• Aucun résultat trouvé

Application : étude des décisions de relocalisation chez les personnes âgées

Rester à la maison ou déménager dans une RPA1 est la question à laquelle les personnes âgées

fragiles au Canada doivent faire face lorsqu'elles commencent à perdre leur autonomie. Souvent

les proches aidants les accompagnent dans cette démarche. Les outils de prise de décision partagée, renforcent la participation des proches aidants à la décision de la relocalisation. Cette décision est faite en collaboration avec des équipes interprofessionnelles des CIUSSS2.Légaré

et al.(2016) ont mené une étude pour tester l'eet de l'ajout d'un programme de formation à la prise de décision partagée dans l'équipe interprofessionnelle à la diusion passive d'un guide sur la prise de décision partagée. La formation consiste à suivre un tutoriel en ligne d'une heure et demie ainsi qu'à assister à un atelier de renforcement des compétences comprenant des démonstrations vidéo et des conférences d'une durée de trois heures et demie.

L'essai clinique implique 9 CIUSSS de la province de Québec. Les CIUSSS sont l'unité de randomisation, chaque centre représente une grappe. An d'éviter toutes sources de biais, un biostatisticien qui n'est pas impliqué dans l'analyse des données s'est occupé de la randomisa- tion des neuf CIUSSS sur quatre séquences. Trois séquences contiennent deux CIUSSS alors que la quatrième est constituée de trois centres. Après le début de la collecte de données de base (T0), chacune des séquences va recevoir l'intervention à une période prédéterminée à l'avance à savoir 4 (T4), 11 (T11), 18 (T18) et 25 (T25) mois après T0. Les interventions ont été séparées par des intervalles de 7 mois. Il y a un total de cinq périodes de collecte de données avec 1 mois pour l'intervention entre chacune d'entre elles. La durée de collecte des données est de 32 mois. Chaque 7 mois, l'intervention est faite dans un nouveau groupe, tandis que les grappes traitées précédemment continuent à appliquer leurs compétences nouvellement acquises, jusqu'à ce que les quatre séquences reçoivent l'intervention. À la n de l'étude, les neuf CIUSSS reçoivent l'intervention. Pour plus de détails concernant le protocole de cet essai clinique voir Légaré et al.(2016).

La gure ci-dessous, tirée deLégaré et al. (2016), illustre le plan d'étude des CIUSSS durant les cinq périodes :

Figure 3.1  Le schéma Stepped wedge de l'essai clinique de l'aide à la décision partagée. En utilisant les données de l'essai clinique Légaré et al. (2016), on construit le schéma 3.2 qui contient les données agrégées grappe par période de notre variable réponse. La variable réponse Yij représente le rôle assumé de la formation, c'est-à-dire, le pourcentage des proches

aidants déclarant ayant joué un rôle actif dans la prise de décision concernant la relocalisation de l'ainé. Dans chacune des séquences, on a pour chaque grappe la valeur de Yij propre à la

grappe i durant la période j, où i=1,...,9 et j=1,...,5.

.

Figure 3.2  Les proportions de proches aidants estimant avoir joué un rôle actif dans la prise de décision concernant la relocalisation de l'ainé.

. Figure 3.3  Le nombre de proches aidants contactés à chaque grappe-période. On observe que durant les périodes 2 et 4, à la grappe 7, la proportion de proches aidants estimant avoir joué un rôle actif est de 29% et 44% respectivement. Cette proportion est faible en la comparant aux autres grappes-périodes, ce qui suggère une hétérogénéité des données. En exploitant les données du schéma 3.2, on obtient les boîtes à moustaches des groupes traités et non-traités :

Figure 3.4  Les boxplots de la proportion du rôle assumé positif groupés par intervention

À partir des boîtes à moustaches de la gure 3.4, on conclut que les proportions médianes du rôle assumé positif entre les groupes traités et non-traités semblent similaires tandis que la proportion de rôle assumé positif des groupes traités est plus variable que celui des non-traités. An d'estimer l'eet de la formation implantée, on analyse les données du tableau 3.2 en

utilisant les trois méthodes vues dans les chapitres 2 et 3. Pour le modèle mixte, on estime l'eet de l'intervention à l'aide du modèle (2.5) en considérant un schéma équilibré, c'est-à-dire on traite les données comme si le nombre des proches aidants dans les grappes-périodes est xe nij=N. Sur les données de la gure 3.2, on exclut les périodes 1 et 5 pour calculer ˆθ avec

les méthodes non-paramétrique et semi-paramétrique. Pour la méthode non-paramétrique on eectue B=1000 permutations. Les résultats des estimations et les intervalles de conances se résument dans le tableau 3.5.

