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Analyse de deux CRÉ

Dans le document UNIVERSITÉ DU QUÉBEC (Page 118-125)

CHAPITRE 5 - ANALYSE GÉNÉRALE

5.1 Analyse de deux CRÉ

En ce qui concerne les CRÉ étudiées, c’est-à-dire les CRÉ des Laurentides et de la Mauricie, rappelons qu’elles se caractérisent par des modes de fonctionnement diamétralement opposés. Le tableau suivant permet d’ailleurs de

113 bien saisir la nature et l’ampleur de ces différences. L’analyse qui suit, concernant les instances, la concertation et la planification régionale, ne reprendra pas en détail chacun des indicateurs figurant au tableau. Ces indicateurs se sont toutefois avérés fort utiles à notre compréhension générale et c’est pourquoi nous avons jugé pertinent de les illustrer de façon concise.

Tableau 12 : Analyse comparative des CRÉ de la Mauricie et des Laurentides

Concepts Dimensions Indicateurs CRÉ de la Mauricie CRÉ des Laurentides

Gouvernance

Se situe au-dessous du nombre maximal possible selon la Loi

de concertation Forum général de la société civile Commission sectorielle Espace interne ou de travail et de dialogue au cours duquel les décisions sont prises.

114 Tableau 12 : Analyse comparative des CRÉ de la Mauricie et des Laurentides

(suite)

Concepts Dimensions Indicateurs CRÉ de la Mauricie CRÉ des Laurentides

Démocratie

Inclus des cibles définies auquel les membres du CA et CE sont

Les membres additionnels au CA et CE sont choisi par les MRC et répartie équitablement entre ces dernières

Les organismes siégeant dans les processus de concertation sont

115 5.1.1 Mécanismes de gouvernance

L’analyse de nos études de cas permet de constater que les deux cas étudiés sont très typés et opposés. Si hâtivement on pourrait conclure que la société civile n’a pas de pouvoir, en regardant de plus près, on peut cependant dire que la réalité n’est pas aussi tranchée. Dans le cas de la CRÉ de la Mauricie, les élus ont reconnu la nécessité de la société civile, ce qui est un constat majeur.

Cette reconnaissance de la société civile, et toute la légitimité qu’elle implique tant au niveau du rôle que de l’apport au développement régional, transcende la question du pouvoir effectif. Il faut rappeler que la Loi 34 n’a pas donné le pouvoir unique aux élus, mais a suscité une vive confrontation entre ces derniers et la société civile. À partir de ce point, les rapports de forces entre les deux groupes se sont tempérés et ajustés dans la CRÉ de la Mauricie. Afin de régulariser les relations, les diverses parties reconnaissent le rôle important de l’administration de la CRÉ comme arbitre. La situation de la CRÉ des Laurentides diffère et témoigne de la cristallisation des rivalités et de l’autorité des élus. En résultent des mécanismes de gouvernance autocratiques dans lesquels la société civile agit dans le respect du cadre déterminé par les élus.

Cette reconnaissance de l’apport de la société civile constitue selon nous le point 0, l’axe fondateur sur lequel l’intérêt général peut émerger. De cette légitimité reconnue à la CRÉ de la Mauricie surgit une formalisation des processus décisionnels, de même que ceux de sélection et d’élection des membres additionnels. L’ouverture à la société civile se constate tant du point de vue démocratique que du point de vue de la gouvernance. Il y a eu une ouverture à la société civile dans le cas de la Mauricie, que l’on ne constate pas dans le cas des Laurentides. Dans les processus de gouvernance, il y a plus de place accordée à la société civile pour que la CRÉ des Laurentides, entre autres grâce à la nomination de membres observateurs de la société civile qui, bien que

non-116 votants, permettent une plus grande représentation de la société civile et une plus grande influence de cette dernière dans les processus de gouvernance, ne serait-ce que l’ouverture à un débat fertile. En fait, la CRÉ de la Mauricie a fait sauter le rapport de force du tiers de membres additionnel et du deux-tiers d’élus afin de permettre un meilleur dialogue. Il y a donc dans cette CRÉ un nouvel espace d’expression démocratique. Cela permet plus d’échanges et de dialogue, et constitue donc un plus fort potentiel démocratique. Aussi on répartit plus équitablement les pouvoirs entre élus et société civile, ce qui vient atténuer le manque d’influence de la société civile dicté par la Loi 34.

Dans la CRÉ des Laurentides, la situation est diamétralement opposée. On s’en est tenu strictement à ce que permettait la loi et même que si cette dernière avait été plus incisive, cela aurait encore mieux répondu aux attentes des élus locaux si l’on se réfère à nos entretiens. La société civile n’a qu’une place minimale sans véritable ascendant sur la CRÉ, du moins dans les mécanismes de gouvernance.

