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La première partie de l’expérimentation a consisté à concevoir et implanter des associations de cultures permettant de tester deux facteurs : le choix de l’espèce associée au soja et l’impact de la séparation spatiale des cultures.

Choix des espèces associées

Deux catégories de critères ont guidé le choix de l’espèce à associer au soja.

D’une part, les espèces associées devaient permettre de répondre à des contraintes de gestion et aux services attendus d’elles. Le service principal attendu de l’espèce associée était la production de grains afin d’assurer et de stabiliser la production et éventuellement contribuer à la réduction de la quantité d’adventices. La démarche était donc de se placer dans un cadre le plus réaliste possible, en prenant en compte les contraintes opérationnelles qu’un agriculteur peut rencontrer lorsqu’il cultive une association. Ainsi, les espèces candidates devaient répondre à plusieurs critères :

- il fallait que la durée de leur cycle corresponde à peu près à celle du soja afin de pouvoir semer et récolter les deux cultures en même temps,

- leurs graines devaient avoir des tailles différentes pour faciliter le tri de la récolte, et leur commercialisation relativement simple,

- il fallait que ces cultures puissent se développer dans les conditions pédoclimatiques locales. Ces contraintes ont fortement filtré les espèces candidates.

Enfin, le choix des espèces a été fortement influencé par des associations déjà pratiquées par des agriculteurs, dont les expériences ont été rapportées dans des journaux agricoles ou via des témoignages (e.g. Waligora and Archambeaud, 2014).

La variété de soja (Glycine max (L.) Merr.) choisie, RGT Sirelia, est une variété très précoce (groupe de maturité 000) recommandée pour les Pays de la Loire avec plusieurs années de références pour ses performances. Nous avons sélectionné les espèces suivantes pour les associer au soja :

- La lentille (Lens culinaris Medik., variété Rosana), de la famille des Fabaceae et capable de fixer l’azote atmosphérique, est une plante courte, produisant de nombreuses ramifications, avec de petites feuilles composées.

- Le sarrasin (Fagopyrum esculentum Moench, variété Harpe), de la famille des Polygonaceae, est une culture annuelle avec une croissance très rapide, des effets allélopathiques et une très bonne compétitivité vis-à-vis des adventices (Falquet et al., 2015). C’est une plante à tige dressée avec des feuilles relativement petites et qui se ramifie.

- Le sorgho (Sorghum bicolor (L.) Moench, variété RGT Iggloo), de la famille des Poaceae, a été choisie parmi les variétés à grains. C’est une plante à port dressé et relativement courte, émettant des talles. Ses feuilles sont linéaires à lancéolées et très longues.

- Le tournesol (Helianthus annuus L., variété SY Valeo), de la famille des Asteraceae, est une plante haute avec de feuilles très grandes et larges.

Arrangement spatial des cultures associées

Parmi la diversité d’arrangements spatiaux possibles pour les associations de cultures, nous avons porté notre choix sur la comparaison entre le mélange dans le rang (Within-row, WR pour la suite du document), qui est la manière d’associer la plus commune dans les études européennes sur les associations de cultures, et les rangs alternés (Alternate-row, AR par la suite), car c’est un moyen de garder les plantes à proximité tout en les séparant un minimum afin de modifier la compétition précoce entre les deux cultures (Figure 0.4). Ces deux arrangements spatiaux des cultures ont rarement été comparés. Le mélange sur le rang est le plus pratiqué par les agriculteurs mais quelques semis en rangs alternés ont aussi été observés chez certains agriculteurs pratiquant les associations de cultures.

Démarche expérimentale

Modalités testées

Dans le dispositif expérimental mis en place, les facteurs « espèces associées » et « arrangement spatial » ont été croisés engendrant 8 modalités d’associations différentes (4 espèces associées x 2 arrangements spatiaux). À ces associations, nous avons ajouté les cultures pures de chaque espèce afin d’avoir une référence de rendement dans les mêmes conditions de culture que les associations et pouvoir mesurer les traits pour chaque espèce sans l’influence de l’espèce associée (conformément aux protocoles standardisés de mesure de ces traits disponibles dans la bibliographie (Cornelissen et al., 2003; Pérez-Harguindeguy et al., 2013)). Nous avons aussi inclus une modalité « sol nu » sur laquelle les adventices étaient libres de se développer afin d’évaluer le potentiel de croissance de ces dernières. En complément, deux modalités de soja en pur semées à 50% de la densité optimale, selon les deux arrangements spatiaux définis, ont été mises en place pour vérifier si la variabilité des traits du soja en association provenait de la réduction de la densité de soja et donc de la compétition intraspécifique ou bien de la compétition provenant de l’espèce associée.

