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Asymptotiques d'utilité Valorisation de produits dérivés hybrides

Ces dernières années ont vu la recrudescence du nombre de produits dérivés com- binant risques nanciers et risques assurantiels purs. Typiquement, un tel produit a la forme suivante: une comagnie d'assurance vend au client i ≤ n une option de maturité T , dont la valeur dépend de l'évolution d'indices de marché tradables S = (St)t≥0et d'une source de risque idiosyncratique additionnelle Ri. Le nombre n

introduit dénote ici le nombre de clients auxquels la compagnie a vendu ces produits. Dans le Chapitre5, nous nous intéressons au problème de la valorisation de ces options, dans la situation réaliste où les Ri's sont indépendants et identiquement

distribués, conditionnellement à S.

Notre principal résultat concerne la convergence du prix d'indiérence d'utilité d'une telle option quand l'aversion absolue au risque d'une suite de fonctions d'utilité tend vers 0, et que le nombre d'options vendues tend vers l'inni.

2.3. Asymptotiques d'utilité - Valorisation de produits dérivés hybrides33 2.3.1 Exemples de produits hybrides

Le large spectre d'applications de tels produits dans l'assurance vie comme dans l'assurance dommages justie l'intérêt conjoint des mathématiques de l'assurance et nancières. Nous donnons ici quelques exemples de tels contrats.

Les agents sont intéressés par la valorisation de produits prenant la forme suiv- ante Gn= n X i=1 f (S, Ri) , (2.3.1)

où pour chaque client i ∈ {1, · · · , n}, les Ri's sont des variables aléatoires indépen-

dantes et identiquement distribuées, n dénote le nombre de contrats f(S, Ri)vendus,

et f est une fonction mesurable.

Dans le cas présent, nous pouvons penser à des produits "unit-linked" f (S, Ri) = 1{Ri>T }ST,

ou des produits "unit-linked" avec garantie,

f (S, Ri) = 1{Ri>T }max(ST, K),

où Ri dénote dans ces deux exemples le temps de décès du client i, et S est un indice

nancier. De tels contrats sont très populaires en assurance vie.

Nous pouvons aussi penser à des contrats légèrement plus élaborés, avec par exemple Riun certain indice météorologique, ou un indice de rendement de produc-

tion.

Considérons par exemple un producteur d'un certain bien (exemple blé), dont le prix de marché est S, espérant produire le volume Ki

Gau temps T , et vendre chaque

unité de cette quantité au moins au prix KS. Son revenu espéré est alors KS× KGi,

tandis que son revenu réalisé est Ri×ST, où Riest son niveau de production réalisée.

Ce producteur est alors intéressé, an de garantir son revenu par l'achat d'un put sur son propre revenu:

fi(S, Ri) := (KS× KG− STRi)+. (2.3.2)

Ces garanties de revenus sont déjà largement vendues aux U.S. et sont sur le point de l'être en Europe.

2.3.2 Asymptotique d'Utilité

Considérons une compagnie d'assurance vendant au client i une option de payo gi, payable à maturité T , dont la valeur dépend de l'évolution d'un actif de marché

34 Chapter 2. Introduction tradable S = (St)t≥0 et d'une source de risque additionnelle idiosyncratique. Typ-

iquement, rappelons (2.3.1), pour tout i ≤ n, chaque contrat individual gi est de la

forme suivante

gi = f (S, Ri).

Les gi's ne sont généralement pas indépendants, mais toujours indépendants condi-

tionnellement à S. La compagnie est alors intéressée par la prime unitaire π(Gn)/n

de l'option agrégée Gn:= n X i=1 gi,

i.e. la prime associée à l'option globale Gn, π(Gn), équitablement répartie à chaque

client i ≤ n.

De tels contrats, et particulièrement les contrats "unit-linked", ont été étudiés par les actuaires depuis la n des années 60. Tandis qu'en nance, toute règle de valorisation repose sur la notion d'absence d'oppportunités d'arbitrage et l'ensemble correspondant de mesures martingales, Les premium principles en assurance sont principalement motivées par l'application de la loi des grands nombres. (voir par exemple [Buh70], [GfIE79] ou [BoA86]).

De fait, ni les traditionnels principes actuariels, ni les arguments d'arbitrage ne semblent satisfaisants pour valoriser de tels actifs. Il a toutefois été suggéré de combiner les deux. Plus précisément, le principe de valorisation proposé par Brennan et Schwartz [BS79a,BS79b] consiste à combiner la loi des grands nombres avec une valorisation nancière basée sur une stratégie de couverture. L'idée est de remplacer les risques assurés par leur espérance, de telle sorte que l'option ainsi modiée ne contienne plus que de l'incertitude nancière. Il reste alors à l'assureur à tarifer et couvrir le contrat suivant :

ˆ Gn= N X i=1 E [ f (S, Ri)| S] .

Cette règle de valorisation a depuis été très largement utilisée dans la pratique, voir par exemple [BH03,MP00,MPY06].

L'intuition mathématique derrière cette règle de valorisation triviale est la suiv- ante. Si les Ri sont i.i.d. sachant S, alors Gn/n → E[f (S, R1)|S] =: ¯g a.s. pour

un nombre n de contrats vendus assez grands. Si le marché formé par les actifs S est complet, (c'est le marché semi-complet de Becherer, voir [Bec03, Section 4]), alors le payo moyen E[f(S, R1)|S]peut être répliqué à partir d'une richesse initiale

2.3. Asymptotiques d'utilité - Valorisation de produits dérivés hybrides35 EQ[E[f (S, R1)|S]]et une stratégie de trading convenable, où Q est l'unique mesure

martingale sur le marché (complet) nancier pur.

