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Autres maladies avec implication éosinophilique

Chapitre 3 : Les éosinophiles

3.2 Implications dans les pathologies humaines et la santé

3.2.3 Autres maladies avec implication éosinophilique

Le recrutement éosinophilique est un signe clinique nouvellement documenté dans plusieurs maladies. Souvent, leur implication dans le processus pathologique est confirmée par une diminution des symptômes à la suite de leur déplétion avec des glucocorticoïdes. Cependant, les divers mécanismes par lesquels l’inflammation éosinophilique contribue au développement de ces maladies ne sont pas encore totalement élucidés (Jacobsen et al., 2012). Une première maladie associée aux éosinophiles est l’œsophagite éosinophilique. Celle-ci est caractérisée par un recrutement éosinophilique au niveau des couches musculaires successives constituant l’œsophage. Des modèles murins de la maladie et des patients atteints possèdent des niveaux élevés de médiateurs solubles, dont l’IL-5 et l’éotaxine, pouvant recruter les éosinophiles au niveau de l’œsophage. Lorsqu’elle n’est pas traitée, l’œsophagite éosinophilique peut induire un remodelage graduel de l’œsophage ainsi qu’au développement d’une fibrosténose (Miehlke, 2015). L’application topique de corticostéroïdes est une thérapie permettant de contrôler les

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symptômes chez les patients. Cependant, l’adoption d’une diète restrictive éliminant des aliments au fort potentiel immunogène tels que les œufs, le lait et le miel demeure une des meilleures options de traitement. L’utilisation systémique d’agents bloquant les cytokines impliquées dans la pathogenèse est une autre option de traitement dont l’efficacité est présentement à l’étude (Sodikoff et al., 2015).

Le syndrome métabolique est une condition caractérisée par l’augmentation des risques de maladies cardiovasculaires, d’accidents vasculaires cérébraux et de diabète de type deux. Il a été démontré in vivo que les éosinophiles résidents des tissus adipeux participent largement à la différenciation des macrophages résidents vers le phénotype M2, nécessaires à la régulation de l’homéostasie du glucose et permettant une sensibilité normale à l’insuline, via la libération d’IL-4. Le nombre d’éosinophiles présents dans le tissu adipeux serait aussi inversement proportionnel avec la déposition de graisses (Jacobsen et al., 2012, Kaur, 2014). Ainsi, un mauvais recrutement des éosinophiles au sein des tissus adipeux augmenterait la susceptibilité de développer un diabète de type deux, car plus de graisses seraient déposées dans les tissus adipeux, tout en compromettant la sensibilité à l’insuline. Il est intéressant de noter que l’éosinophilie induite par l’infection avec des vers parasites a permis de récupérer une tolérance au glucose normale chez un modèle de souris nourries avec une diète riche en gras (Wu et al., 2011).

Les maladies inflammatoires de l’intestin sont des pathologies du système digestif. Celles-ci sont caractérisées par de l’inflammation chronique induisant un remodelage tissulaire. Les signes cliniques classiques sont la présence de diarrhée, la constipation et la perte de poids. Les deux types de maladies inflammatoires de l’intestin les plus courantes sont la colite ulcéreuse et la maladie de Crohn. Alors que dans la colite ulcéreuse l’inflammation se limite majoritairement au colon, dans la maladie de Crohn l’inflammation peut s’étendre sur l’entièreté du tube digestif (Kaser et al., 2010). Considérant leur rôle dans la défense du corps contre les vers parasitaires, une forte présence éosinophilique au niveau de l’estomac et des intestins est courante. Cependant, en présence de maladies inflammatoires de l’intestin actives, la dégranulation des éosinophiles est augmentée dramatiquement. Cela pourrait ainsi contribuer au remodelage tissulaire caractéristiquement observé au cours de ces maladies (Masterson et al., 2011). De plus, lors de modèles murins de maladies inflammatoires de l’intestin, l’absence d’éosinophiles est associée à une diminution du nombre, du niveau d’activation et du potentiel d’activation des lymphocytes Th2 CD4+ résidents des ganglions (Lampinen et al., 2008). Elle est aussi associée

à un ralentissement de la progression de la maladie et permet même d’empêcher l’induction chimique de la maladie par des agents classiques tels que le dodécylsulfate de sodium (Vieira et

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al., 2009). Ainsi, la présence éosinophilique est nécessaire à la protection de l’hôte envers les

parasites intestinaux. Or, leur trop forte activation exacerberait des symptômes des maladies inflammatoires de l’intestin (Jacobsen et al., 2012).

Le rejet de greffes d’organes solides est un processus impliquant les réponses immunitaires innée et adaptative. Celui-ci est caractérisé par l’activation des lymphocytes T de l’hôte à la suite de la reconnaissance des antigènes du greffon en tant que molécules du « non-soi ». L’activation des lymphocytes T permet l’induction de leur expansion clonale et leur différenciation en cellules effectrices, favorisant ainsi la destruction du greffon. Le rejet de greffe est associé à une augmentation de la mortalité et de la morbidité de l’hôte (Ingulli, 2010). La présence d’éosinophiles dans les organes greffés ayant été rejetés est fréquente et elle est même employée en tant que marqueur d’un rejet de greffe de type aigu (Cromvik et al., 2014). Par ailleurs, certaines études menées sur des modèles murins indiquent que les éosinophiles seraient directement impliqués dans l’induction du rejet de greffe (Goldman et al., 2001, Jacobsen et al., 2012). Ainsi, dans un modèle d’allogreffe avec des CMH incompatibles, il y aurait moins d’inductions de rejets en absence d’éosinophiles (Le Moine et al., 1999). Ces granulocytes participent aussi à l’induction de fibrose associée à la maladie du greffon contre l’hôte. En effet, ils libèrent de la MBP, pouvant activer la libération de tryptase par les mastocytes, et du TGF-β, participant au remodelage de la matrice extracellulaire (Jacobsen et al., 2012). De plus, dans un modèle de la maladie du greffon contre l’hôte chronique à la suite d’une transplantation cardiaque, il y aurait moins de signes de fibrose (moins de dépôts de collagène et d’élastine) en absence d’éosinophiles (Chen et al., 2011). En somme, les éosinophiles activés jouent un rôle relativement mineur mais actif dans le rejet de greffe aigu ou chronique, car ils contribueraient au remodelage tissulaire et au développement de fibrose, menant à la destruction du greffon.