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Pour la première fois sur Mars, l’instrument ChemCam rend accessible la composition chimique en éléments majeurs et traces à l’échelle minéralogique de tout type de matériaux situés jusqu’à 7m du rover (Maurice et al., 2012; Wiens et al., 2012). Ceci est rendu possible par une méthode nouvelle dans le domaine du spatial qui va être introduite dans ce Chapitre, la spectroscopie sur plasma induit par laser (en anglais ‘Laser Induced Breakdown Spectroscopy’, LIBS). Aujourd’hui, ce premier laser envoyé dans l’espace a effectué plus de 500 000 tirs LIBS. Cependant, avant d’obtenir les concentrations en éléments majeurs et traces, toute une procédure de quantification est appliquée aux données LIBS. Ce long cheminement, parfois ardu, sera décrit dans une première partie de ce Chapitre.

En plus de la LIBS, Curiosity dispose également d’un autre instrument qui mesure la composition chimique de matériaux : par fluorescence X (en anglais ‘X-Ray Fluorescence’, XRF) et par émission de rayons X induite par particule (en anglais ‘Particule-induced X-ray Emission’, PIXE) (Campbell, 2012), APXS analyse les concentrations en éléments majeurs et traces de roches sur un diamètre de 1.7 cm. Les variations en éléments traces obtenues de par les mesures LIBS et APXS ont donné des indications directes quant aux processus pétrogénétiques subis par les matériaux recouvrant le cratère : des phénomènes magmatiques et sédimentaires ont ainsi été largement révélés depuis le début de la mission. Une seconde partie de ce Chapitre va décrire les principaux résultats.

Laser Induced Breakdown Spectroscopy : fonctionnement et description de

2-1

ChemCam

La LIBS est une méthode de spectroscopie à émission atomique proposée dans les années 60, qui ne s’est développée que plus tard, au cours des années 80. Ce n’est que durant ces 30 dernières années que chercheurs, ingénieurs et industriels ont vu son intérêt pour des applications diverses et variées. Sa capacité à analyser la chimie d’un échantillon solide, liquide, gazeux ou particulaire dans une atmosphère ambiante, sous vide, au fond des océans ou même dans l’espace fait d’elle une technologie unique en son genre. Du domaine médical à l’art en passant par la sécurité, la protection environnementale, l’archéologie et la géologie, la LIBS est sur tous les fronts (Hahn and Omenetto, 2012).

Ses avantages ? La LIBS est capable de détecter tous les éléments chimiques du tableau de Mendeleiev simultanément, dans la limite de sa résolution. Elle est simple d’utilisation, l’analyse est rapide et peut se faire à distance. Aucune préparation d’échantillon n’est nécessaire, permettant des analyses in-situ de divers matériaux tels que des roches à l’aplomb des dorsales océaniques ou à la surface de Mars (Michel et al., 2006; Wiens et al., 2012).

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Ses limites ? Comme tout instrument, la LIBS a des points faibles. L’absence de préparation d’échantillon limite les mesures sur les matériaux hétérogènes et non-uniformes car la composition chimique analysée n’est pas forcément représentative de la totalité de l’échantillon. Ainsi, la présence d’une couche à la surface de la cible étudiée, à composition chimique différente de la composition globale, empêche une analyse représentative de l’ensemble du matériel. Ces problèmes peuvent être en partie résolus par l’analyse en plusieurs points de l’échantillon, avec plusieurs tirs laser par point. Des effets de matrice peuvent également altérer certains signaux élémentaires du fait de propriétés physiques et chimiques particulières de l’échantillon. Par exemple, la présence d’éléments facilement ionisables au sein de l’échantillon telles que le calcium, peut diminuer l’émission caractéristique d’autres éléments présents tels que le barium (Miziolek et al., 2006b). L’analyse LIBS de matrices différentes peut aussi avoir un effet sur l’émission spectrale : par exemple, la limite de détection d’un élément (en anglais ‘Limit of Detection’, LOD) varie selon la taille des grains comme c’est le cas pour le plomb dont la LOD augmente entre une matrice type sable et une matrice type sol (Eppler et al., 1996). Ces effets peuvent être minimisés par des corrections lors de quantifications élémentaires à partir de signal LIBS (Miziolek et al., 2006a).

