• Aucun résultat trouvé

BAI3, cible thérapeutique potentielle dans le traitement des cancers ?

IV. BAI3, une nouvelle cible thérapeutique?

IV.2. BAI3, cible thérapeutique potentielle dans le traitement des cancers ?

Comme nous l’avons vu en introduction, le premier des trois membres de la famille des récepteurs BAI, BAI1, a été caractérisé comme gène cible du suppresseur de tumeur p53 (Nishimori et al., 1997). Par la suite, des études ont montré l’existence d’une corrélation entre la diminution de l’expression des récepteurs BAI et la progression des gliomes vers leur forme maligne : les glioblastomes et leur néovascularisation (Shiratsuchi et al., 1997). De plus, un criblage génétique réalisé sur des tumeurs issues de différents organes a mis en évidence la présence de différentes mutations dans les gènes codant les récepteurs BAI dans certains types de cancers. En particulier, BAI3 est muté dans les cancers du poumon non à petites cellules (Kan et al., 2010). La régulation du cytosquelette d’actine par les RhoGTPases joue un rôle important dans le développement tumoral. Rac1 est notamment impliqué dans le départ en migration des cellules invasives et dans l’angiogenèse tumorale. Dans les gliomes, la suractivation de Rac1 par le GEF non conventionnel ELMO1/Dock180 joue un rôle important dans la migration des cellules invasives (Jarzynka et al., 2007). La voie de signalisation ELMO1/Dock180/Rac1 est aussi impliquée dans la régulation de l’angiogenèse essentielle au développement tumoral (Kaur et al., 2005; Jeong et al., 2006; Kang et al., 2006; Epting et al., 2010; Klenotic et al., 2010). Nos travaux ont mis en évidence l’interaction du récepteur BAI3 avec la protéine cytoplasmique ELMO1 et son implication dans le contrôle de l’activation des RhoGTpases. Notamment, nos données suggèrent une inhibition de Rac1 dans des cellules hétérologues au cours du processus d’étalement. Ce processus précède la migration cellulaire dans plusieurs systèmes. Ainsi, BAI3 pourrait réguler différentes voies en amont des RhoGTPases selon le type cellulaire dans lequel il est exprimé, et diminuer la migration des cellules malignes. La présence de mutations dans sa queue cytoplasmique (Kan et al., 2010) pourrait induire un mauvais repliement de la protéine, empêchant son interaction avec les partenaires intracellulaires menant à ces régulations, donnant ainsi lieu à une aggravation du processus de tumorigénèse. Ces données suggèrent donc l’implication des récepteurs BAI dans le contrôle de la tumorigenèse, notamment lors de la métastatisation et de

la formation de tumeurs secondaires, qui nécessitent un important remodelage du cytosquelette d’actine.

De nombreuses voies de signalisation impliquées dans le développement normal du SNC jouent également un rôle dans la tumorigenèse et l’angiogenèse (Wechsler-Reya et Scott, 2001; Chédotal et al., 2005). Par exemple, les molécules de guidage axonal sémaphorines et leur récepteur neuropiline 1, ou encore les molécules Slit et leurs récepteurs ROBO ont été caractérisées dans la progression tumorale (Chédotal et al., 2005). Ainsi, la mise en évidence de BAI3 en amont du module ELMO1/Rac1, fortement impliquée dans le développement et la métastatisation des cancers, constitue une nouvelle ouverture dans la recherche et le développement de molécules thérapeutiques. De plus, les récepteurs BAI appartiennent à l’importante famille des RCPG qui, par leur diversité structurale, le grand nombre de ligands et les multiples voies de signalisation qu’ils activent, sont impliqués dans de nombreux processus physiologiques et constituent l’une des cibles majeures des molécules thérapeutiques actuellement sur le marché et en développement (Bjarnadóttir et al., 2007; Bridges et Lindsley, 2008; Rosenbaum et al., 2009; Bouvier, 2012).

Conclusion générale

Au cours de ces travaux, nous avons montré que le récepteur BAI3, localisé à la surface des dendrites en formation, régule le développement de l’arborisation dendritique, partiellement via son interaction avec ELMO1. Chez l’adulte, il se concentre dans la tête des épines dendritiques, au niveau de la PSD, probablement grâce au motif QTEV de liaison aux domaines PDZ situé à son extrémité C-terminale. Nos données suggèrent aussi que BAI3 pourrait être impliqué dans la compétition entre les fibres parallèles et les fibres grimpantes pour leur territoire d’innervation sur les cellules de Purkinje. D’un point de vue plus général, nos travaux mettent en évidence l’implication du RCPG d’Adhésion BAIγ dans le développement neuronal via la régulation des RhoGTPases.

Différentes questions seront à aborder ultérieurement. Tout d’abord, il faudra déterminer si BAI3 régule le développement précoce des épines dendritiques. En effet, nous avons montré qu’il n’est pas impliqué dans la plasticité des épines, mais il semble en revanche jouer un rôle dans la mise en place de l’innervation excitatrice des cellules de Purkinje. Dès lors, il est possible que BAI3 permette la stabilisation des épines en formation, ou au contraire induise leur élimination. Les ligands de BAI3, les protéines C1ql, ont été mis en évidence dans l’inhibition de la formation des synapses. Il sera donc nécessaire de déterminer le rôle exact de ces protéines au niveau des neurones de l’olive inférieure où elles sont exprimées, notamment dans la mise en place des synapses fibres grimpantes/cellules de Purkinje. Enfin, les données que nous avons obtenues suggèrent l’existence de plusieurs cascades intracellulaires en aval du récepteur BAI3 dans la régulation du développement neuronal. L’une d’elles semble impliquer le GEF non conventionnel ELMO1/Dock180 et induirait l’activation de Rac1. Il faudra par la suite mettre en évidence de manière directe la régulation par BAIγ de l’activation de Rac1 dans les neurones en développement. Il sera également nécessaire de déterminer les autres partenaires, notamment les protéines G, qui interagissent avec BAI3 dans le cytoplasme.

De manière plus générale, nous avons montré le rôle important du récepteur BAI3 dans le développement neuronal. Étant donné le possible lien génétique existant entre ce récepteur et certains symptômes de la schizophrénie, nos travaux identifient les récepteurs BAI comme de nouveaux acteurs de la morphogenèse neuronale et offrent ainsi de nouvelles perspectives dans l’étude des maladies neurodéveloppementales. Des modèles animaux délétés du gène

codant pour BAI3 devront notamment être générés pour analyser, par des études comportementales, l’implication de ce récepteur dans les différents symptômes de ces maladies.

Annexe : Matériels et méthodes