellement sur la définition de la surface ultime dans l’espace {N, V, M} et sur l’identification de la loi d’écoulement global de la fondation. Un maillage typique ainsi que la surface ultime établie par Taiebat & Carter sont présentés sur la Figure 2.24. Dans Taiebat & Carter (2002) des bornes inférieures ont également été établies par l’approche statique du calcul à la rupture afin de vérifier les résultats par éléments finis. Il s’agissait de champs de contrainte complets, construits analytiquement.

Gouvernec & Randolph (2003) ont essayé de vérifier l’hypothèse utilisée par Bransby & Randolph (1998, 1999) portant sur l’identité de la forme de la surface ultime normalisée pour les semelles filantes et circulaires. La comparaison est effectuée au moyen d’une série d’analyses numériques tridimensionnelles et bidimensionnelles par éléments finis. Le sol est supposé cohérent avec un gradient vertical de cohésion. La conclusion principale de l’étude est qu’une forme unique est

valable dans le plan M = 0, pour les fondations filantes et circulaires, mais que dans les plans N = constante et V = 0, la taille de la surface ultime normalisée diminue avec l’accroissement du degré de non – homogénéité de la résistance. Ainsi, l’hypothèse d’une forme unique de surface ultime obtenue pour des conditions de résistance homogène ne serait pas du côté de la sécurité. Des résultats typiques ainsi obtenus sont présentés sur la Figure 2.25.

Figure 2.24 – Maillage typique et surface ultime dans l’espace {N, V, M} d’après Taiebat & Carter (2000, 2002).

(a) (b) (c)

Figure 2.25 – Surfaces ultimes normalisées des semelles circulaires et filantes pour un spectre des valeurs du gradient de cohésion selon Gouvernec & Randolph (2003). Ligne noire : semelles filantes. Ligne pointillée : semelles circulaires. a) Plan NV, b) Plan NM, c) Plan VM

L’approche cinématique a été utilisée par Randolph & Puzrin (2003) pour établir des bornes supérieures optimales de l’enveloppe des chargements extrêmes d’une semelle circulaire rigide sur un sol cohérent avec gradient vertical de cohésion. La méthode théorique de Puzrin & Randolph (2003a, b) (cf. §2.4.3.1) a été utilisée pour faciliter le traitement des champs de vitesse tridimensionnels considérés. Toujours dans le contexte des fondations offshore, l’interface sol – semelle est considérée comme parfaitement collée et la surface de charge est tracée dans l’espace des paramètres de chargement {N, V, M} pour une gamme de valeurs du gradient de cohésion. Les mécanismes de rupture sont présentés sur la Figure 2.26.

2.5. Capacité portante sismique des fondations circulaires 71

(a) (b)

(c)

Figure 2.26 – « Mécanismes de rupture » utilisés dans Randolph & Puzrin (2003) ; a) mécanisme quasi–symétrique, b) mécanisme purement rotationnel, c) mécanismes rotationnels avec mobilisation de la résistance au cisaillement dans le volume du sol.

Expérimentation au laboratoire

Le comportement des semelles circulaires soumises à un chargement généralisé a été étudié au moyen des essais au laboratoire, p.ex. par Gottardi et al. (1999) et par Martin & Houlsby (2000). Les premiers réalisent des tests sur des massifs de sable et les deuxièmes sur des sols cohérents. Dans ces essais la technique de « swipe tests » (cf. §2.1.3.1) est utilisée afin de tracer la surface ultime dans l’espace des paramètres de chargement. De plus, les déplacements permanents sont soigneusement enregistrés pour mieux comprendre la loi d’écoulement du système global. Sur la Figure 2.27, on représente des vecteurs de déplacement plastique incrémental dans le plan V-M tels qu’ils ont été mesurés par Martin & Houlsby (2000).

2.5.2.3 Développements récents

Parmi les travaux les plus récents ont peut citer le travail théorique de Salençon (2002b) dans le cas des sols cohérents et le travail expérimental de El Sawwaf et al. (2005) sur massifs de sable concernant l’effet de confinement du sol de fondation sur la capacité portante de semelles circulaires, l’étude de l’effet de la surcharge par Lee et al. (2005) à travers des analyses numériques par éléments finis et l’étude du mécanisme d’enfoncement d’une fondation de type « spudcan » dans un sol cohérent par Hossain et al. (2005). On remarque que, même si la littérature géotechnique est riche en ce qui concerne le comportement de semelles circulaires sous un chargement généralisé (grâce à la littérature relative aux fondations offshore), elle ne comporte pas de solutions qui tiennent compte de l’effet des forces d’inertie dans le sol.

