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Apports des bureaux de contrôle et de l'inspection du travail à la maîtrise

1.3 Principes et ressources associés à la maîtrise de la conformité à la législation SST

1.3.3 Acteurs de la maîtrise des conformités en matière de SST

1.3.3.2 Apports des bureaux de contrôle et de l'inspection du travail à la maîtrise

L’un des développements précédents (1.3.2.) a favorisé la mise en exergue de l’existence de services dédiés à la maîtrise de la conformité légale dans le domaine de la SST. Parmi eux, le rôle des bureaux de contrôle et de conseil n’est pas à négliger. En effet, l’objectif de ces sociétés est de fournir aux entreprises clientes des experts amenés à se déplacer directement sur site pour réaliser un certain nombre de vérifications (vérification des moyens d’extinction, de la conformité des équipements de travail,…). On retrouve également au sein de ses prestations la possibilité pour une entreprise de bénéficier d’un "audit" réalisé par un vérificateur extérieur accrédité par le Comité Français d’Accréditation (COFRAC).

L’audit consiste en une "opération de vérification et d'appréciation, sous tous ses aspects,

d'une structure, d'une organisation, d'un système" (Dictionnaire de l'environnement). Plus

globalement, il a pour objectif de "mettre en évidence les écarts par rapport à un référentiel

ou des exigences réglementaires" mais aussi "les points forts et faibles de la démarche de prévention des risques professionnels de l'entreprise" auditée (Esen Education93). Les experts des bureaux de contrôle apparaissent comme de véritables spécialistes des techniques

d’investigation employées lors d’un audit94

(visite de terrain, interviews et revue documentaire95). Or, l’un des développements précédents (1.3.1.2.), relatif à l’étape d’évaluation de la conformité, a montré que celle-ci fait directement appel aux techniques d’investigation décrites à l’instant.

A ce titre, les auditeurs travaillant pour des bureaux de contrôle constituent des acteurs privilégiés lorsqu’il s’agit d’accompagner les entreprises dans cette phase d’évaluation de la conformité. L’un des avantages attendus par les employeurs repose également sur une forme "d’externalisation" du suivi de la conformité. L’employeur estime alors en effet qu’il n’a pas à mobiliser de ressources internes pour ce travail car il est réalisé par une entreprise extérieure. Cette approche trouve cependant très rapidement ses limites en cas de mise en cause de responsabilité juridique, celle du bureau de contrôle restant cantonnée au domaine contractuel (droit civil). L’employeur reste dans les faits seul "maître à bord" de la maîtrise de la conformité à la législation SST applicable, notamment en ce qui concerne sa responsabilité pénale. Il est également notable qu’une telle manière de procéder ne favorise en rien une appropriation de la législation applicable par les acteurs et services internes à l’entreprise elle- même (participation uniquement passive au processus d’audit). On peut rappeler en outre que les journées d’accompagnement et d’audit ont un coût non négligeable et parfois délicat à supporter pour les entreprises.

Enfin, on mentionnera le fait que différents auteurs soulignent les biais et limites intrinsèques à tout processus d’audit. On peut notamment citer :

- L’absence de corrélation entre le déploiement d’audits et la performance d’un système de management de la SST (SMS)96 ;

- La subjectivité des auditeurs dans la comptabilisation des évènements observés et pris en compte97 ;

- Le développement de "Paper systems98" laissant la priorité à l’étude des documents (consignes de sécurité, politiques écrites) plutôt qu’à celle des situations de travail réelles (différences entre le travail "prescrit" et réel).

95 Health and Safety auditing. Innes, J. 2009. Safety line Institute, Worksafe. op cit 96

The Safety Scorecard: Using Multiple Measures to Judge Safety System Effectiveness. Petersen, D. 2001. EHS Today.

97Développement d’instruments de mesure de performance en santé et sécurité du travail à l’intention des

entreprises manufacturières organisées en équipes semi-autonomes de travail. Roy, M. Bergeron, S. Fortier, L. 2004. Institut de recherche Robert-Sauvé en santé et en sécurité du travail (IRSST).

Dans une mesure différente, d’autres acteurs, fonctionnaires de l’Etat, travaillent activement à la maîtrise de la conformité par les entreprises. Ces personnes sont les inspecteurs et contrôleurs du travail. Ils dépendent de plusieurs ministères dont celui du travail et ont pour mission essentielle de "veiller à l’application des dispositions du code du travail et des autres

dispositions légales relatives au régime du travail" (article L.8112-1 du code du travail). Afin

d’assurer cette tâche, ils sont en mesure de constater les infractions relatives à ces dispositions mais également aux discriminations, ou encore à l’interdiction de fumer dans les lieux affectés à un usage collectif (article L.8112-2 du code du travail). Les inspecteurs peuvent intervenir à tout moment (de jour99) pour pénétrer dans une entreprise. Leurs visites peuvent donc être inopinées car ils bénéficient d’un "droit d’entrée" fixé par l’article L.8113-1 du code du travail. Ce point constitue une distinction importante entre le processus d’inspection et celui d’audit car ce dernier n’est en aucun cas inopiné, l’entreprise étant prévenue plusieurs semaines à l’avance du passage d’un auditeur. Ce point pourrait par exemple faciliter la dissimulation des preuves d’une non-conformité en cas d’audit.