2-1.1 Principes généraux de la spectroscopie LIBS

Un laser impulsionel à haute puissance est focalisé sur une cible. Lorsque l’énergie reçue par l’échantillon est suffisante, les structures atomiques et moléculaires se brisent entraînant l’ablation d’une petite fraction d’échantillon (100 ng à quelques µg) (Pasquini et al., 2007). Le plasma ainsi créé contient des espèces chimiques vaporisées qui peuvent être excitées et qui retournent ensuite à leur état d’énergie initial par émission d’un photon lumineux à des longueurs d’onde caractéristiques de l’élément (e.g., longueur d’onde bleue pour l’aluminium et verte pour le cuivre dans la Figure 2-1). La lumière émise est injectée dans une fibre optique et est transportée jusqu’à un ou plusieurs spectromètres : des spectres d’émission optiques sont ainsi enregistrés. Chaque atome, ion et parfois molécule sont donc identifiés selon une signature spectrale spécifique (Miziolek et al., 2006c).

Figure 2-1 Image de plasma LIBS effectué sur différents matériaux. De gauche à droite: plasma LIBS d'aluminium, de cuivre et de trois basaltes à composition différente (Sirven et al., 2007).

La création du plasma LIBS est liée à deux phases d’excitation. Quelques électrons libres commencent à être déviés par collision avec des ions et atomes, produisant ainsi un rayonnement électromagnétique de freinage appelé Bremsstrahlung. Cela augmente l’énergie des électrons, et un effet boule de neige démarre : les collisions provoquent la recombinaison

des électrons avec les ions, et produisent d’autres électrons et plus d’énergie. Ces processus sont à l’origine de la « lumière blanche » ou continuum, dominant le plasma durant les premières nanosecondes (Figure 2-2). Le continuum constitue le fond spectral : à ce stade les spectres d’émission ne sont que « bruit de fond ».

Figure 2-2 Graphe des périodes importantes du plasma en fonction du temps (Cremers & Radziemski, 2013). Il est important de noter que ces temps sont dépendants de l’énergie du laser.

Ensuite, le plasma s’étend dans toutes les directions à partir du volume central. Sa vitesse d’expansion est telle - 105 m/s - que l’onde de choc émet un son audible. Il interagit avec le matériel autour du volume initial.

Finalement, la densité électronique du plasma diminue du fait de son expansion, ralentissant les interactions entre éléments. Le plasma se refroidit : les ions et électrons se recombinent en atomes, qui eux mêmes peuvent se recombiner en molécules (Figure 2-2). Les espèces excitées reviennent à leur état d’énergie initial en émettant un photon. L’émission du continuum diminue donc et les signaux d’émission caractéristiques de la composition élémentaire de la cible dominent après au moins 1 µs. Le signal s’améliore de plus en plus avec le temps, jusqu’à ce que le plasma se dissipe à environ 10 µs. La Figure 2-2 donne une idée du temps à partir duquel les atomes et molécules émettent un signal spectral.

La qualité du signal spectral d’émission dépend des conditions environnantes et en particulier de la pression ambiante (Knight et al., 2000). Lorsque la pression diminue de 1000 à 5 Torrs, le plasma s’étend sur un plus grand volume et la masse ablatée par le laser augmente d’un facteur > 20 : plus la pression diminue, plus le signal spectral est amélioré et plus l’intensité des signaux élémentaires augmente. En effet, plus la pression est grande, plus la densité électronique du plasma augmente et plus le plasma est confiné près de la surface de l’échantillon (Figure 2-3 a-b) : le nombre de collisions et d’éléments excités sont ainsi augmentés. Des photons sont alors absorbés lors de la collision d’un électron avec un ion : le rayonnement laser est donc absorbé par le plasma par effet bouclier selon le mécanisme Bremstrahlung inverse, et la température du plasma diminue rapidement. La masse ablatée, et donc le signal d’émission, sont ainsi plus faibles. Ainsi, à faible pression, le signal LIBS est amélioré et la baisse du nombre de collisions entre éléments chimiques diminue les effets de

1 ns 10 ns 100 ns 1 μs 10 μs 100 μs

Optical signal intensity

Time elapsed after firing Ions Neutrals Molecules Strong continuum emission Laser pulse Continuum

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matrices (Sallé et al., 2005). Cependant, de trop faibles pressions (< 5 Torrs) empêchent un confinement et une densité électronique du plasma suffisants pour exciter les espèces présentes dans le matériel étudié. L’expansion du plasma est diffuse et le rayonnement d’émission est hors du champ de vue des spectromètres comme le montre la photographie en pression lunaire (10-4 Torrs) sur la Figure 2-3. Le signal spectral est donc de plus en plus dégradé (Cremers & Radziemski, 2013; Knight et al., 2000).

