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9.B.5 Pendule de Foucault

Dans le document Mécanique I (Page 180-184)

Considérons maintenant un pendule harmonique de très faible amplitude, sur la Terre, et étudions l’effet de la force de Coriolis sur un tel pendule. On suppose bien sûr que l’oscillation du pendule est approximative- ment confinée à un plan, mais nous allons voir que ce plan est en rotation en raison de la rotation même de la Terre et qu’il s’agit d’une preuve directe de la rotation de la Terre sur elle-même.

Utilisons un système de coordonnées cylindriques où l’axe z est vertical. Si le pendule se trouve à une latitude λ, alors le vecteur de vitesse angulaire de la Terre est

Ω = Ω(cosλ ex+ sinλ ez)

= Ω(eρcosϕ − eϕsinϕ)cosλ + sinλ ez

 (9.42)

(on suppose que l’axe x est dirigé vers le nord). La position du pendule est

r= ρeρ+ z ez (9.43)

et sa vitesse est

v= vρeρ+ vϕeϕ+ vzez (9.44) La force de Coriolis est alors

FCor.= −2mΩ ∧ v

= −2mΩ(cosλcosϕ eρ− cos λ sin ϕ eϕ+ sinλ ez) ∧ (vρeρ+ vϕeϕ+ vzez) = −2mΩ(vϕcosλcosϕ + vρcosλsinϕ)ez+ 2mΩ(vzcosλsinϕ + vϕsinλ)eρ

− 2mΩ(vρsinλ − vzcosλcosϕ)eϕ

(9.45)

La force totale sur le pendule est la somme de la force de tension du câble, de la force gravitationnelle et de la force de Coriolis :

m a= T − mg ez+ FCor. (9.46)

Nous ne résoudrons pas cette équation complètement, mais seulement sa composante enϕ. Comme la ten- sion et la force gravitationnelle n’ont pas de composante enϕ, tout se simplifie :

ρ ¨ϕ + 2 ˙ρ ˙ϕ = −2Ω(vρsinλ − vzcosλcosϕ) (9.47) Puisque, par hypothèse, l’amplitude de l’oscillation du pendule est petite, on peut négliger vzen tout temps. Comme vρ= ˙ρ, on écrit donc

ρ ¨ϕ + 2 ˙ρ ˙ϕ = −2Ωsinλ ˙ρ (9.48)

La solution de cette équation peut être compliquée en général, car elle celle-ci est couplée aux autres compo- santes de l’équation du mouvement par la présence deρ et ˙ρ. Cependant, il existe une solution particulière simple, obtenue en supposant que ˙ϕ est une constante, ce qui signifie que le plan d’oscillation du pendule tourne à une vitesse constante. Dans ce cas, ¨ϕ = 0 et le facteur ˙ρ se simplifie. Il reste

˙

ϕ = −Ωsinλ (9.49)

En intégrant sur une période Tpr.de précession, on trouve

Tpr.=

2π Ωsinλ=

T0

sinλ (9.50)

C. Mouvement libre d’un rigide : équations d’Euler

• Le signe de la relation (9.49) nous renseigne sur la direction de la précession. Dans l’hémisphère nord (λ > 0), ˙ϕ est négatif et donc le plan du pendule précesse dans le sens horaire, alors que c’est le contraire dans l’hémisphère sud.

• À l’équateur (λ = 0) il n’y a aucune précession. Au pôle nord (λ = π/2), la période de précession est 2π/Ω, soit la période de rotation de la Terre, comme il va de soi. À la latitude de Sherbrooke (∼ π/4), la période de rotation est d’environ 3312heures.

• La précession du pendule a été démontrée publiquement par FOUCAULTen 1851 et constitue une preuve que c’est la Terre qui est en rotation sur elle-même et non la voûte céleste !

