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6.2 Le modèle hydrosédimentaire alluvial

6.2.6 Application du modèle à la Loire

A l'issue des tests théoriques, le modèle a été appliqué à un tronçon de la Loire situé dans la plaine du Forez. Le linéaire considéré a une longueur d'environ 21 km et est situé entre Montrond-les-Bains et Cleppé. Les simulations ont pour objectif d'estimer le taux d'érosion du lit de la Loire dans le secteur d'étude, lors de la crue de novembre 2008. Nous avons envisagé dans un premier temps d'appliquer le modèle hydrosédimentaire à un tronçon de la Loire en supposant que le fond du lit est entièrement alluvial et ne présente aucun aeurement rocheux. Cette hypothèse n'est bien sur pas réaliste compte-tenu des observations faites dans ce secteur de la Loire forezienne. Elle permet toutefois d'apprécier les comportements du modèle et de détecter ses limites.

6.2.6.1 Calage du modèle

La procédure de calage du modèle consiste à déterminer le coecient de rugosité ks (co- ecient de Manning-Strickler), qui permet de minimiser l'écart entre la courbe de tarage réelle et celle calculée à la station de Feurs aval. Le calage a été fait en régime permanent pour diérentes valeurs du débit (g. 6.17). Le coecient permettant la meilleure adé-

Figure 6.17: Courbe de tarage à Feurs pour diérentes valeurs du coecient de Strickler. quation entre simulation et observation est alors égal à n = 0.025 (ks = 40). Cette valeur a été utilisée par la suite, dans le modèle hydrosédimentaire.

6.2.6.2 Simulation de la crue de 2008 Les hypothèses de simulation sont les suivantes :

- le régime d'écoulement est non stationnaire. L'hydrogramme de la crue est donné sur la g. 6.18 :

- le lit est supposé formé de matériaux uniformes de diamètre moyen dm = 30 mmet de

densité égale à 2.6,

- la porosité du lit est supposée égale à 0.6,

- la section transversale du cours d'eau est supposée rectangulaire, avec une largeur constante uniforme de b = 100 m,

- la pente du chenal est variable,

- la rugosité du fond et des berges sont identiques et uniformes sur l'ensemble du domaine spatial,

- la contrainte critique de mise en mouvement est égale à 0.047, - le maillage est non uniforme dans l'espace,

Figure 6.18: Hydrogramme de la crue de novembre 2008 à Montrond-les-Bains (source DREAL Centre).

- à l'amont du modèle, on impose le débit liquide Q et la hauteur d'eau h, - à l'aval, le débit solide est supposé égal à la capacité de transport, - le pas de temps dt est variable,

- le nombre de Courant est égal à 0.7,

- le débit solide à l'amont du modèle est supposé égal à la capacité de transport.

La ligne d'eau initiale est déterminée de la manière suivante. La hauteur d'eau est dans un premier temps égale à la hauteur normale correspondant à un régime permanent. On lance le modèle en résolvant les équations de Barré de Saint Venant jusqu'à ce que le débit se propage d'amont en aval et on enregistre la ligne d'eau calculée. Cette première simulation est faite avec l'hypothèse que l'érosion du fond est nulle. Cette ligne d'eau re- calculée est par la suite utilisée comme condition initiale du modèle avec transport solide, en régime transitoire.

La période de simulation va du 02/11/2008 à 01 :00 au 04/11/2008 à 01 :00. La crue se prolonge au-delà de cette période mais compte-tenu du temps de calcul trop important, nous n'avons pas simulé la phase de décrue lorsque le débit redescend en-dessous de 500 m3/s.

L'hydrogramme à Feurs issu de la simulation est reporté sur la gure suivante (g. 6.19). L'hydrogramme simulé a un débit maximum légèrement inférieur au débit de pointe ob- servé (2820 m3/s au lieu de 2870 m3/s soit un écart de 50 m3/s). Par ailleurs, sur la

Figure 6.19: Comparaison de l'hydrogramme à Feurs aval issu du modèle avec l'hydro- gramme réel.

propagation, le modèle est en retard d'1 h sur les observations. Une représentation plus ne de la rugosité de surface aurait dû améliorer ce comportement. Compte-tenu de la durée nécessaire trop importante pour cette simulation1, les tests n'ont pas pu être eec-

tués. Ces résultats ont donc ainsi été jugés satisfaisants.

L'application par le modèle des équations d'Exner et de Meyer-Peter Müller ont permis de simuler l'évolution du lit durant la crue.

Deux secteurs se distinguent :

- le secteur de Saint-Laurent-la-Conche

- le secteur à l'aval de la conuence avec le Lignon.

La gure 6.20 montre l'évolution du fond de la Loire entre Montrond-les-Bains et Cleppé, durant la crue de 2008.

