• Aucun résultat trouvé

I. La mucoviscidose

2. Le canal CFTR

2.5. Biologie cellulaire du CFTR

La synthèse de la protéine CFTR se réalise en 3 étapes. La première (1) consiste en la transcription du gène CFTR en ARNm, suivie de (2) l’épissage de ce dernier. La dernière étape (3) correspond à la traduction de l’ARNm épissé en protéine.

La traduction a lieu au niveau des polysomes. La séquence N-terminale du CFTR est une séquence hydrophobe linéaire nommée peptide signal. Elle permet l’ancrage du complexe ARNm / ribosome au réticulum endoplasmique (RE) via le SRP (Signal Recognition Particle). La translocation du CFTR est initiée dans la lumière du RE suivie par l’orientation des boucles cytoplasmiques et par l’insertion des segments transmembranaires dans la bicouche lipidique du RE (Sadlish et Skach 2004).

D’après l’étude menée par Chen et ses collaborateurs en 2000, le repliement du CFTR serait co-traductionnelle. Le domaine N-terminal acquerrait une activité fonctionnelle alors que le domaine C-terminal serait en cours de formation (Eva Y.-J. Chen, Bartlett, et David M. Clarke 2000). D’autres études sont en faveur d’un repliement post-traductionnel (Eva Y Chen et al. 2004; Du, Manu Sharma, et Gergely L Lukacs 2005). Une fois correctement repliée, la protéine CFTR acquière la conformation de ″protéine canal″ suite à des modifications post-traductionnelles et pourra ainsi quitter le RE. Le RE contient des protéines chaperonnes capable de reconnaître des protéines naissantes et permettent ainsi d’assurer un repliement approprié. Seule la calnexine est connue pour interagir avec la protéine CFTR naissante (Pind, J R Riordan, et D B Williams 1994).

2.5.2. Maturation du CFTR

Dans le RE, un oligosaccharide est greffé à la chaine polypeptidique naissante au niveau de la 4ème

boucle extracellulaire de CFTR. Cette addition co-traductionnelle est appelée N-glycosylation. La protéine monoglycosylée, nommée "core glycosylé", est reconnue par la calnexine qui favorise son repliement. Une fois que la protéine a atteint un certain degré de repliement, le CFTR se sépare alors de la calnexine et est apte à être transporté vers l’appareil de Golgi (Amaral 2005) (Figure 5).

La maturation de la protéine CFTR a lieu dans les compartiments du Golgi. Elle se traduit par une augmentation de la masse moléculaire de CFTR de 20 kDa, due aux modifications enzymatiques réalisées dans l’appareil de Golgi et consistant en la maturation des glycannes N-liés, lui donnant ainsi sa forme hautement glycosylée. La protéine CFTR mature, appelée complexe-glycosylé, est ensuite dirigée vers la membrane plasmique par des vésicules. Une fois délivrée à la membrane, la protéine

canal est rapidement internalisée en une réserve subapicale de protéines qui pourra être recyclée ou envoyée vers la voie de dégradation lysosomale.

Durant sa biosynthèse, la protéine CFTR existe au moins sous quatre formes de glycosylation différentes (S H Cheng et al. 1990; Ward et Kopito 1994) qui sont nommées : forme A, forme B, forme B’ et forme C (Tableau 2).

La maturation de la protéine CFTR est peu efficace. Seulement 20 à 50 % des précurseurs nouvellement synthétisés seront transformés en molécules matures. Le faible taux de maturation du CFTR n’est pas une caractéristique des transporteurs ABC car certains atteignent un degré de maturation de près de 100 %.

2.5.3. Trafic intracellulaire de la protéine CFTR

La protéine CFTR est transportée jusqu’à la membrane apicale des cellules épithéliales ou elle assurera sa fonction de protéine-canal à chlorure. Son transport reste cependant mal connu. La protéine se localise dans de nombreux compartiments : RE, Golgi, endosomes et lysosomes (Bertrand et Raymond A Frizzell 2003) (Figure 6).

2.5.3.1. Compartiment intermédiaire entre le RE et l’appareil de Golgi (ERGIC)

La protéine CFTR est exportée du RE dans des vésicules COPII (Coat Protein II) qui bourgeonnent depuis le RE (Xiaodong Wang et al. 2004). Les vésicules COPII sont constituées de protéines recouvrantes Sec23p/Sec24p ; Sec13p/Sec31p et la GTPase Sar 1 (Kuehn et Schekman 1997). Une fois leur manteau protéique éliminé, ces vésicules fusionnent avec le complexe tubulo-vésiculaire ERGIC situé du côté cis du Golgi (Aridor et al. 1995).

La protéine CFTR possède un signal d’export du RE lui permettant d’emprunter cette voie de transport. Il s’agit des acides aminés D565 et D567 exposés à la surface du domaine NBD1. Une mutation au niveau de ces acides aminés résulte en la rétention du CFTR dans le RE (Xiaodong Wang et al. 2004).

Deux voies d’adressage sont proposées pour la voie de sécrétion de la protéine CFTR suivant son export via les vésicules COPII (Jin-San Yoo et al. 2002).

