3.2 Essais de charge-décharge
4.1.3 Ecrouissage en stade II
4.1.3.2 Analyse des essais mécaniques en stade II
Les figures 4.16a et 4.16b montrent la variation de θ en fonction de la contrainte vraie et la
variation de la fonctionσθen fonction de la contrainte vraie.
(a) (b)
Figure 4.16: Evolution a) du taux d’écrouissage en fonction de la déformation b) de la fonctionσθ
en fonction de la contrainteσpour des échantillons d’alliage Ni20wt.%Cr , d’épaisseur de 1,6 mm
et trois tailles de grains d
s=730, 120 et 45µm
Les principales différences observées entre chaque courbe s’observent en stade II, aussi bien
pour le taux d’écrouissage que pour la fonction σθ. En effet, le stade I est toujours strictement
décroissant, de même que le stade III. Pour le taux d’écrouissage, le stade II passe d’une pente
né-gative pour les tailles de grains les plus faibles à une pente positive pour les plus grandes en passant
par un plateau constant pour les tailles de grains intermédiaires.
Pour la fonction σθ, le stade II correspond à la partie linéaire des courbes présentées figure
4.16b. Il apparaît que le niveau de contrainte de « départ » de celui-ci,σ
I/II, diminue lorsque la taille
de grain augmente. En outre, la longueur de ce stade diminue également avec la taille de grain.
Enfin, le début du stade III, qui se caractérise par l’activation du glissement dévié, à l’origine de la
chute du taux d’écrouissage macroscopique observée sur les différentes tailles de grains évolue lui
aussi avec une modification de la taille de grain.
Au même titre que la contrainte d’écoulement, il est possible de décomposer le taux
d’écrouis-sageθen une contribution associée à la contrainte interne X,θ
X= dX
dε et une contribution associée
à la contrainte effectiveσ
eff,θ
eff= dσ
e f fdε . La figure4.17présente le résultat de cette démarche.
15x103 10 5 0 θX (MPa) 600 400 200 0 Contrainte Interne, X d = 40 µm - t/d = 40 d = 120 µm - t/d = 13 d = 730 µm - t/d = 2,2
(a)
1500 1000 500 0 θeff (MPa) 180 160 140 120 100 80Contrainte Effective, σeff (MPa)
d = 40 µm - t/d = 40
d = 120 µm - t/d = 13
d = 730 µm - t/d = 2,2
(b)
Figure 4.17: Evolution du taux d’écrouissage associé à a) X b) σ
effen fonction de la contrainte
respective pour différentes tailles de grain d’échantillons d’alliage Ni20wt.%Cr d’épaisseur 1,6mm
Indépendamment de la taille de grain,θ
X(figure4.17a) est décroissante dans les premiers
ins-tants de l’écrouissage (stade I). Le stade II semble lui sensible à la taille de grain. S’il est constant
pour les grains les plus petits, il apparaît croissant monotone pour les grains les plus importants.
Enfin, le stade III est lui strictement décroissant quel que soit la taille de grain considérée.
θ
eff(figure 4.17b) présente une évolution comparable à celle observée pour les monocristaux
sollicités en glissement simple. Le stade I est constant, d’une valeur assez faible. En stade II, θ
effest toujours constante mais plus élevée que pour le stade I. La valeur de θ
effsemble d’ailleurs
indépendante de la taille de grain. Enfin, en stade III, θ
effest strictement décroissante en fonction
deσ
eff. L’allure des courbes est insensible à la taille de grain.
Analyse des paramètres∆
IIet (σθ)
0du modèle théorique d’écrouissage en stade II
L’évolution du paramètre∆
II(équation4.16) en fonction de la taille de grain est présentée sur la
figure4.18a. Celui-ci augmente avec la taille de grain lorsqu’elle est inférieure à environ 190µm. Au
delà de cette valeur critique∆
IIreste constant, aux alentours de 2500 MPa. La figure4.18bmontre
que le paramètre∆
IIest insensible au rapport t/d et qu’il n’y a pas de changement de comportement
brusque en deçà d’un seuil critique de 8 grains dans l’épaisseur comme pour la loi de Hall et Petch.
2400 2200 2000 1800 ∆II (MPa) 5 6 7 8 9 100 2 3 4 5 6 7 Taille de grains (µm)
(a)
2400 2200 2000 1800 ∆II (MPa) 30 25 20 15 10 5 Rapport t/d(b)
Figure 4.18: Evolution du paramètre ∆
IIen fonction a) de la taille de grain b) du rapport t/d pour
des échantillons d’alliage Ni20wt.%Cr d’épaisseur 16 mm
La figure4.19présente l’évolution du paramètre (σθ)
0(équation4.17) en fonction du nombre
de grain dans l’épaisseur.
