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Application au système parabolique-elliptique-parabolique précédemment étudié 167

Partie I. Equations de type Keller-Segel pour la modélisation de la Chimio-

VI. Etude heuristique de l’explosion en temps fini

2. Application au système parabolique-elliptique-parabolique précédemment étudié 167

3. Le changement de variable d’Herrero et Velazquez . . . 170

a. Équation vérifiée par la masse . . . 170

« [...] ce qui ne semblera nullement étrange à ceux qui, sachant combien de di-vers automates, ou machines mouvantes, l’industrie des hommes peut faire, sans y employer que fort peu de pièces, à comparaison de la grande multitude des os, des muscles, des nerfs, des artères, des veines, et de toutes les autres parties qui sont dans le corps de chaque animal, considéreront ce corps comme une machine, qui, ayant été faite des mains de Dieu, est incomparablement mieux ordonnée et a en soi des mouvements plus admirables qu’aucune de celles qui peuvent être inventées par les hommes. »

Descartes, Discours de la méthode. (1637)

III. Modéliser la chimiotaxie : les équations de

Keller et Segel

L

a chimiotaxie

8, le phénomène par lequel des organismes dirigent leurs mouvements en fonction des éléments chimiques présents dans leur environnement, joue un rôle clef dans l’histoire de la vie ; c’est un mécanisme essentiel pour des millions d’espèces et un pilier du fonctionnement des écosystèmes. Quoique les premiers microscopes permissent déjà d’observer le mouvement des cellules, la description spécifique de la chimiotaxie a dû attendre la fin du XIXème siècle avec les travaux de Theodor Engelmann en 1881 et Wilhelm Pfeffer en 1884. Ce domaine de la biologie n’a été sérieusement exploré qu’au XXème siècle, avec notamment la contribution du prix nobel Ilya Metchnikov pour ce qui est de la chimiotaxie eucaryote et de ses liens avec le système immunitaire. Les connaissances en chimiotaxie ont ensuite bénéficié de l’explosion des biotechnologies et de la biochimie pendant la seconde moitié du XXème siècle. La modélisation mathématique à permis d’accroître davantage la compréhension qualitative et quantitative de ces phénomènes. On trouve des comportements chimiotactiques dans toutes les branches du vivants, des bactéries les plus primitives aux cellules immunitaires humaines. Il peut s’agir d’attirance vers une substance nutritive, de fuite des substances nocives, ou d’un procédé d’auto-organisation au sein d’une espèce donnée.

Nous allons dans cette partie nous intéresser à ce dernier aspect : l’agrégation de micro-organismes via la sécrétion d’un composé chimioattractant. Avant de présenter la modélisation mathématique de ce phénomène, nous rappelons les concepts fondamentaux de biologie néces-saires à une bonne compréhension des mécanismes sous-jacents et à une conscience aiguisée des limites des modèles.

8Du grec taxis qui signifie "arrangement". La taxie est un mouvement d’un organisme provoqué par une stimulation extérieure.

1. La chimiotaxie et ses mécanismes

Après avoir rappelé des généralité sur l’organisation du monde vivant, nous donnons un aperçu des vastes connaissances disponibles sur la chimiotaxie des micro-organismes9 et son rôles dans les phénomènes dits sociaux.

1.a. Domaines du vivant et microcosme

Le monde du vivant est actuellement divisé par les scientifiques en trois domaines : • le domaine Eubacteria ou Bacteria qui contient les bactéries ;

• le domaine Archaebacteria ou Archaea qui contient les archées ; • le domaine Eukaryota ou Eucarya qui contient les eucaryotes.

Cette classification est récente, proposée en 1977 par Carl Woese10 et ses collègues qui avaient découvert une grande diversité moléculaire entre deux parties de l’ancien règne des procaryotes (les organismes unicellulaires11 sans noyau) qui sont les actuels domaines des bactéries et des archées. Le terme domaine est parfois rejeté par les taxonomistes pour celui d’empire pour des raisons d’antériorité ou parfois de refus de la classification à trois branches de Woese.