Figure 2.27 – Vecteurs de déplacement plastique incrémental d’après Martin & Houlsby (2000).

Le Tableau 2.4 récapitule les travaux les plus marquants sur la capacité portante des semelles circulaires.

2.5. Capacité portante sismique des fondations circulaires 73

Tableau 2.4 - Récapitulation des travaux sur la capacité portante des fondations superficielles circulaires

Référence Ans Sol Chargement Méthode Commentaire

Levin 1955 sol cohérent N Analyse limite. Théorème cinématique Champ de vitesse axisymétrique

Shield 1955 sol cohérent N Méthode des lignes de glissement Champ de contrainte complet ; semelle rigide lisse N

max = 5.69cA Eason &

Shield 1960 sol cohérent N Méthode des lignes de glissement Champ de contrainte complet ; semelle rigide rugueuse Nmax = 6.05cA Cox, Cox et

al.

1961,

1962 sol cohérent et frottant N Méthode des lignes de glissement Différentes configurations avec et sans poids volumique Salençon &

Matar 1982

sol cohérent et frottant

hétérogène N

Méthode des lignes de glissement

Calcul global de plusieurs configurations. Coefficient de forme par rapport aux semelles filantes

Houlsby & Wroth 1983

sol cohérent

hétérogène N

Méthode des lignes de

glissement Gradient vertical de cohésion Kusakabe

et al. 1986

sol cohérent

hétérogène N Approche cinématique Gradient vertical de cohésion Tani &

Craig 1995

sol cohérent

hétérogène N

Méthode des lignes de glissement. Tests en centrifugeuse

Gradient de cohésion. Comparaison semelles filantes - semelles circulaires

Sekiguchi &

Kobayashi 1997 sol cohérent N, M

Approche cinématique

Approche statique Diagramme d'interaction N – M Bransby &

Randolph 1998

sol cohérent

hétérogène N, V, M

Évolution élastoplastique par éléments finis. Approche cinématique

Surface de charge normalisée des semelles circulaires identique à celle des semelles filantes

Bransby &

Randolph 1999 sol cohérent hétérogène N, V, M

Evolution élastoplastique par éléments finis. Approche

cinématique Considération de la profondeur d'encastrement Gottardi et

al. 1999 sol frottant N, V, M Essais sur massif de sol

Swipe tests - Surface de charge dans l'espace {N, V, M}

Martin &

Houlsby 2000 sol cohérent N, V, M Essais sur massif de sol

"Spudcan" footing. Surface de charge et loi d'écoulement

Taiebat &

Carter 2000 sol cohérent N, V, M

Évolution élastoplastique par éléments finis

Modèle en 3D. Surface de charge dans l'espace {N, V, M}

Taiebat &

Carter 2002 sol cohérent N, M

Évolution élastoplastique par éléments finis. Approche statique

Modèles 2D et 3D. Champs de contrainte "apparents" par introduction d'aire effective de la semelle

Salençon 2002b sol cohérent N Approche statique et cinématique du calcul à la rupture

Effet de confinement du sol de fondation par une enceinte circulaire rigide

Gourvenec & Randolph 2003

sol cohérent

hétérogène N, V, M

Evolution elastoplastique par éléments finis.

Modèles 2D et 3D. Comparaison des surfaces de charge de semelles circulaires et filantes Randolph &

Puzrin 2003

sol cohérent

hétérogène N, V, M Approche cinématique

Champs de vitesse 3D. Utilisation de la méthode de Puzrin & Randolph (2003)

Salgado et al. 2004

sol cohérent

hétérogène N

Analyse limite numérique. Théorèmes statique et cinématique

Facteurs de profondeur d'encastrement

El Sawwaf

& Nazer 2005 sol frottant N Essais sur massif de sol Effet de confinement du mécanisme de rupture Lee &

Salgado 2005

différents sols

étudiés N

Essais in situ - analyses numériques par éléments finis

Effets de DR, K0 et largeur de la semelle Lee et al. 2005 sol cohérent et frottant N Evolution élastoplastique par éléments finis. Effet de la surcharge

Hossain et

al. 2005 sol cohérent N

Essais en centrifugeuse - Analyses numériques par éléments finis

Enfoncement d'une semelle circulaire ("spudcan") dans un sol cohérent homogène

2.5.3 Formulation du problème de la capacité portante sismique des