On peut se demander, avec raison, si la formule (9.50) est spécifique à l’hypothèse que ˙ϕ est constant, ou si elle est plus générale. Pour s’en assurer, on peut introduire une nouvelle coordonnée angulaireα qui tourne à la vitesse de précession présumée du pendule, c’est-à-dire qu’on définit

ϕ = −Ωsinλ t + α =⇒ ˙ϕ = −Ωsinλ + ˙α (9.51)

En substituant dans l’équation (9.48), on trouve simplement

ρ ¨α + 2 ˙ρ ˙α = 0 , (9.52)

En multipliant par le facteur intégrantρ, on trouve une dérivée totale : 0= ρ2α + 2ρ ˙ρ ˙α =¨ d

dt(ρ

2α)˙ (9.53)

et on conclut queρ2α est constant. Cette quantité (multipliée par m) est en fait la composante en z du mo-˙

ment cinétique du pendule, mais évaluée dans un repère tournant à la vitesse de précession. Le fait que cette quantité soit constante dans le temps signifie que le pendule, en fonction de la coordonnéeα, se comporte exactement comme un pendule ordinaire en fonction de la coordonnéeϕ, mais dans un référentiel iner- tiel. Dans ce cas, le mouvement du pendule ne montre aucune précession, mais une orbite elliptique dont l’orientation est fixe (avec le point d’équilibre au centre de l’ellipse et non à l’un des foyers). On en conclut que, même en ne supposant pas que ˙ϕ est constant, la précession du pendule s’accomplit à la vitesse −Ωsinλ.

C

Mouvement libre d’un rigide : équations d’Euler

Nous avons affirmé à la section8.Hque le mouvement d’un objet rigide sur lequel ne s’applique aucun couple est plus facile à étudier dans un système d’axes liés à l’objet, en particulier si ces axes sont des axes principaux de l’objet. Un tel système d’axes constitue un référentiel tournant. La relation (9.11) nous permet maintenant d’étudier plus en profondeur le mouvement d’un tel objet.

Si aucun couple ne s’applique sur l’objet, son moment cinétique (évalué au centre de masse) est constant. Cependant, les composantes du moment cinétique par rapport au système d’axes fixes à l’objet ne sont pas constantes. Désignons par e1, e2et e3les trois vecteurs unitaires dirigés le long des axes principaux, fixes par

rapport à l’objet. Plaçons-nous dans ce système d’axes tournants ; la vitesse angulaire du référentiel estω, soit la vitesse angulaire de l’objet. Dans ce référentiel, les composantes du moment cinétique ne sont pas constantes ; leurs dérivées par rapport au temps sont obtenues par la relation (9.11) :

dJ dt ‹ i= dJ dt ‹ r+ ω ∧ J = 0 (9.54) Comme J= Iω, où I est la matrice d’inertie, cette équation peut s’écrire

Dans le système des axes principaux, la matriceI est diagonale et

J= I1ω1e1+ I2ω2e2+ I3ω3e3 (9.56)

L’équation matricielle ci-haut équivaut au système d’équations suivant, appelé équations d’Euler : I1ω˙1+ (I3− I22ω3= 0

I2ω˙2+ (I1− I33ω1= 0

I3ω˙3+ (I2− I11ω2= 0

(9.57)

FIGURE9.5

Orientation relative des vecteurs J etω dans le problème de la nutation d’un objet libre.

J ω ω3 ω axe 3 axe α I3ω3 Iω n

Supposons maintenant que l’objet possède un axe de symétrie – disons l’axe 3 – et donc que I1= I2= I⊥et ce

système d’équations se réduit à ˙ ω1+ γω2ω3= 0 ˙ ω2− γω3ω1= 0 ˙ ω3= 0 où γ =I3− II (9.58)

Donc, dans ce cas,ω3est constant. D’autre part, en différentiant la première équation et en substituant dans

la deuxième, on trouve

¨

ω1+ (γω3)2ω1= 0 (9.59)

La solution de cette équation nous est bien connue :

ω1(t ) = A cos(Γ t + φ) Γ = γω3 (9.60)

où A etφ sont des constantes déterminées par les conditions initiales. De même, ω2oscille avec la même

fréquence et s’obtient directement de la première des équations (9.58) :

ω2(t ) = −A sin(Γ t + φ) (9.61)

Le vecteurω= ω1e1+ ω2e2tourne donc dans le temps dans ce référentiel, à une fréquenceΓ = γω3. La

grandeurω⊥de cette projection est fixe dans le référentiel lié à l’objet, et donc dans le référentiel inertiel

également (la grandeur d’un vecteur ne change pas d’un référentiel inertiel à un référentiel en rotation). D’autre part, commeω3est constant, la grandeur du vecteurω est fixe dans les deux référentiels, mais ce

vecteur précesse autour de l’axe e3 dans le référentiel fixe à l’objet. Ce mouvement de rotation est appelé

nutation.

