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1.3 Traitement des signaux réverbérés par corrélation de bruits

1.3.2 Application en contrôle de santé intégré

L’utilisation des méthodes de corrélation de bruits ambiants dans le domaine du contrôle santé intégré répond aux problématiques rencontrées dans les techniques traditionnelles (pulse-echo, pitch-catch), notamment pour limiter les besoins en énergie. En termes d’ap- ports, l’imagerie passive ne nécessite pas un ajout d’énergie supplémentaire à celle présente dans le milieu (bruit ambiant). Les avantages sont alors conséquents, notamment pour des applications aéronautiques, où les systèmes embarqués doivent être les plus basse consom- mation et légers possibles. De plus, le contrôle se fait d’une manière non invasive sans endommager le milieu. Ce dernier point est très important dans le domaine du contrôle santé intégré, où l’inspection classique (en actif) de défauts impose à l’expérimentateur la mise hors service de la structure. Par ailleurs, lorsque le contrôle se fait par les sources ambiantes, la structure peut rester dans un mode fonctionnel et la surveillance peut se faire en continu en adaptant une instrumentation en surface ou en volume (réseau de quelques capteurs intégrés à la structure, en écoute passive), c’est le principe du CSI passif.

En contrôle non destructif des matériaux, notamment dans les domaines des transports (ferroviaire, aéronautique, pétrolier) et de l’ingénierie civile, les sources de bruit acoustique sont nombreuses (moteurs, bruits aérodynamiques, contacts roue-rail, etc.). Ceci rend alors compatible la méthode de caractérisation et suivi structurel (détection d’endommagements) avec une solution de type corrélation de bruits. En ingénierie civile, C.R. Farrar et G. H. James [2], montrent expérimentalement sur un pont (pont I-40 au-dessus de Rio Grande aux Etats-Unis) qu’une estimation de la réponse impulsionnelle peut être obtenue par cor-

1.3. TRAITEMENT DES SIGNAUX RÉVERBÉRÉS PAR CORRÉLATION DE BRUITS

rélation des vibrations induites par la circulation du trafic automobile et piétons sur le pont. Ils étudient ainsi les fonctions de Green reconstruites pour identifier les modes étroitement espacés (pics de résonances) du pont et leur amortissement associé. L’analyse de l’amplitude de ces modes constitue un indicateur sur la présence de défauts dans le pont, cependant cela n’identifie pas où se situent les dégradations. Cremona[82], reprend les travaux de Farrar et James sur les ponts et montre la possibilité de localiser des défauts contrôlés (ré- versibles) en comparant l’énergie des modes de vibration dans le cas sans et avec défaut. Peu après, Snieder[83], propose une extension de cette application mais cette fois-ci pour la surveillance des immeubles, en corrélant les vibrations induites par les secousses des séismes. Une application potentielle sur l’extraction passive des ondes de Lamb a été proposée par K. Sabra et al.,[4] et A. Duroux et al.,[84]. L’estimation de la fonction de Green a été obtenue par corrélation des champs de vitesse créé dans une plaque d’aluminium d’épaisseur comparable aux panneaux de voilure aéronautiques, par un ensemble de sources contrôlées émettant entre 4-100 kHz, en adaptant une instrumentation laser. Il a été montré en parti- culier, l’influence des caractéristiques des sources de bruit (positions dans la plaque, nombre de sources, le spectre des sources et la durée des signaux) sur la qualité des fonctions de Green reconstruites. Ils montrent aussi la possibilité de détecter des défauts en comparant aux fonctions de Green reconstruites dans le cas d’une plaque saine (sans défaut). Dans le même ordre d’idée, E. Larose et al.,[3] reprend les travaux de Sabra, en remplaçant les sources contrôlées par un bruit ambiant (jet d’air) dans une plaque de plexiglas. Une mé- thode de détection et de localisation de défauts millimétriques par interférométrie de coda a été également proposée par E. Larose et al.,[85] dans le béton.

Dans les systèmes d’éoliennes, récemment, J. D. Tippmann et al.,[86] appliquent cette approche à la surveillance d’éventuels défauts dans les turbines à vent. Les fonctions de Green sont alors estimées entre deux capteurs passifs, en corrélant le bruit créé sur les lames en fonctionnement. Les auteurs observent une asymétrie des fonctions de Green causales et anti-causales due aux non-linéarités introduites par les défauts. Une autre application récente a été proposée par V. Rémy et al.,[87] sur la localisation passive par réseau de capteurs, appliquée à la surveillance de géométrie des structures. La méthode repose sur l’estimation passive des temps de propagation inter-capteurs, en utilisant la corrélation de codas des sources ambiantes incontrôlées dans un milieu de propagation acoustique homo- gène (poutres d’acier).

Au niveau de l’IEMN, cette thématique a été abordée depuis quelques années pour des applications SHM dédiées au domaine des transports, essentiellement tournées à la détec- tion et l’imagerie passive de défauts dans des milieux réverbérants. Les différents travaux effectués ont été réalisés en particulier, sur des plaques, des tubes ou des rails. Un des objec- tifs est le développement de réseaux de capteurs CSI à basse consommation, purement passif.

CHAPITRE 1. PROPAGATION RÉVERBÉRANTE DES ONDES ELASTIQUES DANS LES PLAQUES MINCES ET SES APPLICATIONS AU SHM Dans les plaques minces réverbérantes E. Moulin[6] et N. Abou Leyla[88] montrent que la détection d’un défaut dans une plaque est possible en dépit d’une distribution non uniforme des sources de bruit sur la plaque. L’influence d’un défaut sur la fonction de corrélation a été étudiée théoriquement en comparant le rapport d’énergie entre la variation de cor- rélation des signaux reçus sur deux capteurs à l’apparition d’un défaut et la corrélation des signaux enregistrés pour une plaque saine[89]. Cette approche est ensuite testée sur les tubes, où on peut citer les travaux de S. Djili et al.,[90]. Dans ces travaux, la fonction de Green est estimée par corrélation de l’écoulement d’eau dans un tube d’acier, entre deux capteurs passifs. La reproductibilité de la fonction d’intercorrélation et sa sensibilité à la présence d’un défaut ont été vérifiées pour plusieurs fréquences entre 200 Hz et 35 kHz. H. Achdjian[41], montre dans ses travaux de thèse (soutenue récemment) qu’une estimation passive de l’énergie injectée par les sources ambiantes dans le milieu peut être obtenue par corrélation des signaux enregistrés entre deux capteurs passifs. Enfin, un ensemble de résul- tats prometteurs sur la détection passive de défauts dans les rails ont été obtenus dans le cadre de travaux de thèse de L. Sadoudi[91]. Pour un résumé de ces travaux, l’auteur peut consulter le papier de J. Assaad[92].

Dans tous les travaux décrits sommairement notamment pour le CSI des milieux réver- bérants, la littérature ne montre pas une relation simple entre la corrélation et la fonction de Green, en fonction de paramètres facilement accessible expérimentalement. De plus, les travaux existants sur la détection passive de défauts (notamment les travaux de Abou- Leyla[88], Moulin[6]) ne permettent pas de localiser ni d’imager le milieu réverbérant. Le travail de thèse présenté dans ce manuscrit trouve son originalité dans ce contexte. Comme nous le verrons dans les chapitres suivants, des approches de ce type peuvent être mises en œuvre pour la caractérisation et la localisation de défauts dans des structures solides où la réverbération acoustique est significative.