Toutefois, les techniques de valorisation en marchés incomplets comme les principes usuels actuariels de tarication (rappelons la notion de chargement de sécurité) tombent d'accord qu'une règle de pricing linéaire correspond à un agent neutre au risque. De manière informelle, dans ce contexte, vendre un grand nombre d'options (ce qui est nécessaire pour le bon fonctionnement de la règle des grands nombres) implique une plus grande exposition sur les marchés nanciers. Si la loi des grands nombres ne fonctionnent pas susamment bien, alors les pertes seront ampliées par un mouvement des marchés défavorables. Un agent averse au risque devrait tenir compte de ce risque, de telle manière que la règle (linéaire) de valori- sation triviale ne convient pas à de tels agents (voir Exemples 5.2.3 et 5.2.4 pour des contre-exemples simples).

Ce raisonnement intuitif nous conduit à penser que cette règle va tenir unique- ment à la limite pour des petits niveaux d'aversion au risque, et un grand nombre d'options vendues. Nous donnons dans le Chapitre 5 des conditions sous lesquelles cette règle de valorisation est valable.

Soit S une (F, P)-semi-martingale càdlàg localement bornée. Nous dénotons par M l'ensemble des mesures martingales locales P-équivalentes telles que S soit une (F, Q)-martingale locale. Soit (Un)n∈N une suite de fonctions d'utilité dénie sur R

tout entier et satisfaisant les conditions habituelles (Inada, reasonable asymptotic elasticity, voir Schachermayer [Sch01]). Supposons de plus que M 6= ∅ , que pour tout n ∈ N, le problème dual correspondant (voir par exemple [Sch01]) est ni, et dénissons les prix d'indiérence d'utilité unitaires pn(Gn, Un):

pn(Gn, U ) := inf  p ∈ R : sup X E [U (X + np − Gn )] ≥ sup X E [U (X)]  , (2.3.3) où X représente l'ensemble des richesses terminales atteignables. De plus, probabil- ité et multiplicateur duaux optimaux sont donnés par

(yn0, Q0n) := arg min  E  Vn  ydQ dP  , (y, Q) ∈ (0, ∞) × M  ,

où Vnest la traditionnelle conjuguée convexe de Un. Nous supposons de plus que la

suite (Gn)n≥1 satisfait sup n≥1 |Gn/n|L∞ < ∞, (2.3.4) et que n|rn|∞ −→ n→∞ 0 , avec rn: x 7→ − Un00(x) Un0(x) , (2.3.5)

36 Chapter 2. Introduction où |rn|∞:= supx∈R|rn(x)|. Observons que l'hypothèse (2.3.4) permet de considérer

des exemples d'options individuelles bornées du type de(2.3.2). Nous montrons dans le Théorème5.3.2 que

lim

n→∞pn(Gn, Un) = limn→∞E Q0n[G

n/n] . (2.3.6)

Une première partie de l'égalité (écrite en terme de limsup et liminf) est directe à l'aide du problème dual (voir par exemple Owen [Owe02] ou Bouchard, Touzi et Zeghal [BTZ04]). De manière surprenante, la seconde inégalité est obtenue di- rectement de la formulation primale du problème (contrairement à la plupart des résultats sur les asymptotiques sur les prix d'indiérence d'utilité, voir la Section 2.4 ci-dessous). Cela repose simplement sur une décomposition de Taylor à l'ordre 2, et de manière cruciale sur les Hypothèses (2.3.4) et (2.3.5).

Sous la condition plus faible krnk∞ → 0, et pour peu que la suite (Gn)n≥1

soit uniformément bornée dans L∞, nous établissons un résultat général de

convergence pour une suite de claims bornés quand l'aversion absolue au risque tend uniformément vers 0, ce qui est un résultat intéressant.

Notons toutefois que le résultat (le deuxième terme) de (2.3.6) est plutôt théorique. Dans le cas d'un contexte de sous marché nancier complet (voir la Dé- nition5.2.1pour une dénition précise de l'hypothèse de marché Semi-Complet), un raisonnement similaire à celui de [Bec03, Theorem 4.10 et Assertion (4.5)] montre que, si Gn/n → ¯g quand n → ∞, où ¯g est une variable aléatoire FTS-mesurable,

alors lim n→∞E Q0n[G n/n] = EQ ∗ [¯g],

où Q∗ est la mesure de pricing sur le marché nancier pur, complet.

Dans le but de caractériser la limite lim

n→∞E Q0n[G

n/n]

dans le cas de marché incomplet, nous allons restreindre la classe des fonctions d'utilité. Tout d'abord, remarquons que le fait que rn → 0 uniformément quand

n → ∞implique qu'il existe une suite (ηn1)n≥1 satisfaisant η1n→ 0telle que

rn(x) ≤ ηn1 pour toutx ∈ R et n ≥ 1.

Supposons maintenant que la convergence rn → 0 n'est pas trop rapide : il existe

une autre suite (η2

n)n≥1 telle que pour tout n ≥ 1,

0 < η2n≤ rn≤ η1

2.4. Références sur les asymptotiques de prix d'indierence 37

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