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7 FREINS À LA MISE EN PLACE DES MÉTHODES DURABLES

7.3 Autres freins à l’implantation de méthodes durables

plein, les emplois sont de faible qualité et les salaires trop bas pour ces emplois considérés comme dangereux. Ces localités deviennent peu attrayantes pour des industries durables offrant des emplois mieux rémunérés, à venir s’y installer. (Allen at autres, 2007; Stokstad, 2008)

7.3 Autres freins à l’implantation de méthodes durables

Plusieurs autres raisons inter-reliées (figure 7.1) sont mises en cause en regard à l’inaction reliée à la pollution grandissante par les lisiers. Effectivement, les grandes entreprises porcines démontrent peu de motivation à faire pression en ce qui a trait à l’amélioration et aux changements de pratiques (Henderson, 2015). Mais ce n’est pas tout. La question environnementale occupe une infime place dans la liste des priorités de la population, en raison de la situation sociale et économique déficiente de la population et le bas niveau d’éducation des travailleurs du milieu de l’élevage (USGAO, 2008).

Figure 7.1 Les multiples raisons de mauvaise gestion du lisier (tiré de Lindgren, 2013)

Aussi, les comtés avec de forte concentration d’élevage porcin sont souvent des lieux où les entreprises porcines sont les principaux employeurs. En Caroline du Nord, la compagnie Smithfield Food Inc. emploie à elle seule plus de 46 000 personnes. La prévalence de l'industrie porcine dans certains comtés signifie que presque toute la population est connectée de près ou de loin à l'entreprise porcine. (Nicole, 2013; USGAO, 2008) Il est alors plus délicat de confronter l’entreprise avec des requêtes pour une meilleure protection environnementale, ou encore moins d’intenter une poursuite en justice contre leurs pratiques pour nuisance. Comme le dit le proverbe, « on ne mord pas la main qui nous nourrit ».

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Parallèlement, la législation fédérale n’apporte aucune aide significative pour que la situation s’améliore. On observe peu de surveillance fédérale de ces opérations d’élevage et seulement 40 % des 20 000 grandes exploitations d'élevage porcin aux États-Unis sont règlementées en vertu du CWA (Ribaudo et autres, 2011). En effet, seulement les EEI conçues pour décharger directement dans les cours d'eau ou autres sources d'eau fédérale sont tenus de demander des permis fédéraux en vertu de la CWA (Peach, 2014). La situation n’est guère mieux du côté de la législation des états, car dans les états de la Caroline du Nord et de l’Iowa, beaucoup d’inspecteurs responsables de la surveillance de la gestion du lisier ont perdu leur emploi dans les dernières années. Il y a, par le fait même, une diminution de personnel en charge d’assurer le respect des règlements et également moins d’aide techniques aux agriculteurs (USGAO, 2008). Un autre élément important relevé est en regard aux subventions dérisoires accordées pour les mesures environnementales qui sont loin d’être un incitateur positif pour les éleveurs. Depuis les années 1980, les subventions reliées à la conservation en agriculture ont augmenté de 500 %, mais le financement d’aide technique n’a augmenté que de 60 % (Shortle et autres, 2012) Tous ces éléments mis ensemble illustrent bien la très faible motivation du gouvernement à s’impliquer dans un changement en faveur de l’environnement. Les ressources gouvernementales diminuent alors que l’élevage s’intensifie, ce qui nous laisse croire que l’agriculture est reléguée au second plan.

D’autre part, depuis que l’entreprise Smithfield Food Inc. a investi dans la recherche de nouvelles pratiques alternatives il y a de cela 15 ans et qu’elle a échoué, le gouvernement ne demande pas aux industries de financer d’autres recherches. Malgré le fait qu'il y ait de plus en plus d'études (Burkholder et autres, 2007; Mallin et autres, 2000; Wing et autres, 2002) documentant les impacts des lagunes et de la contamination par le lisier, la correction du système ne semble pas faire partie de la liste actuelle des priorités du gouvernement. Certains états ont même mis en place des règlements interdisant aux nouveaux résidents dans un quartier de déposer des poursuites de nuisance contre les élevages porcins. Une autre modification proposée exigerait que les résidents perdant leur cause de nuisance qu’ils remboursent les frais juridiques des exploitations poursuivies. Depuis 2014, les états deviennent aussi beaucoup moins transparents. Ils omettent de divulguer le nombre de plaintes portées contre les fermes porcines. On affiche plutôt seulement celles qui ont abouti à des avis de violation. (Ribaudo et autres, 2011; Nicole, 2013; Peach, 2014; Food and Water Watch, 2015)

Parallèlement, les lobbys de l’industrie de la viande gagnent en puissance (Ribaudo, 2011). Dans l’éventualité de violation des règlementations environnementales, les probabilités de sanctions juridiques restent plutôt faibles. La raison principale est surtout que la règlementation présente certaines

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failles et qu’elle n’est souvent pas appliquée correctement, en raison du manque d’inspecteurs ou simplement qu’elle ne s’applique pas à l’élevage comme le CAA. Toutefois, s’il arrive qu’une entreprise doive payer une amende pour violation, il semble plus facile et plus économique de payer les frais pour cette violation, même plusieurs fois, que d’apporter les améliorations nécessaires.

En terminant, que l’on parle de la situation économique des éleveurs, des contrats des intégrateurs, des travailleurs illégaux ou des règlements non appliqués, il ressort clairement que plusieurs freins entravent actuellement la mise en place de gestion durable du lisier. Les rapprochements et l’union des différents acteurs seront essentiels pour voir émerger une situation plus positive. La protection environnementale ne devrait pas entraver la productivité d’une ferme et être une barrière au développement économique. Les multinationales, comme l’entreprise Smithfield Food Inc., devraient être des compagnies avant- gardistes et être des leaders du développement durable en exigeant de hauts standards aux éleveurs et en rendant disponible des moyens financiers pour leur permettre d’atteindre les objectifs visés. En utilisant des méthodes durables à grande échelle, telle que la fabrication de biogaz, ces technologies deviendraient plus accessibles financièrement, rayonneraient dans tout le pays et pourraient se propager plus rapidement.

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