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Chapitre 2 : Administration des médicaments par la voie buccale

2. Anatomie et physiologie de la muqueuse buccale

2.1. La muqueuse buccale et ses fonctions

La cavité buccale débute à la jonction entre la peau et les lèvres (vermillon) (Figure 9). Le plafond de la bouche est formé du palais dur. La cavité buccale mène à l’oropharynx, qui comprend le palais mou, l’arrière de la langue et les amygdales. La surface interne des joues forme les côtés de la cavité buccale. La partie inférieure de la cavité buccale est le plancher de la bouche, sur lequel s’appuie la langue. Toute la cavité buccale est tapissée d’une muqueuse. Elle est mouillée par la salive produite en permanence par les glandes salivaires. La muqueuse buccale contient des récepteurs sensoriels qui réagissent à la température et au toucher ainsi que les récepteurs du goût qui se trouvent dans la muqueuse de langue (Cours Paris 5, 2014).

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Figure 9 : Structure de la cavité buccale (source (“Anatomie et physiologie de la cavité buccale,” 2014)

D’un point de vue physiologique, contrairement à la muqueuse gastro-intestinale, la muqueuse buccale n’est pas un site d’absorption mais plutôt une barrière de protection isolant la cavité buccale des tissus sous-jacents. Généralement, elle présente la fonction de protection contre les forces mécaniques mises en jeu lors de la préhension des aliments et de leur mastication, ainsi qu’envers les micro-organismes saprophytes présents dans la cavité buccale. Cette flore est principalement constituée par des microorganismes capables d’adhérer à la muqueuse dont certains streptococcus (type mitis, sanguinis, mutans ou salivarius). La fonction de protection est assurée par le système immunitaire local (organes lymphoïdes, lymphocytes et plasmocytes) et par les sécrétions salivaires, qui sont constituées d’immunoglobulines (IgA, IgG et IgM) et de facteurs bactériostatiques (lysozyme, lactoferrine). Bien que la muqueuse buccale soit protégée par son système immunitaire et par un turn-over salivaire important, celle-ci reste fragile. Toute agression, qu’elle soit biologique, physique ou chimique, pourra entraîner une modification de sa structure et donc de son intégrité.

Dans la cavité buccale, trois types de muqueuses peuvent être distinguées : la muqueuse bordante, la muqueuse masticatoire et la muqueuse spécialisée. La muqueuse s’adapte par des modifications régionales de structures : épithélium plus ou moins épais, kératinisé ou non, chorion plus ou moins dense, présence ou absence d’une sous muqueuse.

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 La muqueuse bordante représente la plus large partie de la muqueuse buccale. Elle revêt le versant muqueux des lèvres, des joues, du plancher, de la face ventrale de la langue ainsi que du palais mou. Sa texture est souple et lâche car l’épithélium n’est pas kératinisé. Son chorion très vascularisé est lié à une structure sous- muqueuse d’une texture lâche.

 La muqueuse masticatrice tapisse les gencives et le palais dur. Elle aide à la compression mécanique des aliments. Contrairement à la muqueuse bordante, elle est kératinisée en surface et sans interposition de sous-muqueuse.

 La muqueuse spécialisée se situe au dos de la langue et est kératinisée comme les muqueuses masticatrices. De nombreuses papilles interviennent dans la fonction gustative.

Généralement, la muqueuse buccale en tant que site d’absorption en pharmacie galénique correspond à la muqueuse bordante, plus précisément la muqueuse des joues ainsi que celle sous la langue. En théorie, elles sont différentes mais en pratique la distinction est impossible à faire. La muqueuse buccale est constituée d'un épithélium malpighien peu ou non kératinisé suivant sa localisation et d'un tissu conjonctif dénommé lamina propria ou chorion (Figure 10). Entre tissus épithélial et conjonctif, se situe la membrane basale, mesurant 1 à 2 µm d'épaisseur. Chez l’homme (Tableau 8), l’épithélium de la muqueuse buccale (jugale) a une épaisseur de 500-600 µm, qui est constituée de 40-50 couches de cellules (Gandhi et Robinson, 1994; Harris et Robinson, 1992).

