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4.3 MUC5B et pathologies respiratoires

4.3.3 Bronchopneumopathie chronique obstructive

4.3.3.1 Chez l'Homme

La bronchopneumopathie chronique obstructive (BPCO) est l'une des causes principales de décès dans le monde. La BPCO est une maladie progressive, caractérisée par la limitation permanente des flux d'air et associée à un état inflammatoire. Elle apparaît après une exposition chronique à des composés nocifs de l'environnement (tabac et/ou gaz et particules), mais des facteurs génétiques prédisposent certaines populations à la BPCO. Les deux phénotypes principaux de la BPCO sont la bronchite chronique (BC) et l'emphysème. La BC est définie par la production d'expectorations et une toux pendant au moins trois mois pendant deux années consécutives. L'emphysème est défini comme étant la destruction des alvéoles. La BC est le principal phénotype mais la majorité des patients ont des symptômes des deux phénotypes. Les manifestations cliniques de la BC sont similaires aux symptômes pulmonaires précoces observés dans la mucoviscidose (production d'expectorations, transport de mucus anormal et inflammation chronique). L'exposition chronique au tabac induit une déshydratation de mucus des voies aériennes, notamment en agissant sur la protéine CFTR (Figure 28) (Ghosh et al., 2015).

Figure 28 : Représentation schématique de l'action de la fumée de cigarette sur la protéine CFTR induisant une déshydratation du mucus pulmonaire dans la bronchopneumopathie chronique obstructive.

L'exposition des voies respiratoires à la fumée de cigarette entraîne une relocalisation du canal membranaire CFTR dans l'agrésome et une libération de Ca2+ par le lysosome qui conduisent à augmenter l'absorption du Na+ à travers le canal ENaC et à diminuer l'épaisseur du mucus. Adapté de (Ghosh et al., 2015).

Cette déshydratation du mucus est renforcée par l'hypersécrétion de mucines. Dans la BC, il a été montré une hypertrophie des glandes de la sous-muqueuse et une hyperplasie/métaplasie des cellules à mucus dans les petites voies aériennes. Cette hypersécrétion de mucines conduit à la formation de bouchons composés à environ 7 % de solides (Ghosh et al., 2015). MUC5AC et MUC5B sont les principales mucines gélifiantes dans les crachats de patients atteints de BPCO, avec une prédominance de MUC5B. De plus, il a été montré que la concentration en MUC5B est corrélée à de plus mauvaises fonctions pulmonaires (Kirkham et al., 2008). Comme une augmentation de MUC5AC et une diminution de MUC5B dans les cellules épithéliales des voies respiratoires de patients atteints de BPCO avaient été montré précédemment (Caramori et al., 2004; Innes et al., 2006; O’Donnell et al., 2004), il a été suggéré que plus la sévérité de la maladie augmente, plus les sécrétions des glandes de la sous-muqueuse, et plus particulièrement MUC5B, contribuent à la composition du gel de mucus (Kirkham et al., 2008). Une augmentation de l'expression de MUC5AC dans les glandes de la sous-muqueuse chez les patients atteints de BPCO a été montrée en plus de l'augmentation de l'expression de MUC5AC dans les cellules épithéliales des bronches. De plus, l'augmentation de MUC5AC dans les cellules épithéliales bronchiques est corrélée au nombre de cigarettes fumées par an chez les fumeurs atteints ou non de BPCO (Caramori et al., 2009).

Chez des patients atteints de BPCO, au début d'une exacerbation aiguë, il a été montré, qu'en plus d'une augmentation de l'expression des mucines (MUC5AC et MUC5B), il y a une diminution des protéases, une augmentation des anti-protéases et une augmentation de la stabilité des mucines. Le niveau d'expression augmenté de MUC5AC observé en début d'exacerbation reste trois fois plus élevé que chez les sujets sains, six semaines après le début de l'exacerbation, alors que le niveau d'expression de MUC5B revient à la normale (Chillappagari et al., 2015).

4.3.3.2 Chez la souris

Le principal facteur de risque de développer une BPCO étant le tabac, différents modèles murins de BPCO ont été mis en place par exposition de souris à

la fumée de cigarette. Chez des souris exposées à la fumée de deux cigarettes sans filtre, six jours par semaine, pendant six mois, il a été observé le développement d'un emphysème (dilatation et destruction des parois alvéolaires) ainsi que le recrutement de cellules inflammatoires (Hautamaki et al., 1997). Ce modèle a ensuite été optimisé pour réduire sa durée en utilisant un condensat de fumée de cigarette plutôt qu'une exposition directe à la fumée de cigarette ou en combinant une exposition à la fumée de cigarette avec une infection. Ainsi, l'instillation intranasale d'un condensat de fumée de cigarette, une fois par jour, pendant 40 jours, induit une inflammation pulmonaire et des changements cellulaires caractéristiques de ceux observés chez des patients atteints de BPCO (augmentation de la résistance pulmonaire suite à un challenge à la métacholine et augmentation de la concentration en Muc5ac) (Miller et al., 2002). Chez des souris infectées intranasalement par la bactérie Haemophilus

influenzae inactivée, la fumée de cigarette induit une augmentation de l'expression

de Muc5ac et Muc5b, alors que l'infection seule n'induit l'augmentation que de Muc5ac (Ganesan et al., 2014).

Le modèle murin couramment utilisé pour étudier l'obstruction des voies respiratoires par du mucus est la souris transgénique sur-exprimant βEnaC spécifiquement dans le poumon (souris βENaC-Tg) (Mall et al., 2004). Cette lignée murine présente un déséquilibre de l'absorption du Na+ et de la sécrétion de Cl, une déshydratation de la surface des voies respiratoires et le développement spontané d'une maladie pulmonaire obstructive caractérisée par une obstruction des voies respiratoires par du mucus, une inflammation neutrophilique et le développement précoce d'un emphysème (Mall et al., 2004, 2008). Grâce aux souris βENaC-Tg, il a été montré que la déshydratation de la surface des voies respiratoires aggrave l'inflammation, la sur-expression des mucines (Muc5ac et Muc5b) et la destruction des parois des alvéoles induites par inhalation de fumée de cigarette, et accélère la formation de follicules lymphoïdes pulmonaires. Par contre, l'exposition à la fumée de cigarette n'induit pas de remodelage des parois des voies respiratoires ni la métaplasie des cellules à mucus chez les souris βENaC-Tg (Seys et al., 2015).