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3. Présence phénicienne : Analyse des données archéologiques

3.1. Données archéologiques à Al Mina

3.1.3. Céramique

Dans la région, la céramique qui date du début de l’âge du fer est caractérisée par sa bonne qualité par rapport à celle fabriquée pendant l’âge du bronze. Les artisans du premier âge du fer ont amélioré la qualité de la céramique du Bronze récent. Ils traitaient soigneusement la surface et la polissaient à l’aide d’une astèque, mais ils ne l’enduisaient que rarement d’un engobe. La surface peinte était presque toujours monochrome de couleur rouge mat et, plus rarement, noire. Les formes de céramique les plus présentes sur les principaux sites de la Syrie du Nord (Ras Ibn Hani, Tell Soukas, et Ras el Bassit) sont les jarres à col étroit et à corps biconique, les cratères carénés à anses verticales, les cratères à épaule accentuée et les bols à lèvre simple et à base annulaire57.

L’analyse de la céramique trouvée dans les différents niveaux du site d’Al Mina montre que l’importation de céramique grecque est restée dominante. M. Robertson58, qui a supervisé l’analyse des fragments de céramiques provenant de différents niveaux, a publié ses résultats en 1940 dans un article qui précise que

56Riis, P.J., Sukas I, Idem, p.163, Fig. 59.

57 Venturi, F. "Le premier Âge du Fer à Tell Afis et en Syrie septentrionale", Ancient Near Eastern

Studies, Supp.7,2000, p. 505 -536, p. 516.

58 Robertson, M. "The Excavations at Al-Mina, Sueidia IV. The Early Greek Vases", dans JHS, 60,

les fragments trouvés sont de caractère grec. Des analyses récentes59 pratiquées sur une douzaine de fragments de poteries à demi-cercles pendants sécants, confirment une origine eubéenne pour la plupart d’entre eux, mais certaines pourraient provenir des Cyclades (Figure 13, Figure 14 et Figure 15).

Lorsque les opérations du port ont été suspendues pour des raisons politiques autour de 550 av. J.C (un seuil de trente ans après 550 av. J.C). L’importation de céramique grecque dans la région n’a pourtant pas cessé. On trouve en effet des céramiques grecques de cette période sur le site de Sabouni et sur les autres sites nord-syriens. Celles-ci ont été importées via Posidéion (Ras el Bassit) qui représentait le port d’importation naturel le plus actif60.

L’article de Josette Elayi61 nous fournit des informations et de précieux arguments en faveur de l’identité phénicienne d’Al Mina. Elayi se fonde sur les céramiques trouvées par Woolley dans les différents niveaux du site. Son premier argument porte sur les bâtiments découverts au niveau III, généralement considéré comme étant représentatif de la marchandise vendue au moment où le niveau a été incendié (en 375 av. J.C).

On constate qu’un seul bâtiment (H), sur les seize fouillés par Woolley, contenait des produits grecs62 (Figure 16 et Figure 17). Trois des bâtiments ne contenaient que des produits locaux et sept bâtiments contenaient des produits majoritairement locaux63. Elayi en déduit l’existence d’une boutique contenant des produits grecs (nommément le bâtiment H) : «Le bâtiment H aurait donc pu appartenir à un commerçant grec, car il est peu probable que des marchands grecs soient venus à Al Mina vendre des produits locaux»64.

59 Jones, R.E. "Greek and Cypriot pottery", A Review of Scientific Studies, Athènes,1986, p.690-698. 60 Woolley, L., A forgotten kingdom, Idem, p.184.

61 Elayi, J. "Al Mina sur l'Oronte à l'Epoque Perse", dans Phoenicia and The East Mediterranean in

the First Millennium BC, Lipinski, Leuven, Studia Phoenicia V, 1987, p. 249-266.

62 Woolley, L., The Excavations at Al-Mina, Sweidia I, Idem, p. 142. 63 Idem, p.140-143.

Elle considère également que la découverte de tétradrachmes athéniennes ne prouve aucunement la présence grecque sur le site ; ceux-ci étaient utilisés comme monnaie-marchandise et traités comme des pièces de métal précieux.

En ce qui concerne les vases trouvés aux niveaux IV et III d’Al Mina, nous remarquons que les vases de fabrication locale sont beaucoup plus nombreux que les vases grecs importés65. Elayi constate que les types de vases sont identiques à ceux qui ont été exhumés des autres sites phéniciens de la région : ce sont des « jarres torpilles ou à anse en bretelles »66. La découverte de vases locaux imitant les oenochoés Grecs ne peut être simplement interprétée comme l’emprunt d’un usage grec par les Phéniciens.

D’autres formes de poteries trouvées en Al Mina, des poteries ayant des formes communes en Phénicie à l’Âge du Fer II, ainsi que les bols de couleur rouge-orange, légèrement polis, ont été trouvés sur plusieurs autres sites phéniciens, notamment à Tell Soukas (voir paragraphe 3.3.3, Soukas)67.

Al Mina et Ras el Bassit représentaient d’importants centres de production et de distribution de la céramique aux VIIIe et VIIe siècles av. J.C. et ce pour toute la Phénicie ainsi que pour les régions voisines. De nombreuses découvertes remontent à cette période : la céramique phénicienne de type « Red Slip », découverte à Al Mina aux niveaux VIII–VI, les cruches phéniciennes à embouchure trilobée trouvées aux niveaux VII-VI (Figure 18) ainsi que certaines cruches globulaires (Figure 19), dont des exemplaires ont aussi été trouvés à Tyr68, à Sarepta et à Chypre69.

65 Woolley, L, The Excavations at Al-Mina, Sweidia I, Idem, p. 137-168. 66 Elayi, J. "Al Mina sur l'Oronte à l'Epoque Perse", Idem, p.259.

67 Bonatz, D, "Some Considerations on The Material Culture of Coastal Syria in The Iron Age",

Egitto E Vicino Oriente, XVI, 1993, p. 136.

68 Bikai, P, M. The Pottery of Tyre, Wilts, England , Aris & Philips Ltd., Warminister, p. 53-76.36,

type J7.

69 Anderson, W. Sepetra I, The late Bronze and Iron Age Strata of Area II, Y, Beyrouth,

La découverte de plats en forme de poisson70 à Al Mina et à Ras el Bassit, dans la même période du VIIe av. J.C. prouve que les deux sites ont connu les mêmes étapes de développement71.

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