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Améliorer l'accueil des jeunes sur le marché du travail

CHAPITRE 3 MIEUX RÉPARTIR L'EFFORT DE TRAVAIL

1. Une meilleure répartition de l'effort de travail au cours

1.1. Améliorer l'accueil des jeunes sur le marché du travail

S'il résulte de la prolongation de la scolarité une insertion plus tardive des jeunes sur le marché du travail, les conditions de cette insertion sont particulièrement sensibles à trois facteurs au moins :

- Les créations d'emplois, le volume d'embauches et les comportements de recrutement des entreprises : la reprise de l'emploi après 1987 a globalement bénéficié aux jeunes, mais de façon inégale pour les plus démunis. Depuis la fin de 1990, la nouvelle dégradation de la situation de l'emploi pèse de façon négative sur le rythme d'insertion des jeunes. Les exigences des employeurs les conduisent spontanément à éliminer de leurs recrutements les jeunes de plus faible niveau scolaire.

- Le développement et la nature des programmes d'intervention publiyue : au cours de la seconde moitié des années 80, l'effort massif en direction des jeunes, les travaux d'utilité collective, les formations en alternance, le plan d'urgence pour les jeunes, ont contribué à restreindre le chômage des jeunes, tout en modifiant considérablement les conditions d'insertion dans la vie active. La diminution du niveau de chômage des jeunes a pu s'opérer en période de meilleure conjoncture, alors que les deux plus importants dispositifs sur le plan quantitatif (TUC et SIVP) régressaient. Lorsque ces dispositifs régressent, les possibilités pour les jeunes sans qualification d'accéder à un "emploi" (au sens

statistique du terme) diminuent. Chaque année de 1989 à 1991, environ 800 000 jeunes de 16 à 25 ans ont obtenu un contrat de travail, dans le secteur marchand ou non marchand, ou ont bénéficié d'une formation complémentaire avec l'aide de l'Etat '. Mais les entrées dans ces dispositifs sont sélectives : lorsque ces mesures sont plus proches d'un emploi ordinaire, elles bénéficient davantage aux jeunes les plus qualifiés, cantonnant ainsi les jeunes les moins qualifiés dans des dispositifs dont l'efficacité est moindre et qui conduisent à des trajectoires d'insertion plus longues.

Les mesures "jeunes" sont devenues un passage obligé pour une part importante de jeunes, plus pour les jeunes filles que les jeunes hommes, et plus pour les jeunes de faible niveau de qualification.

La grande diversité des mesures d'insertion et de formation 2correspond à la volonté de répondre au plus près à des besoins diversifiés des jeunes, du "tout formation" au "tout emploi". Pourtant cette diversité des mesures, parfois concurrentes entre elles, conduit sans doute à renforcer les choix sélectifs des employeurs et à allonger l'insertion, à complexifier et institutionnaliser la succession de séquences, avant de pouvoir accéder à un emploi ordinaire et permanent.

Parmi les sortants du système scolaire en juin 1986, un jeune sur trois ayant commencé leur vie active par un TUC après leur sortie de l'école n'ont connu qu'une succession de mesures jeunes ou de chômage au cours des trois années suivantes. 26 % des filles et 17 % des garçons sont dans la même situation lorsqu'ils ont commencé par un stage d'initiation à la vie professionnelle ; parmi ceux sortis de l'enseignement secondaire aux niveaux V, V bis, VI ', les deux tiers n'ont connu que la précarité (mesure jeunes, contrat à durée déterminée, intérim, chômage) 4.

(1) Pour mémoire, les flux d'entrée dans les dispositifs "jeunes" se sont élevés à 1,2 million et l,1 million respectivement en 1987 et 1988.

(2) Contratsemploi-solidari!é, contrats 10call.J( d'orientation, contratsd âpprentissage, contrats de qualification, contrats d'adaptation, contrats d'orientation, mesure exo-jeunes, programme CFI, programme PAQUE.

(3) Sorties de l'année terminale des cycles cortrts professionnels et abandon de scolarité du second cycle long avant la terminale ; sorties de troisième et des classes du second cycle court avant l'année terminale ; sorties du premier cycle du second degré et des formations professionnelles en un an.

(4) P07TlER (F.) et ZILBERMAN (S.), "La difficiles insertion professionnelle des jeunes", Bref n' 58, CEREQ octobre 1990.

- Mieux répartir l'effort de travail -

Tableau 11 1

Statut des emplois occupés à la sortie de l'école et trois ans et demi après' (en %)

Cohorte 1979 1986

Statut du 1" emploi Dernier 1" emploi Dernier emploi Emploi CDI 37 65 16 49 CDD 57 32 42 37 Mesures jeunes 4 1 39 11 1 Pas d'emploi 2 2 3 3 TOTAL 100 100 100 1 100 contrat à durée indéterminée : CDI ; contrat à durée déterminée : CDD ; mesures jeunes : contrat emploi-formation, travaux d'utilité collective, stage d'insertion dans la vie active, contrat d'adaptation et de qualification

Sous l'effet de l'amélioration conjoncturelle, cette dégradation des conditions d'insertion a certes été freinée pour les jeunes sortis de l'école en 1989. La durée moyenne de chômage que les jeunes connaissent pendant les 30 mois qui suivent leur sortie diminue au profit des diverses formes d'emplois. On observe en analysant les parcours un recul global de l'exclusion 2. Mais cette amélioration a plus largement profité aux garçons. Pour les filles, les aides publiques à l'insertion professionnelle deviennent une composante structurelle de leur trajectoire;

(1) Po77iER (F.) et VINEY(X.), "Ci:ômage de longue durée des jeunes et risques d'exclusion de l'emploi", in "Chômage de longue durée", Syros, 1992, p. 313 à 326.

