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1: Le bassin du Nil et les Etats riverains

Dans le document UNIVERSITE LIBRE DE BRUXELLES (Page 58-150)

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des Sudd soudanais. Cette zone mal drainée est d’une superficie de 300 000 km2. A cause

de l’intensité élevée de l’évaporation et de l’évapotranspiration le fleuve perd plus de 50% de sont débit annuel soit 14 milliards de m3.

A la sortie des marécages au nord de la cuvette soudanaise, le Bahr al Jabal accueille, sur sa droite, les eaux du Bahr al Ghazal et devient, après le confluent, le Nil blanc qui pénètre dans une zone tropicale semi-aride et puis aride. Au Sud de Malakal le Nil blanc est rejoint par la rivière de Sobat.

Le sous – bassin de Sobat est situé au Sud – Est de l’Ethiopie et possède une aire de

captage de 224 000 km2. Ce sous – bassin est caractérisé par une topographie

montagneuse et une forêt très dense. La rivière de Sobat qui draine les eaux du Sud du plateau éthiopien et des marais du Sud – Est soudanais ne modifie que légèrement le régime du fleuve. Pendant 800 km jusqu’à la capitale soudanaise, le fleuve ne reçoit aucun affluent. A Khartoum le Nil Blanc et rejoint par le Nil Bleu.

Le sous- bassin du Nil Bleu avec une aire de captage de 325 000 km2, est situé sur le plateau nord –est éthiopien et caractérisé par des gorges vertigineuses et inaccessibles, des énormes apports de sédiments boueux et des impressionnantes crues d’été. Les précipitations sur sous – bassin du mois d’avril jusqu’en septembre varient de 500 mm dans les régions basses et sèches et à 2 000 mm dans les hauts plateaux.

La source du Nil Bleu est située dans le lac Tana qui possède une superficie de 3000 km² et une profondeur de 14 m. La contribution de ce lac au débit du Nil Bleu est estimée à 7%. Le Nil Bleu quitte le lac Tana en passant à travers une série de cataractes au nombre de six (Voir la figure n° 2.1). Sur sa route vers le Souda n, le Nil Bleu reçoit le débit de huit affluents. Les plus importants de ses affluents sont : Didessa, Dabus, Fincha, et Balas. Après avoir parcouru une distance de 800 km, le fleuve rentre dans les plaines soudanaises à Famaka. A l’intérieur du Soudan, la rivière reçoit deux autres affluents : le Dider et le Rahad. Les sources des deux affluents se trouvent à 30 km à l’Ouest du lac Tana et à 60 km de la source de la rivière d’Atbara. Après la rencontre du Nil Bleu et le Nil Blanc à Khartoum le fleuve s’appelle désormais le Nil. Au-delà de la sixième cataracte, le Nil reçoit son dernier affluent l’Atbara.

Le sous - bassin de l’Atbara se trouve en Ethiopie et possède une aire de captage de 100 000 km². Le principal affluent de la rivière l’Atbara est le Sesit qui possède une aire de drainage de 69 000 km².

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Après sa rencontre avec la rivière de l’Atbara, le Nil se prolonge par une ultime et longue traversée du désert : 2 700 km dont 1.250 km en territoire égyptien. C’est au niveau de la deuxième cataracte que s’effectue son entrée en Egypte. Entre Assouan et le Caire, le fleuve coule dans une vallée étroite et fertile, et se jette, à 160 km au nord du Caire, dans la Méditerranée, en un vaste delta marécageux d’une superficie de 23 000 km² et dont les principaux bras sont ceux de Rosette et Damiette.

Figure 2. 1: profil longitudinal du Nil

Source : Adapté d’après MUTIN G. (2000).

2.3 L’hydrologie du Nil

Le système de drainage et le régime du débit du Nil sont très compliqués du fait que le fleuve traverse des régions climatiques très variées (équatoriale, tropicale et désertique) et aussi du fait que de grandes quantités d’eau sont perdues par l’évaporation dans les marécages de la région du Sudd et à travers le désert que la rivière traverse au cours de son chemin vers la Méditerranée.

Le Nil est un fleuve complexe, ne fut-ce que par sa longueur et la superficie de son bassin versant. Ces deux données contrastent avec la médiocrité de son débit annuel mesuré à Khartoum, soit 84 milliards de m³ (2700 m³/s). Ce module moyen annuel est faible si l’on compare aux 5518 milliards de m³ de l’Amazone aux 1248 milliards de m³ du Congo aux 740 milliards de m³ du Mékong aux 562 milliards de m³ du Mississipi aux 223 milliards de m³ du Zambèze aux 202 milliards de m³ du Danube et aux 192 milliards de m³ du Niger (MONDER KH, 2001).

