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PARTIE III : R ESULTATS & DISCUSSIONS

III- 4 : S YNTHESE & C RIBLAGE R ECHERCHE D ’ INHIBITEURS DE NS3

3) C RIBLAGE : DEROULEMENT D ’ UNE EXPERIENCE TYPE

Pour les différents croisements envisagés, la procédure employée est toujours la même. Une expérience type comporte quatre étapes : tout d’abord la conception du plan de dépôt, ensuite la formation in situ de la banque, puis la réalisation du test enzymatique et enfin la lecture de la fluorescence et l’analyse quantitative des résultats.

3.1) Plan de dépôt

Le plan de dépôt est toujours un croisement entre deux séries de composés hydrazides. Après la formation in situ de la banque, l’enzyme et le substrat sont ajoutés par la suite dans toutes les microgouttes contenant des mélanges d’hydrazones. De plus, un plan de dépôt comporte un contrôle positif : enzyme + substrat, un contrôle négatif : absence d’enzyme, et des contrôles d’inhibition : enzyme + inhibiteur peptidique (IC50 ~ 1µM), enzyme + inhibiteur BILN 2061 (Figure 76). L’inhibiteur BILN 2061, de la société Boerhinger Ingelheim, est un inhibiteur macrocyclique de NS3 très efficace (IC50 d’environ 1 nM).

Figure 76 : Plan de dépôt d’une expérience de criblage.

B1, B2, B3 et B4 sont les quatre blocs supérieurs du tensioarray (les 4 blocs inférieurs sont des dupliquats). Chacune des cases blanches correspond à un mélange de deux hydrazides (e.g. G1-H1) en présence d’acide 3,5-diformylphénylboronique. Le contrôle positif (pas d’inhibiteur) est indiqué en marron, le contrôle négatif (absence de NS3) est en vert, les contrôles inhibiteurs sont en violet (inhibiteur peptidique) et en gris (BILN- 2061).

3.2) Assemblage de la banque de candidats inhibiteurs

Une fois le plan de dépôt entré dans le logiciel de l’éjecteur piézoélectrique, la microplaque 96 puits contenant les hydrazides (1 mM dans une solution eau/DMSO (1:1) contenant 10% de glycérol) est placée sur son support, et trois tensioarrays de huit blocs chacun sont placés sur le porte-lame refroidi (pour limiter l’évaporation pendant le dépôt). Dans un premier temps, les hydrazides sont déposés, puis l’acide 3,5-diformylphénylboronique. Une solution eau/DMSO (1:1) contenant 10% de glycérol est ajoutée dans tous les plots ne contenant pas d’hydrazides (contrôles positifs). Ensuite, les tensioarrays sont placés dans un four à micro- ondes réglé sur une puissance de 80 W pendant 15 minutes. A l’issue de ces 15 minutes, l’eau et le DMSO se sont complètement évaporés, et la banque d’hydrazones est assemblée (Figure 77). Un tensioarray est utilisé pour continuer l’expérience, les deux autres étant conservés à +4°C. Le tensioarray reçoit un mélange eau/DMSO (1:1) dans tous ses plots. Nous avons constaté que les composés chimiques des tensioarrays placés au réfrigérateur

tensioarrays du réfrigérateur et de déposer la solution eau/DMSO (1:1) dans tous leurs plots.

Figure 77 : Méthodologie d’assemblage de la banque sur puce.

A gauche des flèches : Les réactifs, un dialdéhyde et deux synthons hydrazides, sont déposés sur le tensioarray. La synthèse est ensuite accélérée par chauffage micro-ondes, et conduit (à droite des flèches) à un mélange de dihydrazones dans les microgouttes, dans un ratio environ 1:2:1.

3.3) Test enzymatique

Une fois le tensioarray contenant la banque chimique (fraîchement préparée ou sortie du réfrigérateur) positionné sur le support refroidi (juste au-dessus du point de rosée), il suffit d’ajouter le tampon de réaction, l’enzyme et le substrat.

Lors de l’ajout du tampon, on se retrouve face à une limitation majeure des éjecteurs piézoélectriques, à savoir l’impossibilité de prélever de grandes quantités de produit à déposer. Cet inconvénient augmente le nombre d’opérations effectuées par le robot de dispense lors du dépôt des solutions sur le tensioarray. De plus, la diffusion dans la pipette nous oblige à prélever deux fois plus de solution que ce que l’on veut réellement dispenser (cf. partie III-1). Ainsi, l’ajout du tampon est l’étape la plus longue, car il est nécessaire de prélever 8 fois le tampon (1 fois par bloc) pour ajouter 200 gouttes dans chaque plot du tensioarray.

Afin d'ajouter l’enzyme et le substrat le plus rapidement possible, une seule goutte d’une solution concentrée est ajoutée dans chaque microgoutte contenant le tampon et les composés chimiques. Dès que l’ajout du substrat est terminé, le tensioarray est placé pendant 2 heures à l’étuve à 37°C, dans un dispositif empêchant l’évaporation. Il s’agit du même dispositif que celui utilisé pour l’ajout de l’isonitrile sous forme de vapeur (cf. Partie III-3, Figure 51), mais le mélange DMSO/isonitrile est remplacé par un mélange eau/DMSO/glycérol. Durant l’incubation, le clivage du substrat par la protéase NS3 génère une augmentation de la fluorescence (Figure 78). Plus l’inhibition de ce clivage est forte, moins l’augmentation de fluorescence est élevée.

