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Les concepts développés dans cette partie sont l’objet de l’article 1 qui consiste en une revue reprenant globalement la place de l’analyse des protéines pharmaceutiques sous leur forme intacte. Les points les plus importants sont repris ici, avec une mise en avant prononcée de la technique utilisée pour ces travaux de thèse, c'est-à-dire l’électrophorèse capillaire (CE) couplée à la spectrométrie de masse à temps de vol.

L’analyse des protéines sous leur forme intacte permet l’utilisation de techniques très variées, de la spectroscopie UV à la MS, en passant par des techniques séparatives aux principes orthogonaux telles que la LC et les méthodes électrophorétiques (sur gel et capillaires), incluant également la combinaison de ces techniques [27]. De façon globale, le fait de conserver les protéines intactes lors de leur analyse donne accès à des informations structurales qui peuvent être parcellaires dans le cas d’une approche Bottom-Up. En particulier, des informations quant à la structure tridimensionnelle de la protéine ainsi que la position de ses PTMs peuvent s’avérer plus faciles à acquérir via l’analyse de protéines intactes. En effet, comme évoqué ci-avant, l’approche Bottom-Up ne couvre qu’une partie de la séquence de la protéine ce qui peut provoquer une perte d’information, particulièrement

au sujet des PTMs. La grande force de cette approche demeure donc la grande diversité des techniques à disposition et la variété d’informations complémentaires qui en découlent.

Cette approche présente aussi certains inconvénients. Ainsi, l’analyse de protéines intactes s’avère rapidement plus complexe que celle des peptides issus de ces mêmes protéines (problèmes d’adsorption, de dégradation). Certaines techniques se montrent plus naturellement compatibles à l’analyse de ces composés (électrophorèse sur gel, chromatographie d’exclusion stérique) que d’autres (chromatographie liquide en phase inverse, électrophorèse capillaire de zone), et ceci en lien avec les problèmes évoqués ci-dessus. Des ajustements, tant technologiques que méthodologiques, sont alors à effectuer rendant par la suite de nombreuses techniques utilisables. De plus, les mélanges de protéines à analyser sont souvent complexes nécessitant dans certains cas des équipements de pointe et par conséquent coûteux. Par exemple, l’utilisation de la MS en mode Top-Down implique l’emploi de spectromètres de masse à haute résolution et à haute exactitude de masse (tels que les FT-ICR, Orbitrap et TOF) [28,29]. L’analyse des protéines sous leur forme intacte ne s’inscrit donc pas comme une solution de remplacement de l’approche après digestion, mais plutôt comme un gain d’informations, ce qui n’est pas négligeable au vu des difficultés rencontrées pour résoudre ces structures complexes.

Les sous-chapitres suivants décrivent les quatre grandes familles de techniques permettant d’analyser les protéines sous leur forme intacte. Comme dans l’article 1, l’accent a été mis sur les techniques séparatives que sont la chromatographie liquide et les méthodes électrophorétiques. De plus, les approches faisant appel au transport de masse hydrodynamique, comme la viscosité et l’ultra-centrifugation analytique ne sont pas abordées ici.

I.3.2.1 Techniques spectroscopiques

Les techniques spectroscopiques sont très largement utilisées au cours de toutes les étapes du développement d’une protéine thérapeutique. Elles sont principalement employées pour caractériser les structures secondaires et tertiaires de ces molécules et consistent en l’étude des interactions (absorption, émission et diffusion de photons) de radiations électromagnétiques avec les molécules. Différentes techniques existent: par exemple, les rayons-X [30], la résonance magnétique nucléaire (RMN) [31], l’absorption (dans le domaine de l’ultraviolet et du visible) [32], la fluorescence [33], le dichroïsme circulaire (CD) [34], la diffusion dynamique de la lumière (DLS) [35] et la spectroscopie infrarouge (IR) [36]. Ces techniques présentent l’avantage de pouvoir être employées dans des plateformes de criblage à haut débit, particulièrement utiles dans des étapes de caractérisation de la protéine et de ses produits de dégradation [37]. De plus, dans le cas de la fluorescence, de l’absorption UV-visible ou encore de la DLS, ce sont des approches non-destructives qui permettent par conséquent leur utilisation en série, tout en préservant le produit.

