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3.3 Choix d’une stratégie de simulation des grandes échelles avec modélisation de la paroi 111

3.3.4 Approche zonale : mode III de la méthode ZDES

L’étude des spécificités de la couche limite turbulente à grand nombre de Reynolds a mis en valeur l’utilité de la simulation numérique. Celle-ci permet en effet d’obtenir des bases de données très bien résolues. De plus, la réalisation d’expériences numériques permet de déterminer la pertinence et l’importance de mécanismes physiques donnés dans la dynamique de la couche limite en les isolant artificiellement. Cette dernière utilisation de la simulation numérique contribue en particulier à la compréhension actuelle des interactions entre zones de la couche limite exposée dans le chapitre 2. La réalisation d’une simulation numérique de turbulence pariétale décrivant explicitement les fluctuations turbulentes peut également être motivée par des applications en ingénierie, lorsque la résolution des fluctuations est bénéfique à la prévision de l’écoulement et de certaines de ses conséquences, comme abordé dans la section §3.1. Le coût de simulation de la turbulence pariétale et de sa large gamme d’échelles dynamiquement actives à grand nombre de Reynolds peut alors nécessiter la mise en œuvre de stratégies de simulation avancée de la turbulence pariétale. L’objectif est alors de résoudre les fluctuations les plus significatives pour l’application envisagée tout en modélisant le reste de la dynamique turbulente pour en économiser la résolution. Le gain ainsi obtenu

102 pariétale est estimé dans la section §3.2. Enfin, le choix d’une stratégie de simulation avancée est présenté dans la section §3.3 dans un contexte de simulation numérique de géométries tridimensionnelles complexes.

3.1 Motivation des simulations avancées de la turbulence pariétale

De nombreuses applications industrielles nécessitent seulement la connaissance de l’écoulement moyen (au sens de la moyenne de Reynolds introduite §1.2.3), qui est régi dans le cas incompressible par les équations de Navier-Stokes moyennées (1.10) :

xi(�ui�) = 0

t(�ui�) + ∂xj(�ui� �uj�) = −∂xi(�p� /ρ) + ∂xj(�τij� /ρ) − ∂xj

�� u

iu

j

�� (3.1) �τij� /ρ = 2ν �dij� avec �dij� = 1/2xj�ui� + ∂xi�uj (3.2) Le terme −∂xj

�� uiuj��

traduit l’effet des fluctuations turbulentes sur l’écoulement moyen. Une représentation classiquement utilisée consiste à approcher le tenseur de Reynolds à l’aide de la valeur de l’énergie cinétique turbulente k et d’une viscosité turbulente νt selon l’hypothèse de Boussinesq ([333]) :

uiuj

= 2νt�dij� − 2/3 kδij (3.3) si bien que les équations du mouvement moyen sont fermées dès lors que νtet k sont connues :

xi(�ui�) = 0

t(�ui�) + ∂xj(�ui� �uj�) = −∂xi(�p� /ρ + 2/3 k) + ∂xj(2 (ν + νt) �dij�) (3.4) Les valeurs locales de νtet de k sont alors fournies par un modèle de turbulence RANS (Reynolds-Averaged Navier-Stokes). Dans le cas des équations de couche limite pour la quantité de mouvement longitudinale (1.27) seule νt doit être fournie1. L’hypothèse de Boussinesq s’écrit alors, avec les hypothèses de couche limite, − �uv� = νty�u� ([50]).

Un exemple de modèle RANS fréquemment utilisé est le modèle de Spalart-Allmaras (Spalart et Allmaras [296]), qui représente l’évolution de νt dans un écoulement pleinement turbulent à l’aide de l’équation de transport suivante :

t˜ν + �ui� ∂xi˜ν = cb1S ˜˜ν− cw1fw(˜ν/dw)2+ 1/σ (∂xi((ν + ˜ν)∂xi˜ν) + cb2xi˜ν∂xi˜ν) (3.5) avec νt= ˜νfv1, fv1 = χ3/

χ3+ c3 v1

et χ = ˜ν/ν. La norme de la vorticité moyenne Ω =�ωi� �ωi est prise en compte dans la production de viscosité turbulente due au cisaillement moyen à travers le terme ˜S = Ω + ˜ν/