52 Figure 2. 2: Débit du Nil

à l’entrée de la capitale soudanaise varient entre 520 m³/s en mai et 8500 m³/s en septembre (BETHEMONT J., 2003) tient au fait que l’essentiel des débits se forme sur les hauts plateaux éthiopiens qui sont soumis à un régime tropical et alimentent le Nil bleu sans subir de déperdition, alors que le Nil blanc issu de la zone équatoriale dissipe l’essentiel de ses eaux par évaporation dans les vastes marais du Bahr – el – Ghazal. Du moins, son faible débit joue – t – il un rôle essentiel dans le maintien de l’écoulement entre les mois de février et de juin.

Le Nil égyptien est alimenté par les affluents venus, en rive droite, de l’Ethiopie qui fournissent environ 86 % du débit annuel réparti de la manière suivante : 59% pour le Nil bleu, 14% pour la Sobat et 13% pour la rivière de l’Atbara. Les 14% restant proviennent de Bahr – el – Jabal. Durant la période de la grande crue, les plateaux éthiopiens interviennent à hauteur de 95% au débit du Nil réparti comme suit : 68% au Nil bleu, 22% à la rivière de l’Atbara et 5% pour la Sobat. Seulement 5% proviennent de Bahr – el – Jabal. Durant la période basse, 60% du débit du Nil proviennent d’Ethiopie et 40% restant proviennent de Bahr – el – Jabal.

Ces chiffres sont très intéressants pour les travaux de conservation et de commande du débit du Nil. Le Nil Blanc est caractérisé par un débit relativement uniforme comparativement

D éb it e n m il li o n s d e m ³/ jo u r

Les irrégularités de l’écoulement d’une année à l’autre peuvent être très importantes. Les extrêmes

enregistrés ont été de 151

milliards de m³ en 1878-79 (IBRAHIM A. M., 1984) et 34 milliards de m³ en 1987 (MUTIN G., 2000). Et comme l’essentiel des débits, 80% du débit total, s’écoule entre août et novembre avec un maximum au mois de septembre (Voir la figure 2.2), ces écarts se traduisent par des

étiages et des crues

catastrophiques. Ce régime

contrasté dont les débits mesurés Source : D’après HURST H., E. (1954)

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au Nil bleu et à la rivière de l’Atbara. Sa variation saisonnière moyenne à Malakal pour la période 1912 – 1962 s’étend de 525 m³/s à 1215 m³/s, tandis que la variation moyenne du Nil Bleu à Roseires pour la même période s’étend de 125 m³/s à 6200 m³/s.

Ces variations saisonnières sont très importantes d’un point de vue de l’irrigation. La différence marquée des écoulements dans le Nil Bleu entre la période d’inondation et la basse période rend nécessaire le stockage d’eau, tandis que l’écoulement, plutôt, uniforme du Nil Blanc rend le stockage annuel pour l’irrigation inutile.

Dans un bilan établit à l’échelle du bassin nilotique, le fait le plus important, celui qui prête à de nombreuses spéculations, est les pertes de 53 milliards de m³ pour un apport théorique

annuel de 137 milliards de m³, ce qui ne laisse au final que 8420 milliards de m³ mesurés à

l’entrée du territoire égyptien (BETHEMONT J., op. cit.). De plus, la traversée de la zone désertique, bien avant la zone de confluence, se traduit par une constante déperdition de sorte qu’à l’état naturel, on ne mesurerait que 63 milliards de m³ (OSS-UNESCO, 2001) à l’apex du delta du Nil (Voir tableau n° 2.2).

La vase, charriée annuellement par le Nil, est estimée en Egypte à 110 millions de tonnes. Cette quantité est moins importante par rapport à celle transportée par d’autres rivières : 150 millions de tonnes par le Mississipi, 260 millions de tonnes par le Colorado et 2 milliards de tonnes par le fleuve jaune. La teneur moyenne de la matière en suspension dans les eaux du Nil durant la période des inondations est de l’ordre de 1600 mg/l et le maximum est évalué à 5400 mg/l. Le Nil Bleu et la rivière de l’Atbara sont les grands fournisseurs de la vase transportée par le Nil. Le Nil Blanc transporte relativement moins de vase. Cette caractéristique est due au fait que la plupart de cette vase est déposée au cours du voyage du fleuve dans les lacs et les marécages.

