• Aucun résultat trouvé

De fortes teneurs en CO2 ont été quantifiées dans le manteau situé sous le bassin Pannonien (~2000 ppm, cf. Le carbone dans le manteau sous Pannonien) et dans le bassin Pannonien à travers les flux de CO2 mantellique dans les aquifères superficiels (cf. Source du

CO2 dans le Bassin Pannonien) et dans les réservoirs pétroliers et gaziers (Sherwood Lollar et al. 1997). La corrélation observée entre CO2 (%) et CO2/3He (Figure 48) dans le bassin peut être expliquée par des processus ayant lieu au cours de la migration tels que : (1) la perte de la phase porteuse du CO2 mantellique (fractionnement physique); (2) l’ajout de CO2 crustal; (3) l’ajout de CH4 crustal; et potentiellement (4) la conversion du CO2 mantellique en CH4 (Sherwood Lollar et al. 1997). Ces différents processus peuvent se produire sur des échelles de temps et d’espace considérables, typiquement géodynamiques. La compréhension des processus de migrations qui lient le réservoir mantellique et les niveaux de roches sédimentaires du bassin est donc primordiale.

La subduction de la lithosphère européenne a eu lieu entre l’Eocène et le Miocène (Martin & Németh 2004) et serait associée à la mise en place des édifices calco-alcalins observés à la surface du bassin Pannonien. L’étude des xénolites mantelliques de le BBHVF, remontés par le volcanisme alcalin entre la fin du Miocène et le début du Pliocène, a montré que la subduction a fortement enrichi le manteau en éléments volatils et notamment en CO2 durant cette période. En effet, nous avons pu montrer que les magmas percolant les péridotites lithosphériques provenaient très probablement de la fusion de la lithosphère subductante et qu’ils pouvaient contenir jusqu’à 25.4 wt. % de CO2. Il est donc aisé de penser que la lithosphère européenne a libéré de très grandes quantités de CO2 durant sa subduction sous la zone Carpato-Pannonienne (Eocène-Miocène). La présence de fluides en grandes quantités dans la lithosphère subductante a impliqué la libération de grandes quantités de CO2 ainsi que la diminution des conditions de stabilité de nombreuses phases (diminution du solidus) et donc la formation de magmas. Ce mécanisme en chaîne à notamment pu accélérer la déformation du manteau et de la croûte par la génération de magmas et l’injection de volatils.

168 Figure 49 : Résumé des interactions fluide-roche pouvant avoir lieu à l’échelle lithosphérique. Les bandes hachurées représentent les niveaux marbrés. Les deux fines flèches décrivent des intéractions fluide-roche (infiltrations de H2O-CO2 ou dévolatilisation liée au métamorphisme), les flèches épaisses décrivent les infiltrations majeures de fluides. La position structurale à l’intérieur ou à l’extérieur des zones de cisaillement majeur ou mineur exerce un contrôle majeur sur la nature des fluides et sur leurs flux. Plusieurs de ces processus peuvent être caractéristiques de la lithosphère Pannonienne et sont discuttés dans le texte. Source : [Pili et al. 1999]

La majorité des gaz libérés par dégazage non-magmatique, circule principalement par les failles et/ou fractures (Figure 49). De ce fait, la tectonique joue un rôle important dans les processus de dégazage (e.g. Gold 1993; Irwin & Barnes 1980). Pili et al. (1999) résument les processus de source et les circulations lithosphériques de CO2 résultantes. Ils montrent notamment que les zones de cisaillement exercent un contrôle majeur sur la nature des fluides et sur les flux. Ainsi les zones de cisaillement majeures prélèvent du CO2 mantellique (et crustal) et libèrent des flux équivalent à ceux observés au niveau des rides océaniques.

169 Figure 50 : Carte illustrant la profondeur du socle du bassin Pannonien ainsi que les failles majeures contrôlant la formation du bassin. 1- avant arc ; 2- ceinture de flysch ; 3- volcans Miocène et positions approximatives des centres éruptifs explosifs (dépôts rhyolitiques) ; 4- Montagnes alpines, des Carpates et dinariques ; 5- Fenêtre Apenninique ; 6- Ophiolites ; 7- failles normales et de détachement ; 8- Déformations anticlinales ; 9- Failles de décrochement ; 10- failles de décrochement de premier ordre ; AC- Plaque Alcapa; MHFZ- Mid-hungarian zone ; TD- Plaque Tisca-Dacia. Source : [Horváth et al. 2015].