κ2d2w

fv2. Le modèle représente l’influence d’une paroi solide par le terme de destruction −cw1fw(˜ν/dw)2 qui met en jeu la distance à la paroi dw. Un terme de diffusion de la viscosité turbulente complète l’équation de transport. ˜ν est nulle à la paroi, et les fonctions fv1et fv2 assurent un comportement numérique favorable du modèle au voisinage de la paroi. La fonction fw

permet d’obtenir un comportement satisfaisant dans la zone de sillage de la couche limite. Spalart et Allmaras [296] détaillent les fonctions et des valeurs des coefficients. On note en particulier que la valeur d’une des constantes (cw2) est fixée de sorte à obtenir Cf = 0.00262 à Reθ = 104 dans la couche limite turbulente à gradient de pression nul ([296]). Le modèle de Spalart-Allmaras ne fournit que la valeur de νt, tandis que l’effet du terme impliquant k (3.4) est négligé2 ([58]). De nombreux

1. En effet, seule la valeur deuv

est alors impliquée, dont l’approximation selon l’hypothèse de Boussinesq (3.3) ne fait pas intervenir la valeur de k (car δ12= 0).

2. Négliger l’effet du terme impliquant k (3.4) peut être pleinement justifié dans le cas incompressible. En effet, ce terme joue alors dans le système (3.4), de concert avec la pression moyenne, un simple rôle de multiplicateur de Lagrange associé à la contrainte de champ de vitesse moyenne solénoïdal découlant de l’hypothèse d’incompressibilité. En particulier, �p� /ρ + 2/3 k est solution d’une équation de Poisson obtenue en évaluant la divergence du bilan de quantité de mouvement moyenne. Bien que la valeur de 2/3 ρ k ne soit pas explicitement décrite, les efforts de pression moyens pariétaux sont alors accessibles si l’on suppose que k est nulle à la paroi, ce qui est par exemple vrai dès que la condition d’adhérence est vérifiée.

3.1 Motivation des simulations avancées de la turbulence pariétale 103 autres modèles RANS existent, dont certains s’affranchissent de l’hypothèse de Boussinesq pour représenter le tenseur de Reynolds (certains exemples sont discutés par Wilcox [333], Spalart et al. [301], Jakirlić et Hanjalić [136] et Manceau [189]).

La description de l’écoulement à l’aide des équations moyennées et d’un modèle RANS n’est toutefois pas toujours satisfaisante pour les applications en ingénierie mettant en jeu une dynamique turbulente pariétale, en raison des limitations des modèles RANS disponibles et de la restriction à la description des seules grandeurs moyennes intrinsèque à l’approche RANS. Il semble donc parfois nécessaire de recourir à une résolution explicite des fluctuations turbulentes (au moins les plus énergétiques, en particulier dans la zone externe de la couche limite qui joue un rôle important dans la dynamique de la couche limite à grand nombre de Reynolds abordée dans le chapitre 2). Trois catégories d’écoulements mettant en valeur l’utilité d’une simulation avancée sont discutées ici et illustrées par la figure 3.1.

La première catégorie regroupe les couches limites attachées subissant un gradient de pression modéré (proche du cas canonique fig. 1.2). L’approche moyennée (RANS) permet une prévision précise et fiable des grandeurs moyennes dans de tels écoulements, car ils sont proches des cas gé-néralement utilisés pour la calibration des modèles RANS. Si toutefois la description explicite de certaines grandeurs fluctuantes est nécessaire pour l’application envisagée (notion de niveaux de validation formalisée par Sagaut et Deck [264]), et que le recours à un modèle empirique n’est pas souhaitable, la résolution de fluctuations turbulentes par la simulation numérique est nécessaire. Un tel niveau de description peut être requis pour mieux prédire la fatigue d’une structure causée par le chargement instationnaire des parois lié à la turbulence pariétale. Certaines applications en aéroacoustique peuvent également bénéficier de la résolution explicite des fluctuations turbulentes dans les couches limites attachées. Les motivations applicatives de l’étude des fluctuations de pres-sion pariétale sont par exemple détaillées par Gloerfelt et Berland [106] et par Arguillat et al. [8] et Salze et al. [267]. De plus, la diffraction par un bord de fuite tranchant des fluctuations tur-bulentes issues de couches limites incidentes turtur-bulentes attachées est à l’origine de l’émission de bruit de bord de fuite large bande, illustré en (a) sur la figure 3.1 par une simulation numérique directe (Winkler et al. [335]). Cette source de bruit peut être dominante, par exemple dans le cas du bruit généré par l’éolienne étudiée en conditions réelles par Oerlemans et al. [226]. Le bruit de bord de fuite large bande peut être prédit à l’aide d’une simulation des grandes échelles (Marsden et al. [192]), en adaptant toutefois les méthodes numériques utilisées aux contraintes dictées par la résolution précise des phénomènes de propagation acoustique (Bailly et al. [12]). Contrairement au cas d’un bord de fuite émoussé pouvant donner lieu à un lâcher tourbillonnaire source de bruit et pouvant être reproduit par une simulation URANS (utilisation d’un modèle RANS pour décrire un écoulement moyen instationnaire, §3.2), le cas du bruit large bande associé à l’interaction entre la turbulence pariétale incidente et un bord de fuite tranchant ne peut a priori pas être directement reproduit à l’aide d’un modèle RANS. Dans ce cas en l’absence de lâcher tourbillonnaire (Brooks et al. [22]), on peut en effet s’attendre à ce qu’une simulation URANS soit stationnaire.