La vase a influencé considérablement la conception et le fonctionnement des barrages et des canaux d’irrigation en Egypte et au Soudan. La conception du haut barrage d’Assouan tient compte notamment des nécessités de stockage de 41 milliards de m³ d’eau durant la période des crues et de l’envasement prévisible de 31 milliards de m³ de sédiments sur 500 ans soit l’équivalent de 60 millions de m³ par an de vase charriée par le Nil. Le barrage de Sennar, construit en 1925, a à ce jour perdu environ 25% de sa capacité. Quant au barrage de Khashm el Gibra, achevé en 1961, perd sa capacité de stockage à un rythme de 50 millions de m³ par an. De plus, les canaux d’irrigation au Soudan sont nettoyés chaque

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En fait, le régime « naturel » du fleuve ne constitue qu’une référence théorique depuis la construction du premier barrage d’Assouan en 1902. Depuis cette date, de multiples ouvrages de stockage ont été réalisés avec, notamment, le réservoir de Sennar à l’amont de la Djézireh soudanaise et le relèvement du seuil à la sortie du lac Victoria. D’autres projets concernent le lac Tana et la quatrième cataracte.

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année pour les débarrasser de la vase. Ces opérations de nettoyage coûtent des millions de dollars par an aux Soudanais.

Tableau 2. 2: Apports, déperditions et écoulements naturels dans les pays du bassin du Nil

Pays Apports (milliards

de m³/an) Déperdition par évaporation Ecoulement naturel sortant du territoire (milliards de m³/an) Kenya, Ouganda, Tanzanie, Burundi, Rwanda, la RDC 91 54 27 Ethiopie, Erythrée 91 1 90 Soudan Bahr - el – Ghazal Autres bassins Affluents des pays

d’amont Total Soudan 15 5 117 137 14 39 53 1 83 84 84 Egypte affluent de l’amont 84 21 63

Source : OSS-UNESCO, Les ressources en eau des pays de l’Observatoire du Sahara et du Sahel, UNESCO, Paris, 2001.

2.4 Le droit international, le bassin nilotique et les pays riverains

Pendant la colonisation du continent africain, seuls les fleuves Congo et Niger avaient fait l’objet d’un régime d’internationalisation par l’Acte final de la Conférence de Berlin du 26 février 1885. L’internationalisation de ces deux cours d’eau se fit sur la base de l’Acte final du Congrès de Vienne du 9 juin 1815, à savoir la navigabilité du cours d’eau et son caractère successif ou contigu.

La plupart des accords entre les différents Etats riverains du Nil ont été signés durant la période coloniale (fin du 19ème jusqu’à la moitié du 20ème siècle) à l’initiative ou sous l’influences des Etats coloniaux.

L’objectif recherché par la Grande Bretagne fut de soustraire le Nil au régime d’internationalisation applicable aux fleuves Congo et Niger et de faire de ce fleuve un cours d’eau entièrement national. La Grande Bretagne, qui a joué un rôle clé dans ces

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accords, protégea tout d’abords les intérêts de l’Egypte, et après l’indépendance de ce dernier, ceux du Soudan.

Cette préoccupation constante des Britanniques vis – à – vis du Nil s’est traduite par la signature d’une série d’accords, entre 1890 et 1929, avec l’Allemagne (1er juillet 1890), l’Italie (15 avril 1891 et 13 décembre 1906), la Belgique (12 mai 1894 et 9 mai 1906), la France (13 décembre 1906), l’Ethiopie (15 mai 1902) et l’Egypte (7 mai 1929), afin que le bassin nilotique demeure sous influence britannique.

Il est significatif que les différents Etats coloniaux, signataires de ces accords, ne se sont pas préoccupés des intérêts des territoires et des populations colonisés. Ils ont été plus concernés par leurs intérêts et problèmes dans les territoires riverains du bassin nilotique plutôt que par ce qui se passait à l’intérieur des territoires sous leur administration.

Néanmoins, deux accords postcoloniaux ont quand même été signés. Le premier, l’accord de1959, signé entre l’Egypte et le Soudan et le deuxième, l’accord de Kagera, signé en 1977 entre les Etats amonts du Nil sans l’approbation de l’Egypte.

