• Aucun résultat trouvé

EN PLUS DES ANOMALIES DE LA FONCTION VÉSICO-SPHINCTÉRIENNE, QUELLES SONT LES

Deux études reprises dans cette même revue de la littérature ont étudié la valeur diagnostique de l’association des symptômes d'incontinence urinaire d’effort au test de provocation à l’effort. Les valeurs prédictives positives étaient alors respectivement de 78 % et 97 %. L'étude de Videla et Wall, déjà citée au paragraphe précédent, qui rapportait la valeur prédictive positive la plus élevée, avait utilisé un catalogue mictionnel avec mesure des volumes urinaires avant de sélectionner les patientes, ce qui peut constituer un biais, en éliminant, grâce aux données fournies par ce catalogue, celles qui avaient des problèmes d'impériosité (57).

III.3.4. Conclusion

La valeur diagnostique des symptômes et de l’examen clinique n’est pas suffisamment élevée pour permettre un diagnostic fiable du mécanisme de l’incontinence urinaire (d’effort, par impériosité ou mixte). Cependant, pour le groupe de travail cette valeur diagnostique est suffisante pour que le diagnostic du type d’incontinence urinaire reste un diagnostic d’interrogatoire. Les données de l’interrogatoire sont à compléter par l’examen clinique, en sachant que l’absence de fuites provoquées par l’effort ou la toux au cours de cet examen n’élimine pas le dia gnostic d’incontinence d’effort. Une pollakiurie de précaution n’est pas un signe d’instabilité vésicale.

III.3.5. Recommandation

Le diagnostic du type d’incontinence (d’effort, par impériosité ou mixte) est un diagnostic d’interrogatoire, qui ne préjuge pas du mécanisme physiopathologique de cette incontinence.

Il est proposé de rechercher :

• des pertes d’urine quand la patiente tousse, éternue, saute, porte ses courses, change de position ;

• des besoins impérieux (une pollakiurie de précaution ne doit pas être confondue avec une impériosité) ;

• l’association éventuelle des deux types de symptômes.

• pathologies modifiant la répartition des différents compartiments liquidiens de l’organisme : œdèmes par insuffisance veineuse ou insuffisance cardiaque, qui peuvent augmenter la diurèse à certaines périodes, en particulier pendant la nuit par redistribution nocturne des liquides ;

• atteinte neurologique (incontinence urinaire d’apparition récente, association à des troubles sensitifs à type de dysesthésies, à des troubles sexuels, à des troubles sphinctériens anaux avec perte de sensation du passage des urines et des selles (6).

Selon les données de trois enquêtes épidémiologiques, le diabète, la broncho-pneumopathie chronique obstructive, l’accident vasculaire cérébral (28), la constipation (12,37) et l’infection urinaire symptomatique (12) ont été significativement associés à l’incontinence urinaire (cf. tableau 3).

IV.2. Causes iatrogènes pouvant déclencher ou aggraver une incontinence urinaire

Selon les experts réunis par l’AHCPR en 1996 (6), les principaux médicaments déclenchant ou aggravant une incontinence urinaire sont :

• les diurétiques (polyurie, augmentation de la fréquence des mictions, impériosité) ;

• les anticholinergiques, par exemple antiparkinsoniens, antihistaminiques (rétention urinaire et incontinence par regorgement) ;

• les psychotropes dont :

- les antidépresseurs (effets anticholinergiques et sédatifs),

- les antipsychotiques (effets anticholinergiques et sédatifs, rigidité, diminution de la mobilité),

- les sédatifs, hypnotiques, médicaments dépresseurs du système nerveux central (effets anticholinergiques, sédatifs et myorelaxants, diminution de la mobilité, syndrome confusionnel) ;

• les analgésiques morphiniques (effets sédatifs, rétention urinaire, fécalome, syndrome confusionnel) ;

• les alpha-bloquants (diminution de la résistance de l'urètre) ;

• les alpha-sympathicomimétiques, en particulier certains médicaments vendus sans ordonnance comme les décongestionnants nasaux (rétention urinaire) ;

• les bêta-sympathicomimétiques (rétention urinaire) ;

• les inhibiteurs calciques (rétention urinaire).

L’enquête rétrospective du CDRMG (7) a retrouvé chez les femmes incontinentes une prise significativement plus importante d’un ou de plusieurs des médicaments cité ci-dessus.

IV.3. Erreurs hygiéno-diététiques

Selon les experts réunis par l’AHCPR en 1996 (6), d’autres substances peuvent également aggraver ou déclencher une incontinence urinaire :

• l’alcool (polyurie, pollakiurie, impériosité, sédation, syndrome confusionnel, immobilité) ;

• la caféine.

L’enquête rétrospective du CDRMG (7) a retrouvé chez les femmes incontinentes une prise significativement plus importante d’alcool ou de caféine.

