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CHAPITRE 4 : MARGES DE MANŒUVRE TECHNIQUE POUR RÉDUIRE LES

1. Analyse de sensibilité du modèle

Une analyse de sensibilité du modèle à ses principaux paramètres a été réalisée, selon la technique « un à la fois », c'est-à-dire sans aborder les interactions entre paramètres. Certains paramètres sont repérables à priori comme agissant de manière conjointe : ceux qui apparaissent dans des produits dans les équations du modèle. Dans ce cas de figure, a été traité uniquement le paramètre ayant le poids le plus important, analytiquement, dans l’équation. Par exemple, la sensibilité du modèle à l’efficience de conversion du rayonnement intercepté a été testée, mais pas l’influence du coefficient d’extinction. Les variations des résultats de simulation en fonction de variations du coefficient de conversion seront à interpréter comme la sensibilité du modèle à l’efficience de conversion du rayonnement incident (et non intercepté). La variable sur laquelle portait l’analyse de sensibilité était la taille en jours de la fenêtre favorable au semis, telle que définie dans les chapitres précédents. L’analyse a été appliquée pour deux cas de figure agronomiques : d’une part la culture de riz irrigué, qui a été repérée au chapitre 2 comme la culture la plus sensible aux contraintes climatiques en conditions irriguées, et d’autre part le soja en condition pluviales, qui a été repérée au chapitre 3 comme la culture la plus sensible aux contraintes climatiques en conditions pluviales.

Dans le cas du riz irrigué, un seul climat a été considéré, celui de la station de Phu Ho, repéré comme le plus contraignant car le plus froid. L’altitude de 400m a été choisie, comme représentative de la plupart des rizières irrigables au printemps.

Dans le cas du soja en conditions hydriques limitantes, l’analyse a été répétée pour les trois stations, car les fenêtres de semis favorables y étaient toutes très étroites de telle sorte qu’il était difficile d’en distinguer une nettement plus contraignantes que les autres. Les analyses

ont été réalisées pour une altitude arbitrairement fixée à 0m, de manière à placer l’analyse dans le contexte où la température est la moins contraignante, pour la station choisie, et ainsi mieux cerner le rôle spécifique de l’interaction entre la culture modélisée et la distribution des précipitations. Pour chaque paramètre retenu pour l’analyse, on a appliqué des variations de + 20% à -20% par rapport aux valeurs obtenues par calage (pour les paramètres de calage) ou correspondant aux valeurs retenues pour les expérimentations virtuelles des chapitres 2 et 3 pour ceux des paramètres décrivant les situations culturales testées.

Les paramètres retenus pour l’analyse de sensibilité dans le cas du riz irrigué sont la durée totale du cycle de la culture en temps thermique (notée CT dans ce qui suit, les variations testées étant répercutées sur les constantes thermiques de chaque stade phénologique en proportion de la part de chacune sur la durée totale). La température base de calcul du temps thermique Tmin, la température seuil de mortalité de la culture aux basses températures (Tcold), l’efficience de conversion maximale (ebmax), la croissance potentielle du LAI par unité de temps thermique (dLAI), et deux paramètres clefs de la répartition vers les grains de la biomasse accumulée, Cgrain et IRmax. Dans le cas du soja en conditions hydriques limitantes, s’ajoutent à ces paramètres la densité apparente du sol (da) déterminant la réserve utile, le paramètre de sensibilité de la culture à la sécheresse du sol après levée, Pfactor, le paramètre de sensibilité de la culture à la sécheresse du sol pendant la levée, bger, le seuil de remplissage de la réserve hydrique du sol à partir duquel l’évaporation du sol est réduite par rapport à la demande évaporative (SeuilEvap) et le paramètre de vitesse de croissance racinaire deltaRacMax.