Globalement, ces techniques n’étant pas séparatives, elles sont souvent couplées à la chromatographie liquide ou à l’électrophorèse capillaire (cas de l’absorption UV-visible et de la fluorescence principalement), jouant alors le rôle de systèmes de détection. En effet, une séparation préalable permet souvent de mettre en évidence les produits minoritaires

potentiellement présents en les séparant des produits majoritaires. Les techniques spectroscopiques sont largement utilisées à toutes les étapes de développement d’une protéine-médicament, le plus souvent en combinaison, chacune apportant de nouveaux éléments pour caractériser le produit.

I.3.2.2 Spectrométrie de masse

Comment mentionné dans la partie I.3.2, l’approche de spectrométrie de masse proposant d’analyser les protéines sous leur forme intacte s’intitule technique Top-Down. Cette stratégie utilise la fragmentation des protéines directement dans la source du MS, permettant l’identification et la caractérisation de ces molécules, incluant aussi des informations précieuses sur les PTMs. La Figure I.4 présente le principe général de cette approche, avec en regard le principe général de l’approche Bottom Up.

Figure I.4: Schémas des approches Bottom Up et Top Down pour l’analyse des protéines [38].

L’élément primordial du spectromètre de masse employé en mode Top Down est le type d’analyseur de masse employé. Les trappes ioniques (IT), les TOF, les Orbitraps et les FT-ICR sont couramment utilisés [28,29]. Les différences principales entre ces différents appareils résident dans leur pouvoir de résolution et leur exactitude en masse. Ces deux paramètres se calculent le plus souvent comme suit :

é é

Δ | é|

· 10!

où FWHM équivaut à la largeur du pic à mi-hauteur ou full-width at half-height maximum. Par conséquent, pour un composé d’une masse exacte de 400.0000 Da, d’une masse mesurée Equation 1

Equation 2

de 400.0020 et d’une largeur à mi

5000 et son exactitude en masse de 5 ppm.

Ainsi, si les IT permettent une

nombreux fragments, leurs limitations en termes de résolution (1000) et d’

masse (100-200 ppm) les rendent beaucoup moins fiables pour l’identification [38].

L’Orbitrap et le FT-ICR apparaissent comme étant les analyseurs de masse les plus adaptés à ce type d’approche, tant leurs performances en termes de résolution

respectivement) et d’exactitude en masse

impressionnantes. Le TOF ainsi que ses combinaisons, le TOF alternatives intermédiaires qui apportent des résolutions de l’ordre d exactitudes de masse aux alentours de 2

sûre et une caractérisation plus poussée que les IT.

de masse (virtuellement illimité) permettant l

pas d’ions multichargés (par exemple, la désorption/ionisation laser assistée par matrice ou MALDI).

Le type d’analyseur de masse utilisé dépend bien évidemment aussi du budget à disposition.

Si l’Orbitrap rend l’accès aux très hautes résolutions et exactitudes en masse possible pour un coût « moindre » par rapport au FT

compromis coût-résultats. La Figure I.5 résume les caractéristiques de ces quatre types d’analyseurs de masse.

Table I.1: Caractéristiques des analyseurs de masse couramment utilisés dans l’analyse Top Down des protéines. Adapté de [38,39,40,41]. 5000 et son exactitude en masse de 5 ppm.

Ainsi, si les IT permettent une très bonne sensibilité et une très bonne détection de nombreux fragments, leurs limitations en termes de résolution (1000) et d’

ppm) les rendent beaucoup moins fiables pour l’identification [38].

ICR apparaissent comme étant les analyseurs de masse les plus adaptés à ce type d’approche, tant leurs performances en termes de résolution

d’exactitude en masse (2-5 et 0.5-3 ppm respectivement) sont impressionnantes. Le TOF ainsi que ses combinaisons, le TOF-TOF et le Q

alternatives intermédiaires qui apportent des résolutions de l’ordre de 10'000 à 40’000 et des exactitudes de masse aux alentours de 2-10 ppm. Ils permettent donc une identification plus sûre et une caractérisation plus poussée que les IT. De plus, ils possèdent un large domaine de masse (virtuellement illimité) permettant l’emploi de sources d’ionisation ne produisant pas d’ions multichargés (par exemple, la désorption/ionisation laser assistée par matrice ou Le type d’analyseur de masse utilisé dépend bien évidemment aussi du budget à disposition.

l’accès aux très hautes résolutions et exactitudes en masse possible pour

» par rapport au FT-ICR, le TOF demeure le plus attractif en termes de La Figure I.5 résume les caractéristiques de ces quatre types

Table I.1: Caractéristiques des analyseurs de masse couramment utilisés dans l’analyse Top Down des protéines. Adapté de [38,39,40,41]. ppm) les rendent beaucoup moins fiables pour l’identification [38].