Une étude cas-témoins (59) a montré une association entre consommation de caféine et instabilité du détrusor, non significative pour une consommation de 100-400 milligrammes par jour, significative (OR : 2,4, intervalle de confiance à 95 % : 1,1-6,5) pour une consommation de plus de 400 milligrames par jour. Dans cette étude la consommation de

café des femmes avec une instabilité du détrusor était significativement plus élevée que celle des femmes du groupe témoin. Les auteurs de cette étude n’ont pas vérifié si un changement de consommation pouvait avoir un impact sur l’incontinence urinaire.

Cependant, une enquête épidémiologique transversale (30) réalisée chez 12 529 sujets dont 6 139 femmes (déjà citée au paragraphe III.2.2 et détaillée tableau 3) n’a pas retrouvé de relation significative entre l’incontinence urinaire et la consommation de tabac, de thé, de sodas et d’alcool quand l’analyse était ajustée sur l’âge et le sexe.

IV.4. Réduction de la mobilité, difficultés d’accès aux toilettes

Selon l’AHCPR (6), les contraintes physiques pour arriver aux toilettes sont également des causes d’incontinence urinaire potentiellement réversibles.

Une seule étude a par ailleurs été identifiée. Wyman et al. (60) ont étudié l'importance de l'environnement dans la sévérité de l'incontinence urinaire chez 131 femmes sans troubles cognitifs vivant à domicile. Dans l'analyse multivariée seuls l'âge, la distance par rapport aux toilettes et la vitesse de la marche pour se rendre jusqu'aux toilettes étaient des prédicateurs significatifs, expliquant 17 % de la variance du nombre d'épisodes d’incontinence. Les limites de cette étude (nombre de sujets modeste, biais de sélection des patientes) ne permettent pas d’en tirer des conclusions définitives.

Le diagnostic d'incontinence urinaire due à des altérations cognitives, une atteinte de la mobilité, ne doit être porté qu'après identification et correction de toutes les causes réversibles (consensus du groupe de travail et du groupe de lecture).

Tableau 8. Identification et prise en charge des situations causant ou contribuant à une incontinence urinaire, et pouvant bénéficier d’un traitement spécifique d’après l’AHCPR, 1996 (6) , modifié et complété par le groupe de travail.

Situations Prise en charge

Atteinte du bas appareil urinaire

Infection urinaire symptomatique (cystite, urétrite) Antibiothérapie

Vaginite atrophique Œstrogènes

Fécalome Évacuation du fécalome, traitement de la constipation,

prévention par l’augmentation des apports liquidiens, des apports en fibres et de la mobilité

Effets secondaires des médicaments ou d’autres substances

Diurétiques

Anticholinergiques (antiparkinsoniens, anti-histaminiques)

Psychotropes (antidépresseurs, antipsychotiques, sédatifs, hypnotiques, médicaments dépresseurs du système nerveux central )

Analgésiques morphiniques Alpha-bloquants

Agonistes alpha-adrénergiques (décongestionnants nasaux)

Agonistes bêta-adrénergiques Inhibiteurs calciques

Alcool Caféine

Arrêter ou changer le traitement si possible.

Diminuer les dosages (horaires flexibles ou diurétiques à action rapide par exemple)

Polyurie

Maladie métabolique (diabète, hypercalcémie) Meilleur contrôle du diabète. Traitement de l'hypercalcémie selon la cause

Ingestion excessive de liquides Diminution des apports liquidiens diurétiques (par ex.

boissons contenant de la caféine)

Insuffisance veineuse avec œdème (nycturie) Bas de contention, élévation des jambes, régime hyposodé

Insuffisance cardiaque congestive (nycturie) Traitement approprié (diurétiques) Difficulté d’accès aux toilettes

Syndrome confusionnel Diagnostic et traitement de la cause Maladie chronique, ou autres qui interfèrent avec

mobilité

Proposer à la patiente d’aller aux toilettes

régulièrement, utilisation d’un bassin, aménagement de l’environnement (bassin, chaise percée à proximité) Cause psychique (dépression ou troubles cognitifs) Traitement approprié si possible sinon, mêmes

mesures que ci-dessus Autres causes

Vieillissement, syndrome d’apnée du sommeil Proposer à la patiente d’aller aux toilettes régulièrement

Atteinte neurologique Examen neurologique des membres inférieurs et du périnée et traitement si possible

IV.5. Conclusion

Les symptômes d'incontinence urinaire peuvent être déclenchés ou aggravés par des facteurs indépendants du fonctionnement de l'appareil urinaire. Le rôle aggravant de l’alcool et de la caféine n’est pas complètement prouvé.

Les facteurs réversibles, en particulier diététiques et médicamenteux, sont à rechercher systématiquement car ils peuvent être accessibles à une prise en charge même chez les personnes âgées. Certains signes cliniques peuvent orienter vers une pathologie organique.

Le diagnostic d'incontinence urinaire due à des altérations cognitives ou à une limitation de la mobilité ne doit être porté qu'après identification et correction de toutes le s causes réversibles.

IV.6. Recommandation

Il est recommandé de rechercher des symptômes ou signes associés orientant vers une pathologie organique susceptible de déclencher ou d’aggraver une incontinence urinaire et qui peut bénéficier d’un traitement spécifique :

• troubles mictionnels, par exemple pollakiurie, dysurie, hématurie (tumeur des voies