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CHAPITRE 4 COMPORTEMENT VISCOELASTIQUE EN RELATION AVEC

4.3.6 Apport de l’imagerie

Les singularités majeures identifiées dans l’échantillon avaient peu d’impact sur les valeurs des essais quasi-statiques de l’étude (Figure 24 et Figure 25) ; parmi les influences, on peut noter que le pont osseux antérieur a limité le déplacement

instantané du disque DA sous 400 N, et la calcification intra-discale de DC a diminué

sa capacité de fluage. Dans le groupe des L1-L2, exception faite de DA, la quantité

dcomp1/H a augmenté avec la présence de fissures révélées par la discographie, valant

classés C4 et C5. Les raideurs, modules nominaux et éléments élastiques E2 ont suivi la tendance inversée dans le même groupe. L’homogénéité de la dégénérescence chez les DIVs L4-L5 n’a pas permis d’aboutir aux mêmes conclusions.

0 5 10 15 20 25 30 35

E1f (MPa) ηf(GPa.s) RE (%) E1f (MPa) ηf(GPa.s)

Gi1 et Gi2 ; n = 12 Gi3 et Gi4 ; n = 10 Gi1 et Gi2 ; n = 12 Gi3 et Gi4 ; n = 10 Surf/Haut ∈ [146 mm ; 196 mm] ; n = 13 Surf/Haut ∈ [197 mm ; 302 mm] ; n = 9 Surf/Haut ∈ [146 mm ; 196 mm] ; n = 13 Surf/Haut ∈ [197 mm ; 302 mm] ; n = 9

Classification par le grade IRM Classification par le rapport Surf/Haut

Figure 26 Influence de la dégénérescence sur certains paramètres viscoélastiques

Moyennes représentées ± 1 écart-type ; n = nombre de DIVs dans le groupe considéré.

Les paramètres rhéologiques E1 et η (fluage et relaxation) ont exhibé une tendance

marquée à diminuer avec la gravité de la dégénérescence issue de l’IRM d’une part, et d’autre part avec l’augmentation du rapport S/H. La dégénérescence IRM a également influencé le ratio d’hystérésis RE (Figure 26). De plus, parmi les six

72 disques gradés Gi1, deux d’entre eux possédaient une hernie intra-spongieuse ; au sein de ce groupe discal peu dégénéré, ces deux spécimens possédaient le ratio d’hystérésis le plus élevé, à 0.20 et 0.24 (moyenne de 0.17 pour les 4 autres).

La performance de la classification de dégénérescence d’origine macroscopique, en terme de formation de groupes présentant des valeurs viscoélastiques clairement distinctes, a été plus faible que la classification établie par l’IRM. La gradation discographique était en revanche très proche de cette dernière.

4.4 Discussion

D’après Mow [65], un gradient de pression apparaît lors du maintien d’une charge sur un DIV. Celui-ci entraîne un mouvement du fluide, dont une grande partie est extrudée. Cependant, une résistance lui est opposée en raison des forces de frottements agissant lors de son passage à travers la matrice solide ; une dissipation visqueuse en résulte. Les réponses sont donc dépendantes du temps, tout en demeurant réversibles [65]. Ainsi, l’amortissement du DIV découle de sa capacité à dissiper l’énergie mécanique sous forme de chaleur, un phénomène qui s’exprime directement dans les courbes d’hystérésis. La déformation élastique instantanée est quant à elle provoquée par un réarrangement immédiat du réseau de fibres de collagènes présentes dans la structure [36]. La mise en évidence de corrélations entre l’hystérésis, la déformation fluée et le pourcentage de charge relaxée, le lien existant entre l’amortissement en fluage et le ratio d’hystérésis, ainsi que l’indépendance de

E2f par rapport à E1f et ηf suivent donc une logique cohérente du point de vue de la

physique.

Bien que la charge appliquée (100 N), le niveau considéré (thoracique) et le temps de fluage (120 minutes) aient différé avec les travaux de Kazarian [47], la perte de hauteur du DIV (entre 0.3 et 0.5 mm) était du même ordre de grandeur que celle rapportée par la présente étude. De même, Markolf et Morris [57] ont mesuré une

charge relaxée d’environ 300 N pour une charge initiale de 1100 N maintenue pendant 10 minutes, soit une proportion proche des résultats présentés ici.

Les deux niveaux L1-L2 et L4-L5 présentaient des caractéristiques viscoélastiques très comparables, bien que le second groupe ait été globalement plus dégénéré que le premier en accord avec les mesures de Miller et al. [59]. Koeller et al. [50] n’avaient pas non plus rapporté de différences significatives entre les niveaux thoraciques et lombaires pour le ratio (RE) et la déformation du fluage.