Figure 2-3 Photographies des plasmas créés par un même laser LIBS sur un échantillon basaltique en pression ambiante (a) terrestre, (b) martienne et (c) lunaire (modifié de Lasue et al. (2012)).

La pression atmosphérique martienne est en moyenne de 6 à 7 Torrs, soit proche d’une pression suffisamment faible et suffisamment élevée pour favoriser l’expansion et la durée de vie du plasma et ainsi obtenir un signal spectral « quasi-idéal » (Brennetot et al., 2003; Knight et al., 2000; Sallé et al., 2005). Par ailleurs, ces études démontrent les limites de la LIBS pour l’exploration lunaire (P ~ 4.10-4 Torrs) ou de Vénus (P ~ 7.104 Torrs), malgré la possibilité d’obtenir des spectres d’émission LIBS scientifiquement utiles (Arp et al., 2004; Lasue et al., 2012a).

La nature du gaz ambiant peut également influencer la qualité du signal spectral en modifiant la température et la densité électronique du plasma, ainsi que l’intensité d’émission LIBS. À une même pression, l’air terrestre, l’argon, l’hélium et le dioxyde de carbone ont des conductivités thermiques et potentiel d’ionisation distincts, ce qui influence l’importance de l’effet bouclier du plasma. Par exemple, à pression fixe, l’argon ambiant accentue l’absorption du laser par le plasma par rapport à l’hélium, réduisant ainsi la masse ablatée et donc le signal d’émission LIBS (Aguilera & Aragón, 1999; Effenberger & Scott, 2010; Iida, 1990; Lee et al., 1997; Mao et al., 1993). Le dioxyde de carbone ambiant quant à lui, empêche l’observation claire du signal de carbone dans les spectres d’émission LIBS, du fait que le CO2 atmosphérique soit dissocié dans le plasma (AOllila et al., 2011; Wiens et al., 2013). En comparaison avec des conditions atmosphériques terrestre, le CO2 ambiant ne met pas tout le monde d’accord : Brennetot et al. (2003) observent une intensité spectrale améliorée dans le cas de CO2 ambiant à 7 Torrs, alors que Colao et al. (2004) observe l’inverse. Cela souligne la difficulté à comparer deux expérimentations similaires avec des instruments LIBS différents. Sallé et al. (2005) ont cependant montré que les analyses LIBS acquises dans une atmosphère de CO2 à 7 Torrs permettent l’obtention de meilleures courbes de calibration des éléments majeurs, rendant les quantifications élémentaires LIBS plus précises.

Ainsi, la nature et la pression de l’atmosphère martienne (atmosphère de CO2 à ~6 Torrs) favorisent une qualité de signal LIBS suffisante pour la quantification en éléments majeurs et traces avec des effets de matrice limités (Knight et al., 2000; Sallé et al., 2005; Sirven et al., 2007).

2-1.2 La LIBS de ChemCam

Après les premiers travaux menés conjointement par l’Institut de Recherche Astrophysique et Planétologie de Toulouse (IRAP) et le commissariat à l'énergie atomique et aux énergies alternatives (CEA) dès 2005 (Sallé et al., 2005), l’instrument ChemCam a finalement été développé par le Laboratoire National de Los Alamos au Nouveau-Mexique aux Etats-Unis (LANL) et par l’IRAP à Toulouse en France. Afin d’étudier expérimentalement sur Terre les observations martiennes, chacun de ces deux laboratoires (aux Etats-Unis et en France) possède une réplique quasi-exacte de ChemCam. Cette section décrit la LIBS de ChemCam et ses deux répliques instrumentales.

ChemCam

ChemCam est composé de deux instruments spécifiques, la LIBS et un imageur à haute résolution appelé ‘Remote Micro Imager’ (RMI) (Figure 2-4A). La LIBS permet de quantifier les éléments chimiques présents dans des échantillons à l’échelle minéralogique, à une distance comprise entre 1.5 et 7 mètres du robot. La RMI contextualise ces analyses et fournit la localisation précise des points LIBS grâce à un champ de vue à 20 mrad : des objets de 1 mm sont observables à une distance de 10 m (Le Mouélic et al., 2015; Maurice et al., 2012, 2016; Wiens et al., 2012).

