a. Impact sur les obstacles rencontrés et déterminants de la formation à l’origine de la modification ou non de ces freins
A l’issue de la formation, le sentiment d’être provoquant, ressenti par la majorité des médecins, est
atténué pour une majorité qui déclare être moins gênée pour en parler (M2 M5 M6 M9). S’efforcer
d’aborder davantage le sujet a permis de le banaliser (M2 M6), un autre explique que poser la question
aux patients susceptibles d’être concernés lui confère peu de risques de heurter le patient puisque celui-ci attendrait que ce soit le médecin qui lui pose la question (M9).
Pour 3 médecins la formation n’aura pas apporté un bénéfice sur ce point, puisqu’ils craignent toujours de choquer et les pensées du patient à leur égard (M1 M4 M8).
Au décours de la formation, un seul (M6) des quatre médecins (M4 M6 M7 M8) n’a plus le sentiment de
s’immiscer dans l’intimité du patient en l’interrogeant sur sa fonction érectile.: « Au bout du
compte on va se dire que ça parait assez normal de le demander » (M6).
Pour les deux médecins exprimant des difficultés personnelles pour parler de DE, la formation aura permis d’atténuer cette barrière car l’un « ose poser la question »même s’il persiste encore un peu de gêne mais« se force »à le faire et« ça va mieux qu'avant » (M2).Le second avoue être« moins
gêné » (M5).
Le manque de temps au cours d’une consultation est toujours présent mais n’apparaît plus
comme un obstacle au dépistage de la DE (M1 M3 M4 M9).
En effet, pour faire face au manque de temps, l’abord de la DE en fin de consultation est l’occasion de faire émerger le sujet sans commencer à l’explorer pour ne pas perdre trop de temps (M3 M9), alors
qu’un autre s’efforce d’intégrer cette question à l’interrogatoire (M1).
Poser la question n’apparaît finalement pas chronophage (M1 M9) :« au final ça ne prend pas trop de
temps de poser la question quand on voit le patient pour son bilan ou pour son renouvellement d’ordonnance, on peut lui glisser la question » (M9).
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La programmation d’un« prochain rendez-vous » (M4) pour approfondir le sujet est une méthode
alternative à la contrainte du temps. « je ne me lance pas dans l’abord complet s’il s’engage, sinon
je m’en sors pas, mais je peux lui proposer qu’on se revoie pour le bilanter pour ça » (M9).
La formation a permis de sensibiliser la majorité des médecins rapportant un manque d’intérêt pour ce sujet, sur l’intérêt de le faire (M1 M3 M9). Le reste des participant a tenu à mentionner les
différentes raisons de dépister la DE comme motivation à le faire davantage.
Ils évoquent, à ce propos, le rôle central du médecin traitant dans le dépistage de cette pathologie
(M1 M2 M5 M6), décrit comme « l’interlocuteur privilégié » (M5) et évoquent lefait que le patient attende
que ce soit le médecin qui les interroge à ce sujet (M1 M2 M4 M7 M9).
Plusieurs insistent sur le lien étroit entre l’existence d’une DE et la présence de facteurs de risques cardio-vasculaire (M1 M5 M6 M7 M9) ou d’athérome (M4, M5), en soulignant le lien potentiel avec une
pathologie artérielle coronarienne sous-jacente avancée (M1 M2 M3 M4) : « je ne savais pas que le lien
avec les artères coronaires était si important » (M2), « Je n’imaginais pas que [ ] ça pouvait être
associé à des troubles coronariens si avancés. Forcément ça sensibilise un peu plus » (M3).
Ils soulignent aussi l’augmentation de la prévalence du trouble avec l’âge (M1 M5 M9) et sa fréquence
élevée (M2 M3 M7).
Enfin, le retentissement psycho-social de la DE a interpelé les participants qui n’hésitent pas à évoquer la souffrance psychique endurée par le patient (M3 M4 M6) et le couple (M5) comme une
incitation au dépistage : « Oui mais aussi parce que les gens en souffrent beaucoup, seul dans leur
coin » (M4), « mais aussi pour la qualité de vie aussi. Je pense qu’avoir un trouble d’érection dont on
ne parle pas, ça traduit un mal-être dans le couple et dans la société, la vie de tous les jours. On peut sentir que le patient ne va pas très bien, je pense que c’est cela aussi, c’est d’améliorer sa qualité de vie » (M5).
