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3.   ANALYSE DE L’ÉTAT DE L’ART

3.1.   L ES ÉMOTIONS ET LES ATTITUDES

3.1.2.   Les attitudes

Voyons la phylogénèse de la notion d’attitude au sein de la psychologie sociale, du modèle unidimensionnel au modèle multidimensionnel.

3.1.2.1. La perspective unidimensionnelle

Le concept d’attitude a été introduit au sein de la psychologie sociale à la fin du siècle dernier. Le terme « attitude » est alors utilisé pour pouvoir expliquer les réactions des individus face à une situation donnée. Les attitudes sont envisagées à partir de processus mentaux qui déterminent une réaction motrice (Thomas & Znaniecki, 1918). Selon cette théorie, les attitudes sont considérées comme des dispositions comportementales. Il s’agit, autrement-dit, d’une tendance générale vers ou contre certaines actions sociales. Dans cette perspective unidimensionnelle, l’attitude peut être mesurée selon des critères positif/négatif ou favorable/défavorable. De ce point de vue comportementaliste, les processus mentaux n’ont été évalués qu’à partir de l’acte effectué envers un objet ou une action, et ce qui n’est ni observable ni mesurable à travers une réaction (par exemple, l’attitude) n’appartient pas au domaine scientifique.

Ainsi, peu à peu, apparaît un « décalage » entre une attitude et la disposition à passer à l’action réelle qu’on mesure (voir par exemple les travaux conduits par LaPiere, 1934). Mais la relation entre l’attitude évaluée et l’action qui la suit n’a pas été clairement prouvée.

Dans cette situation, Allport (1935) a réclamé, par exemple, la nécessité d’une conception qui tiendrait compte de l’analyse et de l’évaluation qualitative des attitudes. Il définit le terme « attitude » comme suit :

An attitude is a mental and neural state of readiness which exerts a directing influence upon the individual’s response to all objects and

situations with which it is related2

(Allport 1935, p.810)

Dans cette perspective, la notion d’attitude est fondée par l’expérience d’un individu, et ce concept ne fait que guider un comportement envers un objet ou un évènement, en étant tout de même indispensable afin d’expliquer un comportement. Selon cette définition, il conçoit l’attitude comme un état mental et nerveux d’une part et, d’autre part, comme une notion distincte de l’émotion ou de l’instinct avec qui elle est

2 « Une attitude est un état mental et neuronal de disposition à passer à l’action, exerçant une influence directive sur les réponses de l’individu à tous les objets ou situations auxquels il est confronté » (traduit par l’auteur).

souvent confondue car l’attitude est un concept fondé par l’expérience, individuelle au sein de la société à laquelle l’individu appartient. Il reste cependant une part encore incomplète dans la notion d’état mental et nerveux. Ainsi, qu’en est-il du support physiologique et psychologique des attitudes ?

3.1.2.2. La théorie multidimensionnelle

Le concept d’attitude est principalement défini par rapport à sa représentation en mémoire ainsi qu’à son évaluation dans le temps. De fait, toutes les tentatives de définition du concept d’attitude du point de vue de ses propriétés intrinsèques ont été évacuées.

Il en résulte que les recherches actuelles traitent la notion d’attitude dans un cadre strictement opérationnel et formel (Stoezel, 1963) :

• une attitude caractérise un comportement dont l’orientation dépend d’une action liant un sujet à un objet. Une attitude est donc extrêmement versatile et ne peut être confondue avec un trait de caractère.

• l’orientation d’une attitude varie d’un extrême positif à un extrême négatif. • une attitude est le résultat d’une acquisition au sein d’une société et dépend donc de l’environnement du sujet.

Figure 1 : Trois composants pour l’attitude selon Rosenberg & Hovland, Attitude Organization and Change. (Ajzen & Fishbein, 1980 p.19)

Rosenberg & Hovland (1960) ont adopté le modèle multidimensionnel afin d’évaluer l’attitude. Dans cette conception, l’attitude s’articule selon un processus complexe de trois paramètres interagissant entre eux : l’affect (sentiment), la cognition et la conation, et on utilise ces trois paramètres pour évaluer systématiquement les

est un composant qui évalue la croyance à propos de cet objet. Enfin, la conation est un composant qui nous sert à évaluer les diverses tendances d’action envers cet objet (Figure 1)

Afin d’évaluer la multidimensionalité de l’attitude selon ces trois composants, Osgood (1966) a développé un modèle nommé « semantic differential » Il s’agit d’une évaluation systématique de l’attitude qui peut être observée selon les trois dimensions suivantes : évaluation (positive / négative), activation (forte / faible) et contrôle (volontaire / involontaire). Celle échelle d’évaluation de l’attitude est exploitée par Pakosz (1982) dans ses travaux traitant des caractéristiques de l’intonation pour des attitudes.

Chacun semble donc admettre l’acquisition des attitudes chez chaque sujet selon son expérience au sein de son environnement, ce qui les distingue des émotions ou de l’instinct. Elles se construisent au contact de situations externes ou de stimuli. Elles présupposent un tandem sujet-objet opérant selon trois axes : cognitif, affectif et comportemental. L’axe cognitif traite de l’idée que le sujet se fait de son environnement, comment il l’évalue. L’axe affectif procède des ajustements affectifs du sujet. Enfin, l’axe comportemental se rapporte à une réaction adoptée par le sujet, corrélative aux stimuli physiques et sociaux.

3.1.2.3. L’approche linguistique

Comme il a été vu précédemment, les émotions et les attitudes sont, selon les psychologues et les sociologues, toujours exprimées par les sujets au moyen de deux types de canaux comportementaux : physique (expressions du visage, gestualité) et langagier (langage et parole). De fait, les émotions et les attitudes font partie intégrante du langage.

On remarque alors que les recherches sur les attitudes et les émotions nécessitent d’explorer les rapports existants entre l’état des émotions et des attitudes et l’expression de celles-ci dans le langage. Il en résulte une grande variabilité : les états émotionnels et attitudinaux sont bien plus variés et complexes qu’on ne le postule souvent dans les modèles de base d’émotions fondamentales et discrètes (Scherer, 1996, 1998). En réponse à ce foisonnement, nombreux sont les spécialistes des attitudes et des émotions qui tentent de se rassembler au tour d’un « continuum attitude-émotion » dont l’intentionnalité et l’universalité seraient les critères majoritaires d’expression des attitudes et des émotions.

Ohala (1996), lui, tient compte de l’aspect ethnologique des attitudes et des émotions :

« Finally, at another level, one can recognize ways that humans convey their attitudes about the receiver, about the content or referent of their

utterance, or about themselves »3

Cette définition démontre que l’expression attitudinale, réservée aux humains, a pour objet de signaler ce que l'émetteur pense d'un objet, de son interlocuteur, du contenu du message, ou de lui-même. Contrairement aux expressions qui portent des valeurs de survie (par exemple, montrer les dents pour la menace vs. non menace : sourire afin de montrer que l’émetteur n’est pas dangereux), les expressions attitudinales telles que l'ironie, le sarcasme, etc. ne semblent pas servir à la survie de l'individu. Aussi, Ohala suppose que ce niveau expressif fait l'objet d'un apprentissage et qu'il varie par conséquent d’une culture à l’autre, voire d’un individu à l’autre.

En outre, seulement ce troisième type d’expression émotionnelle aurait besoin d’une grande quantité de contexte pragmatique et linguistique de haut niveau pour être communiqué adéquatement.

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