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Figure 2-4 (A) Localisation des unités ChemCam sur le robot Curiosity, et schéma de ces deux unités. (B) Zoom sur les cibles de calibration de ChemCam (CCCT).

La LIBS de ChemCam est formée de deux unités présentées dans la Figure 2-4 A : l’une de 5.8 kg appelée ‘Mast Unit’ (MU) constituant l’œil de Curiosity située en haut du mât, et l’autre de 4.8 kg nommée ‘Body Unit’ (BU) située dans le corps du rover. Une fibre optique permet de relier les deux unités. La Mast Unit renferme le laser, le télescope qui focalise le faisceau laser et collecte la lumière du plasma, un mécanisme de focalisation appelé « Focus » dans la Figure 2-4 A, la RMI et les optiques associées (Figure 2-4 A). Le Body Unit détaillé dans la Figure 2-4 A, contient trois spectromètres correspondant aux gammes de longueurs d’ondes ultra-violettes (UV : 242-335 nm), visibles (VIS : 385-465 nm) et proches infra-rouges (VNIR : 510-800 nm), un démultiplexeur qui distribue selon les longueurs d’onde la lumière du plasma dans ces trois spectromètres, un dispositif à couplage de charge et son électronique associée (CCD, en anglais Charge Coupled Device), un refroidisseur thermo-électrique (TEC, en anglais Thermo-Electric Cooler), un dispositif de traitement de données

(DPU, en anglais Data Processing Unit), et un convertisseur de puissance générant des basses tensions (Maurice et al., 2012, 2016; Wiens et al., 2012).

Le laser LIBS est un Nd:KGW à 1067 nm produisant des impulsions de 5 ns à 3 Hz et 35 mJ d’énergie au maximum. Il génère un faisceau lumineux qui est focalisé par le télescope sur des cibles localisées entre 1.5 et 7 m du rover sur un diamètre variant de 350 µm à 550 µm permettant l’analyse de grains micrométriques (Maurice et al., 2012, 2016; Wiens et al., 2012). Le plasma est créé lorsque la densité surfacique du laser atteint 10 MW/mm2 (Maurice et al., 2012, 2016). L’émission du plasma est alors récoltée par le même télescope et transférée à la BU par la fibre optique siliconée de 5.75 m de longueur. Le démultiplexeur reçoit la lumière répartie dans les trois spectromètres à ~ 0.049 nm/pixel de résolution dans l’UV, ~ 0.042 nm/pixel dans le VIS et ~0.21 nm/pixel dans le VNIR (Maurice et al., 2012, 2016; Wiens et al., 2012).

Des cibles de calibration à compositions chimiques connues présentées dans la Table 2-1 et en annexe dans la Table A3 (en anglais ‘ChemCam Calibration Target’, CCCT), ont été embarquées à bord du rover, et sont situées sur la BU de Curiosity à 1.56 m de la sortie du télescope (Figure 2-4A) (Fabre et al., 2011a; D. Vaniman et al., 2012b). Elles sont au nombre de dix, incluant quatre verres (shergottite, norite, picrite et macusanite), quatre céramiques à base de basaltes, sulfates et phyllosilicates (NAu-2 low S, NAu-2 mid S, NAu-2 high S et KGa-2 mid S), un graphite et une plaque de titane. Des analyses LIBS régulières (tous les ~50 sols martiens) permettent de vérifier la reproductibilité instrumentale, la santé de la LIBS et aident à la calibration des éléments majeurs et traces, et à l’ajustement en longueur d’onde (Figure 2-4B) (Maurice et al., 2016; Wiens et al., 2012).

Table 2-1 Composition chimique des éléments majeurs et traces dans les cibles de calibration ChemCam (CCCT) a,b.