Chaque modalité était présente dans chacun des 4 blocs constituant un dispositif en blocs complets randomisés. Ce dispositif a été reproduit de la même manière en 2018 et 2019.

Conduite de culture

La conduite des cultures a été réalisée de la même manière pour toutes les modalités ; le couvert de moutarde et de féverole précédant les associations a été détruit mécaniquement et le sol travaillé à plusieurs reprises afin de détruire toutes les adventices présentes. Les densités de semis choisies étaient basées sur les recommandations régionales pour chaque espèce. Dans les associations, toutes les espèces ont été implantées à 50% de la densité de la culture pure. Ce design substitutif permet aussi de favoriser l’identification de l’effet espèce par rapport à un effet lié à l’augmentation de la densité de cultures sur la compétition envers les adventices (e.g. Gomez and Gurevitch, 1998). Le soja a été inoculé afin d’assurer un bon développement des nodosités. Du fait de la présence régulière de légumineuses dans la parcelle, la lentille n’a pas été inoculée.

Chaque parcelle mesurait 18 m de long pour 2,88 m de large, ce qui permettait d’implanter 8 rangs pour chaque modalité. Les rangs étaient écartés de 36 cm, un compromis entre les écartements recommandés pour chacune des espèces et les possibilités techniques. Le semis a été réalisé mi-mai pour les 2 années. Les parcelles ont directement été recouvertes d’un filet afin de les protéger des dégâts d’oiseaux et le filet a été retiré une fois que les premières feuilles vraies du tournesol et du soja sont apparues.

Une fois les cultures implantées, seules des irrigations ont été réalisées sur l’ensemble des blocs quand cela était nécessaire ; elles étaient décidées sur la base d’une évaluation visuelle de l’état des plantes et du sol.

Pour les modalités de cultures pures et d’associations en rangs alternés, quatre rangs étaient dédiés aux mesures réalisées la première année et les quatre autres rangs étaient manuellement désherbés au moment de la floraison du soja afin de garantir le bon développement des cultures et un impact réduit des adventices pour l’étude de

Principales mesures

Les traits de performance et les traits fonctionnels mesurés ont été sélectionnés par rapport à leurs liens avec les fonctions nécessaires à l’obtention des services recherchés (Tableau 0.2). Des prélèvements de biomasse ont été réalisés à 5 dates différentes au cours du cycle de culture afin d’assurer un suivi dynamique de l’accumulation de biomasse des cultures et des adventices. Deux prélèvements ont eu lieu pendant la phase végétative du soja, deux autres pendant la phase reproductive et le dernier, à maturité des cultures pour quantifier les rendements et résidus produits. Des mesures de hauteurs sont aussi faites aux 5 dates de prélèvement de biomasse. Les mesures de traits foliaires ont été réalisées pendant la phase végétative du soja et au moment où toutes les cultures avaient entamé leur phase reproductive, au moment de la floraison du sorgho. Les mesures de traits foliaires ont été faites selon les protocoles internationaux disponibles (Cornelissen et al., 2003; Pérez-Harguindeguy et al., 2013). Les traits ont tous été mesurés en cultures pures et en cultures associées pour en évaluer la réponse aux filtres de gestion imposés (le choix de l’espèce associée et l’arrangement spatial). Tableau 0.2: Présentation des relations entre services, fonctions et traits fonctionnels mesurés.

Service Fonction Trait de performance Traits fonctionnel impliqués

Contrôle des adventices

Compétition pour les ressources (rayonnement et nutriments)

Biomasse végétative Surface spécifique foliaire (SLA) Surface d’une feuille (LA) Hauteur maximum (Hmax) Production

de grains

Reproduction et acquisition des ressources.

Biomasse végétative Surface spécifique foliaire (SLA) Surface d’une feuille (LA) Hauteur maximum (Hmax) Succès reproducteur Nombre de grains

PMG Effet

précédent

Décomposition des résidus Biomasse végétative Leaf Dry Matter Content (LDMC) Composition biochimique Teneur en azote des pailles Exportation de l’azote Succès reproducteur Teneur en azote des graines

(Indice de récolte de l’azote ; NHI)

2. Étude de l’impact de l’association sur la décomposition des