Une deuxième catégorie d’écoulements pour laquelle la résolution explicite de fluctuations tur-bulentes peut être utile est celle des couches limites turtur-bulentes attachées soumises à de sévères perturbations. On peut citer les exemples d’un fort gradient de pression adverse ou du mélange avec un sillage turbulent, tous deux pouvant être rencontrés au niveau de l’extrados d’un profil hypersustenté tri-corps. Le cas d’un fort gradient de pression adverse sur l’extrados d’un volet est illustré en (b) fig.3.1. Spalart [300] souligne que l’universalité de modèles RANS simples et robustes n’est pas nécessairement suffisante pour traiter de tels écoulements. La réponse d’une couche limite attachée à un fort gradient de pression adverse met en particulier en jeu une forte augmentation de l’intensité turbulente dans la zone externe tandis que la dynamique propre à la zone interne reste davantage universelle (§2.3.3). Dans le cas du mélange entre une couche limite turbulente attachée et un sillage turbulent, typiquement rencontré dans des configurations hypersustentées (Smith [288]), la différence entre les échelles caractéristiques des dynamiques turbulentes issues de la couche limite et du sillage n’est pas représentée par un modèle RANS basé sur la description de la turbulence par un unique jeu d’échelles caractéristiques locales. Le mélange a lieu au niveau de la zone externe de

104 pariétale

Figure 3.1 – Illustration d’écoulements pour lesquels une simulation numérique résolvant certaines fluctuations turbulentes présente un intérêt. (a) Bruit de bord de fuite associé aux couches limites turbulentes attachées incidentes (Winkler et al. [335]). (b) Couche limite turbulente soumise à un fort gradient de pression adverse sur l’extrados d’un volet appartenant à un profil hypersustenté tri-corps. (c) Décollement à bulbe court au niveau du bord de fuite d’un volet, avec une épaisseur de couche limite incidente du même ordre de grandeur que la hauteur de la zone de recirculation. Adapté de Deck et al. [65] et de Winkler et al. [335].

la couche limite tandis que la zone interne est a priori moins affectée par le phénomène. Pour cette catégorie d’écoulements, la résolution de fluctuations turbulentes, au moins les plus énergétiques de la zone externe de la couche limite, pourrait donc à la fois fournir un meilleur niveau de description de l’écoulement (fluctuations) et une meilleure prévision de l’écoulement moyen en comparaison avec un modèle RANS.

Enfin, une troisième catégorie est constituée par les écoulements dont la dynamique est forte-ment influencée par la dynamique turbulente d’une couche limite attachée située en amont. Deck [61] souligne que c’est en particulier le cas des décollements à bulbe court dont l’épaisseur n’est pas grande devant celle de la couche limite amont (par opposition avec les décollements massifs). Un exemple de décollement à bulbe court peut être rencontré au niveau du bord de fuite d’un volet (illustration (c) de la figure 3.1). Dans le cas du décollement d’une couche limite turbulente incom-pressible sur une plaque plane sous l’effet d’un gradient de pression adverse, Na et Moin [219] et Chong et al. [38] montrent que les structures cohérentes apparues dans la zone externe de la couche limite amont sous l’influence du gradient de pression adverse exercent une influence déterminante sur la couche de mélange au niveau du bulbe de décollement (fig. 3.2). Pearson et al. [233] étudient la séparation turbulente en amont d’une marche montante de hauteur plus petite que l’épaisseur de la couche limite incidente et considèrent le rôle joué par les superstructures présentes dans la couche limite amont sur la dynamique du décollement. Gatski et al. [98] soulignent que malgré les progrès des modèles RANS, la prévision de la longueur des zones décollées semble plus facilement obtenue à l’aide d’une simulation numérique résolvant une partie des fluctuations turbulentes plutôt que les représentant en moyenne selon l’approche RANS. Jakirlić et Maduta [137] proposent par exemple un modèle RANS de transport des tensions de Reynolds (Reynolds-Stress Model) rendu sensible aux instabilités (Instability-Sensitive RSM ) de sorte à supporter la résolution de certaines fluctua-tions turbulentes, et en démontrent en particulier la capacité à résoudre les grandes échelles des fluctuations turbulentes en turbulence homogène isotrope et dans un écoulement de canal turbulent à faible nombre de Reynolds.

