LISTE DES ABREVIATIONS
C. Techniques chirurgicales
3. Cancer rectal
Les patients âgés bénéficient moins de radiothérapie ± chimiothérapie néo-adjuvante que les
patients plus jeunes et les interventions chirurgicales sans rétablissement de la continuité digestive
sont plus fréquemment réalisées pour une localisation tumorale et un stade identiques (208–210).
Ils bénéficient le plus souvent d’une radiothérapie de type palliative qu’une radiothérapie curative pré-
opératoire, bien que les patients avec un cancer rectal de stade II et III pouvant supporter une
intervention chirurgicale, peuvent généralement supporter une radiothérapie néo-adjuvante, avec
une tolérance et une efficacité comparables à celles observées chez les patients jeunes. Cependant,
deux essais ont mis en évidence les effets néfastes de la radiothérapie néo-adjuvante chez les patients
de plus de 80 ans : maladie veineuse thrombo-embolique, fractures du bassin et du col fémoral,
occlusion intestinale et fistules post-opératoires plus fréquentes (211,212).
Les facteurs de risque de fistule post-opératoire mis en évidence sont le sexe masculin, la
radiothérapie pré-opératoire, une anastomose colo-rectale basse (4-6 cm de la marge anale) et très
basse (< 3 cm de la marge anale). L’âge n’est pas retenu comme facteur de risque. Le taux de fistule
post-opératoire était comparable chez les patients âgés et plus jeunes (213).
Le but du traitement chirurgical du cancer rectal chez les patients âgés ne devrait pas prendre
seulement en compte la récidive locale mais aussi le maintien d’une autonomie suffisante pour
supporter le traitement. L’impact sur la qualité de vie de la chirurgie est également à prendre en
considération. La fonction sphinctérienne pré-opératoire, évaluée cliniquement et éventuellement
d’intervention à réaliser (212,214). La préservation sphinctérienne peut être responsable de mauvais
résultats fonctionnels avec un risque plus élevé d’incontinence anale. Cependant, l’impact d’une
colostomie sur la qualité de vie ne doit pas être négligé.
Dans le cas des tumeurs rectales basses, l’amputation abdomino-périnéale semble s’avérer
nécessaire. Cependant, l’amélioration du contrôle local par la radio-chimiothérapie pré-opératoire et
le développement de la résection inter-sphinctérienne ont permis d’augmenter la préservation
sphinctérienne. Le type de résection doit se discuter. En effet, dans le cadre d’une préservation
sphinctérienne, le patient est exposé au Low Anterior Resection Syndrom responsable d’une
incontinence, d’un fractionnement des selles, d’une poly-exonération et d’impériosités pouvant
altérer la qualité de vie, en particulier chez les patients âgés aux ressources physiques limitées (215).
Ce syndrome est plus fréquent après une radio-chimiothérapie néo-ajuvante, une exérèse complète
du mésorectum, une résection inter-sphinctérienne et en cas de troubles fonctionnels pré-existants
(216–218).
De plus, une anastomose colorectale basse et une anastomose colo-anale sont protégées par
une iléostomie pouvant exposer aux risques de troubles hydro-électrolytiques et d’insuffisance rénale.
Ainsi, même si une préservation sphinctérienne est techniquement possible, une amputation
abdomino-périnéale avec une colostomie définitive peut s’avérer être un meilleur choix.
Concernant la qualité de vie post-opératoire, celle-ci semble similaire entre les patients âgés
et les patients jeunes. Excepté pour la dysfonction sexuelle après résection antérieure du rectum et
amputation abdomino-périnéale, pour laquelle les données sont contradictoires (219). Elle semble
plus toucher les patients âgés mais altère plus la qualité de vie des patients jeunes (220,221). Deux
études retrouvaient que les patients de 70 ans et plus ressentaient plus de douleur et de fatigue,
étaient plus nauséeux et présentaient plus de dysfonction sexuelle. De même que l’impact du stress
dû au traitement et à la dysfonction sexuelle était majoré chez les patients âgés (222,223).
Les patients âgés ressentent, au même titre que les patients plus jeunes, une dégradation de
deux méta-analyses et une étude, ont mis en évidence, qu’après une amputation abdomino-périnéale,
la qualité de vie des patients est similaire à celle des patients ayant gardé leur continuité digestive
(225–227).
Différentes études ont recherché si les patients âgés avaient un risque plus élevé de stomie
définitive après résection antérieure du rectum. Les principaux facteurs de risque de stomie définitive
était la présence d’une récidive locale ou à distance, de complications post-opératoires, notamment
de fistules anastomotiques, une stomie de type terminale et la présence de co-morbidités (score de
Charlson > 1) (228–231). Deux d’entre elles ont également retrouvé que l’âge était est facteur de risque
de stomie définitive (228,230). Le risque de non rétablissement de la continuité digestive chez les
patients âgés concerne aussi bien les colostomies que les iléostomies de protection (229,232).
Plusieurs études rétrospectives, avec une petite population, ont évalué la continence anale
après chirurgie rectale avec résection complète du mésorectum et conservation sphinctérienne :
aucune n’a trouvé de différences significatives entre les patients âgés et jeunes concernant la
satisfaction globale post-opératoire, la constipation, l’utilisation de laxatifs, l’incontinence aux selles
et aux gaz, la dyschésie, les douleurs périnéales et l’impact social (233–235). Une étude prospective a
évalué la continence post-résection inter-sphinctérienne : les facteurs de risque significatifs de
mauvais résultat fonctionnel étaient l’étendue de la résection inter-sphinctérienne et la radio-
chimiothérapie pré-opératoire. L’âge ne ressortait pas comme statistiquement significatif (236).
La prise en charge chirurgicale des patients âgés vivant en institution semble encore plus
délicate. Une étude a évalué les résultats de la chirurgie rectale chez les patients de 65 ans et plus
vivant en institution. Elle retrouvait une mortalité post-opératoire à 1 an de 51% après proctectomie
avec colostomie terminale (237,238) et de 40% après préservation sphinctérienne. (HR 1.32, IC 95%
[1.09-1.60], p = 0.004). Après préservation sphinctérienne, 37% des résidents étaient incontinents
de présenter des troubles fonctionnels post-opératoires par rapport à ceux ayant une bonne fonction
pré-opératoire (76% vs 13% ; RR 3.28, IC 95% [1.74- 6.18], p= 0.0002). L’incontinence fécale était aussi
associée aux troubles cognitifs (RR 1.55, IC 95% [1.15-2.09], p = 0.004).
La prise en charge des patients âgés avec une tumeur rectale basse se discute au cas par cas,
notamment pour le type de résection chirurgicale à réaliser, en prenant en compte différents
éléments : le stade tumoral, la réalisation ou non d’un traitement néo-adjuvant, l’état général du