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Le biographique et la formation des enseignants de langues : vers l’émergence d’une posture de

« praticien réflexif »

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?

Bruno Girardeau, Emmanuelle Huver Centre international d’Etudes pédagogiques de Sèvres Université François Rabelais, EA 4246 DYNADIV Résumé

Cet article explore les modalités d’émergence, de construction et d’appropriation d’une posture réflexive par une étudiante / apprentie-enseignante de langue, dans le cadre du dispositif d’accompagnement à la professionnalisation par la pratique réflexive (dit « dispositif portfolio ») mis en œuvre dans le Master 1 APPRODIV de l’Université François Rabelais de Tours. Ce dispositif invite les (apprentis-)enseignants à réfléchir leur agir professionnel en articulant la dimension biographique d’un portfolio individuel et la confrontation à l’interprétation d’autrui lors de séances collectives de réflexion. L’analyse qualitative et interprétative de l’étude de cas présentée met à jour la manière singulière dont cette étudiante se construit une posture réflexive, de manière progressive, mais aussi, diffuse, mobile, non permanente et liée à la subjectivité des interprétations des différents acteurs en présence.

Mots clés

approches biographiques / dispositif de formation / professionnalisation / réflexivité / altérité

Introduction

Depuis que l'Université a engagé une formation diplômante en

« Didactique du français langue étrangère » en 1984, la forme et le sens de cette formation ont nettement évolué d’une approche technico-pédagogique, centrée sur les outils et le « comment faire » (Carré et Caspar 2004, notamment les chapitres 17 et 19), vers une approche à la fois socioconstructiviste et réflexive (Vygotsky 1985, Piaget 1967,

1 Schön (1994)

Perrenoud 2004), puisque l’apprenti-enseignant, mis au centre du dispositif, est, et/ou est accompagné à être, acteur de sa formation. En partant de l'idée que la connaissance est « liée à une action qui modifie l'objet et qui ne l'atteint donc qu'à travers les transformations introduites par cette action » (J. Piaget, 1967), on lui demande en effet entre autres, de prendre son action comme objet de sa réflexion, pour qu’il « cherche à comprendre comment il s'y prend, et parfois pourquoi il fait ce qu'il fait, éventuellement contre son gré » (Perrenoud 2004, s.p.), autrement dit, pour qu’il prenne conscience de ce qu’il sait déjà faire et de la manière dont il utilise ce savoir (Schön 1996).

Dans cet article, qui a pour cadre le Master 1 APPRODIV1 proposé à l’Université François Rabelais de Tours, nous nous interrogerons sur les modalités d’émergence et d’appropriation d’une posture réflexive par une étudiante / apprentie-enseignante en montrant en quoi le dispositif proposé lui a permis de se construire une posture professionnelle réflexive en se distançant d’une attitude jusque là restée très scolaire.

Dans un premier temps, nous décrirons le dispositif mis en place par l’équipe pédagogique pour favoriser ce type de posture et les principes épistémologiques qui le fondent, puis, nous exposerons brièvement la constitution de notre corpus, et enfin, nous décrirons les pratiques discursives de cette étudiante, pour dessiner les contours de son parcours d’appropriation d’une posture de praticienne réflexive.

Démarche de construction et d’analyse d'un dispositif.

Un outil déclencheur : le portfolio pour la formation des enseignants

Le M1 APPRODIV est une formation universitaire professionnalisante d’enseignants de langues, et plus particulièrement d’enseignants de français langue étrangère/seconde. Les étudiants qui suivent cette formation se trouvent au cœur d'un curriculum qui articule de manière forte les trois pôles qui fondent une formation professionnelle universitaire, à savoir : la formation universitaire, les

1 Appropriation du français et diversité

pratiques professionnelles et la professionnalisation. La perspective adoptée est résolument réflexive et vise, entre autres à partir de la mise en lien constante entre « savoirs d’expérience » et « savoirs savants » (Schön 1996), la construction par les étudiants d’une compétence et d’une identité professionnelles qui leur permet :

- d’interroger leurs savoirs, leurs faire et leurs savoir-être pour les contextualiser et les adapter à la diversité et à la singularité des situations d'enseignement / apprentissage auxquelles ils seront confrontés ;

- de clarifier, enrichir et diversifier leur répertoire didactique (Cadet L. et Causa M. 2005) ;

- de faire émerger le sens et le rôle de leur action ;

- de s’inscrire dans une démarche de formation continue tout au long de leur parcours professionnel.

