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B. Approche physique non invasive

3. ARFI

a) Généralités et bases physiques

L’ARFI est une nouvelle technologie qui permet de visualiser et quantifier la rigidité tissulaire, sans compression manuelle en calculant la vitesse de déplacement d’une onde de cisaillement émise suite à une impulsion ultrasonore focalisée source. Initialement développée par un laboratoire américain de la Duke University (Durham, USA ; Nightingale K et al.), cette technique fut d’abord implémentée par la société Siemens Medical Soluations sur les échographes Acuson S2000 puis S3000, mais aussi par la société Philips sur la plateforme iU22. Cette technique quantitative fournit une mesure de l’élasticité au niveau de la région d’excitation. Il s’agit d’une technique unidimensionnelle au même titre que le FS, mais la zone de mesure peut être positionnée sur une image en mode bidimensionnel. La région d’excitation correspond à une ROI rectangulaire de 1 × 0,5 cm que l’on peut déplacer librement dans les tissus jusqu’à une profondeur maximale de 8 cm par rapport au plan cutané. La mesure est proportionnelle à l’élasticité tissulaire et s’exprime en mètre par

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seconde, correspondant à la vitesse de l’onde de cisaillement perpendiculaire à l’impulsion source.

Cette technique est utilisable avec la sonde échographique dédiée à l’exploration de la cavité abdominale (36) (Figure 2).

Les mesures d’élastographie peuvent être réalisées dans le même temps que l’étude morphologique et doppler du foie.

Les applications principales de l’ARFI au niveau hépatique sont l’évaluation de la fibrose et la caractérisation tumorale.

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b.

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d.

Figure 2 : ARFI (a. représentation générale (36), b. appareillage, c. représentation schématique du principe physique de fonctionnement, d. reproduction de l’écran d’étude et du tableau de mesures).

b) Déroulement de l’examen

Le patient est installé en décubitus dorsal, le bras droit placé derrière la tête pour dégager l’hypochondre droit en cas de mesure hépatique et de façon symétrique du côté gauche en cas de mesure splénique.

La ROI est positionnée au sein du parenchyme hépatique sous contrôle visuel du mode bidimensionnel à distance des vaisseaux et à 2 cm sous la capsule (7). La mesure (mètre par seconde) s’affiche après quelques secondes sur l’écran, après avoir appuyé sur le bouton dédié à ce mode. Aucune recommandation n’a été donnée par le constructeur quant au déroulement pratique d’un examen. En pratique, dix mesures sont effectuées dans le foie droit en intercostal en respiration douce ou en apnée. Il faut éviter d’effectuer les mesures après une inspiration profonde qui augmente les valeurs d’ARFI significativement de 13 % en moyenne (87). La médiane, la moyenne et l’écart-type des dix mesures sont calculés. Un échec est défini par un ratio IQR/LSM supérieur à 30 %.

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c) Avantages et inconvénients

Les avantages de la technique ARFI sont nombreux : technique rapide, indolore, facile, résultat immédiatement disponible. La reproductibilité intra- observateur (ICC=0,9) et inter-observateur (ICC=0,81) est correcte (88). Contrairement au FS, le contrôle visuel de la zone de mesure permet d’éviter des structures vasculaires pour la réalisation des mesures, d’étudier des zones d’intérêt (plage de stéatose, foie tumoral), de relier l’élasticité à l’architecture tissulaire observée (nécrose, stéatose, etc.) et d’étudier le foie droit et le foie gauche. Il est possible de choisir la profondeur de la mesure par opposition au FS. Cette technique possède une bonne performance diagnostique, ayant déjà fait l’objet de nombreuses publications. Mais surtout, le système est intégré à un échographe clinique « standard » avec possibilité de coupler dans le même temps l’élastographie quantitative à l’analyse morphologique hépatique qui permet de rechercher des signes de cirrhose, d’HTP et de dépister des lésions focales. Les mesures sont possibles en cas d’ascite avec un taux moyen d’échec moindre qu’en FS même chez les patients obèses (en moyenne un taux d’échec entre 0 et 4,8% dans la littérature) (12).

Il existe cependant quelques limites à cette technique : la mesure de l’élasticité n’est pas délivrée en temps réel ; la mesure de l’élasticité ne peut pas être effectuée rétrospectivement ; seule une acquisition peut être effectuée à la fois et la zone de mesure est une petite zone prédéterminée dont la taille ne peut être modifiée. De plus, il n’existe pas de critère de qualité permettant de retenir ou d’éliminer une mesure. L’absence de critères permettant d’apprécier la fiabilité des mesures est une limite importante, d’ autant plus que la performance diagnostique de l’ARFI diminue fortement en parallèle à l’augmentation de l’IMC chez les patients obèses, sans que le taux d’échec de mesure soit plus important (11) (figure 3) .

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Figure 3 : Evolution des AUROCs en ARFI en fonction de l’IMC dans une population de cirrhotiques (=F4), fibrose sévère (≥F3) et fibrose modérée (≥F2) (11)

d) ARFI et fibrose hépatique

Les performances diagnostiques de l’ARFI sont prometteuses. Dans l’étude de Sporea et al. effectuée sur 274 patients mono-infectés par le VHC, les AUROCs étaient calculées respectivement à 0,880, 0,893 et 0,908 pour prédire un stade de fibrose F≥1, F≥2 (fibrose significative) et F≥3 (fibrose sévère) (89). Dans la méta- analyse de Friedrich-Rust et al. qui inclut 518 patients toutes hépatopathies confondues, les AUROCs sont calculées respectivement à 0,87 pour le diagnostic de fibrose F≥2, 0,91 pour le diagnostic de fibrose sévère (F≥3) (8).