Figure 4.19: Evolution du paramètre (σθ)
0en fonction de t/d
Notons que par rapport à la relation4.17, t/d est équivalent à d
-1à un coefficient multiplicateur
près. Ainsi, la relation linéaire existant entre l’inverse de la taille de grain (i.e. t/d) et (σθ)
0est donc
bien vérifiée pour les tailles de grains les plus faibles. L’extrapolation de la droite nous donne une
valeur d’ordonnée à l’origine de 117 000 MPa
2, bien supérieure à 0. Ce résultat est attendu compte
tenu de la présence de chrome en substitution dans l’alliage Ni20wt.%Cr , de même que celle de
quelques précipités d’impuretés caractéristiques d’un alliage de qualité industrielle. Ces écarts à la
constitution ont un effet « durcissant » [Mecking 1977]. A cela s’ajoute bien entendu la présence
des joints de grains qui écarte d’autant le matériau étudié du cas d’un monocristal idéal de
dimen-sion infinie. Le comportement observé est donc bien caractéristique d’un polycristal.
Un écart marqué à la pente initiale apparaît pour un nombre de grains dans l’épaisseur aux
alen-tours de 14 (d > 110 µm). Toutefois (σθ)
0reste caractéristique d’un comportement polycristallin
((σθ)
0> 0) bien qu’étant fortement réduite par rapport à celles observées pour t/d > 14. La
diminu-tion (σθ)
0traduit un adoucissement de l’écrouissage. Mecking impute ce phénomène, à température
ambiante, au rôle croissant joué par les surfaces libres, équivalent à celui observé dans le cas des
monocristaux réels [Mecking 1977]. D’ailleurs, une transition entre un comportement
polycristal-lin et monocristalpolycristal-lin réel ((σθ)
0< 0) apparaît pour une valeur de t/d comprise entre≈9 et 8, soit
une taille de grain comprise entre 175 et 190µm. Par la suite, pour les tailles de grains supérieures
à 280µm (t/d = 5,7), la valeur de (σθ)
0semble se stabiliser autour de -180 000 MPa
2. Cela traduit
certainement la prédominance des effets de surface au détriment des effets durcissants des joints de
grains. Attendu qu’aucune transition n’est observable pour∆
II, l’effet de surface n’est influant que
sur les incompatibilités de déformation entre grains, c’est-à-dire le paramètre k
GND. Plus
générale-ment, le taux d’écrouissageθ
IIest donc altéré pour un nombre de grains dans l’épaisseur inférieur
à 8. Cette valeur du rapport de transition entre le comportement polycristallin et monocristallin
concorde avec celui déterminé dans l’étude portant sur la loi de Hall et Petch.
Enfin, à l’aide de la pente de la partie linéaire pour les faibles tailles de grains, il est possible
de déterminer la valeur du paramètre k
GND. Il est également possible de déterminer la valeur du
paramètre β, rapport entre le libre parcours moyen et la distance inter-dislocation moyenne. Les
valeurs des paramètres utilisés pour déterminer k
GNDet β selon les équations 4.17 et 4.16 sont
fournies dans le tableau4.3.
Paramètre Valeur Référence
α 0,3 [Kocks et Mecking 2003,Mecking 1977]
µà 300 K 81 300 MPa [Calvarin-Amiri 1998]
M 3,1 Analyses EBSD
(Voir paragraphe2.2.2et tableau2.4)
b 0,249 nm [Butt et Sattar 2001]
k
GND3,06 Equation4.17
β 45 <β< 68 Equation4.16
Tableau 4.3: Valeurs des paramètres utilisés pour le calcul de k
GNDetβselon les équations4.17et
4.16. Valeurs de k
GNDetβdéterminées.
l’es-timation 3π/2, environ 4,7, fournie par Sevillano [Sevillano 1993]. De plus, avec ces même valeurs,
l’équation4.16 fournit une valeur deβcomprise entre 68 et 45 pour respectivement les petites et
grands diamètres de grains soit dans l’ordre de grandeur de la valeur estimée par Mecking, située
aux alentours de 100 [Mecking 1977]. L’évolutions deβsuggère donc une modification des
para-mètres caractérisant les structures de dislocations au sein du matériau avec la taille de grain.
