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CHAPITRE 4 : CONCEPT DE L’ACCEPTABILITÉ ET CADRE CONCEPTUEL

4.2. Cadre conceptuel

À travers la deuxième section de ce chapitre, en continuité avec la présentation du concept d’acceptabilité, de ses principales définitions ainsi que des concepts apparentés, nous proposons d’aborder brièvement les cadres conceptuels qui traitent du concept

d’acceptabilité, pour ensuite présenter plus en détail le modèle théorique retenu pour répondre aux objectifs de cette étude.

Joseph C. Witt et Stephen N. Elliott (1985), deux chercheurs du domaine de l’éducation, ont élaboré un cadre conceptuel comportant quatre éléments: l’acceptabilité du traitement, l’utilisation du traitement, l’intégrité du traitement et l’efficacité du traitement (Elliott, 1988; Witt & Elliott, 1985). Il s’agit d’un des premiers cadres conceptuels élaborés pour définir l’acceptabilité d’une intervention (Huddleston, 2012). Ces auteurs proposent un lien séquentiel et réciproque entre ces quatre éléments postulant que les traitements perçus comme étant acceptables sont susceptibles d’être utilisés et d’être implantés de façon plus fidèle (Elliott, 1988; Huddleston, 2012; Witt & Elliott, 1985). En retour, si le traitement est implanté avec une bonne fidélité, cela se traduit par une meilleure efficacité du traitement puisqu’un traitement administré de façon fidèle permet un meilleur changement du comportement (Huddleston, 2012; Witt & Elliott, 1985). Ce modèle théorique souligne l’importance d’étudier l’acceptabilité d’une intervention par les patients. Cependant, peu d’études empiriques se sont penchées sur ce modèle pour démontrer la relation réciproque entre ces quatre éléments (Huddleston, 2012).

En 1987, Reimers, Wacker, et Koeepl ont développé un modèle de l’acceptabilité d’un traitement qui consiste en une prolongation du modèle de Witt et Elliott (1985) (Huddleston, 2012). Étant en accord avec le postulat affirmant l’interdépendance potentielle entre la perception de l’acceptabilité et le niveau d’efforts fournis pour l’implantation du traitement (Witt & Elliott, 1985), ces chercheurs ajoutent l’importance du degré de compréhension des patients de l’intervention (Huddleston, 2012; Reimers et al., 1987). Selon eux, s’assurer de bien expliquer aux patients en quoi consiste le traitement est la première étape à suivre pour être certains que ceux-ci soient en mesure d’évaluer son acceptabilité de façon adéquate (Huddleston, 2012; Reimers et al., 1987). Lorsque les patients ne saisissent pas bien le rationnel d’un traitement, cela affecte négativement leur adhésion au traitement, et par conséquent, réduit l’efficacité du traitement (Huddleston, 2012; Reimers et al., 1987).

Le “12-factor model of treatment acceptability” de Lennox et Miltenberger (1990) est composé de douze facteurs classés sous quatre catégories et présentés en ordre d’importance (Huddleston, 2012; Lennox & Miltenberger, 1990). Ces catégories sont : les considérations relatives à l'efficacité, les effets secondaires, les implications juridiques et sociales et les considérations pratiques (Huddleston, 2012; Lennox & Miltenberger, 1990). Les points faibles de ce modèle reposent sur la nature hiérarchique des catégories; il met donc l’emphase sur les interventions efficaces et laisse de côté les interventions potentiellement prometteuses dont l’efficacité n’a pas encore pu être démontrée (Huddleston, 2012). De plus, ce modèle accorde une plus grande importance à la perspective des concepteurs des interventions qu’à celles des utilisateurs et des personnes responsables de l’implantation des interventions (Huddleston, 2012; Lennox & Miltenberger, 1990).