Considérons maintenant la figure9.5. Le vecteur J est fixe dans l’espace. Nous venons de voir aussi que le vec- teurω tourne autour de l’axe e3; la fréquence de cette rotation, vue du référentiel lié à l’objet, estΓ . Comme

D. La toupie symétrique : angles d’Euler

ω3est constant dans le temps, I3ω3= J3l’est aussi : la composante de J le long de l’axe e3est constante dans

le temps et donc l’angleα entre e3et J est constant. Enfin, la projection deω sur J est elle-aussi constante

dans le temps, car l’énergie cinétique de rotation, qui est constante, est 12J· ω ; les grandeurs de J et de ω étant constantes, l’angle entre J etω l’est donc aussi. Donc les trois vecteurs e3,ω et J sont rigides les uns par

rapport aux autres. Appelons S3le référentiel dans lequel ces trois vecteurs sont fixes. Ce référentiel, donc

l’axe e3et le vecteurω, tourne autour de J à une fréquence Ω, la véritable fréquence de nutation observée,

qui n’est pas identique àΓ , comme nous allons le voir.

Le référentiel S3est en rotation par rapport aux axes fixes à l’objet. La vitesse angulaire de cette rotation est

précisémentΓ e3: c’est la vitesse angulaire deω par rapport aux axes fixes, tel que démontré par les équations

d’Euler. Or, la rotation de S3par rapport à l’espace – de vitesse angulaireΩez– est la composition de la rotation

de S3par rapport à l’objet – de vitesse angulaireΓ e3 – et de la rotation de l’objet par rapport à l’espace –

de vitesse angulaireω. Autrement dit, la rotation de S3 par rapport à l’espace s’obtient en ajoutant deux

mouvements de rotation – et donc deux vitesses angulaires, comme suit :

Ωez= Γ e3+ ω (9.62)

En projetant cette relation sur le vecteur e3, on trouve

Ωcosα = Γ + ω3=

I3

I

ω3 (9.63)

La fréquence de nutation est donc

Ω = I3

I ω3

cosα (9.64)

Par exemple, dans le cas d’un disque plat de rayon a , on montre que I⊥=14m a2et on sait que I3=12m a2. Si

la nutation est de petite amplitude (α petit), alors cosα ≈ 1 et la fréquence de nutation observée est environ deux fois la vitesse angulaire de rotationω3de l’objet. Si une flèche, dessinée sur le disque, en indiquait

l’orientation, alors deux périodes de nutation se produiraient dans le temps que la flèche fait une rotation complète.

Il est tentant d’appliquer ce calcul à la rotation de la Terre. La Terre étant légèrement aplatie mais symétrique par rapport à son axe, on a I1= I2< I3. On évalue le rapportγ à

γ = I− I

I′ ≈ 0, 00327 (9.65)

En théorie, la périodeΓ de nutation de la Terre (par rapport aux axes fixes à la Terre) devrait être de 306 jours. Cependant, la réalité est plus compliquée, car la Terre n’est pas un objet parfaitement rigide ! Un mouvement de nutation de faible amplitude (environ 15 m d’amplitude au pôle Nord) est observé, mais il n’est pas ré- gulier, c’est-à-dire qu’il est la superposition de plusieurs mouvement de fréquences différentes. Il comporte une composante annuelle attribuée aux saisons (reliée au mouvement des masses d’air, etc.) et une autre composante importante d’une période de 420 jours, qui correspond plus à la nutation prédite. Cette période plus longue que prévu (420 jours au lieu de 306) peut être attribuée à l’élasticité interne de la Terre.

FIGURE9.6

Définition des angles d’Euler. Le plan perpen- diculaire à l’axe de la toupie coupe le plan x y le long de la ligne des noeuds (axe e1), et cette ligne fait un angleφ avec l’axe des x . L’axe de la toupie (e3) est incliné d’un angleθ par rap- port à la verticale (l’axe des z ). Cette rotation d’un angleθ est effectuée autour d’un axe e1. Ensuite, la toupie effectue une rotation d’angle

ψ par rapport à son axe.

θ

ψ

φ

z

x

e

3

e

1

D

La toupie symétrique : angles d’Euler

Dans cette section nous allons étudier plus en détail le mouvement de précession et de nutation d’une toupie ou d’un gyroscope dont un point est fixe. Nous ne supposerons pas nécessairement que la toupie est rapide ou que la précession est uniforme, contrairement à ce qui a été fait à la section8.G. Pour ce faire, il est toutefois utile d’utiliser des axes fixes à l’objet, donc un référentiel tournant.

Dans le document Mécanique I (Page 180-184)