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à arpenter ces dalles froides sous tes pieds, te façonneront un rien, un peu, beaucoup

Et lorsque tu partiras, tu emporteras un peu de ça avec toi.

Zaïneb Hamdi

Fils d'arabe, éditions Tétras-Lyre, 2017.

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POINT DE VIE

Un continuum transcalaire

1. La peau, zone de contact : le corps physique, territoire de l'intime

2. Le seuil : construire des murs pour définir un dedans et un dehors

3. La parcelle : les haies plantées, une exemple de limitation du territoire 4. Le cadastre : une limite non

matérielle qui légifère l'acte de construire

5. L'urbanisation (commune et agglomération) : continuum bâti

6. Les boisements : surfaces d'échanges et de filtration, corridors écologiques 7. Le bassin versant : unité

hydrologique 8. La Biorégion : unité

écosystémique 9. La nation : frontières

immatérielles

10. Le continent : partage terre et océan

Point de vie

© Frédérique Aït-Touati, Alexandra Arènes, Axelle Grégoire, Terra Forma : Manuel de cartographies potentielles

Les cartes qui accompagnent ces pages sont, pour la plupart, issues de l’ouvrage Terra Forma. Manuel de cartographies potentielles, écrit à six mains par Frédérique Aït-Touati, Alexandra Arènes et Axelle Grégoire, et paru aux éditions B42. Face au constat de l’invisibilisation du vivant dans la cartographie traditionnelle, les autrices entreprennent de questionner la carte comme outil de représentation du monde. L’objectif n’est pas ici de remplacer les cartes traditionnelles mais de proposer de nouveaux points de vue – sept modèles – sur cet outil. Ce travail résonne avec la thématique de ce hors-série, le chez-soi étant ici entendu comme la perception du vivant, de son « terrain de vie ».

Nous avons questionné Axelle Grégoire sur cette nécessité de redevenir acteurices de l’écriture de nos territoires.

Vous et Alexandra Arènes êtes architectes, Frédérique Aït-Touati est quant à elle his-torienne des sciences et metteuse en scène.

Comment est né le projet Terra Forma ? J’ai travaillé dans une agence de paysage et d’ur-banisme, où j’ai rencontré Alexandra [Arènes].

Là, s’est opéré un premier déplacement sur la question du rapport au spatial et au vivant. Ce glissement de focale, de l’environnement bâti à l’environnement naturel, nous a poussées à nous intéresser aux choses et aux êtres qui n’étaient pas représentés et passaient sous le radar de nos outils d’architectes. Nous nous sommes ques-tionnées sur notre façon de concevoir l’espace et sur la carte comme principal outil de travail, pour le diagnostic comme pour la prospective. Elle nous a semblé perfectible au fur et à mesure des projets et des problématiques rencontrées. Nous avons progressivement pris conscience que nous avions une responsabilité de ce point de vue, puisque la façon dont on représente le territoire conditionne nos actions sur celui-ci.

Alexandra a ensuite suivi le programme SPEAP à SciencesPo où elle a rencontré Frédérique [Aït-Touati]1. Nous avons collaboré une première fois ensemble sur le projet Inside2, une conférence- spectacle écrite par Bruno Latour. Parallèle-ment a commencé à six mains le travail sur Terra Forma. Ce qui nous a réunies, c’est la capacité

des cartes à déployer des mondes. Il y avait là une possibilité de déconditionner nos réflexes d’aménageur·euses, de chercheur·euses ou de citoyen·nes, de revoir la façon dont on bâtit et crée notre relation au territoire et au terrestre. Je conçois vraiment le projet comme un voyage à travers nos outils. Comment les défaire pour les refabriquer, les réorienter ? Il y a ce double enjeu dans Terra Forma : le rééquipement du regard pour un nouveau type d’exploration autant que le renouvellement d’images et d’imaginaires des territoires observés.

Comment avez-vous défini les sept modé-lisations qui composent Terra Forma – Sol, Point de vie, Paysages vivants, Frontières, Espace-temps, (Re)ssources, Mémoire(s) ? Nous avons dressé une liste de sujets très prag-matiques à partir des probléprag-matiques rencon-trées dans notre travail en agence : la prévalence du foncier sur la compréhension en profondeur des sols, l’accélération des espace-temps urbains, la complexe réhabilitation et recon-nexion des sites postindustriels ou encore la désynchronisation du temps politique, du temps de la ville et du temps cyclique du vivant, etc.

Pour étudier chacun de ces sujets, il nous a fallu construire un outil adapté. Progressivement nous sommes revenues sur ces questions avec une référence qui nous a beaucoup inspirée, celle de Robert Hooke, inventeur du microscope. L’idée était qu’avec une autre lentille optique, même métaphorique, nous pouvions voir les choses complètement différemment. D’un point de vue méthodologique, cette idée de la lentille optique est devenue très importante dans le projet de Terra Forma mais également dans la façon dont je pense la pratique désormais.

Nous avons ainsi commencé par construire un premier outil par rapport à la question du sol. Puis pour approcher les habitant·es de ces sols – humain·es et non-humains –, nous avons emprunté le concept du « point de vie »3 à Emanuele Coccia et à partir de ces deux pre-mières lentilles tout est venu progressivement : le temps, les ressources et la mémoire. Ces sujets étaient déjà très présents dans notre pratique d’architectes-paysagistes puisque nous étions souvent amenées à travailler sur des territoires qui avaient été abandonnés, abimés,

TENDRE À

Propos recueillis par Maryline le Corre, coordinatrice à Culture & Démocratie et retranscrits par Thibault Scohier, chargé de projets à Culture & Démocratie