Analyse des paramètresε
I/II,ε
II/III,σ
I/IIetσ
II/IIIcaractérisant le stade II
La figure4.20aprésente l’évolution de la déformation de début du stade II,ε
I/IIen fonction de la
taille de grain. Le niveau de déformation marquant l’entrée en stade II diminue légèrement à mesure
que la taille de grain augmente. Ce résultat est en accord avec les observations réalisées par Haddou
[Haddou 2003] sur de l’acier 316L ou du nickel. Ce phénomène est par ailleurs visible sur la figure
4.16a. En outre, le graphique4.20bprésente l’évolution deσ
I/IIen fonction deσ
ecorrespondant à
la limite d’élasticité conventionnelle (ε= 0,002). Il en ressort que le stade II débute donc au début
de la déformation plastique homogène les valeurs du rapportσ
I/II/σ
eétant relativement proches de
1. Ce rapport diminue par ailleurs avec un accroissement de la taille de grain.
80x10-3 70 60 50 40 30 εI/II 5 6 7 8 9 100 2 3 4 5 6 7 d (µm)
(a)
2.0 1.9 1.8 1.7 1.6 1.5 1.4 1.3 σI/II /σe 5 6 7 8 9 100 2 3 4 5 6 7 d (µm)(b)
Figure 4.20: Evolution a) de la déformation de début du stade II,ε
I/IIb) de la contrainte de transition
σ
I/IInormée par la limite d’élasticité σ
een fonction de la taille de grain pour des échantillons
d’épaisseur 1,6 mm d’alliage Ni20wt.%Cr
La figure4.21a représente l’évolution de la contrainte de transition,σ
II/III, entre le stade II de
durcissement et le stade III correspondant au glissement dévié généralisé. La fin du stade II est
aussi une fonction de la taille de grain mais elle intervient pour un niveau de contrainte d’autant
plus bas que la taille de grain est grande comme l’indique l’augmentation deσ
II/III. La figure4.16a
σ
II/IIIdiminue lorsque la taille de grain augmente, ce qui est un résultat déjà observé par Haddou
et al.sur du nickel et un acier 316L [Haddou 2003].
La dépendance deσ
II/IIIau nombre de grains dans l’épaisseur est présentée figure4.21b. Pour un
rapport t/d supérieur à approximativement 10,σ
II/IIIdiffère peu d’une valeur de contrainte
d’écou-lement située autour de 700 MPa. En dessous de ce rapport critique, la valeur de transition entre le
stade II et le stade III chute rapidement.
700 650 600 550 500 450 σΙΙ/ΙΙΙ (MPa) 5 6 7 8 9 100 2 3 4 5 6 7 d (µm)
(a)
700 650 600 550 500 450 σΙΙ/ΙΙΙ (MPa) 35 30 25 20 15 10 5 t/d(b)
Figure 4.21: Evolution de la contrainte de transition entre le stade II et le stade III,σ
II/IIIen fonction
a) de la taille de grain b) du rapport t/d pour une alliage Ni20wt.%Cr d’épaisseur 1,6 mm
L’évolution de la longueur du stade II,∆ε
II, en terme de déformation en fonction de la taille de
grain est donnée figure 4.22a. Il apparaît que la longueur du stade II est fortement dépendante de
la taille de grain : plus la taille de grain augmente, plus ∆ε
IIest important. Ces résultats sont en
contradiction avec les travaux portant sur le nickel réalisés par Haddou et al.qui ont observé une
stabilité de∆ε
IIavec la taille de grain [Haddou 2003] mais en accord avec ceux de Keller, toujours
sur du nickel [Keller et al. 2009b].
(a) (b)
Figure 4.22: Evolution de la longueur du stade II, ∆ε
II, en fonction de a) la taille de grain b) le
nombre de grain dans l’épaisseur pour un alliage Ni20wt.%Cr d’épaisseur 1,6 mm
La figure4.22bmet en évidence que cette modification de la longueur du stade II est elle aussi
liée au rapport t/d. En effet, on observe qu’au dessus d’une valeur critique, qu’on situe aux alentours
de 10, compte tenu des incertitudes propres à ce type de mesure,∆ε
IIest relativement stable et vaut
≈0.1. En deçà de ce rapport critique, la longueur en stade II croît fortement jusqu’à atteindre 0,17
pour t/d égal à 2.
Dans le document
Etude des mécanismes de transition volume/surface du comportement mécanique d'un alliage Ni20Cr
(Page 108-114)