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Chapitre IV Une nouvelle approche pour prédire l’uni des chaussées flexibles

IV.4 Cadre de modélisation

Des hypothèses sont posées et servent comme base à la dérivation de la forme mathématique du modèle de prédiction de l’uni.

Hypothèse 1

Le profil longitudinal d’une chaussée peut être divisé en courts segments dont la surface supérieure de chacune est caractérisée par une pente inclinée (Figure IV-1). La longueur de base, au niveau du sol d’infrastructure, de chaque section est de longueur dx, tel que montré à la Figure IV-1. La discrétisation longitudinale de la chaussée n’est pas nouvelle dans le domaine, car Ullidtz (1987) a déjà utilisé cette approche pour le développement du MMOPP (Mathematical Model of Pavement Performance). Aussi, le concept de la pente moyenne rectifiée (Average Slope Rectified) a été utilisé comme indicateur de l’uni (Sayers et al. 1986). Les auteurs du présent article se sont inspirés de ces notions et ont posé l’hypothèse suivante : pour un ensemble de segments de longueur dx donné, la pente initiale des segments définit l’uni initial et lorsque ces pentes varient dans le temps, l’uni varie aussi.

Figure IV-1: Représentation simplifiée du profil longitudinal Hypothèse 2

À la fin de la construction, toute chaussée est caractérisée par un uni initial. Cet uni initial est dû aux limitations, aux défauts de construction et à la variabilité des matériaux des couches de la chaussée (revêtement, fondation et sous-fondation). Les données compilées par le Ministère des Transports du

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Québec entre 2009 et 2013 (Hebert 2014) montrent clairement l’existence de l’uni initial (Figure IV-2). L’uni initial mesuré en termes d’IRI est compris entre 0,94 et 1,11 m/km. Par ailleurs, l’introduction de l’uni initial dans le modèle de prédiction n’est pas nouvelle. En effet, le modèle développé par NCHRP (2004) a déjà dans sa formulation mathématique l’uni initial.

Figure IV-2: Moyenne d’uni initial du réseau routier au Québec (Hebert 2014) Hypothèse 3

L’hypothèse 3 postule que l’évolution de l’uni dans le temps est principalement attribuable aux déformations du sol d’infrastructure. Cette hypothèse considère que la couche de fondation, celle de sous-fondation et celle du revêtement sont constituées des matériaux sélectionnés, formulés et tamisés et donc relativement homogènes. Le comportement de ces couches est relativement uniforme et par conséquent elles n’ont pas d’effet significatif sur l’évolution de l’uni qui est la résultante d’un comportement différentiel. L’uni observé sur des chaussées construites sur du roc (Figure IV-3) au Québec semble supporter cette hypothèse. En effet, l’IRI mesuré entre 10 et 18 ans sur le site de West Ditton est constant, avec une valeur proche de 1 m/km. La valeur de cet uni entre dans la gamme des valeurs d’uni initial montrée par Hebert (2014), ce qui suppose qu’il n’a pas évolué sur 18 années de service. Le site de Jonquière présente, cependant, des valeurs d’IRI initial supérieures aux valeurs d’IRI initial observées à la Figure IV-2. Toutefois, les mesures indiquent que les valeurs sont relativement constantes pendant les 5 années de service de la chaussée. L’absence d’évolution de l’uni sur les sites rocheux du West Ditton (Route régionale 212) et de la Jonquière (Route nationale

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170), supporte l’hypothèse que c’est la couche d’infrastructure, lorsque constitué d’un sol, qui peut influencer significativement l’évolution de l’uni dans le temps.

Figure IV-3: Évolution de l’uni de chaussées construites sur du roc (Base des données MTQ) Hypothèse 4

L’évolution de l’uni dans le temps est due à l’évolution de la déformation permanente

 

p et du

soulèvement au gel (S) du sol d’infrastructure d’épaisseur e. Cette hypothèse suppose la déformation permanente et le soulèvement au gel comme deux facteurs influençant l’évolution de l’uni dans le temps. En effet, ce sont les mécanismes associés à ces deux facteurs qui ont guidé leur choix. La déformation permanente par exemple, provoque l’accumulation progressive d’une dépression dans le sol d’infrastructure, tandis que le soulèvement au gel provoque un gonflement du sol suivi d’un affaissement. La dépression et le gonflement dans le sol d’infrastructure peuvent entrainer la distorsion de la surface de la chaussée. Ainsi, les distorsions de la surface provoquent des variations de pentes (hypothèse 1), et par conséquent, la dégradation de l’uni. Par ailleurs, ces deux facteurs ont des effets cumulatifs sur l’évolution de l’uni. La Figure IV-4 illustre bien ce concept des effets des deux facteurs qui s’additionnent. Si la pente entre deux points séparés d’une distance dx augmente, l’uni augmente. L’augmentation de l’uni pendant l’hiver renforce l’hypothèse 4. En effet, ce phénomène est bien connu et documenté. Hebert et al. (2003) ont mesuré annuellement l’évolution de l’uni en

