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1. Bilan de l’analyse qualitative des consultations pharmaceutiques

1.1. Biais inhérents à l’étude

1.1.1

Biais liés aux patients

1.1.1.1 Biais de sélection

∗ Concernant les consultations pharmaceutiques effectuées dans le cadre de RESIC L’analyse des consultations a été faite de manière rétrospective en intégrant dans l’étude toutes les consultations pharmaceutiques réalisées dans le cadre du réseau RESIC de juin 2007 à juin 2009. La sélection des patients ayant bénéficié des consultations n’a donc pas été faite de manière à représenter au plus près l’ensemble des patients insuffisants cardiaques mais a été dictée par le fonctionnement du réseau et les besoins spécifiques des patients. Ainsi, il faut considérer plusieurs éléments ayant pu intervenir dans le choix des patients:

- Le réseau a certainement proposé en priorité une consultation pharmaceutique aux patients ayant des difficultés particulières dans la compréhension et la mise en œuvre de leur traitement. Cela a permis de faire ressortir d’avantage les besoins, les attentes et les problèmes sur lesquels il faut être vigilant en tant que pharmacien. Cependant, cela constitue également un biais puisque notre

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échantillon n’est pas pleinement représentatif de l’ensemble des patients insuffisants cardiaques.

- L’accord du patient est un pré-requis à la réalisation de la consultation pharmaceutique. Il est possible que cet élément ait pu avoir une influence sur les caractéristiques de la population étudiée.

- La sélection de certains patients a pu se faire sur des critères organisationnels. En effet plusieurs patients ont bénéficié d’une séance individuelle avec un pharmacien car ils étaient dans l’impossibilité d’assister aux séances d’éducation collective organisées par le réseau et cela pour des raisons très différentes (éloignement géographique, faible autonomie, incompatibilité avec les horaires de travail, absence de moyen de transport, handicap comme un problème de vue…)

∗ Concernant les consultations pharmaceutiques effectuées lors du stage officinal Les patients qui se sont vus proposer une consultation pharmaceutique au cours de notre stage officinal de janvier à juin 2009 étaient tous des patients bien connus par le pharmacien titulaire et l’équipe officinale. Aucune consultation n’a été proposée aux personnes de passage ou se présentant plus rarement à l’officine. Ce mode de sélection permettait d’être sûr que le patient soit bien insuffisant cardiaque et correspondait bien aux critères d’inclusion de notre étude. Cependant, le choix des patients a donc pu être tourné vers les patients les plus ouverts au dialogue, avec un niveau de compréhension suffisant et que l’on savait à priori demandeurs d’explications sur leur traitement.

1.1.1.2 Biais liés aux déclarations des patients

Chaque patient, en fonction de sa personnalité et de sa relation avec le pharmacien, développe plus ou moins certains thèmes, ce qui influence évidemment l’efficacité de la démarche éducative. Des informations importantes pour le suivi éducatif peuvent être occultées par le patient par simple oubli, par peur de décevoir le pharmacien en révélant une pratique qu’il pressent délétère, ou par inconscience de l’intérêt de l’information. Enfin, le patient peut modifier son discours de façon à se conformer aux idées supposées de l’enquêteur (125).

1.1.1.3 Biais liés à l’appartenance ou non à un réseau de santé

Dans notre étude, 27 patients faisaient partie de RESIC, 2 patients avaient fait partie de ce réseau, 2 patients n’étaient pas et n’avaient jamais été pris en charge par un réseau de soins pluridisciplinaires. Nous pouvons évoquer un possible biais d’information puisque les patients pris en charge par un

165 réseau de soins semblent à priori plus informés sur leur pathologie et leur traitement que ceux qui bénéficient d’une prise en charge classique. Par ailleurs, les 2 patients n’ayant jamais eu de contact avec un réseau semblaient être plus surpris par la proposition d’une consultation pharmaceutique et avoir plus de mal à cerner ce qu’ils pouvaient en attendre.

1.1.2

Biais liés aux pharmaciens

1.1.2.1 Biais de subjectivité

Au cours de la consultation pharmaceutique, un entretien semi-directif est mené par le pharmacien afin d’identifier les défauts de connaissances et les problèmes dans les pratiques du patient. Bien qu’elle apparaisse comme la plus appropriée, la technique de l’entretien semi-directif laisse une place non négligeable à la subjectivité du pharmacien qui réalise la consultation.

L’enquêteur peut influencer le patient par ses propres opinions et par son expérience des consultations précédentes (126). Lorsque le pharmacien pressent ou soupçonne un problème spécifique, il peut inconsciemment suggérer au patient des réponses qui vont dans le sens de ses convictions. De même, la formulation des questions ou l’insistance plus ou moins prononcée dans la recherche d’un problème peuvent induire des réponses qui vont dans le sens souhaité.

1.1.2.2 Biais liés à la variabilité des pharmaciens

Les 34 consultations pharmaceutiques analysées dans cette étude n’ont pas été menées par le même pharmacien. Un grand nombre d’entre elles (22 séances, soit 65% des consultations) a été réalisé par une pharmacienne vacataire du réseau RESIC spécialisée dans l’éducation thérapeutique, 8 ont été réalisées par différents pharmaciens adhérents au RESIC et 4 ont été réalisées par un étudiant de 6ème année dans le cadre d’un stage officinal.