Méthode θˆ Borne inférieure de IC Borne supérieure de IC

Modèle mixte 0.043 -0.097 0.183

Test de permutation -0.029 -0.098 0.068 Semi-paramétrique -0.026 -0.097 0.046

Table 3.5  L'estimation de l'eet de la formation et les intervalles de conances à 95%. Comme déjà mentionné, les ˆθj obtenus par la méthode semi-paramétrique sont similaires à

ceux estimés par la méthode non-paramétrique. Le vecteur (0.010, -0.041, 0.131) représente les valeurs estimées des θj pour les périodes j=2,3,4.

Pour visualiser les estimations de θ pour les mille permutations eectuées pour la méthode non-paramétrique on dresse le graphique suivant. La ligne en bleu représente l'estimation de l'eet d'intervention sous l'hypothèse nulle ˆθ=-0.02894.

Figure 3.5  L'histogramme, la densité et le boxplot des estimations de θ pour B=1000 permutations.

Selon les intervalles de conance du tableau 3.5, aucune des estimations n'est signicative- ment diérence de 0. L'eet de l'intervention est non signicatif, donc la formation n'a pas d'eet sur le pourcentage des proches aidants déclarant ayant joué un rôle actif dans la prise de décision concernant la relocalisation de l'ainé. En outre, on remarque que ˆθ est positive dans le cas du modèle mixte tandis qu'elle est négative pour les deux dernières méthodes. Probablement cette diérence s'explique par le non-usage des deux périodes 1 et 5 dans les deux méthodes. Prenant la cinquième période, on constate que le rôle assumé Yi5 atteint des

valeurs importantes arrivant à 100% pour plusieurs grappes, voir la gure 3.2. Pour les in- tervalles de conance, on remarque que l'IC obtenue par le modèle mixte est le plus large, peut être cela revient à une mauvaise détermination de la structure de dépendance. Pour une meilleure visualisation, on présente les matrices de variance covariance et de corrélation du modèle mixte et de la méthode semi-paramétrique pour des périodes 2, 3 et 4. Concernant les tests de permutation, et comme déjà mentionné, on ne fait aucune hypothèse sur la structure de corrélation.

Méthode Matrice de variance covariance Matrice de corrélation Modèle mixte    0.026 0.003 0.003 0.003 0.026 0.003 0.003 0.003 0.026       1 0.115 0.115 0.115 1 0.115 0.115 0.115 1    Semi-paramétrique    0.034 0.002 0.024 0.002 0.003 −0.003 0.024 −0.003 0.036       1 0.198 0.690 0.198 1 −0.086 0.690 −0.086 1   

Table 3.6  Les matrices de variance covariance et de corrélation estimées pour les périodes 2,3 et 4.

On remarque, à partir du tableau 3.6, une variabilité importante des estimations de corréla- tions. Pour la méthode semi-paramétrique, les corrélations varient entre -8% et 70%, où deux parmi eux sont assez faibles, probablement cela revient au nombre faible de grappes utilisées. Au niveau des variances, on constate que la variance de la période 3 est très faible ce qui entraine une grande contribution de cette période dans le calcul de ˆθ.

Le code R utilisé pour les diérents résultats discutés dans ce chapitre est présenté dans l'annexe B.