0,00 0,50 1,00 1,50 2,00 2,50 0,0 5,0 10,0 15,0 20,0 IR I (m /km )

Année de service

Évolution de l'uni des chaussées sur roc

Jonquière

West Ditton

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termes d’IRI (Figure IV-5) qui confirme bien le principe d’augmentation d’uni pendant l’hiver. Il est observable qu’à partir du début décembre, correspondant au début d’hiver, l’uni commence à augmenter pour atteindre un pic vers la mi-février, et diminue ensuite jusqu’en avril, soit la fin de l’hiver. Toutefois, il est aussi observable qu’à la fin de l’hiver, l’uni continue de diminuer mais est supérieure au niveau du début. Cette augmentation est attribuée, selon cette même étude, à la déformation résiduelle due au soulèvement au gel. Cet aspect mérite d’être étudié davantage, car il peut être confondu à l’uni dû à la déformation permanente des charges du trafic, qui évolue aussi pendant l’hiver et principalement pendant le dégel.

Figure IV-4: Représentation de l’influence de la déformation permanente et du soulèvement au gel sur la pente

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Figure IV-5: Augmentation de l’uni pendant l’hiver (Hébert et al. 2003)

Hypothèse 5

La sensibilité de l’IRI par rapport à certaines longueurs d’onde a été mise en évidence au chapitre I. L’hypothèse 5 est que les longueurs d’onde variant de 9 à 10 m peuvent être considérées comme critiques et peuvent affecter la dynamique du véhicule, le confort et la sécurité des usagers. En effet, des études, comme celle de Vaillancourt (2004), montrent que les ondulations de grandes longueurs d’onde visibles à la surface de la chaussée sont attribuables aux défauts du sol d’infrastructure. Dans le même ordre d’idée, Fradette et al. (2005) ont fait une étude d’impact des longueurs d’onde et d’amplitude sur la perte de la force de contact entre le pneu et la surface de la chaussée. Le résultat de leurs travaux, présentés à la Figure IV-6, est éloquent. En fixant le seuil de perte de la force de contact critique à 30 %, et en supposant que les amplitudes des ondulations de surface les plus réalistes sont entre 0 et 50 mm, il est possible de déduire que les longueurs d’onde critiques correspondantes sont de 1 à 9 m. Pour être conforme avec la première hypothèse selon laquelle c’est le sol d’infrastructure qui est la source de la variation de l’uni et en sachant que les longueurs d’onde associée aux déformations permanentes du sol d’infrastructure sont les plus grandes (OCDE 1984 et Vaillancourt 2004), la longueur d’onde de 9 m est plus vraisemblable par rapport au comportement du sol d’infrastructure. Ainsi, des longueurs de segments de 4 à 5 m correspondant à une demi-longueur d’onde ont été retenues pour cette étude.

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Figure IV-6: Pourcentage de perte de force de contact maximum pour les pneus de l'essieu arrière en fonction de l'amplitude et des longueurs d'onde à 90 km/h (Doré et al. 2005)

Hypothèse 6

Les fissures transversales sont considérées comme un facteur aggravant de l’uni. En effets, pendant la durée de vie utile d’une chaussée, le revêtement se fissure transversalement par contraction thermique (Epps 2000, Doré et al. 2009). Ces fissures sont des zones préférentielles d’infiltration de l’eau qui peuvent réduire la résistance à la déformation permanente et augmenter la gélivité du sol d’infrastructure. Les fissures transversales sont indirectement responsables de l’évolution de l’uni et c’est pourquoi elles sont considérées comme un facteur aggravant.

Hypothèse 7

Le modèle n’est valable que pour la durée de vie utile d’une chaussée flexible (15-30 ans). Il est considéré qu’après ce temps, les dégradations comme les nids de poule, les pelades, les faïençages et autres dégradations peuvent apparaître et rendre les hypothèses fondamentales précédentes caduques.

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