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II.1 Les dépôts dans le réseau

II.1.4 Le biofilm

II.1.4.4 Assimilation des micropolluants par les biofilms

Que ce soit en milieu naturel (rivière) ou anthropisé (canalisation du réseau d'assainissement ou d'approvisionnement en eau potable), les biofilms ont la particularité d'incorporer les micropolluants organiques et minéraux présents dans la colonne d'eau. Cette propriété résulte essentiellement de leur morphologie (grande surface d'échange, réseau d'EPS) parfaitement adaptée à la sorption des molécules organiques et éléments métalliques.

! Assimilation des hydrocarbures

Approche théorique. Les biofilms étant utilisés dans le traitement d'effluents pollués, les cinétiques d'assimilation des polluants organiques ont fait l'objet de nombreux travaux (Cao et Alaerts, 1995 ; Galil, 1994 ; Scott et al., 1995 ; Späth et al., 1998 ; Zhang et al., 1995) et sont désormais bien connues. Ces études ont notamment permis d'évaluer l'influence des paramètres physico-chimiques (température, pH, aération, etc.) sur les cinétiques d'assimilation et de définir les conditions optimales. Actuellement, dans les stations d'épuration où ces paramètres sont contrôlés et fixés de manière optimum, des rendements de dépollution de près de 90 % sont obtenus (Galil, 1994). Le mode de fixation de la biomasse, c'est à dire suspendue (boue activée) ou fixée, n'influe pas sur ce rendement, mais agit sur la nature de la dépollution. En effet, l'élimination de polluants peut se faire selon deux voies principales : la biosorption et la biodégradation (Späth et al., 1998). La biosorption est le phénomène majoritaire. Dans le cas des films bactériens fixés, 50 % des hydrocarbures sont extraits de l'effluent par attachement à la biomasse (Galil, 1994). Pour la boue activée, cette fraction n'est que de 10 %. Les biofilms fixés peuvent ainsi accumuler 6,5 fois plus d'hydrocarbures que la boue activée qui ne peut emprisonner que 40 mg.g-1 de matière sèche (Galil, 1994). Cette disparité résulte des différences morphologiques des colonies bactériennes. La biomasse suspendue s'organise en petits agrégats (jusqu'à 1 mm) tandis que les films bactériens fixés produisent une croûte continue et épaisse (3 à 5 mm) très spongieuse. Ce caractère spongieux est principalement induit par les EPS qui sont responsables de la majorité de la biosorption de micropolluants organiques (Scott et al., 1995). Il a, par exemple, été montré que 60 % des BTEX (Benzène, Toluène et Xylène) adsorbés sont retrouvés dans la couche d'EPS. La partie restante est adsorbée sur le mur de cellule (membrane cytoplasmique) ou même dans le cytoplasme (Späth et al., 1998). Bien que l'adsorption soit le processus dominant (Zhang et al., 1995), une fraction importante, de l'ordre de 25 % pour les biofilms fixés, est biodégradée (Galil, 1994). Les molécules telles que

les HAP jouent, dans ce cas, un rôle dans le métabolisme bactérien en agissant comme une source de carbone pour la croissance (Scott et al., 1995).

Les micro-organismes sont plus efficaces dans l'utilisation de substrats dissous dans la phase aqueuse. L'adsorption des composés organiques sur les particules, et en particulier des micropolluants organiques, induit une diminution de leur biodisponibilité. La lenteur du phénomène de sorption / désorption limite le retour par diffusion des micropolluants vers l'eau, et, de ce fait, constitue le facteur limitant à l'activité microbiologique. Le taux de biotransformation à la surface des biofilms est alors contrôlé par la désorption et non par l'activité des bactéries (Zhang et al., 1995).