Outre le fait que cette posture réflexive est développée de manière transversale dans la formation, il nous2 a semblé nécessaire d’inciter, d’encourager, de former les étudiants à ce travail de mise en lien entre ces différents pôles. Or, « il ne suffit pas de prendre du temps pour une démarche réflexive ; un outillage est nécessaire » (Paquay et Sirota 2001 : 11). Par conséquent, pour accompagner ce processus d’émergence d’une posture de « praticien réflexif » (Schön 1994), nous nous sommes inspirés des travaux sur les biographies en formation pour proposer aux étudiants d’élaborer un portfolio, conçu comme un « moyen de reconnaissance et de valorisation des parcours d'appropriation et support de réflexions » (Castellotti 2006 : 18-19)3.

2 Ce nous est très polyphonique : s’il réfère aux deux auteurs de l’article, notamment dans les deuxième et troisième parties, il réfère dans cette première partie à l’ensemble de l’équipe pédagogique du M1, qui a pensé et fait vivre ce dispositif de manière collaborative.

3 Ce portfolio était destiné à l'origine aux apprenants en langues, afin d'éclairer et de développer leur compétence plurilingue et pluriculturelle (Coste, Moore et Zarate 1998). Puis, à partir de 2005, le CELV (Centre Européen des Langues Vivantes, Graz) a réfléchi à l’élaboration d’un portfolio pour la formation des enseignants de langues, paru en 2007 (Newby et al. 2007). Pour notre part, nous avons essentiellement retenu la dimension formative du portfolio, plus que son utilisation à

L'expérience menée pendant cette année universitaire 2006-2007 repose sur l'idée que le portfolio, enrichi par un dispositif d’accompagnement, peut être un témoin continu et dynamique de la formation de la personne, ainsi qu’un outil d'aide ou d'accompagnement à une pratique réflexive, dans la mesure où il incite les étudiants à l'auto-observation, à la réflexion et à la confrontation à l’altérité pour la mise à distance et la mise en sens de leur action.

Description du « dispositif d'accompagnement au portfolio »

Dans une première étape, les étudiants de M1 ont été invités à élaborer un portfolio, conçu comme un outil personnel et individuel, évolutif et en devenir, destiné à :

« recueillir des informations sur ses croyances, ses connaissances, ses habiletés et ses compétences afin de prendre conscience de son cheminement, de systématiser ses démarches de réflexion, pour développer une plus grande conscience de sa pratique, de l’analyser et de prendre des décisions menant au développement professionnel et personnel. Il permet aussi d’accéder à une meilleure compréhension de ses idées et de ses pratiques. » (document de travail remis aux étudiants en septembre).

Deux séances ont été prévues au premier semestre, afin d’initier les étudiants, de les sensibiliser et de les soutenir dans l’élaboration de ce portfolio, dans la mesure où cette démarche reste difficilement formulable pour nombre d’entre eux, formés voire formatés par l'écrit scolaire.

Ce portfolio étant personnel et individuel, nous avons souhaité

des fins d’auto-évaluation, le travail proposé aux étudiants s’apparentant dans les faits à l’élaboration et à la synthèse d’un « carnet de routes professionnelles » (Girardeau et Huver 2008).

dans une deuxième étape penser une forme de diffusion de son contenu qui permette en même temps aux étudiants de continuer à s’inscrire dans un processus de formation et de professionnalisation.

Pour ce faire, nous avons pensé un dispositif tutoré d’exploitation comprenant une synthèse individuelle rédigée à partir d’éléments du portfolio, d’écrits intermédiaires et de séances de réflexions et d’échanges collectifs.

Ces ateliers de confrontation et de réflexion, composés de six étudiants chacun, et animés conjointement par un formateur et un enseignant-chercheur, correspondent à un « processus de redéploiement de (la) connaissance potentiellement contenue dans l'expérience » (Roelens 2003) qui ne fonctionne que dans l'interaction dialogique. Plutôt qu'une analyse de pratiques, ces ateliers favorisent en effet le récit de sa propre pratique et visent à interroger et mettre en lien de manière collégiale et collaborative les trois pôles de la formation professionnelle universitaire (cf. supra). Ils permettent également de passer d'un processus d’auto-observation à une explicitation / confrontation aux autres membres du groupe. En effet, nous partons du principe qu'il n'y a pas d' « auto- » (se former par soi), sans « inter- » (se former sur soi avec les autres), et que la réflexivité, en tant qu’« interaction entre action et pensée » (Dortier 2004, article Réflexivité), subjectivement déterminée à travers la verbalisation d'une expérience professionnelle, prend tout son sens (ressenti, signification et orientation à la fois) dans la confrontation intersubjective des expériences.