A l’issu de la formation, les médecins expriment avoir acquis des compétences en matière de
communication leur permettant de repérer les patients exprimant des plaintes abstraites ou des
demandes implicites en lien avec la pathologie érectile (M3 M5 M6 M8). Ils se disent « sensibilisé à
détecter les demandes implicites » (M3), avoir « les codes pour repérer la demande du patient et donc
poser la question au bon moment » (M5)et arriver« à repérer mieux les patients qui tournent autour
du pot » (M8).
Quant à l’abord de la question, on observe un bénéfice chez les quatre médecins éprouvant initialement des difficultés à faire émerger la plainte.
La progression se trouve dans la formulation de la question (M1 M4 M5 M6). La formation a en effet
permis aux participants d’acquérir ou de développer des notions pour aborder le sujet d’une meilleure manière, en commençant par l’utilisation de termes simples et facilement
compréhensibles (M1 M2 M3 M4 M6 M9) comme « Avec-vous des troubles de l’érection ? » plutôt que
d’avoir recours à des formulations abstraites et longues (M6). Cette question directe permet de juger
de la volonté du patient à en parler et ainsi de lui proposer (M3, M4, M9) ou de fixer (M2) un rendez-vous
dédié pour explorer en détail ce symptôme, sans perdre de temps dans la consultation en cours (M9)
et pour en parler « tranquillement » (M3) dans de bonnes conditions. Dans le cas contraire d’un
patient ne souhaitant donner suite à la question du médecin, cela aura permis de lui faire savoir que le médecin est prêt à en reparler (M2) ou bien de ré-aborder la question plus à distance (M5, M1).
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Sur le plan de la prise en charge pure de la pathologie érectile, quatre des cinq médecins (M1 M3 M4 M6)
déclarant souffrir initialement d’un manque de connaissances à ce niveau, disent se sentir plus
aptes à pouvoir proposer une prise en charge suite à la formation. D’autres (M1 M5 M9), ne
rapportant pas de difficultés particulières pour la prise en charge de la DE, relatent une progression de leurs capacités de prise en charge.
Le bénéfice est constaté sur le versant des examens complémentaires à réaliser, de l’orientation précise à proposer et des conseils à prodiguer.
En effet, ils reconnaissent avoir progressé sur le détail du bilan cardiovasculaire et hormonal à prescrire (M2 M3 M4 M6 M9), et sur l’utilité de l’échographie doppler pénien (M4 M7 M9).
Sur le plan de l’orientation du patient, ils estiment avoir acquis des notions permettant de
différencier les troubles de l’érection dont la prise en charge est du ressort du médecin généraliste
(M2 M4 M6 M9), des troubles érectiles nécessitant le recours à un confrère spécialiste.
Enfin, ils déclarent délivrer une information au patient sur sa pathologie et plus exactement sur la physiopathologie du trouble dans le but de le rassurer et de le déculpabiliser (M1 M2 M3 M5 M9). A ce
sujet l’un leur explique « que c’est fréquent, et que ça touche beaucoup de monde, ça permet de les
rassurer. Et comme il y a aussi une part psychologique, ça rompt ce cercle vicieux et ils se stressent moins quand je leur donne une molécule ça évite de concentrer toute leur attention sur le
médicament » (M9),un autreleur dit que « la maladie touche ses artères et que comme il y a des
artères à cet endroit-là, il peut avoir des problèmes d’érection » (M5) et un dernier leur expose
« qu’ils ne sont pas moins forts que leurs copains, et que les traitements, leur âge et leur pathologie chronique vont faire qu’ils sont plus enclins à des défaillances à ce niveau » (M3).
Le médecin qui n’a pu en tirer bénéfice est celui qui confie ne pas avoir reçu par mail le document de synthèse des recommandations officielles indispensable selon-lui à son apprentissage à cause de sa mémoire visuelle (M7).