L’interaction entre une onde de choc et une couche limite turbulente pourrait également être en partie déterminée par les fluctuations turbulentes de la couche limite amont, en particulier les superstructures, mais d’autres phénomènes complexes semblent être en jeu (Clemens et Narayanas-wamy [45]). Le lâcher tourbillonnaire au bord de fuite émoussé d’un profil pourrait aussi dépendre des fluctuations turbulentes dans les couches limites incidentes dans le cas où l’épaisseur du bord de

3.2 Estimation du coût de simulation numérique de la turbulence pariétale 105

Figure 3.2 – Bulbe de décollement visualisé à l’aide de lignes de niveau de vorticité transverse instantanée (lignes continues : 0.047 U0

in; pointillés : −0.047 U0

in). Tiré de Na et Moin [219]. fuite n’est pas grande devant l’épaisseur des couches limites incidentes (on trouvera une discussion dans Rai [254]). Pour prédire le bruit de bord de fuite émoussé associé au lâcher tourbillonnaire (Brooks et al. [22]), il pourrait alors être nécessaire de résoudre les fluctuations turbulentes les plus énergétiques dans les couches limites incidentes. Enfin, la prédiction du bruit de jet semble pouvoir être améliorée par la représentation explicite de fluctuations turbulentes issues des couches limites se développant à l’intérieur de la tuyère (Bühler et al. [23]).

Pour traiter ces trois catégories d’écoulement, une simulation numérique résolvant au moins en partie les fluctuations turbulentes, en particulier dans la zone externe de la couche limite, semble donc présenter des avantages significatifs en comparaison avec une modélisation RANS. Le coût d’une telle simulation numérique peut toutefois être très élevé en raison de la diversité des échelles dynamiquement actives au sein de la turbulence pariétale, comme estimé dans la section suivante.

3.2 Estimation du coût de simulation numérique de la turbulence

pariétale

Figure 3.3 – Différentes approches de simulation numérique de la turbulence. Tiré de Laraufie [170], adapté de Sagaut et al. [265].

Dans l’approche RANS (§3.1), la simulation numérique de la turbulence ne représente que les effets moyens des fluctuations turbulentes sur l’écoulement moyen. Lorsque l’écoulement moyen (au sens de la moyenne de Reynolds) est instationnaire, l’approche est qualifiée de URANS (Unsteady Reynolds-Averaged Navier-Stokes). Spalart [300] indique qu’une simulation URANS permet par exemple de capturer le lâcher tourbillonnaire derrière un corps non profilé. La solution URANS est toutefois le plus souvent périodique en temps dans ce cas, la moyenne de Reynolds coïncidant alors avec une moyenne de phase, et ne rend pas compte de la modulation d’amplitude du lâcher tourbillonnaire ([300]). L’approche (U)RANS suppose de plus qu’il existe une séparation claire entre les échelles turbulentes modélisées et les fluctuations temporelles résolues par la simulation. Dans le cas du lâcher tourbillonnaire résolu par une simulation URANS, [300] souligne que la séparation entre la fréquence associée et les fréquences de certaines fluctuations turbulentes modélisées n’est précisément pas vérifiée.

106 pariétale Comme illustré par la figure3.3, une approche radicalement opposée consiste à résoudre numé-riquement toutes les fluctuations turbulentes, y compris les plus petites échelles dynamiquement actives (§1.2.4), selon la stratégie de la simulation numérique directe (DNS, Direct Numerical Si-mulation). Les équations de Navier-Stokes (1.7) sont alors directement résolues sans introduire de modèle de turbulence.

Pour réduire le coût de simulation, une stratégie intermédiaire exploite la relative universalité des plus petites échelles turbulentes (§1.2.4) tout en réalisant la simulation des grandes échelles (LES, Large Eddy Simulation). L’effet des échelles turbulentes plus petites qu’une échelle de coupure proche de la taille de maille est modélisé par un modèle sous-maille. En revanche, la simulation résout explicitement les grandes échelles, dont le manque d’universalité est en partie à l’origine des difficultés de modélisation RANS.