Macusanite Picrite Norite Shergottite NaU-2 LowS NaU-2 MidS NaU-2 HighS KGa

AVG ETr AVG ETr AVG ETr AVG ETr AVG ET AVG ET AVG ET AVG ET

SiO2 (wt. %) 73.29 0.90 43.59 0.90 45.64 1.20 48.41 1.40 42.7 6.5 40.7 8.1 34.9 10.9 32.4 7.4 TiO2 (wt. %) 0.03 9.20 0.44 1.00 0.75 4.00 0.45 1.00 0.78 n.d. 0.57 n.d. 0.38 n.d. 1.47 n.d Al2O3 (wt. %) 16.35 0.80 12.39 1.30 14.66 0.90 10.83 1.20 7.8 4.6 6.1 4.4 4.1 4.2 21.8 7.9 FeO (wt. %) 0.51 9.30 19.94 2.20 15.37 2.40 17.65 0.70 17.1 6.8 16.5 6.5 15.5 6.5 2.1 3.5 MgO (wt. %) 0.02 33.6 10.9 5.2 9.43 1.30 6.62 1.10 3.8 5.5 1.8 2.9 1.1 2.1 1.5 4.6 CaO (wt. %) 0.21 5.20 9.02 2.30 12.57 1.40 14.15 1.20 7.5 3.1 10.5 4.3 14.2 6.4 9.1 3.5 Na2O (wt. %) 4.17 0.10 3.06 3.40 1.51 4.90 1.61 0.60 1.7 0.9 1.2 0.8 0.8 0.8 0.8 0.6 K2O (wt. %) 3.86 1.70 0.09 6.00 0.04 48.2 0.1 6.30 0.40 n.d. 0.29 n.d. 0.16 n.d. 0.27 n.d Li (ppm) 3528 6 7.2 29.2 44 15 7.5 25.4 7433 n.d. 7433 n.d. 7433 n.d. 7433 n.d Rb (ppm) - - - - - - - - 9 n.d. 6 n.d. 4 n.d. 6 n.d Sr (ppm) 1.3 19.9 1481 3.4 284 7.3 654 6.2 236 n.d. 185 n.d. 144 n.d. 152 n.d Ba (ppm) 1.3 27.7 1283 3.6 355 8 1158 6.2 162 n.d. 107 n.d. 56 n.d. 140 n.d Cu (ppm) 2.4 15.6 - - 6 3 43 3.5 30 n.d. 20 n.d. 10 n.d. 30 n.d

‘AVG’ représente la moyenne des mesures, ‘ETr’ l’écart-type relatif en % et ‘ET’ l’écart-type en % pour les éléments majeurs et ppm pour les traces. ‘n.d.’ indique les écart-types non déterminés du fait du manque de points d’analyse (D. Vaniman et al., 2012b, 2012a). Les compositions en majeurs ont été fournies par analyse en microsonde électronique, et celles en

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traces par spectroscopie et/ou fluorescence. a,b Les teneurs en majeurs et traces des céramiques sont issues de Vaniman et al. (2012a, 2012b), et celles des verres (picrite, norite et shergottite) et de la macusanite proviennent de Fabre et al. (2011).

Les répliques de ChemCam

La Table 2-2 ci-dessous décrit les répliques LIBS du LANL et de l’IRAP et leurs conditions d’utilisation, en comparaison avec la LIBS de ChemCam. Clegg et al. (2017) et Rapin et al. (2017) fournissent de plus amples informations. Les analyses LIBS en laboratoire sont toujours effectuées en condition martienne, soit 100% de CO2 à 7 Torrs au LANL, et un mélange équivalent à l’atmosphère martienne à l’IRAP. Cela permet d’étudier en laboratoire des observations pseudo-martiennes et de pouvoir calibrer sur Terre les mesures effectuées in situ sur Mars. En plus des répliques de la Mast Unit et de la Body Unit de ChemCam, les CCCT ont également des dupliquas, permettant de réaliser des mesures sur Terre et de comparer régulièrement ces dernières à celles obtenues in situ sur Curiosity (Fabre et al., 2011, 2013; Vaniman et al., 2012b, 2012a).

Table 2-2 Table récapitulative décrivant la réplique ChemCam du LANL et de l'IRAP, et les comparant à l’instrument ChemCam. 1Les MU sont placées à basse température notamment afin de refroidir l’instrument et d’éviter la condensation sur les optiques.

