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CHAPITRE I ETAT DE L’ART

I. 3.2.2.3 Asymmetrical Flow Field-Flow Fractionation (AsFlFFF)

Les méthodes dites de fractionnement par flux-force (FFF) sont des techniques assez nouvelles, dédiées principalement à la caractérisation des macromolécules. Décrites pour la première fois en 1960 par Giddings (Giddings, 1966), les techniques de fractionnement par flux-force sont basées sur l’action simultanée de l’écoulement d’un liquide dans un canal de faible épaisseur et l’effet d’un champ externe appliqué perpendiculairement au canal. Le champ d’application de ces techniques est très large, avec une étendue en taille allant du submicronique à des particules de plus de 100 µm. Différentes techniques de fractionnement ont été décrites, qui diffèrent selon la nature du champ externe appliqué :

- Sedimentation FFF (SdFFF) : cette technique utilise la force centrifuge comme champ externe. Les particules sont séparées en fonction de leur taille et de leur densité (Giddings

et al., 1974). Cette technique est très utilisée pour la caractérisation de particules

colloïdales dont le diamètre est compris entre 0,05 et 1 µm (Giddings and Ho, 1995; Kirkland and Yau, 1983).

- Thermal FFF (ThFFF) : cette technique est généralement utilisée pour analyser les polymères synthétiques dans les solvants organiques. Elle est basée sur l’utilisation d’un gradient de température établi par chauffage d’une plaque du canal d’un côté et le refroidissement de l’autre. Ce gradient est responsable d’une diffusion thermique des espèces due à une différence de leur vitesse de mouvement, liée à leur coefficient de diffusion thermique (Liu and Giddings, 1992; Thompson et al., 1969).

61 - Electrical FFF (ElFFF) : cette méthode combine les avantages de l’électrophorèse et de la séparation par Flux Force. Elle utilise un champ électrique comme champ externe et permet ainsi de séparer les molécules en fonction de leur taille, mais également en fonction de leur nature électrostatique (Caldwell and Gao, 1993).

- Flow FFF (FlFFF) : cette technique est la plus universelle. Le champ de force appliqué est un flux croisé perpendiculaire au flux d’élution. Cette méthode permet de séparer les molécules de 1 nm jusqu’aux particules de 100 µm de diamètre (Giddings et al., 1976; Liu and Giddings, 1993; Liu et al., 1993).

Parmi l’ensemble de ces techniques de fractionnement, la technique la plus utilisée de nos jours est l’Asymmetrical Flow Field-Flow Fractionation (AsFlFFF) développée par Wahlund et Giddings (Wahlund and Giddings, 1987). Cette technique est une des techniques FFF la plus universelle. Sa gamme d’application couvre les macromolécules, simples ou complexes, d’importance biologique, pharmaceutique, industrielle ou environnementale.

Le fractionnement par AsFlFFF est basé sur une séparation en fonction de leur diamètre hydrodynamique. Le système de fractionnement par AsFlFFF est constitué d’une cellule de séparation dite asymétrique (Figure 24) à travers laquelle un flux d’éluant est appliqué. La cellule est constituée d’un bloc supérieur imperméable et d’un bloc inférieur doté d’un fritté.

62 Une membrane d’ultrafiltration, généralement de 5 ou 10 kDa, est déposée sur le fritté à travers lequel une fraction de l’éluant introduit dans la cellule va pouvoir être soutiré. Elle détermine la limite inférieure de taille des échantillons. Ces membranes sont généralement en cellulose régénérée ou en polyethersulfones. Un spacer, fine lamelle de forme trapézoïdale, est déposé sur la membrane et serré entre les deux blocs. L’épaisseur de cette pièce fixe le volume de la zone de fractionnement. L’épaisseur varie entre 125 et 490 µm. Contrairement à la chromatographie d’exclusion stérique, l’absence de phase stationnaire dans la cellule limite les phénomènes d’adsorption et de cisaillement des molécules.

Les constituants de l’échantillon sont séparés par l’application d’un champ de force perpendiculaire à la direction d’élution, dit flux croisé. En mode normal, mode fréquemment observé, la séparation se fait selon la Figure 25. Un mode différent du mode normal peut apparaître, le mode stérique, observé pour des molécules de taille supérieure à 1 µm, et dans lequel les molécules de grosses tailles sont éluées avant les petites.

Figure 25 Représentation schématique du fractionnement par AsFlFFF

L’échantillon injecté dans la cellule est soumis au flux croisé de débit Vc et au mouvement brownien, qui est fonction du coefficient de diffusion D des molécules dans l’éluant. Lors des phases de concentration et de relaxation des échantillons, les molécules se répartissent sur un même plan à proximité de la membrane semi-perméable (étape de focalisation).

63 Les grosses molécules, présentant un coefficient de diffusion faible, sont plus proches de la membrane que les petites molécules, présentant un coefficient de diffusion plus élevé, sont plus éloignées de la membrane. Au cours de la phase d’élution, l’épaisseur de la cellule étant très faible (de 125 à 490 µm), le régime est laminaire et le profil de vitesse parabolique (Figure 25). Le temps de rétention tR s’écrit en fonction du coefficient de diffusion :

Équation 15

12= t0+Vc w 2 6+V0+D

avec tR le temps de rétention du composé, t0 le temps mort correspondant à la traversée du volume de la cellule, V0 le volume de la cellule, w l’épaisseur de la cellule, D le coefficient de diffusion, et Vc le débit de flux croisé.

Ce coefficient de diffusion est fonction du rayon hydrodynamique de la molécule d’après l’équation approximée de Stokes-Einstein :

Équation 16

D+= k T

6 π η rH

avec k est la constante de Boltzmann, T la température absolue (K), , la viscosité de l’éluant et rH le rayon hydrodynamique de la molécule.

En mode normal, le temps de rétention s’exprime alors en fonction du rayon hydrodynamique de la molécule selon l’équation suivante :

Équation 17

tR= t0 Vc w 2 η π

V0 k T . rH

L’AsFlFFF est une des technologies les plus avancées pour la séparation de macromolécules de masse molaire élevée. Cette technique est utilisée pour la détermination des distributions de masses molaires de polymères (Rolland-Sabaté et al., 2007; Wittgren and Wahlund, 1997a; Zattoni et al., 2009), de macromolécules (Bria et al., 2013; Rbii et al., 2009; Runyon et al., 2013) et de nanoparticules (Ehrhart et al., 2011; Kammer et al., 2011; Runyon et al., 2014)

64 avec une masse molaire atteignant 109 g/mol et une taille de l'ordre du micromètre. De ce fait, cette technique se développe dans divers domaines de recherche et développement comme en biologie moléculaire (Van Bruijnsvoort et al., 2001; Wahlund et al., 2011), en nanotechnologie et nanomédecine (Till et al., 2014; Varenne et al., 2016), ainsi que dans les secteurs pharmaceutiques (Fraunhofer and Winter, 2004) et agro-industriels (Guyomarc’h et

al., 2010; Lemelin et al., 2005).

Le couplage de ces techniques de fractionnement, SEC ou AsFlFFF, à un système de détection permet de déterminer la distribution de masses molaires de l’échantillon analysé.