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Selon l’approche développée, les conditions Eh-pH favorables à la précipitation des interstratifiés lithiophorite/asbolane correspondent aux zones de recouvrement des domaines de précipitation de la lithiophorite et de l’absolane. Or, sur la figure 30, un tel recouvrement n’apparaît qu’à partir de concentrations en ions Mn2+, Al3+, Ni2+ et Co2+ en solution égales à 10-4 mol/L. En l’absence de données sur la chimie des eaux qui percolent au travers des massifs de péridotites de Nouvelle-Calédonie, le caractère réaliste de telles concentrations est difficile à apprécier. Néanmoins, une comparaison avec les concentrations moyennes en ions Mn2+, Al3+, Ni2+ et Co2+ mesurées dans la fraction dissoute des rivières qui drainent le massif du Koniambo ([Al3+] ≈ 10-6 mol/L, [Mn2+] ≈ 5.10-7 mol/L, [Ni2+] ≈ 2.10-7 mol/L et [Co2+] ≈ 7.10-8 mol/L ; Juillot et al., 2017) suggère qu’il est peu probable que les concentrations des fluides à l’origine des oxydes de manganèse aient pu atteindre des valeurs de l’ordre de 10-4 mol/L dans un contexte d’altération supergène associé à des eaux météoriques.

Cependant, la description des interstratifiés asbolane/lithiophorite, dans le cadre de ce travail, mais également dans le cadre des études antérieures menées en Nouvelle- Calédonie (Llorca & Monchoux, 1991; Llorca, 1993), indique qu’à une période de l’histoire géologique de la Nouvelle-Calédonie les propriétés physico-chimiques de ces fluides ont dû être favorables à la précipitation de ces assemblages.

Afin de tester plus finement l’influence de la concentration en ions Al3+, Ni2+ et Co2+ en solution sur le chevauchement éventuel des domaines de précipitation de la lithiophorite et de l’absolane, tout en restant réaliste quant aux concentrations dans les fluides, une nouvelle série de calculs a été réalisée pour des gammes de concentrations comprises entre 10-7 et 10-5 mol/L.

Les résultats de cette nouvelle série de calculs sont présentés en figures 31, 32 et 33. Le domaine de stabilité de MnO2 n’évoluant pas de manière significative pour une concentration en ions Mn2+ en solution comprise entre 10-7 et 10-5 mol/L, le diagramme de Pourbaix du manganèse n’a pas été représenté de manière à ne pas surcharger les figures.

Sur ces figures, il apparaît que les domaines de précipitation de la lithiophorite et de l’absolane ne se chevauchent jamais pour une concentration en ions Al3+ en solution de 10-7 mol/L, et ceci quelles que soient les concentrations en ions Ni2+ et Co2+ en solution (Fig. 31). A l’inverse, lorsque la concentration en ions Al3+ en solution atteint une valeur de 10-5 mol/L, les domaines de précipitation de la lithiophorite et de l’absolane se chevauchent quelles que soient les concentrations en ions Ni2+ et Co2+ en solution (Fig. 33).

Bien que l’aluminium apparaisse comme l’élément le plus abondant dans la fraction dissoute des eaux qui drainent le massif du Koniambo, la concentration moyenne mesurée en solution pour cet élément est plutôt de l’ordre de 10-6 mol/L. Pour cette concentration en ions Al3+ en solution, le chevauchement entre les domaines de précipitation de la lithiophorite et de l’absolane n’apparaît que lorsque les concentrations en ions Ni2+ et Co2+ en solution atteignent 10-5 mol/L (Fig. 32), soient des valeurs significativement plus élevées que celles mesurées dans la fraction dissoute des rivières qui drainent le massif du Koniambo ([Ni2+] ≈ 2.10-7 mol/L et [Co2+] ≈ 7.10-8 mol/L).

Figure 32 : Superposition des diagrammes de Pourbaix (Patm, 25°C) illustrant les zones de recouvrement éventuel des domaines de stabilité de Al(OH)3, Ni(OH)2 et Co(OH)2 (feuillets élémentaires des interstratifiés asbolane/lithiophorite du site de Goro) pour différentes concentrations en ions Ni2+ et Co2+ en solution ([Al3+] = 10-7 mol/L). Pour des raisons de clarté, le diagramme de Pourbaix de MnO2 n’est pas représenté.

Ces résultats indiquent donc que des conditions Eh/pH favorables à la précipitation des interstratifiés lithiophorite/asbolane peuvent être rencontrées en contexte supergène (25°C) dans deux cas de figures. D’une part, si les concentrations en ions Al3+ en solution (≈ 10-6 mol/L) correspondent à celles mesurées actuellement dans les eaux des rivières qui drainent les massifs de péridotites, à condition que les concentrations en ions Ni2+ et Co2+ en solution soient supérieures à 10-6 mol/L, et donc significativement plus élevées que celles mesurées actuellement dans les eaux de ces rivières ([Ni2+] ≈ 2.10-7 mol/L et [Co2+] ≈ 7.10- 8 mol/L). D’autre part, si les concentrations en ions Ni2+ en solution (≈ 10-7 mol/L) correspondent à celles mesurées actuellement dans les eaux des rivières qui drainent les massifs de péridotites, à condition que les concentrations en ions Al3+ soient supérieures à

10-5 mol/L, et donc plus élevées que celles actuellement mesurées dans les eaux de ces rivières ([Al3+] ≈ 10-6 mol/L) et que les concentrations en ions Co2+ en solution soient supérieures à 10-5 mol/L, et donc beaucoup plus élevées que celles actuellement mesurées dans les eaux de ces rivières ([Co2+] ≈ 7.10-8 mol/L).

Figure 33 : Superposition des diagrammes de Pourbaix (Patm, 25°C) illustrant les zones de recouvrement éventuel des domaines de stabilité de Al(OH)3, Ni(OH)2 et Co(OH)2 (feuillets élémentaires des interstratifiés asbolane/lithiophorite du site de Goro) pour différentes concentrations en ions Ni2+ et Co2+ en solution ([Al3+] = 10-6 mol/L). Pour des raisons de clarté, le diagramme de Pourbaix de MnO2 n’est pas représenté.

Figure 34 : Superposition des diagrammes de Pourbaix (Patm, 25°C) illustrant les zones de recouvrement éventuel des domaines de stabilité de Al(OH)3, Ni(OH)2 et Co(OH)2 (feuillets élémentaires des interstratifiés asbolane/lithiophorite du site de Goro) pour différentes concentrations en ions Ni2+ et Co2+ en solution ([Al3+] = 10-5 mol/L). Pour des raisons de clarté, le diagramme de Pourbaix de MnO2 n’est pas représenté.

Quelle que soit l’option retenue, les conditions Eh/pH favorables à la précipitation des interstratifiés lithiophorite/asbolane en condition supergène (25°C) apparaissent peu étendues (sur deux unités pH pour des concentrations en ions Al3+, Ni2+ et Co2+ égales à 10-5 mol/L; Fig. 33) et restreintes à des pH basiques (supérieurs à 8,8).

Comme évoqué précédemment, les pH basiques étant associés aux niveaux les moins matures dans les profils d’altération, ces observations suggèrent donc qu’en contexte d’altération supergène, les interstratifiés asbolane/lithiophorite pourraient avoir précipité assez précocement dans un profil peu développé (interface saprolite/latérite ou saprolite).

d.

Influence de la température sur le domaine de stabilité des