En 2008, Carter a proposé le « Distributive Model of Treatment Acceptability » qui stipule trois catégories de facteurs qui influencent l’acceptabilité d’une intervention : 1) « societal acceptability » qui réfère aux aspects légaux et aux procédures gouvernementales; 2) « consultant acceptability » qui réfère à l’influence de la formation et des expériences passées du thérapeute, sur sa perception de l’acceptabilité; et 3) « consumer acceptability » qui réfère aux jugements des utilisateurs des services (Carter, 2008). Bien que ce modèle considère à la fois les facteurs sociétaux et ceux en lien avec les thérapeutes ou les utilisateurs des services dans l’évaluation de l’acceptabilité d’une intervention, ce modèle propose des variables d’opérationnalisation du concept qui seraient plus appropriées avec un devis quantitatif (gravité du problème, genre, niveau de connaissance sur le traitement, statut socio-économique, localisation de l’école secondaire, élever un enfant avec une maladie physique, détresse conjugale). De plus, ces variables sont spécifiquement destinées pour l’évaluation des interventions du domaine de l’éducation des jeunes.

Dans la section précédente portant sur les différentes définitions de l’étude de l’acceptabilité d’une intervention, il a été mentionné que Sekhon et al. (2017) ont proposé une nouvelle définition conceptuelle de l’acceptabilité dans le contexte d’une synthèse des synthèses de la littérature, où les auteurs ont mis en lumière la disparité des définitions

disponibles et l’ambiguïté du concept de l’acceptabilité (Sekhon et al., 2017). Ils ont aussi relevé que la littérature n’offrait pas une définition ou un cadre conceptuel permettant d’opérationnaliser ce concept (Sekhon et al., 2017), ce qui a mené les auteurs à proposer un cadre conceptuel qui permet de mesurer l’acceptabilité d’une intervention dans le domaine de la santé.

À la suite de la revue des synthèses de la littérature portant sur la théorisation du concept de l’acceptabilité, Sekhon et al. (2017) ont créé le “Theoretical framework of acceptability” qui propose sept composantes : les attitudes affectives, le sentiment de surcharge, l’éthique, la cohérence de l’intervention, les coûts impliqués, l’efficacité perçue, et le sentiment d’auto-efficacité (Sekhon et al., 2017). Les attitudes affectives réfèrent aux ressentis des patients à l’égard de l’intervention. Le sentiment de surcharge est la perception de la quantité d’efforts qui ont dû être déployés pour participer à l’intervention. La composante éthique consiste à savoir dans quelle mesure l’intervention est en harmonie avec le système de valeurs du patient tandis que la cohérence de l’intervention cherche à savoir dans quelle mesure le patient croit que l’intervention est le traitement approprié pour traiter son trouble. La composante concernant les coûts impliqués cherche à savoir dans quelle mesure les patients doivent renoncer à des bénéfices, des profits ou à ses valeurs personnelles afin de participer à l’intervention. L’efficacité perçue est la composante qui consiste à savoir dans quelle mesure l’intervention est perçue comme efficace pour atteindre ses objectifs et finalement, le sentiment d’auto-efficacité est le degré de confiance perçue par le patient envers sa capacité à adopter les comportements nécessaires pour participer à l’intervention. Les mêmes composantes s’appliquent et s’opérationnalisent sensiblement de la même façon pour l’évaluation de l’acceptabilité d’une intervention, que ce soit selon la perspective des patients ou des thérapeutes. Le modèle théorique de Sekhon et al. (2017) avance que l’acceptabilité peut et devrait être mesurée de façon prospective, rétrospective ou durant le traitement.

Pour cette étude, nous avons choisi de nous appuyer sur le cadre conceptuel de Sekhon et al. (2017) pour guider la conception de l’étude et répondre aux objectifs de recherche. Trois principales raisons expliquent notre choix : 1) ce cadre est issu d’une synthèse des

synthèses de la littérature; 2) contrairement à la plupart des autres cadres (p.ex. : Staniszewska et al. (2010), Reimers et al. (1987); Witt et Elliott (1985)), celui de Sekhon et al. (2017) définit de façon précise les composantes de l’acceptabilité, ce qui nous a permis d’opérationnaliser nos objectifs de recherche; et 3) certains cadres conceptuels sont très « macro » (par ex. : Carter (2008); Lennox et Miltenberger (1990)), c’est-à-dire qu’ils englobent les facteurs entourant la société, les cliniciens et les utilisateurs des services qui influencent l’acceptabilité d’une intervention. Or, compte tenu du contexte de cette étude qui vise à étudier l’acceptabilité de la TCC-T sous un angle particulier, c’est-à-dire selon la perspective des patients, le cadre conceptuel de Sekhon et al. (2017) permet d’arriver à cette fin.

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