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Apports potentiels d'une vue textuelle dynamique et synchronisée

A) Apports aux utilisateurs de Cabr

1°) Mise au point de grosses figures

Un certain nombre de chercheurs et d'enseignants utilisent Cabri dans des domaines connexes à la géométrie. Il s'agit de l'optique, de la physique, des statistiques,... (cf. tableau §I.1.). Ces utilisations nécessitent souvent des constructions et des mises au point de figures de plusieurs centaines d'objets.

Comme nous l'avons vu dans le chapitre I, une des difficultés liées à la construction de grosses figures est que les objets construits sont éloignés dans le temps : l'utilisateur doit se rappeler les contraintes exactes que chaque objet respecte par construction, ainsi que ses liens avec les objets dont il dépend.

Une vue synchrone de la structure logique du programme de construction, avec ubiquité des objets, permettrait de rétablir la correspondance entre les occurrences de la variable qui représente l'objet géométrique et l'instance de cet objet représenté graphiquement (géométriquement). Ainsi, l'utilisateur possèderait plusieurs modes d'accès pour chacune des données, et pourrait poursuivre la construction indifféremment sur chacune des vues, du moment que la vue est dynamique. L'utilisateur pourrait choisir le mode d'accès qui est le plus immédiat dans le contexte de la situation où il se trouve. Par exemple, dans une vue de la structure logique, chaque objet serait accessible et sélectionnable sans ambiguïté.

Les définitions de macro-contructions permettent de structurer la construction, et de récupérer l'investissement dans la mise au point de certaines de ses parties en les réutilisant dans de nouvelles constructions. La vue structurelle donnerait accès au contenu même des macros.

De plus, si nous la munissons de fonctionnalités de dépliement et de repliement des macros, elle permettra d'obtenir une vue synthétique du programme, et de choisir un niveau d'abstraction adapté à sa compréhension et à sa mise au point. Donc le niveau d'abstraction du programme sera adaptable en pliant ou dépliant les macros définies.

Une vue structurelle permet donc de répondre à chacun des points développés dans le chapitre I-1.

Le choix d’une forme textuelle pour cette vue permet de plus d'éditer la figure depuis n'importe quel support textuel, même sur le papier, et de fixer les étapes (liste ordonnée d’actions) à accomplir pour construire la figure.

2°) Enseignement avec Cabri

a. Préparation des exercices et illustrations de cours

Quand un professeur prépare des exercices, il a un rôle d'utilisateur particulier. Ses impératifs ne sont pas les mêmes que ceux des utilisateurs élèves. Il n'a pas de raison de se poser des questions qui contribueraient à l'aider à assimiler des notions mathématiques, en dehors d'une phase de test de ses exercices. Et pour la phase d'édition du support-figure (ou macro) de l'exercice, il a besoin d'efficacité.

L'accès à la structure logique de la figure y contribuera, ainsi que les possibilités de modifications des macros pour leur mise au point.

b. Evaluation des connaissances et des acquis

L'utilisation d'un logiciel dans l'enseignement conduit au problème du contrôle des connaissances acquises par l'élève et donc à l'évaluation de ses travaux. Pour cela, le professeur peut regarder les figures construites par les élèves. Mais, d'une part, ces figures ne contiennent pas toute l'information sur les tentatives des élèves, et d'autre part l'information concernant les contraintes qui régissent les figures ne sont pas immédiatement accessibles depuis la figure.

L'accès à la structure logique répondra à la deuxième attente, et pour la plupart des tâches d'évaluation du résultat, cela suffit.

Par contre, en ce qui concerne l'évaluation de la stratégie d'exploration du problème par l'élève, la vue structurelle ne répondra pas aussi bien au besoin du professeur que l'historique des actions de l'élève.

La vue servira donc moins à ajuster a posteriori les énoncés des problèmes qu’à vérifier que les contraintes désirées auront bien été respectées par l'élève.

