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CHAPITRE 2 UN CAS INDUSTRIEL: COORDINATION DANS UN

3.1 Aperçu

Tel que mentionné en introduction, la littérature générale concernant la gestion des chaînes logistiques (en anglais, Supply chain management, ou SCM) est vaste, mais beaucoup plus réduite en ce qui concerne la coordination des opérations manufacturières. Nous reprendrons ici les principaux éléments constitutifs du cadre logistique introduit au chapitre précédent (tableau 1.1) afin de présenter les principales avenues de recherche. C’est volontairement que nous ne couvrirons pas les approches centralisées ou partiellement centralisées. L’accent est mis sur les méthodes pouvant être mises à profit pour la coordination d’entités autonomes ou semi-autonomes.

Tout d’abord, au niveau opérationnel (v), la littérature propose de nombreux algorithmes pour la prise de décision spécialisés (ex : ordonnancement), souvent sans considération pour les autres aspects du problème. Ces algorithmes ont généralement fait leur chemin jusqu’aux industriels, étant intégrés aux progiciels de gestions (e.g. Enterprise Ressource Planning, Advanced Planning and Scheduling, etc.).

À l’autre extréminé (i), plusieurs chercheurs étudient les caractéristiques d’une bonne relation d’affaires, c'est-à-dire celles pouvant mener à une bonne coordination de manière naturelle [8]. La littérature dans le domaine de la gestion des inventaires

regorge d’exemples concernant l’utilisation de mécanismes tels que les pénalités [9,10], le partage des revenus [11-13], les escomptes au volume [14,15] et autres ententes contractuelles rattachées aux mécanismes de commande [8,16,17].

D’autres chercheurs étudient l’impact d’un meilleur partage d’informations (ii) sur les performances du réseau de création de valeur. Par exemple, Schneeweiss étudie dans [18] les performances du réseau en fonction du niveau d’exactitude de l’information accessible aux entités. Qui plus est, on trouve de nombreuses études concernant les mécanismes de partage d’information concernant les niveaux d’inventaires de manière à faciliter le calcul des prévisions et des stocks de sécurité.

Concernant les mécanismes de coordination en tant que tel (iii; iv) la littérature récente propose des cadres pour la coordination basés sur la négociation et le partage d’informations (e.g. [4,19]). Généralement, ces approches s’appliquent dans des contextes où les partenaires ont des objectifs conflictuels mais doivent s’entendre sur un plan. Elles sont habituellement définies pour des relations à deux partenaires ou bien la participation d’un coordonnateur est requise. Finalement, les technologies multi-agents sont de plus en plus utilisées pour la création de systèmes collaboratifs (voir [20] et [21]).

Le RCV en tant que système multi-agent

Un réseau de création de valeur (RCV) peut naturellement être décrit comme un système multiagent [2] : il est constitué d’entités autonomes (les agents), cherchant à atteindre des buts locaux et/ou globaux, interagissant entre elles et devant respecter les contraintes de leur environnement.

Dans une revue de littérature célèbre [22] et sa version révisée [23], Shen a répertorié plus d’une centaine de travaux utilisant les systèmes multiagents dans un contexte manufacturier. Les applications vont du design de produits jusqu’au suivi de l’exécution des opérations sur le plancher d’une usine. Plus spécifiquement, on trouve dans la

littérature de multiples méthodes spécifiquement destinées à la planification de la production. Dans une autre revue de littérature [24], Shen répertorie les principales applications des systèmes multiagents pour la planification des opérations et l’ordonnancement. Dans la plupart de ces travaux, la décomposition du système en agents est réalisée par le concepteur. Le concept de multi-agent est utilisé par le concepteur en tant que technique de décomposition et de conception de systèmes informatiques; c’est une variante de l’approche dite diviser pour régner. Dans le contexte qui nous intéresse, nous avons affaire à un réseau d’agents existant a priori et devant se coordonner.

Ce problème de coordination n’est pas uniquement l’apanage des réseaux de création de valeur. Certains auteurs ont proposé des méthodes génériques pour la résolution de problèmes d’optimisation distribués; certaines pourraient-elles s’appliquer à notre problème de coordination en contexte hiérarchique? On retrouve plusieurs de ces méthodes dans la littérature en intelligence artificielle distribuée, regroupées sous le terme Distributed Constraint Optimization Problem (DCOP).

En résumé, qu’elles se veuillent génériques ou qu’elles aient été développées pour un problème spécifique, il nous semble clair qu’il existe deux grandes familles d’approches : il y a d’abord (1) les approches basées sur la communication et la négociation et (2) celles basées sur l’algorithmie et le calcul. Au tableau 3.1, nous présentons les principales caractéristiques de ces deux familles. La plupart des méthodes peuvent être classées selon l’une de ces familles, bien que certaines possèdent des caractéristiques de chacune d’elles.

Nous verrons plus loin que la plupart des méthodes utilisées en pratique pour le problème de coordination de la production s’inscrivent dans le cadre de la première approche. Par contre, la seconde catégorie a l’avantage de promettre des solutions de meilleures qualités. Cependant il y a une difficulté apparente avec ces méthodes à

capturer la nature hiérarchique du problème. Les prochaines sections décrivent ces deux approches avec davantage de détails.

Tableau 3.1. Approches exploitées par les méthodes d’optimisation distribuées.

(1) Approches basées sur la communication / négociation

(2) Approches basées sur l’algorithmie et le calcul

Source d’inspiration pour la création d’une nouvelle méthode

Inspirée des réseaux d’entreprises et/ou des réseaux d’humains, de la façon qu’ils ont de se coordonner.

Souvent basée sur un algorithme d’optimisation centralisé existant.

Conception d’une nouvelle méthode

Identification des objets échangés par les partenaires;

Rôle des agents;

Formalisation du protocole d’interaction.

Spécification de l’algorithme et d’un formalisme pour la description du problème;

Distribution des fonctionnalités entre les agents;

Identification des objets échangés.

Nature des objets échangés entre les agents

Les objets échangés ont un sens du point de vue des affaires

(ex : passage d’une commande).

Les objets échangés ont un sens du point de vue algorithmique / mathématique, mais pas

nécessairement du point de vue des affaires

(ex : échange de coefficients lagrangiens).

Domaine d’application de la nouvelle méthode

Généralement spécifique à un domaine d’application.

Générique, pour peu que le problème puisse être modélisé à l’aide du formalisme décrit par la méthode.

Exactitude de la méthode

Généralement une heuristique. Généralement exacte.