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Tableau 8 : Muqueuses de différentes régions dans la cavité buccale humaine (Paderni et al., 2012)

Tissus Structure Epaisseur épithéliale (µm)

Buccal (jugal) Non kératinisée 500 - 600

Sublingual Non kératinisée 100 - 200

Gingival Kératinisée 200

Palatal Kératinisée 250

2.2. La sécrétion salivaire

A la surface de la muqueuse buccale, il y a un film salivaire légèrement visqueux. Les glandes salivaires accessoires sont les seules annexes de la muqueuse buccale. Il y a trois paires de glandes principales (parotides, sous-maxillaires, sublinguales), qui sont responsables de près de 95% de la sécrétion salivaire, et de nombreuses petites glandes. Grâce à la sécrétion salivaire permanente, l'humidification et l’hygiène de la cavité buccale sont assurées. La sécrétion salivaire est généralement contrôlée par le système nerveux, les deux systèmes sympathique et parasympathique interviennent. Les centres de la salivation reçoivent des informations qui entraînent soit une inhibition de la sécrétion (émotions violentes, stress…), soit une stimulation (goût, vision…). Trois facteurs principaux peuvent impacter la sécrétion salivaire : mécanique (mouvement de mastication), gustatif (avec l’acide le plus stimulant, le sucre le moins) et aussi olfactif (Humphrey et Williamson, 2001). Il peut y avoir aussi des facteurs psychique et pathologique.

Concernant ses caractéristiques physico-chimiques (Tableau 9), la salive est un liquide incolore et visqueux. Le volume excrété quotidiennement est de 0,5 à 2,0 L et sa valeur de pH peut osciller entre 5,3 et 7,8 (Humphrey et Williamson, 2001; Salamat-Miller et al., 2005). Elle contient 95-99% d’eau et des composants macromoléculaires (1-5%) responsables des propriétés viscoélastiques, qui forment le mucus (“Cours Médecine, Ostéopathie - Physiologie - - Partie 2,” 2010).

Tableau 9 : Environnements physiologiques de la cavité buccale humaine (Inoue et al., 2008)

Paramètres Valeur

Composants principaux Salive, mucus

pH de la salive 5,3 – 7,8

Volume de la salive (en permanence) 696 ± 312 µL Viscosité de la salive (mPa.s) (n = 40) 1,09 ± 0,11 Protéine dans la salive (mg/ml) (n = 40) 0,70 ± 0,30 Amylase dans la salive (IU/ml) (n = 40) 325 ± 199

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Le mucus est un gel très hydraté, mais fortement adhésif, qui a pour rôle principal la protection de la muqueuse buccale. Les principaux composants du mucus sont des complexes de protéines et de glucides dont l’épaisseur varie de 40 à 300 µm (Forte et Schultz, 1989). Il s’agit de glycoprotéines de poids moléculaire variable, connues sous le nom de mucine. Les molécules, composées de monomères de glycoprotéines hautement glycosylées, sont capables de s’agréger entre elles pour former un réseau tridimensionnel (Norris et al., 1998) (Figure 11). Cette agrégation est responsable du caractère visqueux et filant de la salive. Au pH physiologique de l’environnement buccal, le mucus possède une charge négative grâce à l’acide sialique (3,8-4%) et aux résidus de sulfate (3,5-3,7%) (Slomiany et al., 1996). Une connaissance des propriétés physicochimiques du mucus apporte des éléments essentiels pour développer une forme mucoadhésive pour la voie buccale. La théorie de la mucoadhésion est détaillée dans le paragraphe 3.3.2. de ce chapitre.

Figure 11 : Structure générale de la mucine (Khutoryanskiy, 2011)

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