Dans le cas du riz irrigué, la taille simulée de la fenêtre de semis favorables est sensible uniquement aux paramètres de durée de cycle, de température base de calcul du temps thermique et de température seuil de mortalité (Figure 1). Ce résultat était attendu dans la mesure où l’on a établi au chapitre 2 que la taille de la fenêtre de semis favorable n’était pas influencée par la probabilité P3 d’obtenir un rendement inférieur à 70% du rendement maximal. Dans le détail, on note qu’un abaissement de 10 ou 20% de Tcold ne conduit pas à une augmentation de la taille de la fenêtre favorable au semis, car les périodes froides du printemps au Vietnam comportent en général des températures nettement inférieures (de plus de 20%) à la valeur de Tcold de la variété testée dans cette thèse. On retrouve ce résultat pour le soja (Figure 2) dont la température base est inférieure de 1°C à celle du riz (cf table 1, chapitre 2). On peut en déduire que ce résultat s’applique également au maïs et au riz aérobie dont les valeurs de Tcold sont identiques à celles du soja et du riz irrigué, respectivement.

Un abaissement de la température base de calcul du temps thermique de 20% conduit à une augmentation de 20 jours de la fenêtre de semis soit 50% dans le cas étudié. Une

augmentation de même ampleur est obtenue avec une diminution de 10% de la constante thermique totale du cycle, mais une diminution supplémentaire de cette constante ne produit plus d’effet sur la taille de la fenêtre, probablement à cause d’un nombre important de journées où la température est inférieure à la température base. On peut en déduire que pour aller au-delà d’une augmentation de 50% de la durée de la taille de la fenêtre par sélection variétale, il sera nécessaire de combiner réduction de température base et réduction de la constante thermique totale.

Riz irrigué à Phu Ho 400m

0 10 20 30 40 50 60 70

dLAI

ebmax

Tcold

IRmax

CT

Cgrain

Tmin

0 + 10% + 20% - 20% - 10%

Figure 1. Sensibilité de la fenêtre de semis favorable du riz irrigué à Phu Ho 400m d’altitude à des variations de paramètres du modèle de -20% à +20% autour de leurs valeurs nominales.

Dans le cas de la culture de soja non irrigué (Figure 2), on retrouve une influence importante des paramètres de la durée du cycle, ce qui était également attendu dans la mesure où plus la culture est courte plus elle peut être placée vers la partie tardive du printemps, plus pluvieuse, sans risquer d’obtenir une maturité tardive compromettant le cycle d’été. Les rôles relatifs de la température base et de la constante thermique totale varient selon les climats étudiés, mais pour les trois stations l’impact sur la taille de la fenêtre de semis d’une réduction de leurs valeur est plus important que pour le riz irrigué. Ceci provient du fait que le

risque hydrique détermine des fenêtres de semis plus étroites qu’en conditions irriguées, et qu’à l’extrémité précoce de cette fenêtre les températures sont plus élevées qu’à l’extrémité précoce de la fenêtre de semis des cultures irriguées. Les paramètres d’arrêt de la levée en condition de sécheresse de la région superficielle du sol sont sans influence sur la simulation de la fenêtre de dates de semis favorables. Ceci indique que d’éventuelles imprécisions de ces paramètres sont sans conséquences sur la robustesse du modèle et de l’analyse qu’il permet de conduire. Mais cela n’indique pas pour autant que les conditions de levée ne jouent pas un rôle important dans la taille des fenêtres de semis. En effet, les seuils de teneurs en eau autorisant la levée n’interviennent pas dans le calcul quand le sol superficiel est au point de flétrissement permanent, ce qui est souvent le cas en début de saison et rend effectivement impossible la levée dans la réalité comme dans le modèle. La levée est donc avant tout déterminée, dans les simulations comme dans la réalité, par la date –souvent très tardive- à laquelle interviennent les premières pluies humectant l’horizon superficiel du sol. Le modèle est relativement sensible à la réserve utile du sol (sensibilité aux variations de Da). Dans le contexte de Phu Ho et Van Chan, où il est également sensible aux variations du paramètre Ebmax, ceci est du au fait que sous ces climats, pour une variation donnée de Ebmax, le rendement maximal (obtenu l’année la plus favorable du point de vue hydrique) varie davantage que le rendement obtenu les années où le stress hydrique est important. En conséquence, la probabilité d’avoir un rendement inférieur à 70 % du rendement maximal diminue lorsque ebmax diminue. Ceci se traduit par une augmentation de la taille des fenêtres de semis favorables dans les climats de Phu Ho et Van Chan, mais pas à Mu Cang Chai où seule la durée du cycle influence la taille de la fenêtre favorable, pour les gammes testées de variations des paramètres.