Le nombre élevé de consultations réalisées par la pharmacienne vacataire du réseau s’explique par une inadéquation entre les pharmaciens d’officine adhérents au réseau RESIC et les patients inclus dans le RESIC. D’un côté, de nombreux pharmaciens adhérents et formés à l’éducation thérapeutique n’ont pas dans leur officine de patients inclus dans le réseau. De l’autre côté, de nombreux patients inclus dans le réseau ont un pharmacien référent qui n’est pas adhérent à RESIC et qui n’est donc pas formé à l’éducation thérapeutique. Lorsqu’une consultation pharmaceutique est nécessaire chez un patient du réseau dont le pharmacien n’est pas adhérent, la pharmacienne vacataire du réseau se charge de la réaliser.

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Le fait que toutes les consultations de l’étude n’aient pas été réalisées par un seul et même intervenant permet de diminuer le biais de subjectivité dont nous avons parlé précédemment. Cependant, cela peut être une source de biais en soi.

En effet, bien que tous les pharmaciens se soient basés sur la même grille d’entretien (annexe 6), l’approche humaine, la relation avec le patient, l’expérience, la motivation et le niveau de compétences sont différents pour chaque intervenant. Ces variabilités sont susceptibles d’influencer l’identification des problèmes et l’efficacité de la démarche éducative.

De la même manière, les pharmaciens peuvent également interpréter différemment les réponses faites par les patients, d’autant plus si elles portent sur des domaines où la subjectivité joue un rôle important (représentation de la maladie, bénéfices ressentis...).

Les pharmaciens intervenant dans le cadre du réseau RESIC ont également pu avoir une crédibilité plus importante auprès des patients que l’étudiant réalisant les consultations dans le cadre de son stage officinal.

1.1.2.3 Biais liés aux comptes-rendus des consultations

L’analyse des consultations pharmaceutiques s’est faite, pour la plupart, de manière rétrospective à partir de la grille d’entretien remplie (Annexe 6) et du compte-rendu rédigé (Annexe 15) par le pharmacien suite à chaque séance. Ces documents permettaient d’informer le réseau sur les points éclaircis ou renforcés chez le patient au cours de la séance et sur les points posant encore des difficultés. Le pharmacien pouvait également dans son compte-rendu formuler son opinion pharmaceutique en faisant des remarques ou des propositions visant à optimiser la prise en charge du patient.

Les comptes-rendus étant initialement rédigés dans le cadre de la prise en charge des patients et non pas pour répondre au besoin de notre étude, ils n’étaient pas tous construits sur un modèle rigoureusement standardisé permettant d’identifier des paramètres mesurables et facilement comparables. Les différents pharmaciens ayant réalisé des consultations n’ont pas tous construit leur compte-rendu sur le même modèle, n’ont pas tous fait preuve de la même précision dans le déroulement de la séance, et n’ont peut-être pas eu la même hiérarchisation dans l’importance des éléments à communiquer au réseau.

Le fait que l’analyse se soit faite de manière rétrospective a pu entraîner des pertes de données sur certaines consultations. Par exemple, un compte-rendu de consultation n’abordant pas le sujet de l’automédication signifie à priori qu’aucune difficulté n’a été détectée dans ce

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domaine puisque le thème « automédication » fait partie du guide d’entretien sur lequel est basée la consultation. Cependant, il ne peut être exclu que le pharmacien ait oublié d’aborder ce thème lors de la consultation. Enfin, la rédaction du compte-rendu s’effectuant après l’entretien avec le patient, nous ne pouvons exclure qu’un biais de mémorisation puisse fausser la retranscription.

Une étude prospective des consultations basée sur un guide d’entretien précis et structuré permettant la rédaction par le pharmacien d’un compte-rendu standardisé élaboré préalablement permettrait d’éviter ce biais. Cependant, l’approche prospective était rendue difficile dans ce travail par la fréquence encore faible des consultations pharmaceutiques (29 séances dans RESIC en 2 ans)

1.1.2.4 Biais liés au lieu de la consultation

La majorité des consultations se sont déroulées au domicile du patient, seules 3 ont été faites à l’officine dans un espace de confidentialité. Le lieu de la séance est un élément primordial qui peut influencer directement sur le déroulement et la richesse de la consultation. La séance à domicile permet d’établir plus facilement un climat de confiance entre pharmacien et patient, d’assurer une parfaite confidentialité, et d’adapter un maximum les conseils au contexte du patient. Elle permet ainsi de mieux appréhender la gestion de la maladie et du traitement au quotidien : utilisation de piluliers, rencontre avec l’aide à domicile, pratiques d’automédication à partir de l’armoire à pharmacie… Parmi les inconvénients, la visite à domicile peut être perçue par certains patients comme une atteinte à leur intimité.

La séance à l’officine, même dans un espace de confidentialité, semble moins appropriée au dialogue car l’entretien peut être perturbé par l’activité officinale. Par ailleurs, certaines informations sont plus difficiles à obtenir.

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