1. Environ 12 mn pour simuler 1 h avec un nombre de noeud N = 5989 et un nombre de Courant CF L = 0.7sur un ordinateur intel pentium P4 1.6 Ghz.

Figure 6.20: Evolution de la cote du fond du lit mineur de la Loire durant la crue de novembre 2008.

Le secteur de St-Laurent-la-Conche présente une tendance au dépôt élevée. Cela est dû à la baisse de la capacité de transport (g. 6.21). Les observations sur la carte IGN montrent la présence d'anciennes gravières dans ce secteur. En cas de crue, l'élargissement du lit dans ce secteur ralentit l'écoulement, et favorise les phénomènes de dépôts.

Figure 6.21: Evolution de la capacité de transport (les courbes en ligne continue repré- sentent la période entre le début de la crue et son maximal. Les autres courbes corres- pondent à la décrue).

Figure 6.22: Localisation du dépôt maximum simulé par le modèle.

Si on compare les comportements des diérents tronçons, on constate une dynamique faible à l'amont de Marclopt qui s'intensie au fur et à mesure qu'on avance vers l'aval. Les zones où l'on observe de l'érosion en revanche sont marquées par une hausse impor- tante de la capacité de transport. L'érosion maximale est d'environ 30 cm dans la zone située à l'aval de la conuence avec le Lignon (g. 6.23). Le débit important apporté par cet auent lors la crue de 2008 (près de 220 m3/s à la station de Ponçins) a joué un

rôle majeur sur l'érosion des secteurs immédiatement à l'aval.

Figure 6.23: Ecart entre la cote avant et après la crue de 2008 entre Montrond-les-Bains et Cleppé.

Le modèle reproduit correctement les tendances au dépôt et à l'érosion (g. 6.24). Les secteurs qui présentent des changements de pente sont dans la réalité caractérisés par une érosion régressive vers l'amont et un dépôt progressif vers l'aval. Ce comporte-

ment est retrouvé dans les simulations, avec l'engravement des parties concaves tandis que les zones où le lit est de forme convexe se retrouvent érodées.

(a) (b)

(c) (d)

Figure 6.24: Evolution de la cote du fond entre le 02/11/2008 03 :00 et le 03/11/2008 08 :00 (CF L = 0.7, N = 5989).

Au niveau de la Petite Motte, il se produit initialement un dépôt qui va être emporté au fur et à mesure que l'intensité de la crue augmente.

A l'aval de la conuence avec le Lignon, le changement de pente provoque un phénomène d'érosion-dépôt. On constate ainsi après le passage de la crue une accumulation de maté- riaux dans la zone concave située entre la conuence du Lignon et Cleppé. Dans la réalité, on s'attend à voir ce comportement, car durant la décrue les matériaux en suspension vont se déposer par décantation. Or, notre modèle ne prend pas en compte de la suspension

donc ce résultat ne reète pas la réalité mais constitue la traduction de la baisse de la capacité de transport qui dans la discrétisation de l'équation d'Exner se traduit par une augmentation de la cote du fond du lit.

En regardant les graphiques de débits (g. 6.25) à diérents instants de la crue, on voit que des instabilités numériques se produisent au niveau des changements de pente. Ces perturbations sont localisées et sont proportionnelles à l'intensité de la crue. Par ailleurs, dans la phase de montée de la crue, les débits sont décroissants d'amont en aval en raison de la propagation de l'onde. Une fois la pointe passée, la tendance s'inverse. En eet, alors qu'à l'amont le débit commence à baisser, à l'aval l'onde du pas de temps précédent n'est pas encore arrivée.

(a) (b)

(c) (d)

Figure 6.25: Evolution du débit entre le 02/11/2008 03 :00 et le 03/11/2008 08 :00 (CF L = 0.7, N = 5989).

L'application du critère de Courant-Friedrich-Lévy permet au modèle d'adapter le pas de temps à chaque instant an d'être stable. Les pas de temps utilisés sont très faibles et varient très peu durant la simulation (de l'ordre du 10−3 secondes) (g. 6.26). L'analyse

de l'évolution du pas de temps montre qu'au début de la phase de montée du débit, le modèle présente une meilleure stabilité qui se traduit par un temps de calcul rapide (g. 6.26 (a)). Le modèle réduit ce pas de temps lorsque le débit augmente, car en parallèle une instabilité se crée dans le schéma numérique. On voit que lorsque la pointe est proche, le pas de temps dt baisse brutalement (g. 6.26 (b)). Un comportement inverse est observé durant la décrue où le modèle va avoir tendance à augmenter son pas de temps rapidement (g. 6.26 (c) et (d)).

(a) (b)

(c) (d)

Figure 6.26: Evolution du pas de temps entre le 02/11/2008 03 :00 et le 03/11/2008 08 :00 (CF L = 0.7, N = 5989).