Ac-Asp-Glu-Asp(5-FAM)-Glu-Glu-Abu- -Ser-Lys(QXLTM520)-NH2

F

F Q

F Q

Protéase Protéase

Ac-Asp-Glu-Asp(5-FAM)-Glu-Glu-Abu- -Ser-Lys(QXLTM520)-NH2

F F F F QQ F Q F Q Protéase Protéase ψ-[COO]-Ala L-(+)- acide lactique ψ-[COO]-Ala L-(+)- acide lactique

Figure 78 : Le clivage par NS3 du substrat fluorogène libère la fluorescence.

Le substrat (ruban gris clair) est un peptide spécifique de la protéase NS3, dont le site de clivage est indiqué en rouge. Il comporte un fluorophore (F) et un chromophore ou quencheur (Q), qui absorbe la fluorescence émise par (F). Il est donc faiblement fluorescent, comme le montre la photo correspondante en haut à droite, et la représentation tridimensionnelle en couleur à coté de la photo. Lorsque NS3 clive la protéase, (F) et (Q) s’éloignent l’un de l’autre, et, la fluorescence n’étant plus absorbée par (Q), une augmentation importante de la fluorescence a lieu. La photo (et la représentation 3D) en bas à droite représentent la même microgoutte qu’en haut à droite, mais lorsque tout le substrat a été clivé par NS3.

3.4) Lecture et analyse des résultats

Après 2 heures d’incubation à 37°C, le tensioarray est sorti de son enceinte et placé dans un scanner de fluorescence. La fluorescence (λexc = 488 nm et λem = 512 nm) est alors

mesurée. Un ensemble de contrôles, répartis sur le microarray, permet de connaître les valeurs de la fluorescence pour 0% d’inhibition (C-), pour 100% d’inhibition (C+) et pour

C+

C-

BILN

InhP

Figure 79 : Image typique d’un tensioarray après un criblage de candidats inhibiteurs.

L’image a été obtenu avec un scanner de fluorescence et les couleurs correspondent à une échelle dite «rainbow», qui s’étend progressivement du bleu foncé au rouge en passant par le turquoise, puis le vert, puis le jaune, puis l’orange (encart à gauche). L’agrandissement montre les différents contrôles, avec de haut en bas : contrôle positif (NS3 et substrat), contrôle négatif (substrat sans NS3), contrôle avec un inhibiteur peptidique et contrôle avec BILN 2061. La répartition des contrôles sur le tensioarray est faite suivant le plan de dépôt de la figure 76. Noter que les intensités varient dans les plots qui abritent les composés de la banque chimique formée in situ.

Les images obtenues sont ensuite traitées avec un logiciel d’analyse d’images (GenepixPro) qui permet de quantifier la fluorescence dans chaque plot. La fluorescence est moyennée sur toute la surface du plot. Le résultat d’une telle analyse est un tableau Excel de 800 lignes (une ligne par plot) contenant les valeurs d’une multitude de paramètres, dont seuls deux nous intéressent : la position du plot (Bloc i (1 ≤ i ≤ 8), ligne j (1 ≤ j ≤ 10), colonne k (1 ≤ k ≤ 10)) et la fluorescence moyenne du plot. Le meilleur moyen de traiter un tel tableau est d’utiliser la fonction « tableaux croisés dynamiques » d’Excel, qui permet de changer l’apparence du tableau en déplaçant les paramètres à la souris, en cochant certains paramètres d’une liste, et aussi de calculer des moyennes, des écarts-types, des différences par rapport à une référence, etc. De nombreux graphiques peuvent ainsi être générés en un temps raisonnable, même avec un grand nombre de données. Ces graphiques permettent de

comparer les valeurs de la fluorescence, ce qui donne une bonne indication des inhibitions relatives, et permet donc d’identifier des inhibiteurs. Cependant, une telle approche n’est pas correcte selon la théorie des statistiques. En effet, lorsque que l’on compare des moyennes, dès qu’il y en a plus de deux, il convient de prendre en compte la variabilité globale de l’expérience. Sachant cela nous avons aussi utilisé un traitement statistique plus avancé.

Pour ce traitement plus avancé, nous avons eu recours à l’analyse de la variance à un facteur. Cette méthode, qui généralise les tests de comparaison de deux moyennes, est la seule qui convienne à la comparaison de trois moyennes ou plus. Pour la comparaison des moyennes deux à deux, nous avons eu recours au test de Tukey, et pour la comparaison de l’ensemble des valeurs à une valeur de référence, au test de Dunett. Ces tests impliquent des calculs particulièrement lourds, qui ont été réalisés avec le logiciel de statistiques Minitab (Voir Annexe I pour des exemples de tests de Tukey dans le cas d’une analyse de la variance à deux facteurs). Par exemple, dans le cas d’une comparaison avec le contrôle BILN, les quelques composés qui ne sont pas significativement différents de BILN seront ceux qui présentent un pouvoir inhibiteur élevé.