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3.2 Caract´ erisation instrumentale de l’aspect visuel

4.1.4 Analyse du positionnement multidimensionnel (MDS)

Jusque l`a, nous avons ´etudi´e le rang moyen des ´echantillons, nous avons donc rai- sonn´e dans un espace unidimensionnel. Nous avons compl´et´e l’´etude avec une analyse du positionnement multidimensionnel ou multidimensional scaling analysis (MDS) afin de po- sitionner les ´echantillons dans un espace de perception multidimensionnel de la rugosit´e de surface. Les similarit´es entre les ´echantillons sont d´etermin´ees en prenant en compte l’histogramme de classement donn´e par chaque sujet constituant le panel sensoriel. Nous sommes conscients que nous ne disposons que d’un nombre peu ´elev´e d’´echantillons par groupe de mat´eriaux.

4.1.4.1 Principe

L’id´ee fondamentale du positionnement multidimensionnel est de repr´esenter chaque objet dans un espace euclidien, habituellement bi- ou tridimensionnel, de telle sorte que deux objets semblables soient repr´esent´es par deux points proches l’un de l’autre, et un couple dissemblable, par des points ´eloign´es.

Les techniques de positionnement multidimensionnel trouvent leur origine dans les ´

tions entre objets pour effectuer des groupements, des classifications. D`es lors, c’est devenu une technique de repr´esentation g´eom´etrique largement utilis´ee dans des domaines aussi divers que le marketing, la sociologie ´electorale ou plus r´ecemment l’analyse sensorielle [32]. En ce qui concernent les propri´et´es sensorielles tactiles, Yoshida (cit´e par [90]) a ´et´e le pionnier dans l’utilisation de la technique MDS afin d’´etablir l’espace de perception des textures de surface. D’autres auteurs comme Hollins [59], Picard [90], Ballesteros [7] ont aussi utilis´e la technique MDS pour ´etudier l’espace de perception tactile de la texture de diff´erentes mati`eres. Ces travaux exposent une vari´et´e de moyens pour obtenir la matrice de dissimilarit´e et pour interpr´eter les axes.

4.1.4.2 D´emarche

Nous voulons dans cette ´etude r´epondre `a la question : « `a l’aide de quels param`etres physiques mesurables peut-on expliquer la perception de la rugosit´e tactile des ´echantillons de MDF ponc´es, de bois ponc´es et des divers mat´eriaux d´eriv´es du bois ? ». Contrairement aux travaux cit´es pr´ec´edemment, nous allons uniquement nous int´eresser `a la composante « sensation de rugosit´e » de la perception tactile de la surface du bois et ses d´eriv´es. Pour ce faire,

– Nous avons ´etabli un tableau repr´esentant l’histogramme de classement de la rugo- sit´e tactile o`u figurent en lignes les ´echantillons et en colonnes le pourcentage de sujets classant chacun des produits au rang 1, 2 jusqu’au rang final (6 pour les MDF et bois ponc´es, 8 pour les mat´eriaux divers).

– A partir de ce tableau, nous avons produit un fichier de matrice de similarit´es dans laquelle plus les produits sont semblables, plus l’indice de similarit´e est grand. – La matrice a ensuite ´et´e analys´ee en utilisant l’analyse de proximit´e de Statistica

6 (Statsoft) [107]. Cette analyse permet d’obtenir une repr´esentation graphique des produits dans un espace euclidien.

– La valeur du crit`ere appel´e « stress de Kruskal » d´efini par l’´equation 4.2 a ´et´e mesur´ee afin de savoir si la repr´esentation est fid`ele ou non.

φ =X[dij− f (δij)]2 (4.2)

Dans cette formule, dij repr´esente les distances reproduites, ´etant donn´e le nombre

de dimensions, et δij repr´esente les donn´ees d’entr´ee (c’est-`a-dire, les distances ob-

serv´ees). L’expression f (δij) indique une transformation monotone non m´etrique des

donn´ees d’entr´ee observ´ees (distances).

