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Chapitre 1 : Bibliographie générale sur l’usinage

4 Aspects thermiques de la coupe

Le processus d’usinage génère une forte chaleur. La connaissance de la température en usinage, particulièrement dans l’outil, constitue un critère d’appréciation pour mieux comprendre les mécanismes d’usure des outils de coupe (Tableau 1. 2).

Tableau 1. 2 : Domaine d'oxydation et de changement de la structure du matériau d'outil. Source : Childs et al. [53].

Domaine de température (°C) pour : Matériau d'outil

Oxydation Transformation structurale

Acier Rapide (HSS) – > 600 (au dessus de la trempe)

WC-Co carbure > 500 > 900–950 (dissolution de WC dans Co)

Mélange carbures/cermets > 700 –

Céramique – > 1350–1500 (fusion intergranulaire)

PcBN – > 1100–1350 (Changement du réseau en hexagonal)

PCD (diamant) > 900 > 700 (Transformation en graphite)

Le Tableau 1. 2 résume les principales plages de température pour lesquelles il y a un phénomène d’oxydation ou un changement microstructural. Particulièrement pour WC-Co,

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l’oxydation commence vers 500°C. Cette température est largement atteinte en usinage et cela signifie que la dégradation des outils serait plus sévère au delà de cette température.

La connaissance de la température en usinage permet aussi le développement de nouveaux outils de coupe (composition du matériau de l’outil, géométrie, revêtement ...), l’augmentation de la durée de vie des outils afin de diminuer le coût de la production industrielle.

4.1 La production de chaleur

L’élévation de la température lors d’un processus d’usinage est due à un effet conjugué des phénomènes de dissipation d’énergie plastique dans des différentes zones de déformation et des phénomènes de frottement. Ces différentes zones de déformation sont définies sur la. Fig. 1. 13.

φo, φp, φc sont respectivement les flux dissipés dans l’outil, dans la pièce et dans le copeau.

Ci {i=1 à 5} sont les conditions aux limites du système.

Fig. 1. 13 : Différentes zones de production et de transfert de chaleur en usinage (d’après Battaglia et al. [54])

Zone 1 : Production de chaleur due à la déformation plastique dans la première zone de

cisaillement (ZCP)

Zone 2 : Production de chaleur due au frottement à l’interface outil/copeau (IOC)

Zone 3 : Production de chaleur due à la déformation plastique dans la seconde zone de

cisaillement (ZCS)

Zone 4 : Production de chaleur due à la déformation plastique dans la troisième zone de

déformation (ZCT).

Zone 5 : Production de la chaleur due au frottement à l’interface outil/pièce (IOP).

La chaleur produite dans ces différentes zones est transmise au copeau, à l’outil et la pièce. Actuellement, la quantification du niveau de chaleur généré constitue un challenge dans les domaines de la recherche académique et industrielle. Dans le paragraphe suivant, l’aspect thermique sera davantage présenté sous forme d’une description phénoménologique. La partie modélisation sera abordée dans le chapitre 3.

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4.2 Le transfert thermique en usinage

Pour construire un modèle thermique qui soit le plus représentatif des phénomènes thermiques observés en usinage et qui soit capable de prédire les températures rencontrées lors des expériences, il convient de connaitre :

o Les différents modes de transfert de chaleur et les différents régimes thermiques.

o Les conditions aux limites dans le processus de coupe (conditions environnementales de l’usinage).

o La quantification de la distribution de la chaleur dans les zones de production et aux interfaces de frottement.

Chacun des thèmes ci-dessus a fait l’objet de plusieurs études. Les modes de transfert thermique rencontrés en usinage sont classiquement connus à savoir : la conduction, la convection et le rayonnement. Notons que les deux premiers modes sont majoritaires et sont souvent couplés. Un bilan thermique dans chaque zone permettra une bonne analyse des phénomènes thermiques.

Bilan thermique des Zones 1 et 3 : Production de chaleur due à déformation plastique.

