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Le bain de poésie 47

Dans le document La poésie au cycle 3 (Page 51-55)

C)   Résultats et analyse des données 47

1.   Le bain de poésie 47

L’hypothèse analysée dans cette partie est la suivante : « La familiarisation des élèves avec le genre poétique passe par différents dispositifs identifiés, mais aussi par une présence quotidienne de la poésie, au même titre que les autres genres littéraires : dans la bibliothèque de l’école et de la classe, ou encore dans les autres disciplines comme support dans les séances d’étude de la langue. »

Pour ce qui est de la présence quotidienne de la poésie dans la classe, il est bien évident que je n’ai pas pu tester ce paramètre puisque je n’enseigne qu’un seul jour par semaine dans chaque classe. En revanche, le dispositif de l’élection du poème de la semaine a permis d’inciter les élèves à lire des poèmes régulièrement. Mes collègues m’ont rapporté qu’ils observaient régulièrement des élèves dans ces espaces de lecture et de vote. De plus, ce dispositif présente l’avantage de mettre les élèves en contact avec les textes en amont de leur analyse en classe. Cela a facilité le choix des textes par les groupes en quatrième période par exemple.

Le dispositif le plus pertinent à étudier ici est donc celui de la définition de la poésie avec les élèves. Il me semble qu’il n’est pas possible de laisser uniquement les dispositifs induire les objectifs d’apprentissage aux élèves, surtout lorsque l’on sait qu’un apprenant est plus engagé dans sa tâche quand il en mesure les enjeux et les objectifs. Tout comme il ne suffit pas d’écouter une langue étrangère pour la comprendre et la parler, il ne suffit pas d’être en contact avec la poésie pour en saisir les enjeux. Il me semblait donc nécessaire d’expliciter les caractéristiques de la poésie, sinon en restant muet, en laissant les textes « faire leur effet », on renforce l’idée que la poésie est un genre particulier, réservé aux initiés.

Pour évaluer le dispositif que j’ai exposé en IV. B) 1., j’ai donc récolté les conceptions des élèves à différents moments : en début de première période, en début de cinquième période et en milieu de cinquième période après un travail de définition explicite de la poésie. Voici une synthèse des résultats71.

Tout d’abord, il est intéressant de remarquer les différences et les points communs entre les deux classes au début de l’année. Dans la classe A, les élèves ont principalement évoqué la forme pour expliquer ce qu’étaient les poèmes pour eux. Parmi les 24 participants, 13 comparent les poèmes à des chansons et 5 convoquent les rimes, les strophes et le tempo. J’ai demandé aux élèves concernés d’expliquer la comparaison des poèmes aux chansons, il est ressorti de leurs réponses qu’ils les associent pour les similarités des structures : répétitions, rimes, présentation, etc. Cette comparaison est également présente dans la classe B pour 8 élèves sur 25, mais un seul parle des rimes. Par ailleurs, dans la classe B, 4 élèves font ressortir des caractéristiques qui semblent liées à leur vécu scolaire : la récitation, la difficulté de la lecture qui nécessite une certaine concentration. Je ne retrouve cette dimension que chez un seul élève de la classe A, qui souligne l’importance de « mettre le ton ».

Quant au contenu des poèmes, il est pratiquement exclusivement rapporté aux émotions et à la beauté des textes. On retrouve donc ici la dimension sacrée du poème chez 6 élèves dans la classe B et 5 dans la classe A au moyen d’adjectifs comme « magnifique », « beau ». Mais il est intéressant de remarquer que le vocabulaire leur manque pour décrire cette caractéristique, on trouve ainsi des adjectifs comme « doux », « romantique » sans que les élèves puissent expliquer clairement le sens qu’ils leur attribuent. Certains, même, expriment l’évidence : « la poésie c’est les poèmes ». Par ailleurs, dans la classe B, deux autres éléments

apparaissent dès la première période : 3 élèves écrivent que les poèmes peuvent être drôles et 7 écrivent qu’ils « aiment bien » la poésie. Cette dernière disparaît des deux autres recueils, alors que l’aspect amusant réapparait à chaque fois et apparaît dans la classe A en cinquième période.