Chapitre 4

Le traitement des données désagrégées

Dans le cas d'absence de covariables individuelles, les deux chapitres 2 et 3 présentent quelques approches pour traiter les données agrégées d'un stepped wedge. Quant au cas désagrégé, on ne trouve pas dans la littérature des méthodes spéciques au schéma stepped wedge, semblables à celles des chapitres précédents, qui traitent directement les données individuelles. Le présent chapitre introduit un modèle qui sert à une analyse fondée sur des données individuelles. Il s'agit d'un modèle linéaire mixte généralisé (GLMM). Après la description de ce modèle, On y présente les résultats de son application sur les données de l'essai cliniqueLégaré et al.(2016). Ainsi, tel qu'au chapitre 2 nous eectuons une étude par simulation de la performance du test de comparaison de deux traitements : H0: θ=0. Dans la dernière partie, on dénit la confusion

dans le cadre du modèle logistique avec un facteur confondant. On termine le chapitre par une étude de simulation de tests pour détecter un facteur confondant.

4.1 Construction du modèle

Comme déjà mentionné dans le chapitre 2, Hussey and Hughes(2007) ont proposé le modèle (2.1) pour analyser les données stepped wedge dans le cas d'une variable réponse continue. Ce modèle s'étend aux modèles linéaires mixtes généralisés, cité dans (2.3), pour le traitement des variables binaires. Ce dernier peut accueillir plusieurs niveaux de regroupement par l'ajout de multiples eets aléatoires.

Considérons le cas d'une variable réponse Yijk continue. En gardant les mêmes notations des

chapitres précédents, on rappelle que le modèle proposé par Hussey and Hughes(2007) s'écrit comme suit :

où αi représente l'eet aléatoire de la grappe i qui suit la loi normale, centrée et de variance

τ2, αi ∼ N(0,τ2).

Prenons les données provenant de l'essai cliniqueLégaré et al.(2016). Notre variable réponse, le rôle assumé, est une variable dichotomique. Pour cette raison, on va utiliser le modèle GLMM avec le lien logit (2.3) :

Logit  P (Yijk= 1)  = log  P (Yijk= 1) 1 − P (Yijk= 1)  = µ + αi+ βj+ Xijkθ. (4.2)

Considérons un modèle plus complet que le modèle réduit (4.2) en ajoutant un eet aléatoire de la grappe-période :

Logit(P (Yijk = 1)) = log



P (Yijk = 1)

1 − P (Yijk = 1)



= µ + αi+ βj+ (αβ)ij + Xijkθ. (4.3)

où (αβ)ij est l'eet aléatoire du temps j pour la grappe i qui suit la loi normale, centrée et

de variance σ2

αβ, (αβ)ij ∼ N(0,σαβ2 ).

L'indice de corrélation intra-grappe :

En général, l'ICC est déni par la formule (2.8). Pourtant, dans le cadre de la régression logis- tique, il n'y a pas d'estimation directe de σ2. Pour calculer l'ICC on va recourir à l'approche

des variables latentes1. Cette approche considère la réponse binaire observée comme une va-

riable continue seuillée où on observe 0 en dessous du seuil et 1 au-dessus. Pour plus de détails voir l'article de Nakagawa et al.(2017). On sait que la loi logistique a une variance2 égale à

π2/3. On prend π2/3 comme valeur pour la variance σ2. On se retrouve alors avec

ρ = τ

2

τ2+ π2/3 (4.4)

comme ICC pour le modèle réduit (4.2). Tandis que pour le modèle complet (4.3), on a deux formules de l'ICC. La première porte sur les individus provenant de la même grappe et de la même période noté ρwp. La deuxième formule concerne les individus provenant de la même

grappe mais à des périodes diérentes noté ρbp. Le ρwp et ρbp représentent respectivement

l'ICC_intra-période et l'ICC_inter-période et s'écrivent sous la formes suivantes :    ρwp= τ22 αβ τ22 αβ+π2/3 , ρbp= τ 2 τ22 αβ+π2/3 . (4.5)

L'utilisation des indices wp et bp vient de la terminologie anglaise0within period0 et0between

period0.