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Au total, l’ARFI peut être considéré comme un « bon outil » diagnostique dans l’évaluation de la fibrose, en particulier pour les hépatites virales C chroniques (AUROC >0,8 quelque soit le stade de fibrose).

Cependant, l’étude comparative des performances diagnostiques de l’ARFI et du FS retrouve des résultats variables en fonction des études. Pour prédire une fibrose sévère, quels que soient les auteurs, la performance diagnostique est identique entre ARFI et FS (sonde M ou XL) (7,9–11). Pour prédire F≥1 ou F≥2, la

performance diagnostique du FS apparaît supérieure à l’ARFI pour certains auteurs (7,10), alors qu’elle est la même pour d’autres (9). Plus récemment, Rizzo et al. ont montré que l’ARFI est plus performant que le FS quel que soit le stade de fibrose (90). Dans la méta-analyse de Friedrich-Rust et al., la comparaison de l’ARFI et du FS réalisée sur 312 patients issus de quatre études différentes, montre des résultats comparables entre les deux techniques pour prédire une fibrose sévère, et une performance un peu supérieure pour le FS pour le diagnostic de fibrose significative et de cirrhose (8).

Cependant, le nombre de patients reste trop petit pour tirer des conclusions définitives.

L’interprétation d’un examen ARFI dépend entre autre de la qualité de l’examen technique et de la pathologie étudiée. Même si le constructeur n’a fourni aucune recommandation sur la qualité technique d’un examen, certains auteurs recommandent d’utiliser les mêmes critères que pour le FS (un échec est défini par un ratio IQR/LSM>0,30) (36).

e) ARFI et cirrhose

Les valeurs seuils utilisées pour déterminer les différents stades de fibrose en équivalant METAVIR varient en fonction de l’étiologie et des publications. Dans l’étude multicentrique rétrospective de Sporea et al., la valeur seuil est 1,55 m/s (AUROC=0,842) pour prédire la présence d’une fibrose F=4, pour des patients présentant une hépatite chronique C (91).

Dans la méta-analyse de Friedrich-Rust et al., la valeur seuil optimale est 1,80 m/s pour prédire la présence d’une fibrose F=4 ( AUROC=0,93 ; Se=0,92; Spé=0,86; VPP=0,71 ; VPN=0,97), toutes hépatopathies confondues (8).

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f) ARFI et HTP

Ferlitsch et al., (92) ont corrélé les mesures d’élasticité hépatique en ARFI aux mesures du gradient de pression veineuse hépatique. 49 patients présentant une maladie hépatique chronique d’étiologies variées étaient inclus, chacun bénéficiant d’une mesure d’élasticité hépatique en FS et en méthode ARFI et d’une mesure de GPVH. Une HTP cliniquement significative (GPVH ≥ 10 mm Hg) était retrouvée chez 56,2% des patients. Il existe une bonne corrélation entre ces 2 techniques (r=0,709). L’AUROC de l’ARFI pour le diagnostic de l’HTP cliniquement significative est de 0,874 (IC 95% : 0,748-0,999).

g) ARFI et rate

L’élasticité splénique est rapidement apparue comme un marqueur de fibrose et d’HTP dans de nombreuses études.

La corrélation entre les mesures d’élasticité hépatique et splénique est connue depuis quelques années (R²=0,574 pour un p<0,001) (93). En 2010, Bota et al., ont évalué l’élasticité splénique dans la prédiction de la cirrhose chez une petite population de 82 patients dont 57 cirrhotiques (d’étiologies variables) avec ou sans VO (13). Ils concluent à un intérêt significatif des mesures spléniques dans le diagnostic non invasif de la cirrhose avec un cut-off à 2,51 m /sec (Se=85,2%, Spé=91,7%, VPP=95,8%, VPN=73,3% et AUROC à 0,91), mais ne retrouvent aucune différence significative d’élasticité splénique entre les patients avec ou sans VO : la mesure de SS ne permettrait donc pas de prédire la présence et notamment la sévérité des VO. D’autres études semblent confirmer ce résultat qui reste controversé.

Ainsi, Takuma et al., (12) ont étudié 340 patients cirrhotiques et comparé SSM-ARFI pour prédire la présence ou l’absence de VO et notamment la présence de VO de haut grade (sous contrôle de la FOGD). SSM-ARFI sont significativement supérieures chez les patients avec VO avec un cut-off pour la détection des VO à 3,18 m/sec (AUROC>0,9 ; VPN=98,4%, Se=98,5, LR-=0,025 et une performance diagnostique à 75%) et un cut-off pour l’identification des VO de haut grade à 3,30 m/sec (AUROC>0,9 ; VPN=99,4%, Se=98,9%, LR-=0,018 et une performance diagnostique à 72,1%). Selon ces mêmes auteurs, une valeur de SSM-ARFI <3,30

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m/sec permettrait d’éliminer la présence de VO de haut risque hémorragique dans une population de cirrhotiques. Le taux d’échec de SSM-ARFI était de 4,5% dans cette étude.

La possibilité d’utiliser l’ARFI comme une méthode non invasive dans le diagnostic de l’HTP cliniquement significative et notamment dans le dépistage des VO de haut grade reste donc pour l’instant un sujet encore discuté bien que les résultats dans la littérature semblent prometteurs.

h) Intérêt pronostic dans la cirrhose

A notre connaissance il n’existe pas d’étude pronostique à ce jour.

L’intérêt des mesures d’élasticité hépatique en ARFI dans le suivi des hépatites virales traitées a été étudié sans résultat concluant pour le moment.

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