Les bactéries, qui présentent une grande diversité de tailles et de formes, mesurent en général entre 0,5 et 5 µm et ont pour la plupart une forme sphérique (coques) ou de bâtonnet (bacilles). D’autres formes (intermédiaire, oblongue, hélicoïdale, etc) existent ; cela dépend du cytosque-lette12 et de la paroi cellulaire, et c’est une donnée importante pour la survie de la bactérie. L’organisation interne est relativement "simple", sans noyau ni organite. L’information génétique est souvent contenue dans un unique chromosome circulaire, quoique certains gènes soient parfois localisés sur des petites sections libres appelées plasmides qui peuvent s’échanger entre bactéries. De nombreuses bactéries possèdent, enchâssés dans leurs parois, des organites cellulaires tels que les flagelles ou les poils, qui peuvent servir à la locomotion.

Les archées ressemblent beaucoup aux bactéries et ont longtemps été prises pour des bac-téries extrémophiles. Elles ont en fait une génétique, une biochimie et une biologie moléculaire complètement différentes ; certaines de leurs caractéristiques les rapprochent plus des eucaryotes que des bactéries, par exemple, chez certaines espèces, la présence d’introns dans l’ADN. Elles possèdent aussi des voies métaboliques qui leurs sont propre – la méthanogénèse par exemple – et sont peu consommatrices d’éléments courants chez les autres organismes comme les acides gras. On trouve également chez les archées des exemples de chimiotaxie.

Les eucaryotes rassemblent les animaux, les plantes, les champignons et les protistes (qui contiennent les protozoaires). Ils se caractérisent par la présence d’un noyau cellulaire qui contient

9Nous n’aborderons que superficiellement la chimiotaxie des grands organismes pluricellulaires qui se produit à une autre échelle et met en jeu l’interaction complexe entre de nombreuses cellules.

10Carl Richard Woese (1928-2012) est un microbiologiste américain qui a considérablement contribué à la phy-logénie, notamment en introduisant le domaine des archées et par conséquent la classification à trois domaines qui est encore utilisée à ce jour. Ses découvertes se basaient principalement sur l’analyse moléculaire des organismes. Il a également proposé en 1967 l’antériorité de l’ARN sur l’ADN, hypothèse encore très étudiée.

11Dire que les procaryotes sont unicellulaires n’est pas tout à fait exact. Même s’ils ne forment jamais de tissus différenciés, certains procaryotes peuvent s’assembler en colonies, certaines pouvant atteindre des tailles macroscopiques, comme la cyanobactérie filamenteuse Trichodesmium.

Figure 9 – Classification phylogénétique du vivant ([199], Purificación López-García, David Moreira, 2008). On notera que les animaux, les plantes et les champignons réunis ne représentent qu’une petite partie de l’arbre.

le matériel génétique sous la forme de chromosomes et de petites usines appelées mitochondries. On trouve chez les eucaryotes aussi bien des organismes unicellulaires comme les amibes ou des organismes pluricellulaires massifs comme le rorqual bleu (jusqu’à 30 mètres et 170 tonnes). Du fait de leur plus grande taille, les eucaryotes unicellulaires ont une chimiotaxie différente de celle de la plupart des procaryotes.

1.b. Chimiotaxie des procaryotes Le tumbling

La majeure partie des procaryotes présentant des comportements chimiotactiques se déplace par le moyen de flagelles enchâssés dans leur paroi cellulaire. Il existe une grande diversité dans la forme et le nombre des flagelles à travers le monde vivant. En particulier, et contrairement à ce qui a longtemps été cru, les flagelles des bactéries et des archées ne sont pas homologues. Les flagelles des procaryotes sont structurellement plus "simples" que ceux des eucaryotes et sont en général activés par une force proton motrice.

Le mécanisme chimiotactique le plus courant chez les procaryotes est une alternance entre des phases de natation rectiligne à l’aide des flagelles et de phases de mouvements aléatoires dits de "tumble". En particulier, chez de nombreuses bactéries – par exemple Escherichia Coli dont nous parlerons plus en détail – la paroi cellulaire comporte plusieurs flagelles qui en phase de tumble se désolidarisent les uns des autres, causant un mouvement aléatoire. Lorsque la bactérie va dans la bonne direction (gradient d’une substance favorable ou défavorable) elle change le sens de rotation de ses flagelles pour les arranger en un faisceau synchrone, se propulsant ainsi vers les zone de plus hautes (ou plus faibles si la substance est nocive) concentrations chimiques.