Le bassin Pannonien a subi une histoire géodynamique complexe passant de phases compressives à extensives à plusieurs reprises. Cette histoire complexe a mené à la formation de nombreuses failles qui sont présentées sur la Figure 50. Une structure majeure est d’ailleurs bien visible au centre du bassin Pannonien (Figure 50), c’est la Mid-Hungarian Zone (MHZ). La MHZ est composée d’une série de failles parallèles et lithosphériques. Elle est décrite dans la littérature comme un système décrochant datant de l’Oligocène, et le long duquel les micro-plaques ALCAPA et TISZA-DACIA se juxtaposent (ex. : Géczy 1973; Géczy 1984; Kovacs 1982; Csontos et al. 1992). Cette forte zone de cisaillements lithosphériques concorde d’un point de vu temporel avec la subduction de la lithosphère européenne. De plus, l’ensemble de la longueur du système de la MHZ est recouverte par

170 d’épais dépôts volcaniques calco-alcalins datant du Miocène (Balla 1984; Balla 1987). Weinlich et al. (1999) expliquent que les chemins de migration des magmas sont également des chenaux utilisés par les fluides (ex. : le CO2) pour migrer vers la surface (Figure 50). Il est donc aisé de penser que les fluides libérés lors de la subduction ont pu facilement migrer vers le bassin et la surface par les failles lithosphériques formant la MHZ au cours de l’Oligocène et du Miocène. En accord avec ces hypothèses, les analyses des gaz du bassin Pannonien montrent que les plus fortes concentrations en CO2, associées à une origine mantellique, sont localisées sur/à proximité de la MHZ, dans la Great Hungarian Plain (Sherwood Lollar et al. 1997) et dans le BBHVF (cette étude). Ces observations s’accordent donc avec une migration de fluides mantelliques riches en CO2 libérés par la subduction de la plaque européenne, vers le bassin sédimentaire et, par les failles lithosphériques et les chemins de migration des magmas calco-alcalins de la MHZ.

Figure 51 : Exemple de synopsis des sources de CO2, He et N2, leurs signatures isotopiques, les processus de transport et de mélange dans l’Ouest du rift Eger. Source : [Weinlich et al. 1999]

Sacchi & Horváth (2002) ont montré que bien que la zone Carpato-Pannonienne ait été soulevée entièrement au cours du Quaternaire, des mouvements verticaux différentiels indiquent une flexure continue avec un soulèvement maximal entre le BBHVF (Bakony) et le mont Mecsek (Figure 52, Cloetingh et al., 2006). Cette information est importante car elle montre que le BBHVF se situe en bordure de bassin et à proximité des pentes de flexions

171 maximales. Cette perte de rigidité est liée aux transitions de phase et à la migration d’éléments volatils associés (Morner & Etiope 2002) dans les zones de forte fracturation. Plusieurs des principaux champs pétroliers et gaziers mondiaux sont localisés dans des bassins ayant subi une perte de rigidité de la lithosphère (Morner & Etiope 2002). Dans ces bassins (ex. : l’Est des Carpates, la Mer Noire, le Péri-Caspien), les accumulations d’éléments volatils mantelliques (ex. : CO2) ne se font pas dans le centre du bassin mais plutôt le long des pentes de flexion maximale où la lithosphère doit avoir perdue sa rigidité normale. De ce fait, la localisation de le BBHVF, à proximité de zones de flexion maximale de la lithosphère, favorise une libération importante de fluide qui est en accord avec les teneurs en CO2 mantellique observées dans les aquifères de cette zone.

Figure 52 : Exemple de plissement à l’échelle crustale en Transdanubie (Hongrie), basée sur l’interprétation et l’analyse de séquences stratigraphiques de profils de réflexion sismique régionale (Sacchi & Horváth 2002). Source : [Cloetingh et al. 2006]

Nous proposons donc une migration du CO2 mantellique par flux advectif le long des chemins de migration de magmas présents dans le bassin Pannonien mais surtout, une migration diffuse de ce CO2 le long des différents plans de failles associés à la mise-en-place du bassin (Figure 53), controlée en partie par la MHZ.

172 Figure 53 : Chemins de migration du CO2 mantellique, vers le bassin Pannonien, par flux advectifs et par migration diffuse le long des différents plans de failles associés à la mise-en-place du bassin.

Documents relatifs