(2) Un jeune sur huit, sorti en 1989 a connu le chômage durant au moins 18 mois sur 30 observés, contre un sur cinq de la cohorte de 1986 ; COUPPIÉ (T.), "Le rôle des aides publiques à la sortie de l'école", Bref CEREQ, n' 80, octobre 1992.

la moitié d'entre elles en ont bénéficié, notamment de contrats emploi- solidarité 1.

Plus que la durée avant l'accès au premier emploi, c'est la précarité des premières situations qui contribue donc à l'allongement de l'insertion et à l'élévation du risque d'exclusion. Dans cet ensemble, la qualification joue évidemment un rôle important, mais n'est pas toujours déterminante.

- Le lien entre l'école et l'entreprise

L'écart entre les logiques propres du système éducatif et de l'entreprise, lorsqu'il s'agit de fournir des diplômes d'une part, de reconnaître et développer des compétences d'autre part, est aussi source d'une multiplication et d'un allongement des formes de transition professionnelle. La diversification des formations techniques et professionnelles, les efforts de promotion de l'apprentissage, le développement des formations en alternance constituent autant de motifs de rapprochement entre l'école, les organismes de formation et les entreprises.

Ces orientations impulsées au niveau global, se donnent effectivement pour objectif de construire des liens positifs entre des logiques scolaires et de diplômes et des logiques d'organisation de travail et de compétences, dont le clivage est souvent mentionné comme une caractéristique française.

Ces efforts se traduisent dans certaines branches ou sur certain bassins d'emplois par des partenariats et une concertation entre l'Education nationale et les professions ; mais ils sont encore très limités.

1.1.2. Créer des passerelles entre l'école et l'entreprise

L'absence de continuité entre l'école et l'entreprise, que l'on observe dans la plupart des cas, conduit bien des jeunes à affronter le marché du travail en ne comptant que sur leurs propres forces. Pour rompre cette discontinuité il convient de créer de véritables passerelles, permettant de guider les jeunes du monde éducatif au monde du travail. Ceci suppose que soient développées toutes les formes de l'alternance et que tous les acteurs concernés et en premier lieu les entreprises et les établissements de formation, soient effectivement mobilisés, ce qui est loin d'être le cas aujourd'hui.

(I) Pour les garçons. le poids des mesures jeunes ne s'est pas accru. Les contrats d'adaptation sont les plus nombreux (15 % des garçons) et réservés aux plus diplômés ; alors que les contrats de qualification (8 %) et surtout les CES concement un public moins bien formé.

- Mieux répartir l'effort de travail -

Le groupe Emploi n'a pas à se prononcer sur l'efficacité du système éducatif qui n'est pas ici en cause, c'est un autre groupe du XI' Plan qui a abordé ce problème. Mais il constate que, à la sortie du système scolaire et universitaire, et à tous les niveaux, le jeune est, dans la plupart des cas, abandonné à lui même dans sa recherche d'emploi. Cette rupture entre la communauté de l'école et celle du travail conduit à un isolement que la multiplicité des procédures d'insertion ne saurait pallier.

Multiplier les formes d'enseignement en alternance

Le développement de l'alternance sous des formes multiples, contrats d'apprentissage et d'alternance, alternance sous statut scolaire, pour divers niveaux de formation professionnelle ou générale et pour divers publics, doit être encouragé. Non seulement, la pratique de l'alternance contribue à l'acquisition d'une meilleure formation et de meilleures compétences, en reconnaissant la situation de travail comme situation formatrice, mais également, elle participe à la construction d'un sas pour les jeunes en fin d'études et de formation scolaire. Divers travaux le montrent : l'accès à l'emploi est facilité à l'issue des dispositifs fondés sur l'alternance. Encore faut-il que les dispositifs d'alternance soient effectivement conçus comme de véritables passerelles entre l'école et l'entreprise.

Encourager la construction de liens entre les chefs d'établissement et les employeurs L'organisation de liens contractuels systématiques entre les établissements scolaires et les employeurs constitue également une nécessité, pour assurer une responsabilisation et une prise en charge commune de l'insertion des jeunes sur le marché du travail.

Cela suppose une forte déconcentration de l'Education nationale, un allégement des procédures administrativeset budgétaires et une volonté collective clairement exprimée.

Ce partenariat resserré entre l'école et l'entreprise est d'ores et déjà expérimenté dans certains secteurs (la plasturgie par exemple), dans certains bassins d'emploi. Les modalités de ces conventions sont très diverses : toutes formes de jumelages, sensibilisation à la vie professionnelle, participation à des actions d'insertion, contribution matérielle des entreprises sous une autre forme que la taxe d'apprentissage. Ces initiatives doivent être consolidées ; elles représentent une avancée qu'il convient de faciliter et d'encourager.

La responsabilisation des établissements scolaires ou universitaires sur l'orientation de leurs élèves et étudiants (recherches de stages, organisations de ces liens avec les entreprises, suivi des jeunes après qu'ils aient quitté l'établissement) est indispensable. Le développement qualitatif et quantitatif du

tutorat' est une voie qu'il faut intégrer à cette proposition. Pour répondre à ces objectifs, l'Education nationale devra tout à la fois affirmer clairement des orientations en la matière, encourager vigoureusement les chefs d'établissement à se rapprocher des entreprises, leur donner le moyen de cette action par la déconcentration des procédures et des budgets. Les entreprises, quant à elles, et les organisations professionnelles et consulaires doivent comprendre ce que peut leur apporter une telle démarche et jouer leur rôle de complémentarité entre l'éducation de base et la formation à l'emploi.

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