Application au réseau d’assainissement. Les phénomènes de transfert de micropolluants entre la colonne d’eau et les biofilms, utilisés dans les stations d’épuration, se produisent naturellement dans la plupart des systèmes aquatiques. Ainsi, même au sein des canalisations du réseau d’approvisionnement en eau potable où transitent des effluents faiblement pollués, se développent des biofilms. Ces structures sont à l’origine d’une diminution des teneurs en micropolluants de la colonne d’eau puisqu’elles concentrent dans leur biomasse une partie des micropolluants dissous. Inversement, lorsque les conditions physico-chimiques du milieu deviennent trop hostiles à la prolifération de ces micro-organismes (injection de chlore), on observe une augmentation significative des teneurs en HAP (Maier et al., 2000). Ce phénomène s’explique par le relargage des hydrocarbures accumulés dans la biomasse cellulaire lors de la mort des biofilms induite par la modification des conditions du milieu. Un phénomène analogue est observé dans les collecteurs des réseaux d’assainissement. Selon les travaux de Michelbach (1995), la concentration totale en HAP mesurée dans les biofilms prélevés dans le réseau d’assainissement, est de l'ordre de 6,4 µg.g-1. Sur le même site, les concentrations en HAP dissous et particulaires sont respectivement de 7,2 ng.l-1 et 9,4 µg.g-1. Les teneurs en HAP des biofilms sont donc du même ordre de grandeur que celle des MES et significativement plus importantes que celle mesurées dans la fraction dissoute. Ces observations confirment donc le phénomène de transfert et d’accumulation des HAP de la phase dissoute vers les biofilms.

! Assimilation des métaux

Approche théorique. Les biofilms ont la capacité d’incorporer de grandes quantités de métaux. Cette propriété est utilisée dans le traitement des eaux usées domestiques et industrielles présentant généralement des teneurs importantes en métaux. De ce fait, et tout comme pour les hydrocarbures, les propriétés de sorption des métaux par les biofilms ont fait l’objet de nombreux travaux et les processus d’adsorption sont connus. Contrairement aux micropolluants organiques dont une fraction est biodégradée par les microorganismes, dans le cas des métaux, seul le processus d’adsorption intervient. Lorsque les biofilms sont exposés à une solution contenant des métaux, il s’établit rapidemment un équilibre entre la biomasse et les micropolluants en solution (Späth et al., 1998). Selon les métaux, le point de saturation des biofilms varie. Ainsi par exemple, les points de saturation des biofilms sont respectivement pour le Cd et le Zn de 60 et 40 mg.g-1 de matière sèche (Späth et al., 1998). Comme pour les HAP, il semble que les EPS soient les structures principalement impliquées dans la fixation des métaux. En effet, le réseau d’EPS, dont les molécules contiennent des groupes anioniques, chélate de manière efficace beaucoup de métaux (Cd, Cu, Cr et Pb) (Decho, 2000). La capacité de fixation des réseaux d’EPS est, par ailleurs, influencée par son état physique. Son affinité pour un ion donné peut varier significativement en fonction de son état physique (état de gel, état baveux) (Decho, 2000). Cependant, la littérature n’est pas unanime sur la prédominance du réseau d’EPS dans la fixation des métaux par les biofilms.

Späth et al. (1998) estime, par exemple, que 80 % du Cd fixé par les biofilms est contenu dans la fraction cellulaire. Il conclut donc sur la nécessité de considérer l’ensemble du système (film et EPS) pour évaluer les phénomènes de sorption des biofilms.

Application au réseau d’assainissement. D'importantes quantités de métaux transitent dans les collecteurs des réseaux d'assainissement. Ces flux métalliques ont été caractérisés dans le réseau d'assainissement unitaire du bassin versant du quartier du Marais à Paris (Garnaud, 1999). Les concentrations métalliques des eaux usées collectées par temps sec à l'exutoire ont été mesurées. Les concentrations totales (dissous et particulaire) en Cd, Cu, Pb et Zn ont respectivement été mesurées à 0,2, 77, 9 et 182 µg.l-1 pour le mois de janvier et à 0,3, 79, 13 et 161 µg.l-1 pour le mois de mars (Garnaud, 1999). Les biofilms fixés aux parois des canalisations des réseaux d'assainissement, et en particulier des réseaux unitaires, sont donc au contact d'effluents fortement chargés en métaux. Cette position, combinée à leur grande affinité pour les cations (Cu2+, Zn2+, Pb2+, Cd2+, etc.), permet à ces microorganismes d'adsorber et d'accumuler rapidement de grandes quantités de métaux (Gutekunst, 1988). Roth et Lemmer (1994) ont mesuré, au sein de biofilms collectés dans le réseau, des teneurs en Cr et Ni respectivement de 1940 et 1030 µg.g-1. Michelbach (1995) a, quant à lui, mesuré des teneurs en Cu, Pb, Zn, Ni et Cd respectivement de 174, 143, 1000, 23 et 2,38 µg.g-1 ms (Michelbach, 1995 ; Michelbach et Wöhrle, 1994).

II.1.4.5 Intérêt de l'étude des biofilms

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