Le coût élevé d’une LES en comparaison avec l’approche RANS peut toutefois motiver la restric-tion de l’emploi de la LES aux seules zones de l’écoulement où un niveau de descriprestric-tion supérieur à celui fourni par une simulation RANS est souhaité. Les méthodes hybrides RANS/LES permettent en particulier de représenter les couches limites attachées par une modélisation RANS tandis que les décollements massifs sont traités en LES (Sagaut et Deck [264]). Une discussion étendue des approches multi-résolution est proposée par Sagaut et al. [265].

Figure 3.4 – Différentes approches de simulation numérique de la turbulence pariétale. L’appella-tion QDNS (Quasi-DNS) sera justifiée fig. 3.5. Adapté de Deck et al. [65].

Comme discuté dans la section3.1, le traitement des couches limites attachées en RANS n’est toutefois pas toujours satisfaisant. Le coût d’une DNS est par ailleurs très élevé à grand nombre de Reynolds. De plus, parmi les échelles de fluctuations turbulentes directement impliquées dans la dynamique propre de la zone tampon (§1.3.3), même les plus grandes échelles sont de très petite taille en comparaison avec l’épaisseur de la couche limite attachée à grand nombre de Reynolds. Une simulation des grandes échelles résolvant la dynamique proche paroi (WRLES, Wall-Resolved Large Eddy Simulation, figure 3.4) ne procure donc qu’un gain modéré en comparaison avec le coût d’une DNS. Cela motive la stratégie de simulation des grandes échelles avec modèle de paroi (WMLES, Wall-Modelled Large Eddy Simulation, fig. 3.4), dans laquelle la dynamique propre à la zone proche paroi, supposée relativement universelle, est modélisée tandis que celle de la zone externe est résolue par une LES3. On a en effet vu dans la section précédente l’intérêt applicatif de résoudre les fluctuations les plus énergétiques de la zone externe de la couche limite. De plus, l’importance croissante de la zone externe dans la dynamique turbulente de la couche limite à grand 3. Lors de la discussion de la stratégie WMLES, on entend par zone externe le complémentaire de la zone proche paroi modélisée. Cette zone ne coïncide donc pas nécessairement avec l’intégralité de la zone externe définie lors de la discussion de la physique de la couche limite, §1.2.5.3. Rappelons en particulier que les zones externe et interne se recouvrent.

3.2 Estimation du coût de simulation numérique de la turbulence pariétale 107 nombre de Reynolds a été soulignée dans le chapitre 2.

Pour illustrer le gain obtenu à l’aide de l’approche WMLES, le coût de simulation d’une couche limite turbulente en développement spatial à gradient de pression nul par ces trois approches (DNS, WRLES et WMLES) est estimé ici. On choisit de focaliser l’évaluation du coût de la simulation numérique sur le nombre de points du maillage. En effet, la question du coût de l’intégration en temps (pas de temps, durée de la simulation) et de la méthode numérique (schémas de discrétisation, algorithmes de résolution, coût CPU, stockage mémoire) tend à dépendre du phénomène physique étudié et donc de l’application finale envisagée (une estimation du nombre de pas de temps est toutefois proposée par Piomelli [242]). L’estimation du nombre de points de maillage nécessaire pour simuler numériquement la turbulence pariétale repose sur les caractéristiques spatiales des structures cohérentes (chap. 1et2) et sur les pratiques de maillage usuelles dictées par l’expérience dont la littérature rend compte (par exemple, une étude de l’effet de la résolution du maillage sur des simulations de type WMLES ainsi que WRLES est proposée par Deck et al. [68]).

La résolution du maillage est contrainte par le développement spatial de la couche limite. Pour décrire cette croissance, Choi et Moin [36] suggèrent d’utiliser des corrélations ajustées à la gamme des grands nombres de Reynolds. On suppose tout d’abord que le profil de vitesse moyenne longi-tudinale peut être représenté par une loi en puissance 1/7, ce qui mène à la relation suivante :

θ= 7

72δ (3.6)

Au lieu d’utiliser la relation Cf(Reδ) résultant de cette hypothèse, une autre loi en puissance Cf(Reδ) spécifiquement ajustée à la gamme des grands nombres de Reynolds est utilisée. Choi et Moin [36] indiquent que ces hypothèses conduisent, avec l’équation (1.39), aux relations suivantes utilisées pour estimer la taille du maillage :

δ

x = 0.16Re−1/7

x (3.7)

Cf = 0.027Re−1/7

x (3.8)

Le nombre de points de maillage requis pour résoudre la zone externe de la couche limite en simulation des grandes échelles avec modèle de paroi (WMLES) est estimé selon la méthode de

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