3°) Applications de Cabri à de nouveaux domaines

a. Recherche en mathématiques

En recherche en mathématiques, Cabri et la géométrie dynamique offrent un support de réflexion permettant de deviner, d'imaginer des propriétés. En géométrie non euclidienne (§I-1) ou avec les coniques, par exemple, l'environnement constitué par le micro-monde de Cabri est très apprécié, car il permet d’appréhender des propriétés non perceptibles sans animation.

Les figures construites pour ce type d'activités sont de grosses figures et les chercheurs fabriquent des outils personnels en écrivant des macros très complexes qu'ils réutilisent d'une recherche à une autre.

Contrairement à l'utilisation de Cabri pour l'enseignement pur, les utilisateurs-chercheurs investissent plus de temps dans l'appropriation de l'outil informatique. Ils veulent faire fructifier leur investissement en réutilisant ce qu'ils ont déjà construit. Ils intègrent leurs macro- constructions dans la barre de menus, et la spécialisent selon leurs besoins (barre de géométrie hyperbolique...). Ils travaillent avec le logiciel à un niveau d'abstraction plus élevé que celui des outils de base.

Ils veulent aussi réutiliser et partager des macro-constructions entre chercheurs. Or, sans forme textuelle, le seul moyen pour connaître le contenu effectif des macros est le commentaire prévu par son créateur ou une analyse des effets de son application à des objets. Comme nous l'avons vu dans le chapitre I-1, l'enregistrement textuel est difficilement décriptable et donc réutilisable, même pour des experts. On ne peut donc corriger ou modifier une grosse macro qu’avec un risque important de ne pas aboutir.

Ainsi, les chercheurs en mathématiques utilisateurs de Cabri sont, a priori, gros consommateurs de fonctionnalités spécifiques des environnements de programmation, comme la hiérarchisation. Le besoin d’une vue textuelle, accompagnée d’outils de navigation appropriés, est particulièrement important pour eux.

b. Prototypage graphique

Dans d'autres domaines comme la conception assistée par ordinateur, ou la modélisation en 3 dimensions, le concept des macros de Cabri permet de fabriquer des prototypes d'outils et ainsi d'évaluer la pertinence de différentes approches pour manipuler les objets de ces domaines à travers une interface graphique.

Depuis l’origine, les systèmes de CAO sont essentiellement basés sur la programmation textuelle, et les recherches actuelles tentent d'y intégrer des approches de manipulation directe des objets géométriques (§I-2-C-2°-c, §I-3-B-2°-b).

Le public visé par ces systèmes est constitué d'utilisateurs non-programmeurs, mais les tâches qu'ils ont à accomplir sont souvent répétitives. Elles peuvent être optimisées par la définition de programmes. Aussi, l'approche de la programmation par l'exemple (cf. §I.2.C), et la définition automatique des macros, est bien adaptée à ce domaine. Une des spécificités de ce domaine est le grand nombre d'objets à construire, ce qui conduit à une gestion critique de l'ambiguïté.

Dans ces domaines où la programmation textuelle est première, la programmation directe commande l'édition d'un texte qui, lui, en tant que programme de construction, commande la construction. Le rôle du programme textuel reste prédominant.

L’interface de Cabri-géomètre pourrait être très utile pour ces domaines, en particulier grâce au concept de macro qu’il supporte. La conjugaison de la manipulation directe des objets que Cabri-géomètre fournit, et la possibilité de définir des macro-commandes, permettrait l'exploration et l’évaluation d'idées nouvelles.

Dans un tel contexte, les prototypages en CAO nécessiteraient la mise au point de macros Cabri complexes, difficiels à mettre au point sans accès (textuel) à leur contenu effectif. De plus, l’utilisation synchronisée de la vue textuelle peut constituer un moyen pour remédier aux problèmes liés à l’ambiguïté.

Imaginer un tel apport de Cabri à un domaine comme la CAO nous conduit, réciproquement, à dégager des améliorations possibles de Cabri lui-même. Par exemple, nous voyons l'intérêt de définir des paramètres globaux pour les macros, et d’intégrer de véritables structures de contrôle qui sont indispensables en CAO [Girard 95].

La première version mise en œuvre dans le cadre de ce travail répond à certains de ces désirs, mais pas encore à tous.