ICR apparaissent comme étant les analyseurs de masse les plus adaptés (60'000 et 200'000 3 ppm respectivement) sont TOF et le Q-TOF, sont des e 10'000 à 40’000 et des 10 ppm. Ils permettent donc une identification plus De plus, ils possèdent un large domaine

’emploi de sources d’ionisation ne produisant pas d’ions multichargés (par exemple, la désorption/ionisation laser assistée par matrice ou Le type d’analyseur de masse utilisé dépend bien évidemment aussi du budget à disposition.

l’accès aux très hautes résolutions et exactitudes en masse possible pour ICR, le TOF demeure le plus attractif en termes de La Figure I.5 résume les caractéristiques de ces quatre types

Table I.1: Caractéristiques des analyseurs de masse couramment utilisés dans l’analyse Top

Performance à 8 kDa

L’approche Top Down ne saurait remplacer la Bottom Up, ces deux techniques sont définitivement complémentaires. En effet, si la MS Bottom Up ne saurait être détrônée dans les cas où il s’agit de détecter la présence d’une protéine ou encore de l’identifier grâce à une base de données, la MS Top Down a apporté ces dernières années des informations que la MS Bottom Up ne permet pas d’obtenir. Par exemple, la caractérisation complète de la structure primaire d’une protéine (composition en acides aminés et modifications) par une approche Top Down ciblée donne des résultats très intéressants. L’approche Top Down ciblée consiste en la comparaison des masses des ions précurseurs et fragments avec une base de données. Cela permet une localisation et une caractérisation complètes des PTMs.

Les bases de données Top Down n’atteignent pas encore la qualité de celles consacrées à l’approche Bottom Up mais les progrès sont constants [42].

Il existe deux approches mixtes qui sont nommées Middle Up et Middle Down. La première consiste comme la Bottom Up en une digestion enzymatique de la protéine, mais cette digestion résulte en des peptides plus grands qui sont analysés tels quels dans le MS. La deuxième approche utilise les mêmes peptides que la Middle Up mais ceux-ci sont encore fragmentés dans le MS (MS/MS). Afin de démontrer la grande complémentarité de ces quatre approches, la Figure I.5 présente leur emploi au cours de la caractérisation la plus complète possible de mAbs.

Figure I.5: Résumé des différentes techniques MS employées pour la caractérisation structurale des mAbs [43].

Même si les mAbs sont dans l’extrême de la complexité au niveau structural, cette approche multi-modes peut s’appliquer à d’autres classes de protéines et démontre une fois de plus la nécessité d’avoir une palette de techniques pour pouvoir tenter d’approcher la structure véritable de la protéine.

I.3.2.3 Chromatographie liquide

La chromatographie liquide (LC) est une technique séparative très employée pour l’analyse des protéines intactes de par son grand pouvoir résolutif et sa haute reproductibilité ainsi que sa compatibilité avec la spectrométrie de masse. Les modes utilisés pour la séparation de protéines intactes sont la LC en phase inverse (reversed-phase LC ou RPLC), la chromatographie d’exclusion stérique (SEC), la chromatographie d’échanges d’ions (IEC), la chromatographie à interaction hydrophile (HILIC) et la chromatographie d’affinité (AC). D’une manière générale, les systèmes de LC sont similaires quel que soit le mode employé (injecteur, pompe, colonne,…). Par conséquent, de manière globale, l’emploi du polyétheréthercétone (PEEK) pour les tubes de connexion ainsi que pour les aiguilles est déconseillé lors de l’analyse de protéines de par sa grande hydrophobicité et donc sa grande propension à l’adsorption des protéines hydrophobes. Les matériaux inertes tels que le titane, l’acier inoxydable ou le PEEK-Sil (PEEK à l’extérieur et silice fondue à l’intérieur) sont préférables, même s’ils n’annulent pas totalement les phénomènes d’adsorption. Les constructeurs de systèmes LC commencent par ailleurs à mettre sur le marché des appareils dédiés à l’analyse des protéines intactes. Ces derniers sont faits dans des matériaux biocompatibles et inertes.

L’accent a été mis dans cette partie consacrée à la LC sur la RPLC car ce mode connaît actuellement les plus grands développements technologiques.