La voie conventionnelle de transport du CFTR à travers l’appareil de Golgi consiste en un transport progressif de la protéine des compartiments cis vers le trans Golgi concomitant avec la maturation des

Tableau 2 : Formes de glycosylation de la protéine CFTR au cours de sa maturation.

Figure 5 : Illustration du processus de biosynthèse et de maturation du CFTR.

D’après (Amaral 2005)

Formes du CFTR Etat de glycosylation Poids moléculaire

Forme A Précurseur non glycosylé 130 kDa

Forme B Forme immature dite ″core-glycosylé″ 140 kDa

Forme B’ Forme maturée de la forme B dans le Golgi (30%) 140 kDa

transport aux endosomes précoces serait nécessaire à la maturation des oligosaccharides dans le compartiment cis-golgien (Okiyoneda et al. 2004). Cette voie est en accord avec la faible proportion de CFTR dans l’appareil de Golgi.

2.5.3.2. Transport du CFTR de l’appareil de Golgi vers la membrane plasmique

Le mécanisme de transport de la protéine à la membrane plasmique des cellules est peu connu. Il est admis que des interactions protéine-protéine sont impliquées dans le trafic intracellulaire du CFTR. Il s’agit en particulier d’interactions entre la partie C-terminale du CFTR via la séquence DTRL et des

protéines à domaines PDZ NHE-RF1 (Na+-H+ Exchange Regulatory Factor) et CAL (CFTR

Associated Ligand). L’interaction CFTR/NHE-RF1 favorise l’adressage du canal à la membrane plasmique contrairement à l’interaction CFTR/CAL qui favorise la séquestration de la protéine CFTR dans la cellule (Jie Cheng, Hua Wang, et William B Guggino 2004). D’autres études démontrent qu’en absence de la séquence DTRL au niveau de la partie C-terminale de CFTR, les protéines NHE-RF1 et CFTR se dissocient sans incidence sur la localisation à la membrane apicale du CFTR sur sa stabilité et son activité canal à ions chlorure (Mohamed Benharouga et al. 2003; Ostedgaard et al. 2003). D’autres signaux seraient donc impliqués dans le trafic du CFTR de l’appareil de Golgi à la membrane plasmique.

2.5.4. Endocytose, recyclage du CFTR et voies de dégradation

Après avoir atteint la membrane plasmique, la protéine CFTR est rapidement internalisée (Prince, Workman, et Marchase 1994; Bertrand et Raymond A Frizzell 2003). Cette internalisation est médiée par des vésicules à manteau de clathrine qui vont adresser les protéines aux endosomes (G L Lukacs et al. 1997).

Les motifs di-leucine et tyrosine présents au niveau des domaines N et C terminaux du CFTR constituent le signal d’endocytose (Prince et al. 1999; W Hu, Howard, et G L Lukacs 2001). La protéine CFTR forme un complexe avec la myosine VI et la protéine adaptatrice Disabled 2 (Dab2) (Swiatecka-Urban et al. 2002) puis est ensuite recrutée au sein de ces vésicules. Ce mécanisme permet de réguler le nombre de canaux CFTR présents à la surface apicale des cellules épithéliales.

L’internalisation de CFTR est réalisée via l’interaction entre des protéines adaptatrices spécifiques de la membrane plasmique telles que les complexes AP-1 et AP-2 (Adaptator Protein) et des séquences spécifiques présentes aux extrémités de CFTR (N A Bradbury et al. 1994). AP-1 participe au transport

Figure 6 : Modèle représentant le trafic intracellulaire du CFTR.

(i) la protéine CFTR est transportée du RE à l’appareil de Golgi, les protéines mal conformées seront dégradées par le protéasome (v), une fois maturée dans le Golgi la protéine CFTR sera transportée jusqu’à la membrane plasmique ; (ii) le CFTR est internalisé dans des vésicules à manteau de clathrine puis est recyclé à la membrane directement ou via la voie des endosomes (iii). Une partie du CFTR est adressée aux endosomes tardifs (iv). D’après (Ameen, Silvis, et Neil A Bradbury 2007)

L’internalisation de CFTR est perturbée par inhibition de l’interaction AP-2/CFTR ou si le site de fixation de CFTR à la myosine VI est masqué (N A Bradbury et al. 1994; Jie Cheng, Hua Wang, et William B Guggino 2004; Gentzsch et al. 2004). Les protéines présentes dans ces vésicules sont recyclées à la membrane ou adressées à la voie de dégradation via les endosomes tardifs et/ou les lysosomes. Les protéines qui sont recyclées sont transportées vers le compartiment des endosomes de recyclage (Mukherjee, Ghosh, et Maxfield 1997). Il a été démontré que CFTR entre dans ce compartiment et est recyclé à la membrane plasmique (Picciano et al. 2003). Ce phénomène est indispensable pour pallier à l’internalisation constitutive et l’augmentation de la présence de CFTR à la membrane (Manu Sharma et al. 2004).

Documents relatifs