Par ailleurs, la rédaction de la synthèse, en tant que passage à un écrit « pour l’autre » (à savoir pour l’enseignant, mais aussi, éventuellement, pour le reste du groupe), permet à l’étudiant de prendre conscience de son action, de s'en mettre à distance pour l'éclairer, de la mettre en mots pour la mettre en sens.

Enfin, il importe de souligner que les deux aspects de ce dispositif, composés de phases écrites et orales, sont pensés de manière articulée : en effet, les étudiants doivent produire des écrits intermédiaires de leur synthèse entre les séances de réflexion / explicitation / confrontation ; ces écrits constituent ainsi des

ressources pour les moments de réflexion et de confrontation collectives, eux-mêmes destinés en retour à nourrir l’élaboration de la synthèse.

Séance de réflexion 1 : les contextes de stage / d’intervention professionnelle, amorce d’une problématisation

Écrit intermédiaire 1 : les contextes de stage / d’intervention professionnelle, difficultés / questionnements, problématisation

Séance de réflexion 2 : articulation expériences professionnelles - expériences individuelles – formation universitaire

Écrit intermédiaire 2 : contextes d’intervention professionnelle, problématisation, articulation expériences professionnelles - expériences individuelles – formation Séance de réflexion 3 : vers la professionnalisation

Ecrit final – synthèse : Lieu(x) d’intervention professionnelle et problématisation ; articulations construites entre expériences professionnelles, expériences individuelles et formation ; formation et professionnalisation

Ce dispositif (portfolio – écrits intermédiaires – confrontations – synthèse) constitue donc une réelle démarche praxéologique d’« alter-réflexivité » (De Robillard 2007b et 2008) qui permet à l'étudiant de co-construire l’articulation de ses pratiques professionnelles et de sa formation universitaire et donc de co-penser son agir et son identité professionnels comme nous tenterons de le montrer à partir de l’étude de cas qui suit.

Démarche d’analyse de ce dispositif : la posture réflexive du chercheur

L’analyse ci-dessous se fonde sur des enregistrements d’une partie des ateliers de confrontation, ainsi que sur les écrits intermédiaires produits par LA, notre témoin. Elle se fonde également sur des éléments plus informels, glanés tout au long de l’année, au contact continu des étudiants (discussions entre deux portes, échanges de courriels, etc.). Or, ces éléments, et plus largement notre connaissance – impliquée – du contexte d’intervention et des personnes qui y sont associées, s’ils ne sont pas « visibles », car non transcrits, participent pourtant pleinement de notre démarche d’analyse. C’est alors le statut du « corpus » qui est questionné, dans la mesure où nous avons délibérément choisi de l’étendre à l’ensemble de l’expérience de recherche-intervention, et non de le réduire à ses constituants attestés.

Par ailleurs, nous pensons que l’expérience humaine que représente la formation est inséparable de l’interprétation (Heller 2002) que nous faisons ensuite de notre « corpus », liée à une démarche qui repose résolument sur le rapport entre les subjectivités.

Dans ce sens, ce travail s’inscrit dans une perspective qualitative, compréhensive et impliquée : les écrits intermédiaires et les discours produits lors des ateliers de confrontation, qui entrecroisent, selon des modalités diversifiées, les dimensions biographique et réflexive, alimentent en partie, plus qu’ils ne fondent à eux seuls, le processus interprétatif. Par conséquent, ce type de démarche contextualisante et interprétative est à considérer comme la « [traduction] des interprétations (celles des témoins) sous la forme d’une autre interprétation (celle du chercheur). » (Blanchet 2007, p.274). Dès lors, ce sont l’identité et l’activité professionnelles du (praticien-)chercheur qui sont à redéfinir, en y intégrant, de manière renouvelée, la question, à la fois complexe et prometteuse, de l’implication (Molinié, ici-même).