Réplique LANL Réplique IRAP ChemCam

Modèles de l’instrument - MU : Modèle Ingénieur (EM, en anglais Engineering Model) - BU : Modèle de vol de rechange (en anglais flight spares)

- MU : Modèle Ingénieur de Qualification (EQM, en anglais Engineering Qualification Model) - BU : Modèle Ingénieur - MU : Modèle de vol (FM, en anglais Flight Model) - BU : Modèle de vol Température d’utilisation - MU : 4 °C 1 - BU : Température ambiante - MU : -10 °C 1 - BU : Température ambiante - MU : -30 à 30 °C - BU : -55 à 70 °C Utilisation laser - Impulsions de 5 ns - 14 mJ/ pulse - 3 Hz - Impulsions de 6 ns - ~12 mJ/ pulse - 3 Hz - Impulsions de 5 ns - < 35 mJ/ pulse - 3 Hz Distance MU - standards 1.56 - 7 m 1.56 - 7 m 1.56 - 7 m Chambre martienne - 100 % CO2 - PCO2 = 7 (+/- 0.2) Torr - 95.7 % CO2, 2.7% N et 1.6% Ar - PCO2 = 7 (+/- 0.5) Torr - 95.32 % CO2, 2.7% N et 1.6% Ar - PCO2 ~ 7 Torr

Comme décrit dans la Table 2-2, ChemCam et ses répliques sont des instruments très similaires. Malgré quelques différences existantes comme l’énergie de pulsation laser plus variable sur Mars, les spectres d’émission obtenus en laboratoire sont comparables à ceux acquis par ChemCam sur Mars après une série de traitements spectraux décrits dans la section suivante (Clegg et al., 2017a).

Traitement des spectres LIBS obtenus par ChemCam

2-2

Afin d’optimiser le signal spectral et de pouvoir comparer les résultats obtenus par ChemCam et ses répliques, les spectres bruts LIBS de Mars et de laboratoire sont traités selon une même routine : retrait du bruit de fond, du bruit spectral, du continuum, calibration en longueur d’onde, correction de la réponse instrumentale et normalisation des spectres ainsi traités (Wiens et al., 2013). Une correction des effets de distance est également effectuée sur les spectres LIBS ChemCam, et une correction Earth-to-Mars est réalisée sur les spectres LIBS de laboratoire. Cette section décrit brièvement ces traitements spectraux résumés dans la Figure 2-5. Pour plus de détails, Wiens et al. (2013) approfondissent chacune de ces étapes.

Figure 2-5 Schéma de la routine de traitement spectral des spectres ChemCam et des spectres obtenus en laboratoire.

Analyses ChemCam sur Mars Analyses par la réplique en laboratoire

Composition en éléments majeurs / traces

Spectres traités (CCS)

Calibration MOC / univarié Normalisation

Correction de la distance

- Retrait du bruit de fond - Débruitage - Retrait du continuum - Ajustement en longueur d’onde - Correction de la réponse instrumentale

Spectre brut

Echantillon de composition connue

Cible inconnue

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Le bruit de fond est toujours présent dans les spectres LIBS. Afin de le diminuer voire le retirer, les spectres passifs sont utilisés. Ces derniers sont obtenus sans tir laser et enregistrent simplement le bruit du détecteur et l’émission de la lumière réfléchie par la cible. Un spectre d’émission LIBS est toujours associé à un spectre passif. Sur un même point, les spectres passifs obtenus sont moyennés afin de diminuer leur bruit intrinsèque. Un spectre appelé ‘dark’ en résulte. Par exemple, pour une série de 30 tirs LIBS, 30 spectres passifs sont acquis au même endroit que les spectres LIBS et selon les mêmes paramètres spectroscopiques. Ces spectres passifs sont alors moyennés, et le ‘dark’ ainsi obtenu est soustrait au spectre d’émission moyen. Le bruit de fond est alors fortement réduit (Maurice et al., 2016; Wiens et al., 2013).

Le bruit spectral ou bruit blanc est un signal aléatoire indésirable. Une transformée en ondelette permet de le retirer : à chaque ondelette, une estimation du bruit est calculée et un seuil égal à 3 fois l’écart type du bruit est fixé (Wiens et al., 2013). Le spectre, ainsi débruité, est finalement recomposé.

Le continuum lié au rayonnement Bremstrahlung et aux recombinaisons ions-électrons est également retiré par une transformée en ondelette utilisée aux basses fréquences (Wiens et al., 2013).

Des décalages en longueur d’onde peuvent se produire à cause des changements de

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