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Analyse multivariée des déterminants de la répartition spatiale des jardins collectifs

Chapitre 2 : Les déterminants de la répartition spatiale des jardins collectifs du

6. Analyse multivariée des déterminants de la répartition spatiale des jardins collectifs

Dans les paragraphes précédents nous avons analysé l’un après l’autre les différents facteurs pouvant avoir une influence sur la répartition spatiale des jardins collectifs dans le Grand-Lyon. Les cartes élaborées pour cela montrent des correspondances claires entre différents facteurs, comme le revenu des ménages, l’importance des industries et le nombre des jardins. Les cartes montrent également qu’il y a également des relations fortes entre les facteurs que nous avons considérés comme potentiellement explicatifs. Par exemple les communes les moins riches sont également celles où les zones industrielles sont les plus nombreuses. Elles ne sont pas non plus situées au hasard dans l’agglomération mais se concentre à l’est. Ces interrelations appellent à une analyse statistique multivariée qui permettra de comprendre les correspondances entre différentes variables certaines caractérisant les jardins, d’autres les caractéristiques sociales, économiques et spatiales des communes du Grand-Lyon. Nous avons retenu la méthode de l’analyse des correspondances multiples (ACM) particulièrement adaptée à des variables qualitatives (chapitre méthodologie, paragraphe : 3.2 Analyse des correspondances multiples). Les variables utilisées dans cette analyse multivariée sont présentées de façon synthétique dans le tableau 13. Elles permettent à la fois de caractériser le nombre, la superficie et le type de jardin (familial ou partagé) de chaque commune, et leurs caractéristiques économiques, sociales et spatiales.

Variable Modalités

Revenu moyen des ménages

Revenu fiscal de 11 821 euros à 19 924 euros Plus de 19 924 à 22 907 euros

Plus de 22 907 à 6173 euros

Plus de 26173 euros à 36 593 euros

Nombre de Jardins partagés

Jardins Partagés : 0 Jardins partagés : 1 Jardins partagés : 2 ou 3 Jardins partagés : 4 et plus

Nombre de jardins familiaux

Jardins familiaux : 0 Jardins familiaux : 1 Jardins familiaux : 2 et 3 Jardins familiaux : 4 et plus

Superficie en jardins collectifs dans la commune

(en m²)

Superficie en jardins dans la commune : 0 Superficie en jardins dans la commune : <= 11 500 m²

Superficie jardins dans la commune : > 11 500 m² (max 151 000 m²)

Part de jardiniers dans la population communale (%)

% jardiniers dans la population : 0

% jardiniers dans la population: <= 0,00 45 (0,45%)

% jardiniers dans la population: > 0,45% ; max : 5,9%)

Part urbanisée de la surface de la commune (%)

% surface commune urbanisée : 10,6 à 35% % surface commune urbanisée : 35,1 à 48,5% % surface commune urbanisée : 48,6 à 74,2% % surface commune urbanisée : 74,3% à 100%

Part de la surface industrialisée dans la

commune (%)

% surface commune avec industries : 0 à 0,6% % surface commune avec industries : 0,61% à 1,3%

% surface commune avec industries : 1,31% à 3% % surface commune avec industries : 3,1% à 9,7%

Situation géographique de la commune

Ville de Lyon

Est et sud lyonnais : communes touchant la ville Est et sud lyonnais : communes périphériques Ouest et nord lyonnais : ensemble des communes

L'ACM s'applique à tout tableau dans lequel un ensemble d'individus est décrit par des variables qualitatives. L’ACM s’interprète simplement sous forme graphique à partir d’un nuage dont les points représentent les individus (ici les communes) du tableau analysé et d’un nuage dont les points représentent les colonnes, c’est-à-dire les modalités des variables. L’ACM consiste à projeter chacun des deux nuages sur une suite d’axes orthogonaux d’inertie maximum, c’est-à-dire prenant en compte au mieux la variabilité des lignes et des colonnes du tableau. En combinant deux de ces axes, on obtient une représentation plane, ou plan factoriel. Compte-tenu de la part importante d’inertie portée par les deux premiers axes de l’ACM nous nous sommes limités à ceux-ci. Sur ce plan factoriel, les individus, qui ont beaucoup de modalités de variables en commun sont proches. Ceux qui en revanche ont peu de modalités en commun sont éloignés. Dans une ACM, on peut superposer la représentation des individus et celle des modalités des variables. On peut ainsi considérer que les individus caractérisés par une ou plusieurs modalités de variables sont proches de celles-ci dans la représentation graphique.

La figure 46 présente le plan factoriel des axes 1 et 2 de l’ACM. L’axe 1 porte 75,6 % de l’inertie ajustée (et 23,7% de l’inertie), le second axe 7% de l’inertie ajustée (et 10,4% de l’inertie). La valeur explicative de ces deux axes est donc très satisfaisante. L’examen de cette figure permet de caractériser de la façon suivante les deux axes :

 L’axe 1 oppose, sur la partie négative de l’axe, communes associant revenus forts, taux d’urbanisation les plus faibles et peu d’industries à la partie positive de l’axe où on trouve les communes avec revenus faibles, urbanisation importante et beaucoup d’industries. Les communes de l’ouest et du nord lyonnais sont dans les zones de revenu forts, de faible urbanisation du côté négatif de l’axe. C’est très logiquement sur la partie négative de l’axe 1 que sont projetées les modalités des variables correspondants à une faible importance des jardins collectifs : JP1, JF1, SURJ1, %JAR1.

