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2. CARACTERISATION DES MORTIERS CEReM

2.2. Etude de la cinétique d’hydratation

2.2.2. Protocoles expérimentaux

2.2.2.2. Analyse thermogravimétrique (ATG)

· Principe

L’analyse thermogravimétrique consiste à mesurer la perte en masse induite par la décomposition

thermique des différentes phases minérales composant un matériau. En chauffant une phase minérale, celle-ci se décompose en une phase solide et une phase gazeuse. Connaissant la

stœchiométrie de cette réaction, la perte de masse induite par le départ de la phase gazeuse permet de calculer la masse de la phase initiale. L’énergie nécessaire à la décomposition d’un minéral lui

étant propre, il est ainsi possible d’associer une plage de température à un type de décomposition et ainsi de déterminer la phase minérale qui en est à l’origine. Le chauffage progressif d’un matériau

inconnu associé au suivi de sa perte de masse permet de quantifier la masse des différentes phases minérales qui le composent.

Dans une plage de température comprise entre 30°C et 1100°C, les principales décompositions ayant lieu pour les matériaux cimentaires sont les suivantes (Alarcon-Ruiza, et al., 2005) :

- évaporation de l’eau libre et de l’eau physique adsorbée à la surface des hydrates (30-105°C) - décomposition du gypse hydraté et de l’ettringite hydraté (110-170°C)

- évaporation de l’eau chimiquement combinée avec les C-S-H (180-300°C) - déshydratation de la Portlandite (450-550°C) :

ܥܽሺܱܪሻଶ՜ ܥܱܽ ൅ ሺܪଶܱሻ௚௔௭

- décarbonatation de la calcite (600-900°C) :

ܥܽܥܱ՜ ܥܱܽ ൅ ሺܥܱ௚௔௭

La majorité de ces décompositions est due à la l’évaporation de l’eau. Dans le cas d’un matériau s’hydratant en conditions endogènes (avec absence de carbonatation), la perte de masse associée à

ces évaporations est donc dépendante de la quantité d’hydrates formée et traduit l’état de maturité de la matrice cimentaire. Si l’on suppose qu’il y a proportionnalité entre cette perte en masse et la

masse d’hydrates formée, le degré d’hydratation à instant ݐpeut alors s’écrire comme :

ߦሺݐሻ ൌ௠೐೗ሺஶሻ௠೐೗ሺ௧ሻ (0-8)

avec ݉௘௟ሺݐሻ la masse d’eau chimiquement liée au ciment à l’instantݐ, ݉௘௟ሺλሻ la quantité d’eau

chimiquement liée lorsque l’hydratation du matériau est complète.

En se basant sur ce concept, de nombreux auteurs déterminent l’évolution du degré d’hydratation

par ATG (Singh, et al., 1995) (Lam, et al., 2000) (Mounanga, 2003) (Pane, et al., 2005). Des

échantillons d’un matériau conservés en conditions endogènes sont donc testés à différentes

échéances afin de déterminer l’évolution de la quantité d’eau chimiquement liée aux hydrates. Il est à noter que cet essai est donc un essai destructif et ponctuel.

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Figure 24 Courbe thermogravimétrique (TG) et sa dérivée (DTG) représentative d’un ciment hydraté (Loukili, et al., 1999)

Le principal biais de cette méthode est la proximité qui existe entre la température d’évaporation de l’eau libre et celle de l’eau chimiquement liée au gel C-S-H. Il est donc difficile de dissocier la perte en masse de chacune de ces évaporations. Cet effet de chevauchement est accentué par la méthode

thermogravimétrique généralement employée. En effet dans la majorité des études, l’augmentation en température du four se fait de manière linéaire jusqu’à atteindre la température final de l’essai.

Les réactions de décomposition ne peuvent donc se réaliser de manière complète à la température de décomposition qui leur est associée. La perte en masse associée à la phase décomposée se poursuit donc sur une plage de température plus ou moins importante suivant la quantité de la phase initiale et la vitesse de montée en température du four.