2.4.1 Les accords entre la Grande Bretagne et les Etats européens sur le Nil

Ce qui rendait le Nil si important aux yeux des Britanniques, étaient ses usages possibles à des fins autres que la navigation : l’agriculture et plus particulièrement la culture du coton. Ainsi la Grande Bretagne avait déployé toute son énergie pour se faire reconnaître un rôle clé dans la région du Nil par un ensemble d’accords avec les puissances du Nil : l’Allemagne, la France, la Belgique et l’Italie.

2.4.2 L’accord Anglo – Germanique de 1890

L’accord signé en juillet 1890 entre la Grande Bretagne et l’Allemagne reconnaît à ce dernier la souveraineté sur le Sultanat de Zanzibar en échange de la reconnaissance par l’Allemagne du Nil comme zone d’influence britannique.

L’Allemagne qui « n’avait aucun intérêt dans la vallée du Nil, pouvait sans difficulté reconnaître à l’Angleterre des droits dont l’exercice ne la gênait aucunement » (BLANCHARD G., 1899). Toutefois, cet accord fut vivement critiqué par la France parce qu’il ne tenait pas compte d’une précédente promesse faite par la Grande Bretagne qui reconnaissait un contrôle franco-britannique sur Zanzibar.

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2.4.3 Le protocole Anglo – Italien de 1891

Lorsque l’Italie fit connaître ses prétentions sur l’Ethiopie, la Grande Bretagne se mit à craindre qu’elle ne procède à une dérivation des eaux du Nil et ne réduise le débit du fleuve au Soudan et en Egypte. Ces craintes amenèrent à la signature du protocole du 15 avril 1891, pour la démarcation des zones d’influence en Afrique orientale, entre l’Ethiopie et la Grande Bretagne.

Cet accord confirme l’influence italienne sur l’Ethiopie tout en laissant le bassin du Nil sous influence britannique. De plus, « le Gouvernement italien s’engage à ne pas construire sur l’Atbara, en vue de l’irrigation, aucun ouvrage qui pourrait sensiblement modifier sa défluence dans le Nil » (ST/LEG/SER.B/12, Nations Unies, 1963).

2.4.4 L’accord Anglo – Belge de 1894 et de 1906

Le 12 mai 1894, le Roi Léopold II, souverain de l’Etat indépendant du Congo, reconnaît le Nil comme zone d’influence britannique et accorde à la Grande Bretagne un corridor de 25 km de long entre les lacs Tanganyika, Albert et Edouard qui garantissait un contrôle ininterrompu de la Grande Bretagne sur cette zone.

En échange, le Roi Léopold II reçoit sous forme de bail les deux provinces soudanaises de Bahr el Ghazal et Equatorial.

Un tel accord avait été conclu essentiellement pour barrer le chemin à toute avancée française venant de l’ouest du Nil. Les Britanniques avaient, semble – t – il, besoin d’établir entre le Nil et les possessions françaises d’Afrique « un Etat tampon dont la situation aurait été analogue à celle du Siam, placé entre le Tonkin français et la Birmanie anglaise. L’Etat du Congo était tout indiqué pour remplir cette mission » (BLANCHARD G., op. cit.).

Toutefois, les pressions de la France sur le Roi des Belges furent très fortes et il ne fallut pas longtemps pour que ce dernier renonce à sa domination sur les deux provinces soudanaises. Un accord fut signé à cet effet entre la France et la Belgique le 14 août 1894. Cet accord suscitait de vives protestations de la part des Britanniques. Ces protestations amenèrent l’Etat du Congo à signer le 9 mai 1906 avec les Britanniques le traité de frontière. Dans l’article 3 de ce traité il est stipulé que « le Gouvernement de l’Etat indépendant du Congo s’engage à ne pas construire ou permettre la construction d’ouvrages sur le Semliki ou l’Isango, ou à proximité, ce qui diminuerait le volume d’eau entrant dans le lac Albert, sauf

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accord avec le Gouvernement soudanais » (Ministère égyptien des Affaires étrangères, 1982).

2.4.5 L’accord de 1906 entre la Grande Bretagne, la France et l’Italie

Désormais, ces différents accords et protocoles, signés entre la Grande Bretagne et les autres puissances coloniales d’Afrique, consacrèrent la suprématie britannique sur le Nil. Les menaces belge, française et allemande furent écartées et le rêve éthiopien de l’Italie fut avorté après la défaite d’Adwa en mars 1896. Cette stabilisation, du moins en apparence, fut à l’origine de l’accord du 13 décembre de 1906 entre les trois puissances du Nil : la France, l’Italie et la Grande Bretagne.