On peut également noter que les délégués du personnel sont en mesure, au titre de l’article L.2313-1 du code du travail, de "saisir l’inspection du travail" concernant les plaintes et observations relatives à sa mission. Les infractions constatées lors des visites peuvent donner lieu à l’établissement de mises en demeure de se mettre en conformité ou encore de procès verbaux qui sont ensuite transmis au procureur de la république ("Parquet"100). Ce pouvoir de sanction permet de rendre plus effective la mission de l’inspection du travail car il lui permet d’exercer un pouvoir coercitif réel à l’encontre d’un employeur. Cependant, afin d’être le plus complet possible, il convient de noter qu’il n’existe pas, en France, au moment de la rédaction de ce manuscrit, d’étude sérieuse relative à l’effectivité des sanctions prononcées par l’inspection du travail sur les comportements des entreprises en matière de SST.

Cette sous-section a mis en avant le fait que les employeurs peuvent solliciter l’accompagnement d’acteurs externes à l’entreprise, les vérificateurs des bureaux de contrôle

98 Occupational Health and Safety Management Systems: A Review of their Effectiveness in Securing Healthy

and Safe Workplaces. Gallagher, C. Underhill, E. Rimmer, M. 2001. National Occupational Health and Safety

Commission (NOHSC).

99 Cette précision est apportée par l’article 12 de la Convention 81 de l’Organisation Internationale du Travail (OIT).

100

Article : Laurent Pina : inspecteur du travail. Interview. Mai-juin 2010, n°4. Revue Risque Sécurité Environnement (RSE). p 12.

et de conseil. Ces derniers, spécialistes de l’utilisation des outils d’audit, représentent donc des ressources en mesure de contribuer à la maîtrise de la conformité, même si l’évocation de certaines limites intrinsèques au processus d’audit est venue nuancer ce propos. Enfin, l’inspection du travail, en raison de son statut, de ses missions, mais également des pouvoirs à sa disposition, assure une participation active dans la gestion de la conformité légale des entreprises en matière de SST.

Conclusion du chapitre

Ce premier chapitre a permis de mettre en avant le cadre législatif et réglementaire applicable aux entreprises dans le domaine de la SST. On a notamment souligné à ce titre un certain nombre de difficultés rencontrées par les employeurs dans l’appréhension de ce dernier. On s’est ensuite intéressé aux réels enjeux liés à la maîtrise des conformités en évoquant par exemple la notion de responsabilité juridique de l’employeur (civile et pénale). On a également dévoilé des opportunités d’amélioration concomitantes à la gestion de la conformité légale, notamment en ce qui concerne la maîtrise des risques professionnels et les processus de gestion mis en œuvre dans le cadre d’un SMS.

La dernière partie du chapitre a finalement traité des mécanismes déployés afin d’assurer l’objectif de maîtrise de la conformité ainsi que des ressources humaines et tertiaires (services) associées à ces mécanismes.

Le chapitre suivant propose de mettre en exergue un état détaillé des pratiques d’entreprises en matière de maîtrise des conformités légales dans le domaine de la SST. Il s’appuie sur les résultats d’une enquête quantitative101

menée entre 2010 et 2011 par l’AFNOR, la société PREVENTEO et le Centre de recherche sur les Risques et les Crises (CRC) de Mines- Paristech.

101 L’enquête utilisée s’intitule "Conformité réglementaire et certification". Cette seconde enquête a été menée après la réalisation d’une première enquête "Preventeurs" dont les résultats ont été publiés en novembre 2010 (références : Préventeurs et politique de prévention en santé sécurité au travail, AFNOR Groupe. Miotti, H. Guarnieri, F. Martin, C. Besnard, D. Rallo, JM. Novembre 2010. op cit.)

2

Chapitre 2

Etat des pratiques en matière de maîtrise de la

conformité légale en SST au travers d'une enquête

quantitative

Le présent chapitre a pour objet de proposer une mise en lumière des pratiques d'entreprises en matière de maîtrise de la conformité légale dans le domaine de la santé et de la sécurité au travail (SST). Cette présentation doit permettre de confronter le contexte introduit dans le chapitre précédent aux dispositifs réellement mis en œuvre par les entreprises françaises. Les résultats mis en avant sont issus d'une enquête quantitative menée en collaboration avec la société PREVENTEO, l'AFNOR et le Centre de recherche sur les Risques et les Crises (CRC) de Mines Paristech entre 2010 et 2011.

Le travail d'enquête mené dans ce chapitre s'appuie sur des démarches de fond déployées depuis plusieurs années par le CRC sur la réalité du travail de préventeur SST dans le monde de l'entreprise. La première section de ce chapitre (2.1) vise à présenter en détail le contexte dans lequel l'étude quantitative a été menée. Il est également utile de noter que cette section propose de faire la lumière sur les objectifs de l'étude en s'interrogeant sur un certain nombre de problématiques liées aux notions de suivi et de maîtrise de la conformité légale dans le domaine de la SST.

La deuxième section du chapitre est pour sa part consacrée à la présentation de la méthodologie déployée dans le cadre de ce travail d'enquête (2.2). Les premiers développements s'attardent à mettre en exergue les problématiques à traiter alors que le suivant propose de décrire les différentes étapes suivies lors de la phase de rédaction. La dernière partie de cette section s'intéresse au contenu final du questionnaire d'enquête ainsi qu'à la description du mode d'administration de ce dernier.

La dernière section s'attache enfin à la mise en lumière des apports de l'étude quantitative dans le cadre de ce travail de recherche (2.3). Ces derniers permettront d'identifier d'éventuels

besoins émergents dans les entreprises en matière de maîtrise de la conformité légale dans le domaine de la SST102. Le commentaire des résultats obtenus aura pour intérêt essentiel de comprendre les objectifs visés par les employeurs et ainsi favoriser la proposition d'un modèle de système de maîtrise des conformités (SMC) adapté aux besoins exprimés.

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