Comme le montre la Figure 24, il est difficile de dissocier la perte de masse induite par les deux types

d’évaporation. Afin de déterminer la masse d’eau chimiquement liée, les utilisateurs de cette

méthode fixent donc arbitrairement une température frontière. Cette température varie suivant les auteurs, par exemple : 110°C (Lam, et al., 2000), 140°C (Pane, et al., 2005), 145°C (Mounanga, 2003).

Dans le cas d’un matériau conservé en conditions endogènes, Mounanga (Mounanga, 2003) identifie

la masse d’eau chimiquement liée au ciment comme suit :

݉௘௟ൌ ȁο݉ଵସହ՜ଵଵ଴଴ι஼ȁ െ ȁο݉଺଴଴՜଼଴଴ι஼ȁ െ ݉ή ܲܽܨ(0-9)

avec ο݉ଵସହ՜ଵଵ଴଴ι஼la perte en masse de l’échantillon entre 145 et 1100°C (g) ;ο݉଺଴଴՜଼଴଴ι஼ la perte en masse entre 600 et 800°C (g) (masse de calcite indépendant de l’état de maturité du matériau) ;

݉ la masse de ciment contenue dans l’échantillon (g); ܲܽܨ la perte au feu du ciment (%).

La détermination de l’eau chimiquement liée au terme des réactions d’hydratation ݉௘௟ሺλሻ est déterminée de manière théorique à partir de la composition chimique du ciment, des formules de Bogue et de la masse de ciment théorique contenue dans l’échantillon testé. Au moyen de ce calcul,

il est possible d’évaluer le degré d’hydratation du matériau défini par l’équation (1-8).

· Choix d’un marqueur de l’hydratation pour nos mortiers

Dans le cas de nos compositions, la quantité d’eau libre présente dans les échantillons testés est très

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l’eau liée induit de fait un risque d’erreur important sur la quantité d’eau effectivement liée aux

hydrates.

Nous avons donc opté pour une autre approche, à savoir le suivi du degré d’avancement en

mesurant l’évolution de la quantité de Portlandite. La température de décomposition de cet hydrate

est en effet suffisamment distincte de la température de décomposition des autres phases pour permettre une mesure précise. Ce protocole a été également adopté par Nicot (Nicot, 2008) pour

comparer l’hydratation à 28 jours de mortiers composés de différents types d’éther de cellulose. La Portlandite (CH) est un indicateur de l’hydratation intéressant car sa précipitation est associée au début de la prise des matériaux cimentaires. (Mounanga, et al., 2006) montrent notamment qu’il existe une bonne corrélation entre l’initiation de la précipitation des CH et le début de prise détecté par aiguille Vicat. L’objectif de nos travaux n’étant pas d’identifier les différents processus d’hydratation mais de caractériser le développement du squelette solide, cet indicateur semble donc

pertinent.

La décomposition de la Portlandite se produit aux alentours de 400°C. Afin d’assurer une mesure

précise de la masse de Ca(OH)2, nous identifions le début et la fin de la décomposition à partir des

points d’inflexion de la courbe de perte en masse (dérivée seconde - Figure 25). La dérive de

l’appareil, bien que faible, est prise en compte dans le calcul de la masse de CH.

݉஼௔ሺைுሻమȁ௠̱రబబι಴ȁିห௠೏ǡ̱రబబι಴

±೎೓ೌ೙೟೔೗೗೚೙ ή಴ೌሺೀಹሻమ

ಹమೀ (0-10)

Avec ݉஼௔ሺைுሻమ la masse de Portlandite rapportée à la masse de l’échantillon (% massique) ;ȁ̱݉ସ଴଴ι஼ȁ la perte en masse correspondant aux températures de décomposition de la Portlandite (calcul à partir des points d’inflexion) (g) ; ห݉ௗǡ̱ସ଴଴ι஼หla dérive de l’appareil pour la plage

de température considérée (g); ܯ௑೔ la masse molaire de la molécule ܺ intervenant dans la réaction de décomposition.

