6 ÉTUDES ÉVALUATIVES PORTANT SUR LE MODÈLE IPS
6.9 Bilan de l’examen de la littérature
De cette synthèse de la littérature évaluative sur le soutien à l’emploi se dégagent les constats suivants : a) Le modèle de soutien à l’emploi IPS est beaucoup plus efficace, sur un horizon d’un à deux ans tout
au moins, que les autres approches connues à ce jour pour aider les personnes qui ont des troubles mentaux graves à intégrer le marché du travail régulier. Si la durée moyenne des emplois réguliers obtenus grâce à l’IPS semble à peu près semblable à celle atteinte par d’autres approches, la proportion de clients obtenant un emploi est beaucoup plus élevée, de sorte qu’au total un groupe donné de clients IPS passe plus de temps en emploi régulier. Cette efficacité à court terme a été confirmée par diverses études menées non seulement aux États-Unis, mais également à Hong Kong, en Australie, dans plusieurs pays européens, à Vancouver et à Montréal. Les deux études à long terme
37. Charles Rapp, communication personnelle, juin 2007.
38. Lors de la conférence du European Network for Mental Service Evaluation (ENMESH) à Cracovie les 22, 23 et 24 mai 2008, Geoff Shepherd, du Sainsbury Center for Mental Health, de Londres, a présenté des travaux en cours impliquant une grande variété d’acteurs et visant à développer un ensemble de tels indicateurs.
effectuées jusqu’à maintenant tendent à montrer que cette efficacité se maintiendrait au moins pendant une dizaine d’années39.
b) Quoique de nombreuses études associent le travail en lui-même à divers bienfaits psychologiques pour les clients, ces programmes ne semblent pas dans l’ensemble exercer une telle influence dans un sens ou dans l’autre, du moins de façon généralisée et à court terme : cette absence d’association pourrait être attribuable à la relativement courte période de suivi des études, et au fait que l’expérience de travail demeure limitée pour plusieurs des clients de ces programmes de soutien à l’emploi. En revanche, les clients qui parviennent à travailler grâce à ces programmes semblent en éprouver des bénéfices pour ce qui est de leur qualité de vie et de leur estime d’eux-mêmes, à tout le moins.
c) Les données disponibles tendent à montrer que les services de soutien à l’emploi sont appréciés des clients. Les expériences documentées de conversions de centres de traitement de jour en programmes de soutien à l’emploi ont été perçues de façon positive ou très positive par la grande majorité des clients et intervenants concernés.
d) À court terme, sans conversion de services existants, les programmes de soutien à l’emploi engendrent des coûts additionnels pour le réseau, car, en général, ils ne semblent pas réduire l’utilisation d’autres ressources du système de santé telles que l’hospitalisation. Les études disponibles à ce jour ne permettent pas de conclure quant aux effets à long terme sur les coûts des services de santé.
e) Le respect des principes du modèle IPS est associé à une plus grande efficacité du modèle.
f) Tous les principes du modèle reçoivent un certain appui empirique. Certains se fondent aussi sur des valeurs d’inclusion sociale, d’équité ou d’empowerment. Il est bien démontré que la recherche rapide d’un emploi mène très vite à des taux d’emploi plus élevés, et que le maintien d’un lien étroit entre le conseiller en emploi et l’équipe clinique du client augmente l’efficacité de l’intervention.
g) Trois limites principales sont souvent attribuées au modèle IPS :
sur un horizon d’un à deux ans, environ le tiers ou la moitié des clients d’un programme IPS ne parviennent pas à trouver un emploi régulier;
dans la majorité des cas, ceux qui en trouvent un ne réussissent pas à le conserver plus longtemps qu’avec d’autres approches d’intégration professionnelle; et
la plupart des emplois obtenus n’exigent pas d’habiletés particulières.
Les tentatives d’améliorer les habiletés des clients en emploi, qui pourraient accroître la durée des emplois, n’ont pas encore donné de résultats concluants. Le rôle bénéfique de la remédiation cognitive reste à préciser. L’importance des encouragements et du soutien que doivent donner l’ensemble des intervenants à leurs clients dans une démarche d’intégration en emploi est bien soulignée dans les études. Un recours accru au soutien à l’emploi comme véhicule pour soutenir un retour aux études mérite d’être approfondi, tout comme les caractéristiques personnelles qui prédisposent une personne à devenir un conseiller en emploi efficace.
h) L’implantation de programmes de soutien à l’emploi efficaces est favorisée par la mise en œuvre de plusieurs mesures :
concertation aux paliers décisionnels supérieurs pour permettre l’établissement de programmes de soutien à l’emploi;
mise en place, pour les clients, d’incitatifs financiers à travailler;
établissement d’un centre d’accompagnement, de formation et de consultation technique visant l’atteinte par les programmes d’un niveau élevé de fidélité au modèle et surtout, de taux d’emploi élevés pour la clientèle;
39. Le programme IPS de l’Hôpital Douglas fonctionne depuis 2001, avec un faible taux de roulement de personnel. Une évaluation non publiée, mais présentée au Centre hospitalier de l’Université de Montréal le 6 décembre 2006, indique qu’après presque 6 ans de fonctionnement, 96 clients (dont 5 inactifs) étaient inscrits, et de ceux-ci, 82 % travaillaient en milieu régulier, et ce, en moyenne 25 heures par semaine.
mesure régulière des résultats obtenus par les programmes de soutien à l’emploi, dans une optique d’amélioration continue de la qualité; et
utilisation d’incitatifs financiers pour soutenir l’atteinte par les programmes des meilleurs taux d’obtention et de maintien en emploi possibles.