1. https://www.barelysignicant.com/post/icc/

L'implantation du modèle sous R :

Après le calcul de la fonction de vraisemblance conditionnelle, on intègre sur les eets aléa- toires an d'obtenir une fonction de vraisemblance marginale qu'on maximise pour construire les estimations des paramètres. Pour cette n, des méthodes d'intégration interviennent. Le logiciel R a mis en ÷uvre deux méthodes d'estimation des coecients. La première s'agit du calcul de quasi-vraisemblance pénalisée noté PQL, et la deuxième concerne un calcul de vrai- semblance avec l'approximation de Laplace ou la quadrature adaptative de Gauss-Hermite. An d'utiliser la méthode de PQL il faut appeler la fonction glmmPQL du package MASS Ri- pley et al. (2013). Tandis que la fonction glmer du package lme4 Bates et al. (2015) utilise l'approximation de Laplace par défaut, ce qui est équivalent à la méthode de Gauss-Hermite avec un seul point de quadrature. An d'utiliser une quadrature de Gauss-Hermite avec un nombre plus important de points d'intégration, il sut de donner la valeur du nombre de points de quadrature désirés à l'argument nAGQ. Plus on augmente le nombre de points, plus le programme devient long mais les estimations sont plus précises. Actuellement, la méthode de Gauss-Hermite est implémentée seulement pour les modèles avec un seul eet aléatoire3.

Pour plus de détails voir Stéphane (2012) etCommenges and Jacqmin-Gadda (2015). Exemple : essai clinique sur les proches aidants

En guise de comparaison entre les grappes qui ont subi la formation et celles qui ont reçu le guide seulement, et an de tester si la formation a un eet, on ajuste, sous R, les deux modèles linéaires généralisés (4.2) et (4.3). Ainsi on ajuste le modèle (4.3) en utilisant le package TMB Kristensen et al. (2015). TMB est un package R qui permet une implémentation rapide de modèles complexes à eet aléatoire aux données. D'abord, On a écrit un programme C++ qui permet d'évaluer la vraisemblance conditionnelle, étant donné les eets aléatoires pour le GLMM. Ce programme permet à TMB de faire des calculs très précis des dérivées nécessaires pour faire l'approximation de Laplace. Le code et les sorties R sont présentés dans les annexes C et E. Les résultats de cette analyse sont résumés dans le tableau 4.1 :

H H H H H H H R TMB Modèles θ P.value IC− IC− Déviance τ2 σαβ2 R Modèle complet 0.217 0.625 -0.655 1.090 339.4 0.124 0.024 R Modèle réduit 0.222 0.611 -0.635 1.080 339.4 0.130 0 TMB Modèle complet 0.217 0.625 -0.655 1.090 339.4 0.124 0.024 Table 4.1  L'estimation de l'eet de la formation, les P.value , les intervalles de conance, les déviances et les variances.

En principe TMB donne des résultats plus précis que lmer. On a utilisé les deux packages pour s'assurer que les résultats de l'approximation de Laplace faite par lmer sont satisfaisants. Dans notre cas, on remarque que les résultats obtenus par lmer sont similaires aux sorties TMB. Cela valide que les résultats donnés par lmer sont ables. D'après le tableau 4.1, l'eet de l'intervention est non signicatif, donc la formation n'a pas d'eet sur le pourcentage des proches aidants déclarant ayant joué un rôle actif dans la prise de décision concernant la relocalisation de l'ainé. On remarque que les estimations obtenues en analysant les données individuellement sont diérentes de celles obtenues avec les données agrégées résumés dans le tableau 3.5. Cette diérence est probablement due à la fonction de lien utilisée. Dans les modèles ajustés pour le tableau 4.1 on a considéré une fonction de lien logit tandis que pour le tableau 3.5 on a un lien linéaire. À propos de la déviance, le but derrière son utilisation est d'eectuer le test du rapport des vraisemblances lorsque le modèle sous l'hypothèse nulle est un cas particulier du modèle sous la contre hypothèse. On note D0 la déviance du modèle

réduit, D1 la déviance du modèle complet. On calcule la statistique du test ζ= D0- D1, ensuite

on calcule le seuil observé p = P (χ2

r > ζ)où r est le nombre de paramètres du modèle complet

moins le nombre de paramètres du modèle réduit. Par rapport à l'exemple, on obtient la même valeur avec les deux modèles. La statistique du rapport des vraisemblances pour ce test est donc égale à ζ=0. La valeur p est P (χ2

1 > 0)  5%, donc on ne rejette pas l'hypothèse nulle

que σ2

αβ=0 et on retient le modèle réduit.

Documents relatifs