Selon Grall [50], une valeur du « stress » sup´erieure `a 0,5 d´ecrit une repr´esentation probablement al´eatoire ; entre 0,5 et 0,25, une repr´esentation de qualit´e m´ediocre ; entre 0,1 et 0,25 de qualit´e satisfaisante ; en dessous de 0,1 une excellente repr´esentation. Ce crit`ere permet donc de d´eterminer le nombre de dimensions de l’espace `a retenir. Les configurations optimales des MDF ponc´es, des bois ponc´es et des divers mat´eriaux d´eriv´es du bois dans un espace `a deux dimensions sont pr´esent´ees respectivement dans les figures 4.8a, 4.8b, 4.9a.

4.1.4.3 MDF ponc´es

Une configuration 2D du MDS donne une valeur de contrainte de 0,08, ce qui permet de dire qu’une repr´esentation 2D est suffisante pour repr´esenter les donn´ees. La figure 4.8a d´emontre que le premier axe (Dimension 1) de la repr´esentation qui est celui corres- pondant aux ´ecarts observ´es les plus importants en termes de disparit´es, s´epare les MDF ponc´es avec des grains fins et les MDF ponc´es avec des grains grossiers. La dimension 2 met en exergue la singularit´e de MDF120 par rapport aux autres plaques. Sur cette dimension, MDF120 est plus proche des surfaces des plaques ponc´ees avec des grains tr`es fins (MDF220 et MDF320) que des surfaces ponc´ees avec des papiers abrasifs de grains moyens (MDF80, MDF100). MDF60 MDF80 MDF100 MDF120 MDF220 MDF320 -1,0 -0,8 -0,6 -0,4 -0,2 0,0 0,2 0,4 0,6 0,8 1,0 1,2 1,4 Dimension 1 -0,8 -0,6 -0,4 -0,2 0,0 0,2 0,4 0,6 0,8 1,0 1,2 D im en si on 2 (a) MDF BM60 BM80 BM100 BM120 BM220 BM320 -1,4 -1,2 -1,0 -0,8 -0,6 -0,4 -0,2 0,0 0,2 0,4 0,6 0,8 1,0 1,2 Dimension 1 -1,0 -0,8 -0,6 -0,4 -0,2 0,0 0,2 0,4 0,6 0,8 1,0 1,2 D im en si on 2 (b) Bois

Fig. 4.8 – Repr´esentation des espaces de perception tactile de la rugosit´e `a l’aide de l’analyse MDS a) des MDF ponc´es, b) des bois ponc´es

4.1.4.4 Bois ponc´es

Une configuration optimale est obtenue avec 2 dimensions (contrainte de 0,09). La dimension 1 distingue BM220 situ´e `a une extr´emit´e de BM320 situ´e `a l’autre extr´emit´e de l’espace. Le reste des plaques BM60 `a BM100 se situe entre ces deux extrˆemes. La dimension 2 capture les diff´erences de perception entre les surfaces par taille de grains de pon¸cage (figure 4.8b). Cette dimension est ´equivalente `a la dimension 1 de l’espace de perception de la rugosit´e tactile des MDF ponc´es pr´esent´e pr´ec´edemment dans la figure 4.8a. Ici, on observe une s´eparation claire entre la plaque de bois ponc´ee avec un papier abrasif P120 et celles ponc´ees avec des grains fins (BM220 et BM320), contrairement `a ce qui a ´et´e observ´e avec la plaque MDF120. BM120 est mˆeme tr`es proche de BM100. Le probl`eme au pon¸cage n’a donc pas affect´e la rugosit´e tactile des bois.

4.1.4.5 Divers mat´eriaux d´eriv´es du bois

Une configuration optimale est obtenue avec 2 dimensions (contrainte de 0,19). La figure 4.9a montre que dans l’espace de perception de la rugosit´e tactile, trois groupes

sont distincts : il y a les produits tr`es lisses (PD et MDF) s´epar´es des produits plus rugueux (PP, PSL, CP, OSB) par la dimension 2, ensuite il y a le groupe des « bois naturels » (BM et RET) qui est discrimin´e par la dimension 1.

