439 D.LEGEAIS, note sous Cass. com., 3 avril 2002, préc.
440
131. – Les cas de limitation de dette. L’article 2290 du Code civil (ancien article 2013)
énonce dans ses deux premiers alinéas que « le cautionnement ne peut excéder ce qui est dû
par le débiteur, ni être contracté sous des conditions plus onéreuses. Il peut être contracté
pour une partie de la dette seulement, et sous des conditions moins onéreuses ». Cet article
prévoit les cas de limitation de l’engagement de la caution dont deux résultent
expressément du texte et un troisième plus implicite. Ainsi, la caution peut d’abord limiter
son engagement à une partie de la dette. Pour ce faire, il sera précisé expressément dans
l’acte de caution le « montant plafond » au-delà duquel la caution n’est pas engagée. En
pratique, cette limitation se traduira par l’indication d’une somme inférieure au montant
garanti. Ainsi, des formules telles que « cautionnement à hauteur de…euros » ou
« cautionnement dans la limite de…euros » ou encore « cautionnement à concurrence de
…euros » seront utilisées
441.
132. – L’engagement de la caution peut, en outre, être limité par la stipulation des
conditions moins onéreuses. Ce cas de limitation ne devrait pas surprendre, car il y a une
relation de cause à effet entre les conditions de l’engagement et la somme à payer. En effet,
selon que les conditions sont plus ou moins rigides, le montant à payer sera d’autant élevé.
Dès lors, la caution peut parfaitement limiter les conditions de son engagement, laquelle
limitation va influencer à la baisse la somme qu’elle serait amenée à payer. Ces conditions
concernent par exemple la prorogation tacite du cautionnement par suite de l’obligation
principale. C’est ainsi que les cautions peuvent stipuler que la prorogation du terme ne
pourra être consentie qu’avec leur accord exprès
442. Une telle stipulation tend à neutraliser
la règle de l’article 2316 du Code civil (ancien article 2039) suivant laquelle « la simple
prorogation du terme, accordée par le créancier au débiteur principal ne décharge point la
caution […] ». Ces conditions concernent surtout les accessoires de la dette
443, c’est-à-dire
441 Par exemple : Cass. com., 07 décembre 2004 : RJDA 4/05, n° 457.
442 Cass. 1ère civ., 1er décembre 1993 : JCP. E 1994, 408, n° 7 ; Panorama 173 ; JCP. G 1994, IV, 335.
443
Par accessoires, il faut entendre « [les obligations] qui sont la conséquence directe de l’obligation cautionnée, qui sont nécessairement liés à cette obligation. Ce lien est suffisamment étroit, si l’on peut admettre que, en l’absence de dispositions contraires, ces accessoires sont normalement entrés dans la prévisions des parties ». En ce sens, PH.SIMLER, Cautionnement – Garanties autonomes – Garanties indemnitaires, op.cit., n° 295. Cette définition exclut les dettes indirectes qui s’insèrent dans le cautionnement illimité en montant telle que les dettes délictuelles (V. par exemple Cass. com., 26 juin 2001, D. 2001, Act. Jurispr., p. 2513, noteV.AVENA-ROBARDET).Les accessoires d’une dette peuvent donc être très divers : il peut s’agir des intérêts légaux ou conventionnels de la dette que prévoit l’article 1907 du Code civil, des frais de justice, des dommages intérêts... Sur la notion d’accessoire, M. CABRILLAC, « Les accessoires de la créance », in Mélanges A. Weill, Dalloz-Litec, p. 108 et s.
les intérêts et leur taux, ainsi que toutes les pénalités
444. En effet, les accessoires de la dette,
spécialement les intérêts, sont parfois aussi importants – sinon plus – que le montant
principal garanti
445. C’est sans doute en considération de ce danger que la première
chambre civile avait étendu la mention manuscrite aux accessoires. Certes, le fondement
était déplorable ; mais la finalité n’était pas moins louable. L’analyse de la position de la
caution permet de le vérifier.
133. – Analyse de la position de la caution. Appréciation a priori. L’examen de la
formation du cautionnement et de l’appel de la caution conduit à dire que l’engagement de
la caution doit se limiter au principal seul. En effet, pourquoi interpréter le silence ou
l’absence de précisons de la caution sur les accessoires comme valant engagement ? Le
silence signifie simplement que les accessoires ne sont pas inclus dans le champ de
l’engagement de la caution
446. Une appréciation a priori de l’engagement de la caution
permet de le penser car la caution s’engage pour le principal. Ainsi, lorsqu’une caution
s’engage en garantie d’une somme déterminée, elle limite implicitement son engagement à
la somme indiquée dans l’instrumentum, à l’exclusion des accessoires qui grossiront ce
principal plus tard. Comment imaginer qu’il en aille autrement, puisque la somme garantie
est expressément indiquée et limitée ? Dès lors que le cautionnement garantit une dette
dont le montant est connu, plafonné, rien ne permet la qualification de cautionnement
indéfini. Et, parce que l’obligation principale garantie est connue, le cautionnement l’est
nécessairement. Sous cet angle, la limitation de la dette garantie implique nécessairement
une limitation de l’engagement de la caution.
134. – Appréciation a posteriori. Cette analyse se vérifie aussi a posteriori, c'est-à-dire
lors de l’appel de la caution. Si la caution s’engage pour la somme correspondant au
principal de la dette, quelle ne serait pas sa surprise de s’entendre réclamer le paiement des
accessoires. Psychologiquement, la caution reste engagée à hauteur de la somme connue
444 Cass. com., 24 octobre 1995 : JCP. N 1996, II, p. 271 ; Gaz. Pal. 8 mai 1996, p. 21 : « a violé les articles 1326 et 2015 C. civ., la cour d’appel qui a condamné la caution solidaire d’une société à payer une certaine une certaine somme avec les intérêts alors que la mention figurant au bas de l’acte de cautionnement portait de la main de la caution « bon pour caution solidaire de la somme de … en capital », ce dont il résulte que la l’engagement était limité au capital de la dette du montant indiqué, à l’exclusion des accessoires ».
445I.TRICOT-CHAMARD, op. cit., n° 8.
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