L’article 4 de cet accord stipule que « dans le cas où les événements viendraient à troubler le statu quo prévu par l’article premier, la France, la Grande Bretagne et l’Italie feront tous leurs efforts pour maintenir l’intégrité de l’Ethiopie (…) elles se concerteront pour sauvegarder les intérêts de la Grande Bretagne et de l’Egypte dans le bassin du Nil, et plus spécialement en ce qui concerne la réglementation des eaux du fleuve et de ses affluents » (Ministère des Affaires étrangères, op. cit.).

Par cet accord, les signataires s’engagent à ne pas intervenir dans le débit du Nil, ni modifier son cours sans le consentement des riverains de l’aval. « Cet engagement est de fait un point marquant dans l’histoire juridique du Nil, ce n’est plus la liberté de navigation qui va l’emporter, mais c’est le libre écoulement du cours d’eau qui va intéresser les contractants » (MAJZOUB T., 1994).

2.4.6 Les accords entre la Grande Bretagne et les nouveaux riverains du Nil

La défaite italienne en Ethiopie à Adwa en mars 1896 et l’indépendance officielle21

égyptienne ramenèrent les Britanniques à signer des nouveaux accords sur le Nil.

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Nous savons que, dans les faits, l’indépendance réelle de l’Egypte n’est intervenue qu’au début des années cinquante.

58 2.4.6.1 Le traité Anglo – Ethiopien de 1902

Dans ce traité signé entre la Grande Bretagne et l’Ethiopie à Addis Abéba le 15 mai 1902 , le Roi des Ethiopiens, Ménélik II, s’engageait « par devant le gouvernement de Sa majesté Britannique, à ne pas construire et à ne pas autoriser la construction d’ouvrages sur le Nil Bleu, le lac Tana ou le Sobat, qui auraient pour effet d’arrêter l’écoulement de leurs eaux dans le Nil, sauf en accord avec le Gouvernement de Sa Majesté Britannique et le Gouvernement du Soudan » (Ministère des Affaires étrangères, op. cit.).

Cet accord qui visait à restreindre l’exercice de la souveraineté absolue de l’Ethiopie sur le Nil fut sévèrement critiqué par la doctrine juridique internationale. M. Garriston, s’adressant à la Société Américaine de Droit International, a décrit ce traité comme un pacte « dans lequel l’une des parties se réservait les droits et les privilèges, laissant l’autre sans contrepartie, sans engagement réciproque et sans compensation » (Proceedings of the American Society of International Law, 1960).

Toutefois, il ne faudrait pas perdre de vue le contexte politique lorsqu’on évalue se traité. Car le principal objectif de l’Ethiopie, à travers cet accord, avait été d’obtenir certains intérêts politiques, à savoir : la délimitation des frontières avec le Soudan et la reconnaissance de l’intégrité territoriale de l’Ethiopie.

2.4.6.2 L’accord Anglo – Egyptien de 1929

L’accord du 7 mai 1929 entre l’Egypte et la Grande Bretagne (Nile Water Agreement) qui représentait le Soudan, le Kenya, la Tanzanie et l’Ouganda a permis l’élaboration de règles relatives à la répartition des eaux du Nil entre l’Egypte et le Soudan, en rendant juridique leur quotte – part. Il organise l’usage des eaux du Nil avec pour principal souci la satisfaction des besoins en eau de l’Egypte, et en partie ceux du Soudan. L’Egypte obtenait 48 km³, et le Soudan 4 km³ des eaux annuelles du fleuve.

Il affirme notamment que les eaux du lac Victoria ne pourront être utilisées sans l’accord préalable de l’Egypte et qu’aucun ouvrage susceptible de réduire le débit d’eau en Egypte ne sera entrepris sur le Nil ou ses affluents. L’accord permettait également à l’Egypte d’inspecter et d’enquêter sur toute la longueur du Nil jusqu’aux sources éloignées de ses affluents dans le bassin.

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Il est clair que l’accord de 1929 essayait de sauvegarder les intérêts de l’Egypte tout en allant jusqu’à légitimer des ingérences égyptiennes dans le développement agricole des riverains de l’amont, sans que pour cela l’inverse soit vrai. Toutefois, comme pour l’accord Anglo – Ethiopien, il ne faudrait pas perdre de vue le contexte politique lorsqu’on évalue ce

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