Le bilan thermique dans ces zones est donné par la relation (1.7) :

. .

plas

cT k T Q

ρ + ∇ = (1.7)

Où ρ, c et k sont respectivement la masse volumique, la capacité thermique et la conductivité thermique du matériau usiné, le premier terme représente la variation temporelle de la température, le second représente la conduction et le membre de droite représente la dissipation due à la déformation plastique.

Dans le cas de la déformation rapide, le phénomène de la conduction est négligeable. Ce cas correspond à un système thermique adiabatique. En effet, en usinage et particulièrement à grande vitesse de coupe, la thermique dans la zone de cisaillement primaire est modélisée comme adiabatique, comme le montre bien les différentes configurations de la Fig. 1. 14. Cette hypothèse est bien justifiée puisque le phénomène de déformation plastique est très rapide, limitant ainsi le phénomène de conduction. Par contre dans la zone 4 où il y a une forte pression et une stagnation de la matière, la condition d’adiabaticité n’est plus valable d’autant puisque la conductivité dépend de la pression de contact. La Fig. 1. 14 montre un récapitulatif réalisé par Komanduri et Hou [55]. Elle illustre différents modèles phénoménologiques de l’analyse thermique de la première zone de cisaillement. En effet, pour bien prendre en compte la température dans les lois de comportement des matériaux à usiner, la température de cette zone doit être bien connue. L’inaccessibilité de cette zone rend difficile la mesure de la température. Ainsi beaucoup d’efforts continus d’être consentis pour mieux prédire la température. Ces efforts concernent la répartition de la chaleur entre la pièce et le copeau dans la zone 1 d’une part et entre l’outil et le copeau dans la zone 2 d’autre part.

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Fig. 1. 14 : Récapitulatif des modèles utilisés pour estimer la distribution de la température dans le copeau et la pièce, induite par la chaleur de ZCP [55].

Bilan thermique des Zone 2 et 5 : La chaleur produite par le frottement.

L’estimation de la température dans ces zones est importante car elle conduit à une fragilisation et à une usure des outils de coupe. Dans ces zones de frottement, où deux corps différents sont en contact, le problème de coefficient de partage de flux devient pertinent. La Fig. 1. 15 issue des travaux de Ceretti et al. représente un modèle phénoménologique de transfert de chaleur dans l’outil. Il apparaît clairement sur cette figure un apport de chaleur dû au frottement (Q1) et une perte

de chaleur par conductance (Q2).

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En plus de trouver la part du flux entrant dans l’outil, le phénomène de résistance de contact, particulièrement celui de la constriction, reste un challenge pour mieux comprendre le transfert de chaleur dans ces zones.

Bilan thermique de la Zone 4 : La production de chaleur dans cette zone est identique à celle

de la zone 1. Le comportement thermique n’est pas clairement identifié. Cette zone située en amont de l’arête de coupe, qualifiée de zone morte, engendre des pressions très élevées sur l’arête de coupe. Généralement la modélisation de la température de cette zone et de l’interface outil/copeau ne sont pas dissociées. La pression est élevée dans cette zone et génère une stagnation de la matière usinée et modifie ainsi le comportement thermique par rapport l’interface outil/copeau.

L’analyse thermique présentée dans ce paragraphe illustre bien les phénomènes de transfert de chaleur qui se produisent en usinage. Le fait de considérer la modélisation du transfert de chaleur en usinage par dissociation des différentes zones montre bien la complexité du transfert de chaleur dans un procédé de coupe.

Il a été souligné au début de ce chapitre que l’objectif final de différentes études est d’avoir un coût de production faible et une meilleure qualité de surface usinée. Pour atteindre cet objectif, il faut interrompre à temps l’usinage sans atteindre la phase de dégradation ultime de l’outil de coupe. Il existe plusieurs modèles pour la prédiction de la durée de vie ou la quantification de l’usure des outils de coupe. Une présentation brève de ces modèles est donnée dans le paragraphe suivant.