Figure 25 Détermination de la quantité de Portlandite et de calcite dans un échantillon de mortier testé par ATG

· Choix d’un marqueur de la teneur en ciment des échantillons

Afin d’identifier l’avancement de l’hydratation, la quantité de Portlandite mesurée par ATG doit être rapportée à la quantité de ciment présente dans l’échantillon. Cette masse de ciment peut être

déterminée à partir de la proportion des différents constituants du mortier (E/C et S/C) : -35 -30 -25 -20 -15 -10 -5 0 P er te e n m as se , T G ( m g ) 0 200 400 600 800 1000 -4 -2 0 2 Température (°C) ¶TG / ¶t 2 (m g /m in 2 ) Essai Dérive appareil CaCO 3 CH

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݉ ±೎೓ೌ೙೟೔೗೗೚೙

ሺଵାா ஼Τ ାௌȀ஼ሻ(0-11)

L’inconvénient de ce calcul est son manque de précision car l’échantillon testé ne contient pas

toujours exactement les proportions théroriques (S/C par exemple).

Nous avons donc choisi de déterminer la masse de ciment à partir d’un « marqueur » du ciment : le

calcaire présent dans l’échantillon. Les essais d’ATG étant menés sur des matériaux conservés en

conditions endogénes, leur carbonatation est limitée. Le sable étant siliceux, le ciment est la seule

source de calcaire (teneur massique de 3,2% d’après sa fiche technique). La quantité de CaCO3

mesurée est donc proportionnelle à la quantité de ciment présente dans l’échantillon. La masse de

CaCO3 est mesurée suivant la même procédure que la masse de CH (Figure 25).

݉஼௔஼ைȁ௠̱ళబబι಴ȁିห௠೏ǡ̱ళబబι಴

±೎೓ೌ೙೟೔೗೗೚೙ ή಴ೌ಴ೀయ

಴ೀమ (0-12)

Avec ݉஼௔஼ை la masse de calcite rapportée à la masse de l’échantillon (% massique) ; ȁ̱݉଻଴଴ι஼ȁ la perte en masse aux températures de décomposition de la calcite (g) ;ห݉ௗǡ̱଻଴଴ι஼หla dérive de

l’appareil (g); ܯ௑ la masse molaire de la molécule ܺ௜.

Le rapport de la masse de Portlandite créée sur la masse de calcite représente l’état d’hydratation du matériau. Le degré d’avancement de l’hydratation à l’instant ݐ est donc calculé comme suit:

ߙሺݐሻ ൌ ೘಴ಹ ೘಴ೌ಴ೀయሺ௧ሻ቉ ೘಴ಹ ೘಴ೌ಴ೀయሺஶሻ቉ (0-13) Avec ௠಴ಹ

಴ೌ಴ೀయሺλሻ le rapport masse de Portlandite sur masse de calcite à une échéance pour laquelle

l’hydratation du matériau est considérée comme terminée (180 jours).

· Protocole expérimental

Après gâchage, le mortier est coulé dans des moules 2×4×16cm puis protégé de la dessiccation par plusieurs couches de polyane. Le décoffrage est réalisé un jour après. Les éprouvettes sont

immédiatement enveloppées dans plusieurs couches de polyane. Une couche d’aluminium adhésif supplémentaire prévient tout risque d’échange hydrique avec l’extérieur. Les éprouvettes sont

conservées dans une salle à 23°C.

A chaque échéance de mesure, une tranche de 2x4cm de section et de 1cm d’épaisseur est prélevée

par sciage. L’ensemble du fragment ainsi obtenu est broyé. Cette poudre est ensuite mélangée afin de limiter les artéfacts dus au prélèvement tel qu’une ségrégation locale du matériau. Une masse de 150±5mg de cette poudre est placée dans le creuset en alumine qui est alors introduit dans le four de

l’appareil d’ATG. Au cours de l’essai, la masse est mesurée en continu lors d’un chauffage entre 25 et

1000°C à la vitesse de 10°C/min. L’appareil d’ATG utilisé est un Setsys Evolution de Setaram (Figure 26).

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Figure 26 Schéma de l’appareil d’analyse thermogravimétrique employé (tiré de (Setaram))

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