L’étudiante citée ici a été choisie du fait que son parcours

académique et professionnel met en lumière une manière singulière et significative d’expliciter et par conséquent de faire émerger, ou non ou partiellement ou par moments, une posture réflexive par le biais du

« dispositif portfolio ».

Etude de cas : LA

Contextualisation, analyse, interprétation

LA est une étudiante en formation initiale : après l’obtention d’un diplôme de licence, elle s’est inscrite directement en M1. Elle effectue depuis octobre un stage à la SONACOTRA, qui constitue sa première expérience professionnelle en tant qu’enseignante. Ce stage l'engage pour un an à raison d'une heure et demie par semaine. Il a lieu dans les locaux de ce centre d'accueil pour demandeurs d'asile. LA s'occupe particulièrement des enfants et des pré-adolescents, d'âge, de nationalités et de niveau linguistique très différents. Certains sont déjà scolarisés depuis deux ans, d'autres sont en situation d'illettrisme. Son cours non obligatoire porte sur « des activités plus ludiques pour approcher le français sans passer par les devoirs et sans rester dans un cadre scolaire fixe »4.

Lors du premier atelier de confrontation et de réflexion5, elle exprime sa difficulté face à l’absentéisme, la non-motivation, voire l’impertinence dont font preuve ses élèves. Elle décrit les activités qui marchent, qui ne marchent pas, elle se demande pourquoi, sur un autre lieu de stage, plus institutionnel, les activités qu’elle propose marchent mieux, sans parvenir réellement à sortir de cette série de questions qui ne lui permettent pas de mettre du sens sur son agir, ni d’entendre les incitations – implicites ou explicites – des autres membres du groupe à élargir le cadre de son questionnement.

Suite à ce premier atelier, dont elle ressort un peu perplexe et

4 Extrait du 1er écrit intermédiaire de LA du 23 mars 2007 (désormais noté : LA – 23.03.07)

5 Conventions de transcription en annexe. Par ailleurs, nous avons choisi de transcrire les pratiques discursives des interactants au plus près de leurs pratiques effectives, dans la mesure où celles-ci constituent un indicateur de la construction de la pensée.

toujours aussi désorientée, elle formule un premier écrit intermédiaire qu’elle soumet à son formateur référent : cet écrit maladroitement structuré, qu'on pourrait assimiler à un brouillon, (« Mon rôle et mon stage n'est donc pas très bien défini et j'ai des difficultés à trouver. » LA – 23.03.07) dénote une urgence à coucher sur le papier ce sentiment de désarroi (« J'ai toujours peur avant d'y aller, peur d'être ridiculisée, nulle et d'échouer...J'ai une boule au ventre tous les mercredis. » LA – 23.03.07).

Lors du deuxième atelier de confrontation, elle adopte une attitude beaucoup plus impliquée : elle prend la parole spontanément et établit régulièrement et pertinemment des liens entre les documents déclencheurs proposés6, les expériences et réflexions des autres membres du groupe et les siennes.

Par ailleurs, elle se positionne par rapport à son premier écrit intermédiaire :

– tout d’abord pour le dévaloriser et ainsi signaler qu’elle a conscience du fait que ça n’est pas un écrit « académique » :

« LA : ben moi en fait, quand je me suis relue en fait, je me suis dit mais (elle se tape le front) mais j’ai envoyé ÇA, mais c’est pas possible, vraiment, je me suis dit, c’est… c’est c’est

B : c’est LA : ridicule B : ridicule ?

6 Lors de ce deuxième atelier, les étudiants ont été invités à réfléchir à la construction de leur propre professionnalité à partir d’extraits de la bande dessinée de M. Vidberg Journal d’un remplaçant (Vidberg 2007) : cette BD met en scène la première expérience d’enseignement d’un jeune professeur des écoles remplaçant.

Elle prend la forme d’un journal autobiographique mettant en scène, de manière à la fois humoristique et impertinente, différents moments de la vie d’un enseignant novice. Dans la mesure où ce récit met en scène, à sa façon, la construction d’une professionnalité, il nous a semblé opportun d’en sélectionner quelques extraits pour inviter les étudiants du M1 à faire des ponts avec leurs propres expériences.