L’évolution de ces conceptions en cinquième période permet d’analyser l’impact du travail réalisé dans l’année au travers des dispositifs décrits plus haut. Ainsi, concernant la forme des poèmes, la caractéristique rimique reste très présente, mais elle est accompagnée d’autres critères qui sont parfois nuancés. Par exemple, en fin de période 5, 16 élèves sur 28 de la classe B parlent des rimes mais quelques-uns nuancent en ajoutant « pas toujours ». Dans la classe A, les rimes sont citées en plus grand nombre en cinquième période (13 sur 28 en cinquième période contre 3 sur 24 en première période), et la comparaison aux chansons n’est plus présente mais la comparaison avec les comptines apparaît. Je pense que c’est un moyen de parler de la spécificité des structures sans savoir exactement comment l’exprimer, tout en essayant d’éviter de mettre en évidence les rimes, puisque cette question avait été débattue en classe. Par ailleurs, pour la forme, de nouvelles caractéristiques apparaissent en cinquième période. Il y a l’auteur, le titre, la structure répétitive dans la classe B, ce qui s’explique par le travail effectué autour de l’anaphore, mais aussi les mots inventés et les jeux avec les mots, ce qui s’explique par les ateliers d’écriture collective réalisés en quatrième période. Il y a également un constat de l’existence de différents types de poèmes, ce qui montre que le poème ne leur apparaît plus comme une entité bien définie avec une forme toujours identique. Et enfin, l’objet livre apparaît en milieu de cinquième période, et l’on peut penser que cela vient du travail sur le recueil de Jean-Pierre Siméon.

Concernant le contenu des poèmes, les élèves font toujours allusion au fait que les poèmes sont beaux. Mais cet aspect a évolué au cours de l’année, déjà le vocabulaire est plus sûr, ils parlent d’ « émotions » et de « sentiments », de « joie » et de « tristesse ». Dans la classe A, on passe de 5 élèves qui évoquent cela à 17 en milieu de cinquième période ; et dans la classe B, on passe de 11 à 24 élèves. De plus, j’ai vu apparaître des éléments dont on avait débattu en classe, notamment dans la classe B où une élève a écrit que les poèmes racontent des histoires en début de cinquième période. Cet élément a été l’objet de discussions et quelques élèves ont repris à leur compte certaines dimensions dans leurs conceptions en milieu de cinquième période. Pour s’appuyer sur les chiffres, 7 élèves indiquent que les poèmes racontent des

histoires en début de cinquième période contre 11 en milieu de période. De plus, dans un premier temps un seul élève ajoute que les poèmes peuvent « parler de tout », et en milieu de cinquième période, on voit apparaître deux notes affirmant que les poètes écrivent sur le monde qui les entoure et deux qui mentionnent l’imagination et l’invention dans l’écriture de poèmes. Cet aspect est quasiment absent dans la classe A. Un seul élève fait allusion aux histoires racontées par les poèmes en première période, puis cette conception disparaît jusqu’au milieu de la période où là un élève souligne le fait que l’imagination est nécessaire pour écrire des poèmes et que ceux-ci peuvent « emmener dans un autre monde ». Il apparaît ici qu’il est plus difficile de faire saisir aux élèves les caractéristiques du contenu des poèmes. Il faudrait en effet leur faire comprendre que c’est dans le décalage et l’inattendu que les poèmes prennent leur sens. Peut-être que c’est pour cette raison que la notion de « drôle » revient souvent dans les conceptions des élèves, et qu’ils hésitent à parler d’histoire racontée. Néanmoins, on peut tout de même penser que le travail réalisé en classe a permis de faire évoluer leurs conceptions. L’évolution des conceptions n’est pas la même d’une classe à l’autre, mais peut-être que cela s’explique par le choix des textes proposés aux élèves en poèmes de la semaine. Peut- être une caractéristique était plus présente dans les textes d’une classe que de l’autre, cela peut expliquer l’absence de l’aspect narratif des poèmes dans la classe A. Ou bien est-ce l’émulation entre pairs qui met en avant certains aspects et en élude d’autres.

D’autres conceptions d’élèves de la cinquième période montrent l’effet des dispositifs mis en œuvre en classe. Je parlais plus haut de la présence dans la classe B de caractéristiques liées au vécu scolaire des élèves en première période, celles-ci disparaissent pratiquement en cinquième période pour laisser la place à la mise en voix : « il faut mettre le ton » apparaît une fois et « il y a différentes façons de le dire » également. On peut donc penser que les ateliers de mise en voix ont rendu les poèmes plus accessibles aux élèves et leur ont révélé l’importance de l’énonciation de ces textes. Cette dimension est aussi présente dans la classe A mais de façon plus maladroite. Trois élèves écrivent qu’un poème « se chante » et cinq qu’il s’apprend par cœur en milieu de cinquième période, mais l’un d’entre eux explique que l’on peut « jouer avec ».

Malgré l’absence d’un réel « bain de poésie » en classe, on peut dire que le travail d’explicitation des caractéristiques des poèmes a eu une influence sur les conceptions

des élèves. L’aspect sacré s’estompe pour laisser la place à d’autres éléments comme la narration d’histoire, les émotions, les jeux avec les mots, etc. On peut donc espérer que cela ait une influence sur la lecture et l’interprétation des textes poétiques tout comme sur les ateliers d’écriture.

2. L’analyse formelle des textes : lecture-compréhension et

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