C’est aussi ce dernier qui mentionnait le manque de reconnaissance financière comme obstacle au dépistage. La formation n’aura pas modifié de point précis : « en 15 minutes à 23 euros, je ne
peux pas examiner le patient de la pointe des cheveux jusqu’aux orteils » (M7).
L’unique médecin qui craignait de modifier la relation qu’il entretien avec son patient, a précisé ne
pas avoir perçu de bénéfice à ce niveau : « ça n’a rien changé » (M8).
Le sexe féminin comme obstacle au dépistage de la DE n’est pas effacé par la formation. Le médecin en question affirme toujours que : « le fait d’être une femme pour aborder ce sujet [la]
freine un peu », mais il est atténué, tout comme l’obstacle représenté par le caractère du patient : « mais je prends sur moi, mais c’est tout de même plus simple qu’auparavant » (M2).
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b. Conséquence sur le dépistage
La formation a eu un impact positif sur le dépistage de la DE pour 7 des 9 participants. Tout d’abord, son influence se retrouve sur la fréquence de dépistage qui se voit accrue, puisqu’un médecin affirme le faire « nettement plus » (M1), certains abordent la question « plus
fréquemment » (M2),« davantage » (M6),et de manière« plus systématique » (M2).Un autre« en parle
plus »et« y veille » (M9),et d’autres« s’efforce de le faire »(M4) ou « y pense plus » (M5).
Plusieurs d’entre eux tiennent à préciser que s’ils le font plus, ils ne le font « pas
systématiquement » (M5), et « ne pas en parler à tous les patients non plus », « c'est pas automatique
encore, mais un pas en avant par rapport à ce que je faisais »(M6) ou encore ne pas le faire « à tour
de bras toute la journée » (M9).
Afin de ne pas omettre d’interroger le patient sur ses capacités érectiles, on remarque que les médecins ont des habitudes différentes, comme intégrer la question dans l’interrogatoire ou l’examen du patient (M1, M5, M6), de la poser au moment du renouvellement d’ordonnance de patient
âgées ou avec des facteurs de risques cardio-vasculaires (M2 M3), au moment d’un bilan annuel (M6),
en encore en créant une annotation dans le dossier médical du patient pour y repenser lors de la prochaine consultation si celui-ci ne souhaite pas en parler (M5).
Pour 2 médecins la formation n’a pas permis d’optimiser le dépistage de la DE puisque l’un ne
le fait « toujours pas » (M7). Pour l’autre « ça n’a rien changé pour l’instant »et déclare être
toujours « dans l’attente des demandes » (M8).
c. Répercussions sur le patient
Le bénéfice de la formation sur le dépistage étant constaté sur 7 des 9 médecins, ceux-là sont amenés à la prendre davantage en charge la DE, par rapport à leurs pratiques antérieures. Même si le constat à trois mois de la formation, ne permet pas d’avoir constitué un pool de patients
suffisamment important pour juger avec pertinence de l’utilité de leurs compétences sur le patient, on note tout de même des avis positifs.
On retrouve d’abord un bénéfice sur la qualité de l’érection. En effet, en relatant les propos d’un patient, un participant nous fait part d’une répercussion « sur la qualité des rapports sexuels » (M2),
ce qui estappuyé par le constat d’un autre de l’amélioration« sur le plan sexuel »(M3) et confirmé
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Le couple semble aussi bénéficier des apports de la formation sur le médecin. En effet, souffrir
d’un trouble de l’érection « provoquait quelques accrochages entre eux » (M2)alors que la prise en
charge « améliore la vie de couple globalement » (M9).
Un bénéfice est constaté sur le plan psychologique, puisque « ça les change ils sont mieux et plus
contents, plus de confort »(M6)et que« ça le stressait pas mal » (M2).
Enfin, il paraît intéressant de signaler qu’un médecin a constaté suite à la prise en charge d’un patient, qu’il « prend mieux son traitement chronique » (M3),interrompu initialement par le patient
lorsqu’il souffrait de DE.
Ces propos sont tout de même à nuancer et à entendre avec prudence, car la majorité des
participants relatent peu de retours de patients sur les éventuels bénéfices de leur prise en charge. Ceux-ci n’ont obtenus que « peu » (M6) de retours et même si ça à l’air mieux après la formation ça
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