D’autres méthodes existent pour des procaryotes ne possédant qu’un flagelle ou ayant une forme globale hélicoïdale. La diversité est telle qu’il est vain de vouloir l’embrasser toute entière dans ce document.

Récepteurs

Les procaryotes n’ayant pas de système nerveux et étant trop petits pour percevoir une différence de concentration entre deux points de leur paroi, ils ont besoin de capteurs pour évaluer la concentration des espèces chimiques dans leur environnement et d’une capacité à intégrer dans le temps les informations acquises.

L’évaluation des concentrations se fait par le moyen de récepteurs, pour la plupart transmem-branaires. Les articles [306] et [333], qui dressent un panorama des différents types de récepteurs que l’on trouve chez les bactéries et les archées, montrent à quel point la chimiotaxie peut faire appel à des méthodes complexes et diverses. Chaque molécule a ses propres récepteurs, et pour la même molécule, le dioxygène par exemple, on trouve des récepteurs transmembranaires qui fixent la molécule, d’autres sensibles à la force proton motrice, d’autres encore sont inter-membranaires et sensibles à l’état interne de la cellule.

Une fois les récepteurs activés, une cascade de réactions conduit à la modification du compor-tement du ou des flagelles. Le système s’adapte continuellement à la concentration extérieure : le récepteur est modifié au fur et à mesure de son activation. Une boucle de rétroaction permet au système de toujours s’adapter aux nouvelles concentrations chimiques, de sorte que le système réagira toujours à un changement de la concentration du chimioattractant, la sensibilité du ré-cepteur ayant été ajustée aux concentrations ambiantes. Ce phénomène est en général dû au jeu d’enzymes antagonistes qui méthylent et déméthylent la partie inter-membranaire du récepteur. Un organisme qui se déplace aléatoirement par tumbling pourra donc, via ce mécanisme interne, percevoir des différences de concentrations chimiques entre deux points de l’espace et favoriser son déplacement dans une direction particulière (vers les hautes concentrations du composé chi-mique s’il est attractif ou l’inverse s’il est répulsif).

La chimiotaxie chez Escherichia Coli

La bactérie Escherichia Coli est l’une des plus étudiées de l’histoire de la biologie, à la fois en raison de l’ancienneté de sa découverte13 et de la facilité de sa culture (division toutes les vingt minutes à 37°C, résistante). C’est un bacille aérobie à Gram négatif14 très fréquent dans la flore intestinale de l’homme (près de 80% de la flore intestinale aérobie) et de la plupart des animaux homéothermes. Quoique certaines souches puissent être pathogènes (de l’infection urinaire jusqu’à la septicémie), E. Coli est en général commensale chez l’homme. C’est aussi une bactérie qui mute facilement et elle est à ce titre très utilisée en ingénierie génétique comme "châssis" pour les gênes testés. Le modèle élaboré par Aotani, Mimura et Mollee ([11]) pour les colonies d’E. Coli est l’objet principal des travaux originaux présentés dans cette partie de la thèse.

Équipées de quelques flagelles hélicoïdales – quatre à dix –, les E. Coli sont le parfait exemple du phénomène de "tumble" que nous avons décrit ci-dessus : elles alternent, en l’absence de sub-stances attractives ou répulsives, des phases de rotation aléatoire et des courtes phases de natation rectiligne. Cela résulte en une marche aléatoire qui leur permet d’explorer leur environnement. La présence de composés chimiques attractifs (chimioattractants) ou répulsifs (chimiorépellants)

13E. Coli a été découverte en 1885 par Theodor Escherich.

14Les bactéries à Gram négatif et à Gram positif peuvent être différentiées par un procédé appelé coloration de Gram. Ces deux groupes ne sont pas des ensembles monophylétiques mais partagent des propriétés structurelles. Les bactéries à Gram négatif ont en général une structure bimembrannée organisée en trois parties : une membrane externe, un espace périplasmique intermédiaire contenant en particulier la paroi proprement dite et une membrane plasmique interne en contact avec le cytoplasme.

Figure 10 – Une bactérie Escherichia Coli, vue d’artiste, "E. Coli" acrylique sur toile 610mm x 610mm, par Shardcore (http ://www.shardcore.org/shardpress2019/2006/01/19/e-coli-2006/) favorise les phases de nage : le temps passé en phase de tumble est comparativement moindre et la bactérie se déplace dans la direction préférentielle. Lorsque les flagelles tournent dans le sens trigonométrique (anti-horaire), les flagelles forment un faisceau cohérent et propulsent la bacté-rie en une nage rectiligne ; si au contraire les flagelles tournent dans le sens anti-trigonométrique (horaire), les flagelles se désolidarisent et la bactérie tourne sur elle même de façon erratique.