5.1.2 Espaces démocratique de concertation régionale

Alors qu’il y a concentration du pouvoir dans les espaces de gouvernance, il est pertinent de se questionner sur le véritable apport des structures de concertation. Celles-ci permettent la discussion, le dialogue entre une grande variété d’acteurs dans le meilleur des cas, mais pourquoi faire au juste? À la CRÉ de la Mauricie, il y a vraiment eu des initiatives afin de constituer un système de concertation complexe, formel et cohérent permettant à la société civile de reconnaître ce qui en résulte dans les décisions prises par le CA. Les structures de concertation permettent alors, quand elles sont bien conçues, l’innovation sociale, offrant ainsi une plus grande capacité de développement régional.

117 La résultante de la concertation régionale est aux antipodes pour la CRÉ des Laurentides. Toutefois, au-delà de l’attribution de secteur du développement à certains groupes ou organismes, il faut reconnaître que ces derniers profitent d’une autonomie pour déterminer des projets qui s’inscrivent dans leurs parts respectives de FDR. Bien qu’elles doivent impérativement s’en remettre à l’approbation du CA, il n’en reste pas moins qu’elles obtiennent ainsi une influence, se traduisant par la concrétisation de leurs projets respectifs tant qu’ils cadrent avec les intérêts des autres. Toutefois, on ne peut nier que la société civile, les représentants institutionnels, les représentants du monde des affaires se retrouvent, tout comme les préfets et maires, dans une structure confuse où s’affrontent et s’opposent leurs intérêts particuliers. Alors que la CRÉ des Laurentides répond aux logiques locales, à la CRÉ de la Mauricie on cherche à

"faire ensemble" dans un forum régional de la société civile. En contrepartie, en voulant regrouper les forces vives de son ancien CRD, la CRÉ de la Mauricie a constitué un espace permanent, mais en contrepartie immuable aux nouveaux acteurs. Cela a pour effet de restreindre les possibilités d’innovation, ce qui est pourtant la raison d’être du forum de la société civile.

Dans les mécanismes de concertation des deux CRÉ nous relevons un nombre très élevé de représentants institutionnels, limitant grandement la représentation de groupe de la société civile et l’influence qui pourrait potentiellement en découler. Étant donné le manque de place, il est évident que certaines rivalités apparaissent entre des groupes antagonistes.

5.1.3 Espaces démocratique de planification régionale

Nous avons pu observer deux CRÉ qui ont une vision opposée de la planification quinquennale. La CRÉ des Laurentides s’en passerait bien alors

118 que la CRÉ de la Mauricie y déploie une énergie sans commune mesure. Il est difficile et même impossible de véritablement détecter et qualifier l’influence de la planification quinquennale, mais notons qu’elle s’articule autour des notions d’imputabilité et de crédibilité.

Pour la CRÉ des Laurentides, il faut avouer que le processus de planification est vaporeux, ce qui décrédibilise la CRÉ. La planification ne détermine aucun objectif clair et précis, ni même de mesures visant à accroître l’imputabilité. Dans un autre paradigme, la CRÉ de la Mauricie a réalisé un processus interne de planification qui a identifié les objectifs et besoins de tous.

On regroupe tous les niveaux : local, supra local et régional (CAR). Ainsi il y a eu plus d’intégration et donc de crédibilité. L’ouverture du processus capte l’intérêt des divers acteurs. Il est donc possible de faire une planification au sens que l’entend le vérificateur général, avec des objectifs clairs et à la limite quantifiée. Toutefois, même si la CRÉ a cherché à accroître le niveau de l’imputabilité, la CRÉ n’a aucun pouvoir de contrainte. De mettre l’épaule à la roue par simple bonne volonté, c’est difficile selon les acteurs rencontrés. Il y a décalage entre ce que la CRÉ de la Mauricie veut faire et ce qu’elle peut faire en réalité. Si personne ne veut être imputable, il est difficile de mettre les acteurs en mode résolution de problèmes. La planification régionale devient, malgré toute bonne intention, un exemple de régionalisation virtuelle. À l’évidence même si la CRÉ désire mener le processus de planification quinquennal le plus adéquatement possible, cela implique tant en matière de ressources financières et humaines que cela frise l’impossible. Cela explique peut-être pourquoi la CRÉ des Laurentides rejette la démarche du revers de la main en remâchant tous les 5 ans un même plan, étant donné que le dernier exercice de dialogue avec la communauté et la société civile remonte à 1992, époque à laquelle le plan stratégique de développement a été rédigé par le CRD. C’est sur la base de ce plan, datant de plus de 20 ans, que la CRÉ articule ses plans quinquennaux.

119 Sur la base des éléments de l’analyse générale, nous avons imagé la situation des deux CRÉ étudiées sur nos continuums.

Figure 4 : Situation des CRÉ selon la démocratie et la gouvernance

5.2 État sensible de la société civile dans les CRÉ

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