Les modules nominaux ont augmenté avec la vitesse de chargement, comme démontré sur des études porcines et bovines [70,79]. En fluage, le taux de chargement était de 800 N/min (i.e. environ 8 kPa/s) ; il valait 50 mm/min (i.e. environ 150 kPa/sec) en relaxation. Sous une charge de 400 N (environ 0.23 MPa), Race et al. [79] ont rapporté des valeurs de 4 MPa et 6 MPa pour les modules nominaux à ces deux vitesses, contre 5 MPa et 7 MPa dans cette étude. L’accroissement s’effectuait donc dans des proportions similaires.

Si les valeurs des paramètres du modèle rhéologique en relaxation ne pouvaient être confrontées à aucune étude de la littérature, celles en fluage se comparaient favorablement avec les résultats de Keller et al. [48], malgré la conservation des arcs postérieurs pour ces derniers et une charge appliquée inférieure (253 N). Il est à noter que l’absence des arcs postérieurs altère peu la réponse des spécimens en

compression [38,46,88]. Les valeurs E2f et E2r de notre étude étaient très proches, bien

que E2r ait été légèrement sous-estimé par le modèle rhéologique inapte à traduire le

comportement discal dans les premières secondes de relaxation. Ce module d’Young semble donc convenablement définir le matériau et ses propriétés lors d’une déformation instantanée. En revanche, de grandes disparités existaient d’une part

entre E1f et E1r et d’autre part entre ηf et ηr. Si le fluage et la relaxation sont le résultat

74 renferme certainement pas suffisamment de complexité pour caractériser à lui seul le double comportement.

La présence de fissures dans le réseau collagénique agissait de façon prévisible sur la déformation initiale ; Hirsch et Nachemson [38] ont néanmoins démontré que ce phénomène était mieux révélé à 1000 N qu’à 400 N. De plus, à l’instar de Keller et al.

[48] et de Li et al. [54], une diminution manifeste de E1 et de η a pu être constatée

lors de l’augmentation du grade de dégénérescence établi d’après l’IRM. Ainsi, avec la dégénérescence, l’état d’équilibre en fluage et en relaxation était atteint plus rapidement, et la déformation fluée ou la charge relaxée était plus grande (Figure 22). La dégénérescence s’est également traduite par un ratio d’hystérésis plus important. Le signal IRM renseigne sur l’état d’hydratation du disque [64,89] ; ainsi, les disques plus déshydratés (type Gi3 et Gi4) avaient des capacités d’amortissement inférieures à ceux qui exhibaient une présence de fluide plus importante (type Gi1 et Gi2).

Les singularités majeures, d’ordre macroscopique, n’avaient pas d’incidence sur le comportement quasi-statique du disque ; le fait qu’elles soient sans conséquence apparente sur les phénomènes de dissipation interne tendrait à prouver que ceux-ci ne sont pas régis par un environnement structurel extra-discal ; cette observation est corroborée par une aptitude modérée de la classification d’origine macroscopique à rendre compte d’une augmentation ou diminution des paramètres, bien que celle-ci ait été utilisée par Keller et al. et Li et al. Koeller et al. n’avaient d’ailleurs trouvé aucune influence de la dégénérescence d’origine macroscopique sur les résultats des expériences de fluage.

4.5 Résumé et conclusion

Des essais de compression, fluage et relaxation ont été réalisés sur 22 disques lombaires issus de niveaux L1-L2 et L4-L5, qui ont eu un comportement très proche. Des corrélations ont été mises en évidence entre les trois sollicitations, confirmant la

similarité des principes physiques inhérents au comportement viscoélastique. Les résultats quasi-statiques ont été approximés par un modèle rhéologique à trois

paramètres (E1,η, E2). Le modèle rhéologique était plus performant en fluage qu’en

relaxation, cet essai nécessitant vraisemblablement l’exploitation d’un modèle plus complexe. La dégénérescence, établie de façon plus performante par l’IRM, s’est traduite par un état d’équilibre atteint plus rapidement, et par des contraintes relaxées et déformations fluées plus grandes. Les singularités extra-discales, telle la scoliose, n’avaient pas de conséquences apparentes sur les caractéristiques viscoélastiques des DIVs. L’exploitation simultanée des deux courbes de fluage et de relaxation serait judicieuse pour définir des paramètres communs aux deux phénomènes.

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