Nous décrivons ici plus précisément ce processus. Ce passage (les deux paragraphes suivants) est plus technique que le reste de cette introduction et peut être sauté sans nuire à la compré-hension globale.

La membrane extérieure contient des récepteurs transmembranaires capables de fixer les mo-lécules attractantes ou répellantes ; ils sont chacun spécifique à une molécule particulière ([141]). Ces récepteurs activent des voies de signalement intracellulaires qui permettent de favoriser la nage dans la direction appropriée. Plus précisément, les récepteurs sont associés à une histidine kinase15 CheA qui se phosphoryle naturellement en CheA-P ([333]). L’activité du récepteur va changer le rythme auquel CheA se transforme en CheA-P. Ce groupe phosphoryl porté par CheA est récupéré soit par la méthyle estérase CheB, qui devient CheB-P, soit par le régulateur de ré-ponse CheY, qui devient CheY-P. Le régulateur phosphorylé CheY-P diffuse dans le cytoplasme jusqu’à atteindre les moteurs intracellulaires des flagelles, plus particulièrement la protéine dite FliM qui contrôle le sens de rotation des flagelles (voir [50] et [197]), et par son effet sur cette protéine favorise le biais pour la rotation horaire (et donc augmente le temps passé en phase de tumble, [341]). Le complexe CheY-P se déphosphoryle spontanément d’une part et sous l’action d’une phosphatase CheZ d’autre part ([196]).

Lorsque le récepteur chimiotactique est activé par le chimioattractant, le rythme auquel les histidines kinases CheA sont phosphorylées diminue ; moins de CheY-P sont alors produits et les flagelles sont moins incitées à tourner en sens horaire, ce qui favorise la nage. S’il n’y avait que ce mécanisme, une concentration constante de chimioattractant entrainerait une nage constante. Hors, c’est la différence de concentration entre deux points qui a cet effet. Le mécanisme qui répond à ce besoin se base sur la méthyle estérase CheB et la méthyle transférase CheR dont les

15Les kinases sont des enzimes du groupe des transférases. Elle catalysent les réactions de phosphorylation en ajoutant un ion phosphate à la molécule cible à partir de l’ATP. Dans le cas de CheA, le groupe phosphoryl n’est pas transmis de manière active mais récupéré par CheB et CheY

rôles sont antagonistes. La protéine CheR ajoute des groupements méthyles aux chimiorécepteurs, ce qui augmente l’auto-phosphorylation de CheA ([301]) ; à l’inverse, CheB-P déméthyle les récepteurs, ce qui diminue l’auto-phosphorylation de CheA ([302]). L’activation du récepteur par le chimioattractant entraine donc une diminution de la concentration de CheA-P, donc une diminution de la concentration de CheB-P, donc une méthylation supérieure des récepteurs par CheR dont l’action n’est plus contrecarrée. IL s’ensuit une phosphorylation supérieure de CheA en CheA-P. La quantité de CheY-P revient à sa valeur stable et le ratio entre nage et tumble revient à son état stationnaire malgré le fait que la concentration du chimioattractant ait augmenté dans l’environnement. Cette boucle de rétro-contrôle permet à E. Coli de percevoir des variations de concentration chimique sur cinq ordres de grandeurs ([215]).

Pour une introduction plus globale et profonde sur les voies de signalisation des bactéries, on pourra consulter le livre [48]. On trouvera dans [120] une analyse mathématique d’un modèle à la fois clair et réaliste de la voie de signalisation intracellulaire de la chimiotaxie chez E. Coli.

Figure 11 – Différents motifs formés par des colonies d’E. Coli chimiotactiques dans de l’agar semi-solide, Budrene et Berg dans [60]. a : anneau formé après 38h en présence de 1 mM de succinate. b : groupements disposés de façon radiale sur un réseau pseudo-hexagonal formés après 72h en présence de 2 mM de succinate. c : groupements en motifs entrecroisés formés après 72h en présence de 3 mM de succinate. d et e : schémas représentant les motifs des images b et c.