Figure 2. Sensibilité de la taille en jours fenêtre de semis favorable du soja à 0m d’altitude à des variations de paramètres du modèle de -20% à +20% autour de leurs valeurs nominales.

Cette analyse de sensibilité nous renseigne ainsi à la fois sur la robustesse du modèle et sur les techniques envisageables pour augmenter les possibilités de réussir les cultures de printemps. La robustesse du modèle pour la question traitée dans cette thèse dépend avant tout de la qualité de la simulation des durées de cycle. Dans la mesure où il s’agit justement de l’aspect pour lequel le modèle a été calé avec le plus de précision, comme on l’a vu au chapitre 2, on peut accorder une confiance élevée aux simulations en conditions non limitantes en eau. Pour les situations où l’eau est limitante, le modèle est évidemment d’autant plus sensible aux paramètres du bilan hydrique que l’on étudie des situations où la pluviométrie est effectivement contraignante. Mais la sensibilité à Ebmax suggère en fait que l’analyse de l’impact de la contrainte hydrique est très dépendante du seuil que l’on utilise pour qualifier l’écart entre le rendement obtenu sous contrainte hydrique et le rendement maximal obtenu l’année où cette contrainte est la plus faible. Les fenêtres de semis favorables définies dans cette thèse sont, tout particulièrement pour ce cas de figure,

Soja à Phu Ho 0m d'altitude

-20 -10 0 10 20 30 40 dLAI ebmax CT Cgrain DeltaRacmax Pfactor bGer Da SeuilEvap Tcold Tmin 0 + 10% + 20% - 20% - 10%

Soja à Van Chan 0m d'altitude

-20 -10 0 10 20 30 40 dLAI ebmax CT Cgrain DeltaRacmax Pfactor bGer Da SeuilEvap Tcold Tmin

Soja à Mu Cang Chai 0m d'altitude

-20 -10 0 10 20 30 40 dLAI ebmax CT Cgrain DeltaRacmax Pfactor bGer Da SeuilEvap Tcold Tmin

surtout utiles pour comparer les localités et les cultures entre elles, mais ne suffisent en aucun cas à déterminer s’il est pertinent ou pas de tenter une culture en conditions pluviales en un lieu donné et à une date donnée.

Concernant les techniques envisageables, à part celles agissant directement sur la température (serres) ou sur l’offre en eau (irrigation), on ne peut guère identifier à ce stade de l’étude que la mise au point de variétés plus précoces et ou plus tolérantes aux basses températures). Les variations testées du paramètre de la fonction d’évaporation ont été sans effet sur la durée des fenêtres de semis favorables, ce qui suggère qu’une technique de réduction de l’évaporation telle que l’utilisation de mulchs pailleux ou plastique a peu de chance de réduire significativement la contrainte pluviométrique s’exerçant sur les cultures de printemps. Cependant, les variations du paramètre testé ne réduisent qu’assez peu l’évaporation elle-même dans la mesure où elles ne modifient pas l’évaporation pendant les journées qui suivent immédiatement les pluies, où le sol évapore à l’évaporation potentielle. Ces journées sont d’autant plus nombreuses qu’on a affaire à des évaporations potentielles basses au printemps et à des pluies de faible hauteur mais relativement fréquentes. L’analyse de sensibilité ne permet donc pas d’écarter totalement la possibilité que les techniques à base de mulch pailleux ou plastique augmentent de façon utile la taille de la fenêtre de semis. Une modélisation minimale de l’effet de ces mulchs sur l’évaporation paraît donc justifiée pour explorer cette possibilité.

2. Evaluation des principales techniques envisageables

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