LA : (…) mais euh c’était sous le coup de l’émotion en fait, vraiment » (séance collective du 3 avril 20077)

– ensuite pour modaliser ses propos en expliquant que cet écrit a constitué pour elle « une manière d’évacuer » et de prendre de la distance par rapport à son expérience :

« LA : j’suis passée par une période où je me disais où je m’étais dit euh c’est pas bien et je me suis dit voilà faut que j’arrête de dire que c’est ma faute que j’suis nulle quoi, passque j’me dis c’est pas VRAI le contexte il est difficile, c’que j’fais c’est toujours de changer de choses, d’apporter de nouveaux éléments donc à partir de là ben… » (SC 03.04.07)

– enfin pour reconnaitre la valeur de son écrit, qu’elle qualifie de déclencheur d’une nouvelle étape dans son parcours :

« R : c’est peut-être ton déclencheur. T’avais besoin p’têtre de ce déclencheur là pour à partir de là avancer.

(…)

LA : ouais j’pense. J’pense vraiment. » (SC 03.04.07) Cette nouvelle étape dans son parcours se manifeste par une prise de conscience du fait que son questionnement ne lui a pas permis d’évoluer et de trouver des solutions à ses difficultés :

« LA : mais c’est ça en fait, vraiment j’ai l’impression même en me relisant vraiment que je suis restée dans le même processus c’est-à-dire euh ça a marché ça a pas marché, ça a marché ça a pas marché, ça a marché ça a pas marché, je m’suis dit euh pfff faut arrêter quoi. » (SC 03.04.07)

7 Désormais notée « SC 03.04.07 »

Dès lors, elle opère un « tournant réflexif » :

- en créant du lien entre son expérience et les contenus de la formation :

« LA : moi ça m’a ouvert l’esprit sur beaucoup de choses par rapport à ma vision de l’enseignement et de l’école, que j’avais en fait, sans m’en rendre COMpte, d’être vraiment cloisonnée et plein de matières, petit bout par petit bout, rien que par exemple variation du français au premier semestre, ben oui, que qu’y avait différents français, qu’y avait différents PAYS qui parlent français, qu’y avait même rien que français oral, français écrit.

Passque on sait PAS en fait quand on arrive, si on avait eu, voilà, une classe (…) si on parlait éventuellement français plutôt oral, avec différents registres de langue, ben j’me s’rais dis oh non non non, nous on va essayer de leur apprendre le français stanDARD, quoi, quand même j’suis là pour ça. (rires) alors que bon maintenant du coup euh j’me dis au conTRAIRE, au conTRAIRE, c’est intéressant de voir les deux euh… ça m’a ouvert l’esprit j’pense » (SC 03.04.07)

« LA : tous les cours de sociolinguistique et d’alphabétisation qui m’ont un peu ouvert l’esprit en disant qu’y a un rapport délicat avec les langues » (SC 03.04.07)

en élargissant le cadre de sa réflexion, initialement centrée exclusivement sur les outils :

LA : « Eux savent pas qui j’suis non plus, i savent pas comment me voir. Moi c’est pas l’école et en même temps des fois c’qu’on fait ça ressemble un peu à l’école, des fois je donne des cours, je leur demande d’écrire au tableau, des fois on fait des jeux donc c’est drôle. Enfin voilà, j’pense qu’i savent pas me… » (SC 03.04.07)

LA : « l’autre truc, dont j’me suis rendu compte y’a pas très longtemps c’est que c’était pas que par rapport à MOI c’était pas moi en tant que personne qui qui… c’est que EUX avaient des problèmes par rapport à l’écrit, par rapport à leur langue, [....] que le rapport délicat il est pas avec MOI particulièrement en fait, il est plus par rapport au français, à ce que je peux représenter, à XXX, à leur identité… voilà ils sont adolescents, ils sont en construction, ils sont en rupture, ils sont en recherche, voilà quoi, enfin, réfléchir à ça en fait. (…) » (SC 03.04.07)

en explicitant, au moins en partie, son rapport à l’enseignement :

« LA : pour moi l’enseignant, c’est quelqu’un qui REgle les problèmes, qui règle… qui aide les autres à, à avancer et c’est là que j’me dis ; ma mission, elle est pa:s » (SC 03.04.07)

en formulant une problématique envisagée sous l’angle de la construction active et personnelle d’une identité

en formulant une problématique envisagée sous l’angle de la construction active et personnelle d’une identité