 L’axe 2 sépare, sur sa partie positive, les communes à revenu faible (en positif), du centre de Lyon en négatif (Modalités Sit1). C’est surtout un axe géographique et spatial avec les arrondissements de la ville de Lyon en négatif et l’est (SIT2) et le sud lyonnais (SIT3) en positif. C’est ainsi que l’on trouve, en positif axe 1 et en négatif sur l’axe axe 2 les arrondissements de la ville de Lyon qui sont associées à des surfaces moyennes en jardin (SURJ2) et à une part élevée de jardins partagés (JP4). Sur la partie haute et droite du graphique (axes 1 et 2 positifs) on observe les communes aux

revenus les plus faibles, avec beaucoup d’industries et également beaucoup de jardins familiaux (JF4), un taux élevé de jardiniers dans la population (%JAR3) et les plus grosses surfaces en jardins collectifs (SUR3). Ce sont les communes de l’est et du sud lyonnais (SIT2 et SIT3).

Rev-1 Rev-2 Rev-3 Rev-4 JP-1 JP-2 JP-3 JP-4 JF-1 JF-2 JF-3 JF-4 SurJ-1 SurJ-2 SurJ-3 %Jar-1 %Jar-2 %Jar-3 Urb-1 Urb-2 Urb-3 Urb-4 Ind-1 Ind-2 Ind-3 Ind-4 Sit-1 Sit-2 Sit-3 Sit-4 -2 -1,5 -1 -0,5 0 0,5 1 1,5 -2,5 -2 -1,5 -1 -0,5 0 0,5 1 1,5 2 2,5 3 F2 (7 ,0 7 %) F1 (75,56 %) Variables

Figure 46 : Graphique symétrique des variables (Asaad, Fleury, 2016)

L’analyse de la figure 47 permet de poser le diagnostic d’une relation forte entre d’une part revenus fiscal des ménages, importance des industries, situation géographique dans la métropole, taux d’urbanisation et d’autre part surface en jardins collectifs, jardins partagés, jardins familiaux et part des jardiniers collectifs dans la population.

La figure 47, qui présente sur les mêmes axes 1 et 2 les observations, nous permet ainsi d’identifier trois grands groupes de communes. Celles du nord lyonnais où les jardins collectifs sont absents ou rares ; celles de l’est et du sud lyonnais adjacentes à la ville de Lyon, les jardins y sont nombreux souvent de grande taille et les jardins familiaux dominent ; enfin les arrondissements de la ville de Lyon où se sont les jardins partagés qui sont les plus nombreux mais leur surface totale reste modeste. La structure économique, sociale et spatiale de la ville explique de fait la répartition spatiale des jardins et des jardiniers. Plutôt que de rechercher la ou les variables influentes sur la répartition des jardins collectifs, celle-ci est de fait à envisager de façon globale par rapport à l’organisation de l’espace, des activités et de la

société dans l’agglomération. Le besoin de cette mise en perspective globale des jardins collectifs se trouve confirmée par l’analyse des relations entre zonages des PLU et répartition des jardins.

Figure 47 : Graphique symétrique des observations (Asaad, Fleury, 2016)

Pour permettre la lisibilité du schéma, toutes les communes ne sont pas nommées (50 sur 67 communes).

Conclusion

En nous appuyant sur les analyses cartographiques et statistiques de ce chapitre il ressort clairement que la répartition spatiale des jardins collectifs dans l’agglomération de Lyon n’est ni aléatoire ni déterminée pas un seul facteur. Elle ne se comprend que si on remet en perspective cette répartition de façon globale à la fois avec des facteurs démographiques, économiques, sociaux, spatiaux et géographiques qui eux même sont en interactions fortes. Plus encore diversité spatiale de la répartition des jardins et histoire de ceux-ci sont liées. Si les jardins familiaux, autrefois jardins ouvriers sont préférentiellement situés dans les communes les plus populaires et industrieuses de l’est lyonnais ils ont une histoire plus longue et bien différente de celle plus récente des jardins partagés qui est moins située socialement et spatialement. Les jardins collectifs sont tout à la fois un reflet et une résultante de la vie de la cité. Activités économiques, démographie des communes, répartition géographique des habitants selon leur catégorie sociale, organisation de l’agglomération lyonnaise selon un modèle centre/périphérie, contraintes naturelles (risque d’inondations, accidents du relief), évolution des conceptions de l’aménagement de la ville (Brunel, 2007) entrent en résonance. C’est dans cette dynamique complexe, mais non aléatoire, qu’il faut envisager la question des jardins collectifs.

Chapitre 3 : Gestion, gouvernance et fonctions des