Un but important de ce travail de th`ese est de d´eterminer si l’espace de perception change quand les sujets explorent les mat´eriaux en situation bimodale (vision + toucher). La question est donc de savoir si l’espace est similaire quand les sujets utilisent non seulement le toucher mais aussi la vision pour explorer la rugosit´e de surface. Les tests visio-tactiles ont ´et´e r´ealis´es uniquement sur le groupe des divers mat´eriaux d´eriv´es du bois. C’est la raison pour laquelle, seul celui-ci est ´etudi´e pour comparer les espaces de perception tactile et visio-tactile de la rugosit´e. Comme pour l’exploration tactile (en aveugle), la qualit´e de la repr´esentation sugg`ere aussi une solution `a deux dimensions pour l’exploration visio-tactile.

RET PSL PP PD OSB MDF CP BM -1,5 -1,0 -0,5 0,0 0,5 1,0 1,5 2,0 Dimension 1 -1,2 -1,0 -0,8 -0,6 -0,4 -0,2 0,0 0,2 0,4 0,6 0,8 D im en si on 2 (a) tactile RET PSL PP PD OSB MDF CP BM -1,2 -1,0 -0,8 -0,6 -0,4 -0,2 0,0 0,2 0,4 0,6 0,8 1,0 Dimension 1 -1,0 -0,8 -0,6 -0,4 -0,2 0,0 0,2 0,4 0,6 0,8 1,0 1,2 1,4 1,6 D im en si on 2 (b) visio-tactile

Fig. 4.9 – Repr´esentation des espaces de perception de la rugosit´e des divers mat´eriaux d´eriv´es du bois `a l’aide de l’analyse MDS : a) tactile, b) visio-tactile

Mˆeme s’il y a quelques diff´erences entre les deux configurations, l’arrangement glo- bal des huit plaques est tr`es similaire. On assiste `a une rotation de l’espace de -90˚ de telle sorte que la dimension 1 de l’espace tactile est comparable `a la dimension 2 de l’es- pace visio-tactile, et inversement. Le rajout de la vision `a l’exploration tactile n’a pas affect´e l’organisation des groupes dans l’espace. On s’aper¸coit ainsi que les groupes cit´es pr´ec´edemment dans l’espace tactile (surface lisse/surface rugueuse/surface des bois natu- rels) se retrouvent encore dans l’espace visio-tactile. Par contre, PSL devient confondu avec PP et MDF se rapproche de PD.

4.1.4.6 R´ecapitulatif et discussions

Les r´esultats d´emontrent que la discrimination des diff´erents mat´eriaux par les sujets peut ˆetre repr´esent´ee avec succ`es dans un espace euclidien. Les analyses MDS produisent une configuration bidimensionnelle avec une valeur de contrainte acceptable. Pour les trois s´eries de mat´eriaux, une dimension de l’espace peut ˆetre interpr´et´ee comme le rang moyen tactile car les ´echantillons sont rang´es le long de cette dimension selon le rang moyen tactile. Cela est dˆu au fait que l’analyse MDS a ´et´e op´er´ee `a partir des donn´ees de

l’histogramme de classement. La signification des autres dimensions serait int´eressante `a interpr´eter. La d´efinition des dimensions permettrait de savoir en outre si la signification est la mˆeme pour chaque s´erie de mat´eriaux. Cette interpr´etation sera abord´ee dans le paragraphe 4.2.2 `a l’aide d’une analyse en composantes principales avec les param`etres physiques mesur´es.

Le rajout de la vision `a l’exploration tactile a modifi´e les distances entre ´echantillons, a g´en´er´e une rotation de l’espace mais n’a pas affect´e l’organisation des groupes dans l’espace. Ces observations sont conformes aux travaux de Ballesteros [7] sur la perception tactile et visio-tactile de la texture de surface de divers mat´eriaux. Ils ont aussi observ´e une rotation dans l’espace et ont conclu que la dimension « couleur » n’influe pas l’organisation de l’espace de perception tactile.