Les E. Coli sont également capables, sous certaines conditions de stress environnemental, d’émettre leur propre chimioattractant afin de s’agglomérer en diverses structures pluricellulaires. On trouvera une description fine du phénomène et des confirmations expérimentales dans les articles de Budrene, Berg et leurs coauteurs : [59], [60] et [220]. Placées au centre d’une boite de Pétri contenant un mélange d’agar semi-solide et d’un composé intermédiaire du cycle de l’acide tricarbonique (du succinate ou du fumarate), la colonie forme en un à trois jours des motifs

géométriques complexes et stables que l’on peut observer sur les figures11et 12. Le temps que met la population à doubler de taille dans ces conditions est d’environ deux heures : les motifs se forment donc en lien avec la croissance de la population et la consommation des nutriments présents dans le milieu. Le mécanisme exact de la formation de ces motifs géométriques est encore mal compris et nous nous intéressons dans cette partie de la thèse à des modèles mathématiques de ce phénomène.

En présence de succinate, les E. Coli chimiotactiques sécrètent de l’aspartate, un de leurs chimioattractants ( [220] ou le livre [23]). Les bactéries se rassemblent alors en remontant le gradient d’aspartate. Les plus gros agrégats émettant plus d’aspartate elles forment des groupes compacts et espacés. Les bactéries sont d’abord fortement mobiles, ce qui leur permet de se réunir. Elle vont ensuite légèrement s’espacer et perdre une partie de cette mobilité, stabilisant ainsi le motif global jusqu’à le figer ([60]). Budrene et Berg conjecturent que la formation des colonies en motifs géométriques stables ne dépend que de de la consommation des nutriments, de la reproduction des bactéries, de l’excrétion du chimioattractant et de la mobilité chimiotactique, sans intervention d’un programme morphogénétique plus complexe.

Figure 12 – Colonies d’E. Coli chimiotactiques, Budrene et Berg [59]

La modélisation mathématique du phénomène de chimiotaxie est une voie privilégiée pour comprendre comment ces règles simples peuvent conduire à des réalisations si diverses, et par là même valider l’hypothèse que font Budrene et Berg qu’aucune voie métabolique complexe, en dehors de celles associées à la chimiotaxie, n’a besoin d’intervenir pour créer cette complexité.

1.c. Chiomiotaxie des eucaryotes Une autre échelle

Les organismes eucaryotes étant en règle générale plus gros et à l’organisation plus complexe que leurs homologues procaryotes, ils n’ont pas à recourir à la méthode de marche aléatoire pour percevoir les différences de concentrations des substances favorables ou nocives ; leur taille leur permet de sentir un gradient entre deux points de leur paroi cellulaire. L’intégration des signaux issus de gradients chimiques en des voies métaboliques permettant la locomotion est encore mal comprise.

Les organismes eucaryotes unicellulaires possèdent parfois des cils semblables aux flagelles des procaryotes mais présents en bien plus grand nombre et s’agitant de manière synchrone. On trouve aussi des cellules eucaryotes présentant un unique flagelle complexe équipé de plusieurs moteurs moléculaires. D’autres cellules se déforment en créant des "bras" internes formés de filaments d’actine : la cellule n’a a priori pas d’avant ni d’arrière et la présence d’une plus grande quantité de chimioattractant d’un côté de sa paroi lui fait projeter sa masse dans la direction favorable, comme on peut le voir dans la figure13issue de [193], sur la (jolie) photographie14ou sur cette vidéo disponible sur la chaine youtube du Dr Ralph Wagner :https://www.youtube. com/watch?v=7pR7TNzJ_pA. Le "bras" que la cellule projette en avant, qui est une manifestation de la réorganisation du cytosquelette, est appelé pseudopode.

Figure 13 – Exemple de chimiotaxie eucaryote, Levine et Rappel [193]

Même au sein des organismes de grande taille comme les mammifères, on trouve des cellules eucaryotes capables, de manière individuelle, de réagir à un gradient de concentration chimique et de se mettre en mouvement afin de le remonter. C’est aussi une raison possible de virulence pour les métastases cancéreuses. Les leucocythes utilisent par exemple des pseudopodes, à l’ins-tar de certaines espèces d’amibes rampantes dont nous allons parler plus spécifiquement.

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